B/ Une nomination restrictive
Le cas français ne cadre pas avec cette
problématique. Le législateur français est vague en ce qui
concerne le profil des membres du CC. Le professeur Dmitri Georges
LAVROFF31 pense qu' « aucune condition n'est posée
pour la nomination des membres du Conseil constitutionnelle. Il n'y a aucune
condition d'âge, ni non plus de compétence, ou encore de fonctions
préalablement exercées ». Cette situation fait en sorte
que la juridiction constitutionnelle française est parfois
composée des membres dont la qualité professionnelle est
justifiée par une activité professionnelle antérieure ou
par la possession d'un certain nombre de titre et de diplômes. Mais
aujourd'hui, malgré l'existence des conditions vagues quant à la
nomination des membres du CC, les autorités de désignation
s'attèlent le plus souvent à nommer des juristes pour exercer ces
fonctions. C'est ainsi que des éminents juristes ont été
nommés successivement au CC pour valoriser la fonction juridictionnelle
de l'institution et de dissiper toutes les considérations politiques qui
sous-tendent le critère de nomination. Des juristes comme le Doyen Vedel
et le professeur Robert BADINTER ont été au sein de cette
juridiction constitutionnelle et aujourd'hui la grande partie des membres ont
une formation de droit, à l'instar du président actuel Jean Louis
DEBRE32.
Le législateur gabonais a
déterminé un profil pour le choix des membres de la Cour. Telle
est l'avancée du législateur gabonais par rapport au
législateur français. Car le législateur gabonais apporte
une précision sur le profil qui détermine la désignation
des conseillers à la Cour. L'article 89 de la Constitution nous fait
savoir que les autorités de nomination désignent obligatoirement
deux juristes dont au moins un magistrat. Ce choix doit se faire sur une liste
d'aptitude établie par le Conseil supérieur de la
Magistrature.
En effet l'autorité de désignation, dans
l'exercice de son pouvoir discrétionnaire de nomination, se heurte
à une compétence liée dans le pouvoir
d'appréciation du choix des membres de la CC. De ce fait,
conformément aux dispositions de l'article 5 de la loi
31 Op cit.
32 Actuel président du Conseil constitutionnel
français, il a été nommé en 2007 par Nicolas
SARKOZY ( Président de la République française) et ses
fonctions cesseront en 2016.
elle « les conseillers à la Cour
constitutionnelle sont
professeurs de droit, les avocats, les magistrats
ayant au moins quarante (40) ans d'âge et quinze (15) ans
d'expérience professionnelle et parmi les personnalités ayant
honoré le service de l'Etat et âgées d'au moins quarante
ans ». Il convient de préciser que la volonté du
législateur gabonais dans la précision « deux juristes et au
moins un magistrat » est dû au fait qu'un organe qui se veut
juridictionnel doit au moins avoir en son sein des magistrats.
Vu sous cet angle, l'amoindrissement du pouvoir
d'appréciation de l'autorité de désignation est mis en
relief. La question qu'il faudrait alors se poser est celle de savoir si dans
la pratique les membres nommés n'ont aucun rapport avec les aspirations
politiques de l'autorité de nomination ou n'est ce pas dans leur moule
idéologique que ces autorités choisissent les membres de la Cour
? Au regard des critères qui définissent le choix de
l'autorité de désignation, l'aspect politique pourrait être
réfuté. Cependant l'opposition gabonaise estime que le
caractère d'indépendance des membres de la Cour pourrait
être remis en cause, car ces membres essayeront d'être en accord
avec les caprices du pouvoir en place.
Au Sénégal le pouvoir
d'appréciation du président de la République,
autorité habilitée à désigner tous les membres du
CC, n'est pas aussi absolu. Il est limité par le fait que, le
président choisit les membres parmi les juristes
expérimentés. La loi organique de 1992 sur le CC lui fait
obligation de choisir deux membres sur cinq parmi les professeurs titulaires de
droit33.
Le profil des membres de la CC
déterminé, l'autorité de désignation gabonaise se
pliera obligatoirement à ces caractéristiques afin que la
fonction dévolue à cette institution puisse être
redorée davantage ; même si pour certains l'unanimité n'est
pas encore manifeste quant au mode de désignation des membres de la
juridiction constitutionnelle.
Une fois nommés, les membres de la CC exercent
leur fonction conformément aux textes en vigueurs. Ainsi l'article 93 de
la Constitution prévoit que « les règles d'organisation et
de fonctionnement de la Cour constitutionnelle, ainsi que la procédure
suivie devant elle sont déterminées par la loi organique ».
C'est alors la loi organique qui détermine comment les membres de la
Cour doivent exercer leur fonction. Après leur nomination, les membres
de
18
33 Article 4 al.2 de la loi
organique sur le Conseil constitutionnel « deux membres du Conseil sur
cinq peuvent en outre être choisis parmi les professeurs et anciens
professeurs titulaires des facultés de droit, les inspecteurs
généraux d'Etat et anciens inspecteurs généraux
d'Etat, et les avocats, à condition qu'ils aient au moins 25 ans
d'ancienneté dans la fonction publique ou 25 d'exercice de leur fonction
»
ticulier doté des avantages et des obligations.
Cela leur ulier. C'est à travers ce statut que l'indépendance
des
membres est justifiée.
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