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Le droit de l'enfant a l'education et le deuxieme objectif du millenaire pour le developpement: essai sur l'effectivité d'un droit à  réalisation progressive dans le contexte congolais

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par Justin BAHIRWE Mutabunga
Université Catholique de Bukavu (UCB) - Licence en Droit, Option Droit Public 2008
  

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Section 3ème : L'Etat d'avancement par rapport au 2ème OMD en RDC.

Pour rendre effectif le deuxième OMD en RDC, il est plus important de tenir compte de son interdépendance par rapport aux autres contenus dans la Déclaration du Millénaire. L'on peut considérer que les obstacles à l'éducation sont aussi bien liés à la pauvreté et aux inégalités sociales (objectif 1), à l'accès aux soins de santé (objectif 4, 5 et 6), à l'eau et aux infrastructures sanitaires confortables (objectif 7), tandis que ces obstacles renforcent la discrimination de genre (objectif 3) en touchant en priorité les filles.

Cela étant, nous allons, d'entrée de jeu, examiner les obstacles susceptibles d'entraver l'effectivité du droit de l'enfant à l'éducation en RDC (§1), avant d'envisager les solutions préconisées par la République Démocratique du Congo et les OI du système de l'ONU engagées dans cette lutte (§2).

§1. Les obstacles susceptibles d'entraver l'effectivité du droit de l'enfant à

l'éducation en RDC.

Au-delà du contexte de la guerre et celui de l'instabilité politique 116(*) il existe des obstacles à caractère social (A) et d'autres liés aux mécanismes actuels de protection des droits économiques, sociaux et culturels (B).

A. Les obstacles à caractère social.

Ces obstacles peuvent être financiers, administratifs, culturels, ou liés aux moyens de communication.

a) L'obstacle financier.

Pour les parents à faible revenu, envoyer les enfants à l'école est devenu pour eux un luxe. La situation est d'autant plus compliquée étant donné qu'il ne suffit pas d'envoyer l'enfant à l'école, mais il faut également lui doter des effets scolaires, de l'uniforme, il doit avoir à manger et doit également accéder aux soins de santé adéquats. Tout ceci influence le taux d'abandon scolaire avec comme conséquence logique l'inégalité d'accès à l'école primaire entre le milieu rural et celui urbain, entre filles et garçons et entre enfants de familles riches et de familles pauvres.

Face à cet obstacle, la problématique qualité-quantité se pose avec acuité. Les gouvernants et les OI devraient revoir des politiques visant essentiellement à permettre à un minimum d'enfants de s'inscrire à l'école et d'aboutir à une alphabétisation généralisée. Malheureusement, la plupart des acteurs s'empressent à ajouter qu'il est vrai que l'essentiel dont un enfant a besoin en terme d'instruction pour pouvoir se débrouiller plus tard dans la vie est de savoir lire, écrire et compter. Et pourtant cet obstacle aurait pu être évité si l'Administration fonctionnait correctement.

b) L'obstacle administratif.

Cet obstacle, comme indiqué dans les lignes précédentes, date de la période dite de « rigueur », période pendant laquelle le gouvernement Kengo wa DONDO avait instauré le système d'ajustement structurel pour lui permettre le payement des dettes que le pays devait aux institutions financières de Bretton Wood. Cet obstacle a pu dégénérer au début des années 1990 quand le gouvernement avait complètement abandonné le système éducatif, il s'en est suivi la grève d'une année scolaire (1991-1992) à l'Est du pays avant que les confessions religieuses ne prennent la relève en sensibilisant les parents pour la « continuité » et le fonctionnement des écoles. Le disfonctionnement des écoles est lié à la non disponibilité des frais des fonctionnement, au non payement des salaires des enseignants, à l'absence de politique en matière d'éducation, à la non mécanisation de certaines écoles et de certains enseignants, au non payement des salaires de tous les fonctionnaires du secteur public en général, etc.

Signalons toutefois que les écoles qui fonctionnent encore un tout petit peu normalement sont soit privées, soit celles publiques mais qui sont concédées aux confessions religieuses comme les écoles conventionnées catholiques, conventionnées protestantes, etc.

c) L'obstacle culturel.

Il ancré dans la mentalité de plusieurs personnes, surtout dans les milieux ruraux, que l'éducation n'est réservée qu'aux seuls garçons, les filles ne pouvant rester à la maison en train de cultiver les champs, préparer à manger en attendant leur tour de se marier. Dans beaucoup de villages, les filles sont délaissées pour compte alors que parmi les nombreux avantages qu'offre un enseignement de qualité, il y a la sécurité qui s'attache au travail rémunéré. D'où alors, les gouvernants devaient soutenir la campagne de l'Unicef « toutes les filles à l'école »117(*) pour parvenir à lutter contre cet obstacle.

d) L'obstacle lié au moyen de communication.

Accéder à l'éducation veut dire accéder aux infrastructures où cette éducation est dispensée. La situation de la RDC est devenue drastique en matière de voies de communication. Pendant la période de pluie, dans certaines ville comme celle de Bukavu, les enfants ont difficile à se rendre à l'école à cause de l'impraticabilité des routes et les eaux ruisselant le long des caniveaux. Dans les milieux ruraux, certains enfants sont obligés de traverser par pirogue pour aller suivre les cours à quelques dizaines des kilomètres. D'autres sont obligés de faire une distance de plus de 10 km à pied pour aller à l'école. Ceci suscite le même problème découlant du rapprochement de l'éducation à l'enfant comme se pose le problème du rapprochement de la justice au justiciable.

En plus des obstacles ci-contre, il est de bon droit d'y joindre le problème lié aux mécanismes actuels de protection des droits économiques, sociaux et culturels.

B. Les obstacles liés aux mécanismes actuels de protection des DESC.

Etant donné que le droit de l'enfant à l'éducation gratuite et obligatoire est prévu par le PIDESC, nous allons passer en revue les mécanismes prévus par le droit international (a), avant de jeter un regard sur le droit interne (b).

a) Mécanisme actuel de protection du droit de l'enfant à l'éducation en droit international.

Nous allons partir d'un postulat posé en termes de question. Il s'agit de savoir si un pays comme la RDC, potentiellement riche mais réellement pauvre118(*) et dont la proportion des personnes vivant avec moins d'un (1$ US) dollar par jour qui est de 75% à ces jours,119(*) est excusable complètement de la non réalisation de droit du l'enfant à l'éducation, alors qu'il a la possibilité de s'appuyer sur le levier de la coopération internationale pour le développement (8ème OMD) ?

Et bien nous ne le pensons pas. Amnisty International évoque à ce sujet la Commission africaine des droits de l'home et des peuples qui a considéré que le Zaïre avait violé le droit à l'éducation parce que les écoles secondaires et les universités étaient restées fermées durant deux ans lors d'un conflit armé.120(*)

Au niveau international, la grande difficulté réside en l'absence du protocole facultatif ou additionnel au PIDESC.

Le Pacte demande aux Etats parties de présenter des rapports « sur les mesures qu'ils auront adoptés et sur les progrès accomplis en vue d'assurer le respect des droits reconnus », en faisant état, le cas échéant, des difficultés qui les empêchent de s'acquitter de leurs obligations. C'est ce qui ressort de la lecture combinée des art.16 à 22 du PIDESC.

Ce contrôle de respect du PIDESC fondé sur la procédure des rapports avait été confié dans un premier temps, à un organe intergouvernemental, puis à un organe indépendant, composé de 18 experts siégeant à titre individuel, appelé comité des DESC, créé par la Résolution 1985/17 du Conseil Economique et Social le 28 mai 1985. Il s'agit d'un organe subsidiaire du Conseil Economique et Social de l'ONU, ce dernier étant un organe principal créé par la charte.

Progressivement, le système de contrôle de ce Pacte se rapproche de celui du Pacte international relatif aux droits civils et politiques par la périodicité des rapports, l'adaptation d'observations finales sur chaque rapport et d'observations générales.

Quoi qu'il en soit, plusieurs faiblesses affectent les présents mécanismes. D'entrée de jeu, la possibilité est laissée aux Etats d'interpréter les obligations qui leur incombent en vertu du PIDESC au gré des ressources disponibles. De ceci, l'on constate que le pouvoir de ce comité est restreint pour la raison qu'il ne se limite qu'à analyser et à formuler des remarques dépourvues de force contraignante à l'égard des rapports présentés par les Etats-membres. En plus aucune possibilité n'est donnée à un individu qui s'estime victime d'une violation d'un de ses droits contenus dans le Pacte de saisir le présent comité. L'on constate également qu'aucune sanction réelle n'a été prévue à l'égard d'un Etat qui viole des droits reconnus par le PIDESC, le comité ne disposant qu'un pouvoir de recommandation pour sanctionner l'Etat qui viole les droits dont question. Quid du droit interne ?

b) Mécanisme actuel de protection du droit de l'enfant à l'éducation en droit interne

Le deuxième chapitre du Titre II de la Constitution de la RDC traite des droits économiques, sociaux et culturels. L'al. 4 de l'art. 43 prévoit que « l'enseignement primaire est obligatoire et gratuit dans les établissements publics ».

Ainsi, nous sommes en droit de savoir par quel mécanisme pouvons-nous recouvrer ce droit au cas où il n'est pas effectif ? Dire mieux, par devant quelle juridiction on peut s'adresser pour ce faire ?

Si l'on part de la lecture de l'art.153, al 4 de la Constitution du 18 février 2006121(*), l'on peut sembler conclure qu'il est admis de saisir un juge pour l'application du droit de l'enfant à l'éducation garanti par le PIDESC et la Constitution.

Mais de cette hypothèse, il se pose un nouveau problème ; celui de savoir quel est le juge compétent pour ce faire ! Et cela en tenant compte du fait que le Conseil d'Etat et la Cour Constitutionnelle, prévus formellement dans la Constitution, ne sont toujours pas effectifs d'une part, et de la sanction prévue à l'égard du chef de famille par la Loi-cadre à son art.137 d'autre part.122(*)

La lecture combinée de deux articles ci-contre démontre que la Loi-cadre est dépassée et mérite d'être revisitée à ces jours. La législation en la matière sanctionne un chef de ménage qui n'envoie pas l'enfant à l'école et le dispense de sanction au cas où il réside à une distance de 5 km, ou en cas d'une pauvreté remarquée. Cette législation doit s'adapter à l'évolution du droit international en s'inspirer du PIDESC, de la Déclaration du millénaire, de la Constitution de la RDC et d'autres instruments analogues.

En plus, il nous semble que, concrètement, la législation congolaise n'a pas prévu par devant quel juge on peut s'adresser pour recouvrer un droit économique, social ou culturel. Ceci amène DRAGO d'affirmer que « si ces droits sont proclamés par la Constitution, leur protection véritable ne peut être assurée que s'ils ont été aménagés pour pouvoir impliquer une protection immédiate et seul l'aménagement législatif est susceptible d'adopter ici les garanties nécessaires. Ainsi est-il nécessaire pour assurer la protection de ces droits économiques et sociaux, l'intervention du juge chargé de les faire respecter, qu'il s'agisse d'un juge spécialisé ou des juridictions ordinaires de droit commun dans l'ordre judiciaire ou administratif ».123(*)

A titre d'exemple, on peut retenir qu'en Belgique, le conseil d'Etat, dans son Arrêt Copur, n° 32.989, rendu le 6 septembre 1989, en connaissance des effets directs à l'art.13 du PIDESC, a estimé que la question n'est pas de savoir s'il a conféré aux particuliers des droits subjectifs dont ils pourraient se prévaloir devant les tribunaux, mais de vérifier si la législation belge est compatible avec l'objet inscrit dans la règle claire et précise de l'art.13, al.2 du Pacte. Dans une note sous cet arrêt, Russen Ergec écrit que « cette jurisprudence (...) ouvre en tout cas une brèche dans le dogme de la non « justiciabilité » des droits économiques et sociaux.124(*)

Il sied toutefois de signaler qu'à l'issue de notre recherche nous n'avons pas trouvé, en RDC, moins encore dans la province du Sud-Kivu, un seul cas où un particulier a pris le courage de saisir le juge pour non effectivité du droit de l'enfant à l'éducation par l'Etat congolais.

Tenant compte de l'inefficacité du contrôle par voie des rapports de la part du comité aux DESC et de l'ineffectivité du mécanisme juridictionnel du droit interne, la procédure de plaintes individuelles ou collectives au PIDESC, paraîtrait un moyen plus efficace comme l'indique le résultat de la conférence de l'ONU tenue à Vienne en 1993, à laquelle les Etats ont insisté sur la nécessité de renforcer l'indivisibilité des droits de l'homme.

A l'occasion, il avait été demandé à la commission des droits de l'Homme d'étudier la possibilité de créer une procédure de plaintes pour garantir les droits protégés par le PIESC. Ils avaient estimé que cela prendrait la forme de l'adoption d'un texte complétant le Pacte (d'où son nom de Protocole additionnel) qui établirait un mécanisme de plaintes et fixerait sa portée et ses modalités de fonctionnement. Ce texte serait ouvert à la ratification de tous les Etats parties au Pacte sans l'obligation pour eux d'y adhérer (d'où le qualificatif de « facultatif »). Un premier projet de texte avait été élaboré en 1997, suivi d'une série de discussion et de rapports d'experts.

En 2003, il fut finalement créé un groupe de travail ad hoc rattaché à la commission des droits de l'Homme chargé non pas de commencer à rédiger un projet de texte mais simplement « d'examiner les options en ce qui concerne l'élaboration d'un protocole facultatif ». Ceci a amené le centre de recherche et d'information au développement de mener une campagne pour la création d'un mécanisme de plaintes au niveau international pour les DESC.125(*)

En attendant l'aboutissement des mécanismes internationaux et nationaux de protection du droit de l'enfant à l'éducation, l'opinion ne peut que se contenter de vérifier l'état d'avancement à travers des rapports des OI et des institutions étatiques engagées dans la réalisation du deuxième OMD, étant entendu que le droit de l'enfant à l'éducation prévu dans la Constitution ne demeure, présentement, qu'un espoir à devenir. Examinons, dans un deuxième paragraphe, les solutions préconisées par la RDC et les organes subsidiaires de l'Organisation des Nations unies engagés dans la réalisation dudit objectif.

§2. Les solutions préconisées par la RDC et les organes subsidiaires de l'ONU.

Le présent paragraphe n'a pas pour objet d'apprécier l'efficacité du deuxième OMD en RDC. Nous rappelons que pareille évaluation s'avérerait prématurée compte tenu des prévisions onusiennes, à savoir l'horizon 2015. Toutefois, partant de l'interaction des OMD, et prenant en compte la cible consistant à « éliminer les disparités entre les sexes dans l'enseignements primaire d'ici à 2005, si possible, et à tous les niveaux de l'enseignement en 2015 au plus tard », nous allons essayer de comprendre, partant des statistiques disponibles, quelle en est la réalité en RDC en général, et au Sud-Kivu en particulier.

Etant donné que la RDC a l'obligation première, celle découlant du Pacte, d'assurer l'effectivité des DESC, nous allons examiner les solutions préconisées par cette dernière (A), avant d'aborder celles envisagées par les institutions spécialisées de l'ONU, à titre supplémentaire (B).

A. Les solutions préconisées par la RDC pour la réalisation du deuxième OMD.

D'entrée de jeu, nous devons rappeler que la RDC est un pays post-conflit. Et quand bien même à ce stade l'on peut considérer qu'elle est dotée des institutions légitimes, elle n'a pas parvenu, jusqu'à présent, à exercer sa souveraineté sur toute l'étendue de son territoire.

En plus de ce qui précède, il sied de rappeler que ce pays est rangé parmi les pays pauvres de la planète. En 2005, une étude démontrait que plus de 75% des congolais vivaient avec moins d'un dollar par jour et n'avait pas d'accès à l'eau potable. Le taux de mortalité infantile étant de 128 pour 1000 naissances, l'un des taux les plus élevés du monde, seules 61% des accouchements sont immédiatement assistés, le taux de mortalité maternelle étant de 1289 femmes sur 100.000. Bien avant en 2004, 4 millions de cas de paludisme ont été enregistrés et 13000 personnes en sont mortes. Cependant, cette même étude estime que les chiffres ci-avant indiqués ne représenteraient en réalité que 20% des cas de paludisme car 80% des malades n'accèdent pas à l'hôpital.126(*)

Or, dans un texte comme celui-là, et tenant compte de l'interaction des OMD, l'on a à l'esprit, qu'actuellement, la RDC est loin d'atteindre la réalisation du droit de l'enfant à l'éducation obligatoire et gratuite. Mais tout espoir n'est pas perdu. Si les engagements politiques se concrétisent, en tenant compte du chantier éducation du chef de l'Etat, à l'horizon 2015 on peut aboutir à des indicateurs certains.

En dépit de cela, il nous revient de comprendre, qu'est-ce qui a été déjà fait par la RDC depuis la mise sur pied de la Déclaration du Millénaire.

Pour répondre à cette question, nous devons faire une gymnastique pas plausible. Il s'agit d'analyser le tout premier rapport de la RDC relatif aux OMD.127(*) Ce rapport de 58 pages avec illustration du défit à relever, a été publié avec l'appui financier de la communauté internationale. Les pages 27 à 37 traitent du 2ème et du 3ème OMD en RDC. Nous allons donc aborder les points relatifs à la situation actuelle et tendance des dernières années.

a) La situation actuelle et tendance vers le 2ème OMD

Le rapport souligne que l'objectif d'un enseignement primaire universel est encore loin de la réalité en RDC. Après les avancées des années 60 et dans la 1ère moitié des années 70, le système éducatif congolais a commencé à se dégrader vers la fin des années 70. Le taux net de scolarisation était évalué à 72% en 1979. Dix ans plus tard, il a été réduit à 59%, puis à 56% en 1995, et 52% en 2001.

La dégradation touche aussi bien l'accès à l'école que l'effectivité interne même du système éducatif. Parmi les enfants scolarisés, le taux d'achèvement du cycle primaire a également chuté de moitié entre 1990 et 1995, passant de 51% à 25%. La déperdition scolaire concerne aussi bien les filles que les garçons. Dans l'ensemble, 4 enfants congolais sur 10 étaient scolarisés et achevaient le cycle primaire en 1990. Ce niveau a été réduit à un ou deux à partir de 1995.

La construction des profils scolaires met également en évidence deux réalités :

i) La scolarisation varie beaucoup selon de milieu de résidence ;

ii) Les enfants vont tardivement à l'école quel que soit le milieu de résidence.

La qualité de l'enseignement est également en défaveur des zones rurales. Le taux d'admission en 5ème année y est de 21% tandis qu'il se situe à 34% dans les zones urbaines. Les provinces de l'Ouest (Bas-congo, Kinshasa, Bandundu et les deux Kassaï) jouissent de taux de scolarisation plus élevés que les provinces de l'Est (76% contre 34%).

En ce qui concerne le retard de scolarisation, sur 10 enfants nouvellement inscrits en 1ère année primaire, 7 à 8 enfants ont plus de 6 ans. L'âge moyen à l'inscription est plus de 7 ans dans les zones urbaines et plus de 9 ans dans les milieux ruraux. Plus de 10% des élèves des écoles primaires urbaines et près de 17% de ceux des écoles primaires rurales ont plus de 14 ans.

Ce résultat est en contradiction avec les prescrits de l'art. 21 de la Loi-cadre qui énonce que « ne sont admis en première année du cycle primaire que les enfants ayant atteint l'age de six ans révolus au plus tard trois mois après la date fixée pour la rentrée scolaire. Aucun enfant ne sera admis en première année primaire s'il a atteint l'age de 9 ans résolus au moment de la rentrée scolaire, sauf dispense motivée qui pourra être accordée dans les conditions qui seront déterminées par voie réglementaire ».128(*)

Toutefois, la dégradation du système éducatif congolais trouve en partie son organe dans les trois faits suivant :

· La vétusté et le délabrement des infrastructures scolaires.129(*)

· Le vieillissement et la démotivation du corps enseignant. Il appert que l'âge moyen des enseignants du cycle primaire est de 44 ans. Les salaires des enseignants sont très bas : « un instituteur gagne en moyenne l'équivalent en francs congolais de 46 $ US à Kinshasa (17$ US de salaire et 29 $ US de prime de motivation) et de 12 $ US dans le Bandundu (6 $ US de salaire et 8 $ US de prime de motivation).

· La modicité du budget de l'éducation : jusqu'en 1982, le budget de l'éducation représentait près de 25% du budget global. Cependant, depuis 1984, le secteur de l'éducation a compté pour à peine 1% en moyenne du budget de l'Etat. Le niveau des dépenses par élève du primaire et par an est évalué à 4 $ contre 109 $ en 1980.

b) La situation actuelle et tendance vers le 3ème OMD.

Alors que les femmes constituent la majorité de la population congolaise (51,5%), cette majorité ne se reflète ni dans les différents cycles d'enseignement ni dans les différents secteurs d'activité. Dans l'enseignement, l'indice de parité entre les sexes est estimé à 90% en 2001. Cet indice diminue au fur à mesure qu'on passe aux cycles supérieurs : 54% pour le secondaire et environ 30% pour l'enseignement supérieur. Une relative amélioration de l'indice de parité femme / homme est observée depuis 1990. Cette performance pourrait paraître toutefois trompeuse, dans la mesure évidente où elle est largement due à la baisse du taux de scolarisation qui s'est, en plus, relevé plus forte pour les garçons (87% en 1979, 55% en 2001) que pour les filles (58% en 1979, 49% en 2001).130(*)

Evolution des indicateurs en tableaux.

OMD 2.

Indicateur

1990

1995

2001

Taux net de scolarisation primaire

59%

56%

52%

Proportion d'écoliers commençant la 1ère année d'étude dans l'enseignement primaire et achevant la 5ème.

5%

25%

25%

OMD 3.

Indicateurs

1990

1995

2001

Rapport filles/ garçons dans le primaire.

74%

-

90%

De ce qui précède, il se comprend sans peine que la RDC a pris part à la Déclaration du Millénaire dans un contexte politique très complexe. Cependant, le gros du travail que devait réaliser le gouvernement congolais n'a pu être fait à cause du disfonctionnement que ce dernier connaissait. A titre d'illustration, c'est dans le budget de 2009 qu'on vient de prendre compte, pour la 1ère fois, du document stratégique pour la réduction de la pauvreté (DSRP). Toutefois, nous devons encourager les efforts fournis par la Communauté internationale à travers ses institutions spécialisées oeuvrant dans le domaine du droit de l'enfant à l'éducation suite aux solutions par elles préconisées.

B. Les solutions préconisées par les institutions spécialisées de l'ONU.

Pour la réalisation effective du 2ème et du 3ème OMD en RDC, l'UNICEF, la Banque Mondiale et l'UNESCO mènent des activités différentes. Mais l'obligation première incombant à l'Etat congolais, l'action des ces institutions se heurte à des défis majeurs dont les principaux sont : la rémunération des salaires des fonctionnaires publics, la réhabilitation et la construction des écoles et des routes, etc.

Etant entendu que la Banque Mondiale intervient dans le financement pouvant permettre la réhabilitation et la construction des infrastructures routières, scolaires et sanitaires, nous allons seulement prendre en compte les progrès réalisés par l'UNICEF en matière de parité filles/garçons à travers sa campagne « toutes les filles à l'école ». Loin de perdre de vue la contribution importante du rapport de l'UNESCO sur « l'éducation pour tous » de 2008, nous préférons tenir compte des points positifs dans le 3ème chapitre qui va porter sur les stratégies pour l'effectivité du droit de l'enfant à l'éducation.

Les solutions préconisées par l'UNICEF sont entre autres l'étude initiée en 2001 dénommée enquête nationale des enfants et des femmes, Rapport MICS2 2001 (a), en plus de la campagne dénommée toutes les filles à l'école menée à l'est de la RDC (b) et des conférences internationales en faveur du droit de l'enfant à l'éducation(c).

a) Le résultat du rapport MICS 2/2001.

La présente enquête menée conjointement avec le Ministre du plan a aboutie aux résultats qui suivent :

· L'éducation préscolaire :

La participation aux programmes d'éducation préscolaire ne concerne que 3 % d'enfants de 3 à 4 ans révolus. Presque tous sont issus des ménages les plus riches, des centres urbains et des mères instruites.131(*)

· Accès à l'école primaire :

Le pourcentage d'enfants qui commencent leurs études primaires à l'âge légal de 6 ans est faible et en baisse : 23 % en 1995 contre 17 % en 2001. Les écarts se sont réduits entre les sexes. Les disparités sont très marquées entre les plus riches (43 %) et les plus pauvres (9 %), entre les enfants des mères les plus instruites (35 %) et ceux des mères sans instruction (7 %) et entre provinces (42 % à Kinshasa contre 4% dans les Nord et Sud-Kivu). Parmi les nouveaux inscrits en 1ère année primaire, 32 % ont 9 ans ou plus. Ces entrées tardives à l'école primaire entraînent un vieillissement des élèves et, plus tard, des études. Parmi les enfants qui fréquentent l'école primaire, un sur dix est âgé de plus de 14 ans.

· Scolarisation des enfants au niveau primaire :

Seulement un enfant sur deux, âgés de 6 à 11 ans est scolarisé. La scolarisation des enfants est en régression en RDC : le taux net de scolarisation est passé de 56 % en 1995 à 52 % en 2001. Les garçons sont plus scolarisés que les filles : 55 % de garçons pour 49 % de filles en 2001 (en 1995, les taux nets étaient respectivement de 59 % et 53 %). Cette différence s'observe plus à partir de 9 ans, car beaucoup de filles quittent l'école à ces âges. Les enfants de ménages les plus pauvres (39 %) et du milieu rural (43 %) étudient moins que ceux de ménages les plus riches (81 %) et du milieu urbain (72 %).

· Fréquentation scolaire :

Dans l'ensemble du pays, un enfant de 6 à 14 ans sur trois (31 %) n'a jamais fréquenté l'école et risque de ne jamais fréquenter. Les filles sont plus concernées par cette situation que les garçons (35 % contre 28 %). La proportion de filles n'ayant jamais fréquenté l'école est quatre fois plus élevée parmi les enfants des mères sans instruction (56%) que parmi celles des mères ayant le niveau d'instruction secondaire (13 %).

Au moment de l'enquête, près de la moitié (45 %) d'enfants âgés de 6 à 14 ans ne fréquentaient pas l'école. Les raisons sont avant tout l'incapacité des parents de payer les frais scolaires (63 % des cas) et l'éloignement des écoles (9% des cas).

· Efficacité interne du système scolaire :

Le système éducatif congolais est peu efficace pour le plus grand nombre : un enfant seulement sur quatre entrant en première année d'enseignement primaire atteint la cinquième année, soit un taux de survie scolaire égal à 25 %. Ce taux est de 18 % seulement dans les ménages les plus pauvres contre 41 % dans les ménages les plus riches. Par contre, parmi 100 élèves qui terminent la 6ème année primaire, 81 s'inscrivent en secondaire.

· Raisons de non fréquentation actuelle :

Echecs scolaires : 1%, maladie prolongée : 4%, changement de résidence : 2%, grossesse : 0, 1%, travail : 0,9 %, autres : 20%, pas d'écoles proches : 9%, frais scolaires : 63 %.132(*)

b) La campagne dite « toutes les filles à l'école ».

Les résultats de l'enquête initiée en 2001, ont permis à l'UNICEF de mettre sur pied, à l'Est du pays, la campagne dite « toutes les filles à l'école ». Cette campagne lancée en 2004, avait pour objet de donner à la fille à l'âge scolaire la possibilité d'accéder à l'école primaire, et partant, contribuer à la cible du troisième OMD. Se faisant, l'UNICEF donne des objets scolaires aux enfants de 1ère et 2ème années tout en intensifiant des moyens de sensibilisation de sa campagnes aux sports publicitaires, à la Radio, à la Télévision, à travers des bandes dessinées, et va jusqu'à financer des chassons initiées par des musiciens.

Toutefois, les problèmes majeurs demeurent. Cette campagne ne fait qu'encourager! Ce qui est une bonne chose. Mais les enfants encouragés à aller à l'école sont toujours soumis aux mêmes problèmes qui sont devenus un engrenage du système éducatif congolais dont le plus imminent demeure le payement des frais scolaires.

Quoi qu'il en soit, l'on doit encourager des telles initiatives. Mais la plus récente publication de l'UNICEF, bureau de la RDC indique que, globalement, pour la participation des filles, le nombre de filles scolarisées est inférieur à celui des garçons. Il est plus faible en 2ème année qu'en 1ère année.133(*) Cependant, une tendance contraire est observée dans les provinces de l'Equateur et de Kinshasa où les filles sont plus scolarisées que les garçons. Par ailleurs, l'indice de parité le plus faible est enregistré au Katanga et dans le Sud-Kivu où l'on compte respectivement 79 et 75 filles pour 100 garçons scolarisés au cours de l'année scolaire 2007-2008.

Les résultats du Katanga suggèrent que les effets de la scolarisation massive des enfants induits par la mesure de gratuité prise par le gouvernement de province ne sont pas aussi bénéfiques pour les filles qu'ils les sont pour les garçons car, pour les deux années d'études, l'indice de parité s'est détérioré d'une année à l'autre, passant de 0,82 à 0,79 aussi bien en 1ère année qu'en 2ème, soit une baisse de 0,03.

Par contre, cet indice a pris une ample évolution au Sud-Kivu. Pour une étude menée sur 1390 écoles de 1ère et 2ème année au cours des années scolaires 2006-2007, 2007-2008, sur 100 élèves garçons, il y a 71 filles. L'indice de parité de 2006-2007 étant de 0,71, et celui de 2007-2008 de 0,75; l'on aboutit à un résultat selon lequel l'indice d'accroissement est de 0,04 : ce qui est déjà une évolution. Le tableau qui suit illustre davantage.

Evolution de l'indice de parité filles/garçons.

Provinces

Nombre d'écoles

1ère année

2ème année

2006-2007

2007-2008

2006-2007

2007-2008

Bandundu

394

0,96

0,99

0,96

0,99

Bas Congo

495

0,95

0,97

0,95

0,97

Equateur

214

1,01

1,04

1,03

1,05

Kinshasa

721

1,02

1,03

1,03

1,03

Katanga

2387

0,82

0,79

0,82

0,79

Kasaï occidental

102

0,99

0,99

0,86

0,92

Kasaï oriental

366

0,91

0,91

0,99

0,99

Maniema

322

0,84

0,85

0,84

0,85

Nord - Kivu

1068

0,93

0,50

0,93

0,95

Province orientale

869

0,97

0,95

0,97

0,95

Sud- Kivu

1390

0,71

0,75

0,71

0,75

Ituri134(*)

961

0,80

0 ,88

0,80

0,88

Moyenne RDC (pays)

9289

0,90

0,90

0,88

0,88

Ces résultats ont permis à l'UNICEF de changer de slogan pour l'année scolaire 2008-2009. Au lieu de « toutes les filles à l'école » l'UNICEF emploie désormais « filles et garçons à l'école » tout en mettant un accent particulier sur l'encouragement des filles. Examinons à présent des recommandations issues des conférences initiées par l'UNICEF.

c). Les recommandations issues des conférences internationales.

L'UNICEF, au coté des autres organisations engagées dans les droits des enfants, lance des campagnes mondiales d'information sur l'importance de l'éducation pour chaque enfant. Pour cet effet, l'UNICEF, en collaboration avec l'UNESCO et la Banque Mondiale ont organisé une conférence sur l'EPT à Dakar en 2000, une autre sur les investissements les plus efficaces pour inciter les garçons et les filles à se rendre à l'école, tenue à Ouagadougou (BOURKINAFASO) en 2004, une autre sur la gratuité des frais scolaires tenue à BAMAKO en 2007, et plus récemment celle de Brazzaville du 27 au 30 Octobre 2008, dite 7ème sommet sur le développement de l'Afrique, pour ne citer que celles-là. Les travaux de toutes ces conférences auxquelles la RDC a toujours pris part, vont nous aider, dans le troisième chapitre, à proposer des stratégies d'accélération des OMD relatifs à l'éducation en RDC, d'ici 2015.

(c) mutajustin@yahoo.fr

CHAP. III : STRATEGIES POUR L'EFFECTIVITE DU DROIT DE

L'ENFANT A L'EDUCATION EN RDC EN GENERAL ET

AU SUD-KIVU EN PARTICULIER.

Les stratégies développées dans le présent chapitre sont adressées principalement au gouvernement central, et subsidiairement au gouvernement provincial. Cette approche se justifie par le fait que, le domaine de l'éducation demeure, jusqu'à preuve du contraire, une matière concurrente entre le gouvernement central et celui provincial quoi que la loi n° 08/012 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces ait transféré complètement certains aspects aux provinces. En plus, une stratégie comme celle des politiques en matière d'éducation relève en premier lieu du gouvernement central. Il en est ainsi de la diplomatie, qu'elle soit ordinaire ou ad hoc.

Ceci étant, le présent chapitre s'articule autour du renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau international et national (section 1ère), la poursuite de l'amélioration de l'efficacité de l'enseignement au niveau interne et externe (section 2ème) et l'inspiration des progrès réalisés par d'autres pays ainsi que le respect des engagements pris dans des conférences internationales (section 3ème).

Section 1ère : Renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau international et

national.

La présente section aborde les aspects relatifs au renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau international (§1) et au niveau national (§2) en vue de rendre effectif le droit de l'enfant à l'éducation en RDC.

§1. Renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau international

D'aucuns peuvent se poser la question de savoir, quelle est la place de la souveraineté dans un domaine où l'Etat a l'obligation première de réalisation ?

La souveraineté de l'Etat ne s'analyse pas en des termes positifs, comme un ensemble des pouvoirs que l'Etat détiendrait sur ses sujets ou sur les autres, mais se définit négativement comme la non-soumission à une autorité supérieure ; le fait de n'être le sujet (au sens d'assujetti) d'aucun autre sujet (au sens juridique).135(*) L'idée de souveraineté-indépendance comporte comme corollaire immédiat l'égalité des Etats ; tous sont égaux, et à ce titre, négocient et discutent leurs accords sur base de l'égalité et de la liberté de conclure des traités. En dépit de cette indépendance, il est bien observable qu'aucun Etat ne peut se prévaloir de s'enfermer sur sa souveraineté interne en vue de réaliser le droit de l'enfant à l'éducation. Le droit dont question, est depuis belle lurette, un droit internationalisé. Cela se justifié par sa consécration dans plusieurs instruments internationaux tels qu'ils ont été relevés le long du deuxième chapitre.

Pour ce faire, le renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau international sous-entend d'une part la capacité de l'Etat de mener un lobbying au niveau international (A) et d'autre part s'inscrire dans la politique du partenariat mondial pour le développement (B).

A. La mobilisation de la Communauté internationale

Pour mobiliser la communauté internationale, il est impérieux de disposer d'une diplomatie active, qu'elle soit celle habilitée au ad hoc.

Sur ce point, la RDC a brillé dans le retard en matière d'éducation. Et pourtant, comme elle est membre de pas mal d'organisations internationales et régionales, elle devait se démarquer en vue de relever le défis du droit de l'enfant à l'éducation qui s'annonce désastreux à ce stade. A titre d'exemple, l'on peut noter la fait que ce pays a prouvé sa capacité de mobiliser des fonds au sein de la communauté internationale lorsque le besoin s'est fait sentir. Cela a été le cas pendant la transition, période pendant laquelle, une celle institution d'appui à la démocratisation, comme la Commission Electorale Indépendante, a bénéficiée d'un appui de la communauté internationale de plus ou moins 450 millions de dollars.

Tout porte à croire que les OMD n'ont pas été une priorité du gouvernement congolais depuis leur mise sur pied. Cependant, l'état d'avancement des autres pays appelle la RDC à mettre en place une diplomatie active lui permettant de mobiliser des fonds capables de programmer la réalisation progressive et continue du droit de l'enfant à l'éducation. Mais ce défi majeur peut être relevé si l'Etat congolais parvenait à s'inscrire, entre autre, dans la politique du partenariat mondial pour le développement.

B. Le partenariat mondial pour le développement.

Déjà en 2000, la Conférence de Dakar sur l'EPT affirmait qu'on ne peut espérer qu'un pays se développe dans une économie moderne sans qu'une proportion importante de sa main d'oeuvre ait suivi un cycle secondaire complet.136(*) Cela a abouti à l'implication accrue des bailleurs des fonds, ce qui a amené le G8 à commander en 2002 la mise en oeuvre d'une procédure accélérée dont le secrétariat technique est assuré par la Banque Mondiale.

Ainsi a pris naissance la Fast Track Initiative (FTI),137(*) lancée officiellement par le comité de développement de la Banque mondiale et du FMI et centrée sur un des objectifs communs du plan d'action de Dakar pour l'EPT et la Déclaration du millénaire : atteindre l'éducation primaire universelle en 2015.

La FTI poursuit l'objectif de mieux coordonner et harmoniser l'aide des donateurs dans le secteur de l'éducation. Elle se fonde sur cinq principes (appropriation nationale, définition des critères, soutien lié aux performances, abaissement des coûts de transaction, transparence) et sur six objectifs.138(*) La FTI rassemble plus de trente bailleurs multilatéraux et bilatéraux, dont la Belgique qui a assuré la co-présidence de juillet 2005 à juillet 2006. Sont éligibles, les pays à faible revenu qui disposent un plan d'action adéquat pour la scolarisation primaire universelle. Un processus d'évaluation a été mis en oeuvre sur base des performances enregistrées dans le cadre des reformes requises. Ces reformes s'alignent sur les recettes généralement prescrites par la Banque Mondiale lors de l'élaboration des documents stratégiques pour la réduction de la pauvreté (DSRP), qui ont remplacés depuis 1999 les programmes d'ajustement structurel (PAS).

La FTI dispose par ailleurs d'un cadre indicatif pour évaluer les progrès accomplis par les pays. Il s'agit notamment des indicateurs suivants : Dépenses publiques consacrées à l'éducation (environs 20%) ; dépenses consacrées à l'enseignement primaire (environ 50% du budget de l'éducation), salaires des enseignants (environ 3,5 fois le PIB par habitant), Ratio élèves /maître (environ 40% pour 1), dépenses hors salaires des enseignants (33% des dépenses courantes), taux moyen de redoublement (10% ou moins), nombre annuel d'heures d'instruction (850 ou plus).

Une vingtaine de pays (dont 12 africains) forment la liste des bénéficiaires de la FTI. Il s'agit du Burkina Faso, du Djibouti, de l'Ethiopie, de la Gambie, du Ghana, de la Guinée, de la Guyane, du Honduras, du Kenya, du Lesotho, du Madagascar, de la Mauritanie, de la Mordovie, du Mozambique, du Nicaragua, du Niger, du Tadjikistan, du Timor Est, du Vietnam et du Yémen.139(*)

Le Rwanda est en voie d'être gréé depuis 2007. La RDC qui prétendait y être a encore raté une belle occasion à cause de son budget qui ne tient toujours pas compte des exigences de la FTI. Il est donc plus qu'une nécessité, pour la RDC, de chercher par tous les moyens la possibilité d'attraper cette occasion. Cette opportunité serait saisie par le budget 2009 qui entendait ternir compte du DSRP, mais ce seul critère ne suffisant pas, l'enseignement primaire congolais va continuer à souffrir des mêmes maux.140(*)

§2. Renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau national.

Le renforcement de la souveraineté de l'Etat au niveau national a comme effet direct d'instaurer l'autorité de l'Etat sur toute l'étendue du territoire national. La souveraineté intérieure se définit en droit interne par son contenu positif de plénitude des pouvoirs que l'Etat exerce sur ceux qui lui sont soumis, c'est-à-dire ses sujets ; il n'admet point de collectivité à lui supérieure.141(*)

Or, parmi les obstacles qui affectent le système, éducatif congolais, il y a l'instabilité politique et la guerre ayant comme conséquence politique l'insécurité.

A. L'éradication de la guerre.

La RDC a débuté, en 2003, une période de Transition qui a mis sur pied en 2006 un gouvernement issu des élections libres et démocratiques. Mais malgré cela, il continue à s'observer sur le territoire national des groupuscules rebelles et des groupes armés étrangers. La conséquence en est que, dans les zones sous contrôle des bandes armées comme au Nord-Kivu, au Sud-Kivu et en province Orientale, les enfants ne savent aller à l'école ; et ceux qui y vont ne bénéficient pas d'un enseignement de qualité conformément aux normes internationalement établies par l'UNICEF et l'UNESCO. Ces guerres ont comme conséquences logiques l'insécurité des milieux avoisinant même s'ils sont sous contrôle du gouvernement.

B. L'éradication de l'insécurité.

Il y a deux ans, dans les groupements de KANIOLA et d'IZEGE dans le Territoire de Walungu, province du Sud-Kivu, les écoles fonctionnaient d'une manière intermintante, soit fonctionner pendant deux semaines et fermer pendant deux autres. Ces groupements sous contrôle du gouvernement faisaient, et continuent à faire l'objet d'une insécurité causée par les groupes armés occupant les collines qui surplombent lesdits groupements.

Cet état de chose a une conséquence logique sur la qualité d'enseignement des enfants ainsi que sur leur état psychique et moral. Or, dans des telles conditions, les programmes ne sont jamais achevés. Pour atteindre les OMD, les autorités centrales comme celles provinciales sont appelées à donner la chance à tous les enfants du pays, garçons et filles, d'accès dans les conditions normales à l'éducation. Cela permettra également aux parents qui ont fui leurs villages pour la ville, avec comme conséquence pour leurs enfants d'abandonner les études, étant donné que la source de payement des frais scolaires n'étaient que les activités des champs, de reprendre le cycle, et d'avoir la chance comme les autres enfants du monde d'achever le cycle élémentaire. Examinons, à présent, la poursuite de l'amélioration et l'efficacité de l'enseignement interne (section 2).

Section 2ème : Poursuivre l'amélioration de l'efficacité interne de l'enseignement.

Bien qu'il soit difficile d'envisager l'effectivité de l'éducation primaire universelle à l'horizon 2015 en RDC, il est possible de réaliser 60% de taux d'achèvement du cycle primaire. Cela s'explique par le fait que le pays dispose des potentialités pour inverser la tendance à la baisse de ces dernières années et atteindre un tel objectif intermédiaire.

Partant du caractère interdépendant des OMD en général et du droit de l'enfant à l'éducation, un droit programmatoire et à réalisation progressive, si par exemple, le contrat chinois qui prévoit la construction des universités, des logements sociaux, des hôpitaux et des routes parvenait à se réaliser effectivement, le droit de l'enfant à l'éducation peut s'améliorer sur quelques points. En effet, cela ne constituerait qu'une étape à côté de l'augmentation de l'offre d'éducation primaire (§1) préconisée par le rapport national sur les OMD, et des stratégies internes et externes à la salle de classe préconisées par l'UNICEF (§2).

§1. L'augmentation de l'offre de l'éducation primaire en RDC.

Quoi que le contexte ne soit pas le même, la RDC n'est pas le seul pays qui a connu la guerre et le fait qu'il ait connu la guerre ne constitut, qu'avec une moindre dose, un motif pour ne pas satisfaire aux droits des générations futures. Or, les enfants qui apprennent aujourd'hui constituent les animateurs des institutions de demain. Les dirigeants actuels ne doivent pas perdre de vue que ce que sont les enfants aujourd'hui, ils l'ont été hier ; et que ce qu'ils sont aujourd'hui, les enfants le seront demain.

L'Angola, au côté de la RDC, a subi également une guerre de plus ou moins vingt ans. Cette guerre civile qui a ravagé le pays jusqu'à mars 2002 a laissé le pays, et particulièrement le secteur éducatif dans un piètre état, un million d'enfants étant privés d'enseignement primaire. En février 2003, une campagne dénommée la « Rentrée des classes » a été lancée, celle-ci étant la plus grande campagne d'éducation jamais menée en Angola. A l'initiative commune des autorités locales et l'UNICEF, cette campagne a permis à 250.000 enfants d'aller pour la 1ère fois à l'école, la priorité étant dans un premier temps donnée aux provinces centrales de BIE et MALANJE, qui ont été durement touchées par la guerre.142(*)

Cette campagne représente un changement de l'orientation majeure pour le Gouvernement angolais, qui estimait auparavant que l'enseignement primaire universel ne pourrait se concrétiser tant que l'on ne construirait pas dans l'ensemble du pays des salles de classe traditionnelles et que l'on ne disposerait pas un nombre suffisant d'enseignants dûment formés et qualifiés. Cette campagne se fonde en revanche sur une formation rapide des enseignants et sur une amélioration progressive de la qualité de l'enseignement. Jusqu'en 2004, l'UNICEF avait déjà formé 5.000 enseignants de toute urgence. Or, cette réalité peut être applicable en RDC, étant donné qu'il s'agit d'un pays post-conflit comme l'Angola. Cela nous amène à examiner l'amélioration de l'efficacité de l'enseignement (A), ainsi que des politiques et programmes (B), avant d'aborder des stratégies spécifiques à la province du Sud-Kivu (C).

A) L'amélioration de l'efficacité interne de l'enseignement.

Comme préconisé ci-contre, il est possible d'atteindre un taux d'achèvement du cycle primaire d'au moins 60% à travers l'amélioration des méthodes de transmission des connaissances (notamment la fourniture des manuels scolaires, des conditions d'apprentissage et des méthodes d'évaluation des connaissances. Le rapport National sur les OMD estime également que cela pourrait permettre une augmentation du taux d'admission en 5ème année de 25% actuellement à 75%.143(*) Pour y parvenir, quelques conditions sont nécessaires :

a) L'Etat doit assurer une meilleure répartition des écoles et des capacités d'accueil dans toutes les provinces proportionnellement à la population scolarisable : Ceci devrait permettre d'améliorer l'accès à l'école, d'augmenter l'offre d'éducation et également d'améliorer la rentabilité et l'équité des investissements publics éducatifs.

b) Réengager l'Etat dans le secteur, en garantissant des budgets annuels acceptables et en progression : Il n'y aura pas d'alternative viable à cette opinion, les ajustements spontanés qui ont évité l'effondrement total du système ayant montré leurs limites. De plus, les énormes besoins de construction et de réhabilitation des infrastructures scolaires imposent une plus grande participation des pouvoirs publics.

c) Améliorer le système statistique afin de faciliter le suivi des réformes et des programmes : Cette amélioration doit concerner aussi bien la quantité que la qualité des données statistiques produites. Un effort considérable devrait également être réalisé au niveau de l'analyse et de la gestion des statistiques, une publication régulière et périodique est plus que souhaitable. Une attention particulière devait être attachée à la Division Provinciale de l'EPSP/Sud-Kivu où il existe un service des statistiques mais presque non fonctionnel. Les rapports qui y sont envoyés chaque année par les gestionnaires des écoles ne sont pas compilés, moins encore ventilés. Ceci constitut un problème majeur aux chercheurs et sont obligés de se contenter des rapports de l'UNICEF, de la Banque Mondiale, de l'UNESCO et très récemment de la Division Provinciale du Plan grâce au soutien de l'UNICEF et du PNUD.

B) Amélioration des politiques et des programmes.

Etant donné que le droit à l'éducation s'articule autour d'une approche genre, le gouvernement devait intensifier l'introduction du concept « genre » dans les programmes de développement des droits des enfants, accélérer le « Programme Multisectoriel d'urgence de Réhabilitation et de Reconstruction (PMURR) », lancé en 2002, qui concentre ses efforts sur la réhabilitation des infrastructures et qui est soutenu par la Banque Mondiale, prévoyant la réhabilitation des écoles à Kinshasa, Bas-Congo, Bandundu, les deux Kasaï et le Katanga.144(*) Ce programme devrait être élargi aux provinces du Sud-Kivu, du Nord-Kivu et Orientale pour avoir subi les plus grands affres de la guerre.145(*)

Dans le même ordre d'idée, l'appui de l'UNICEF consistant à assurer la formation des enseignants, comme le cas de l'Angola sus évoqué, et l'encouragement de l'inscription massive des enfants en première année primaire, tout en mettant un accent particulier sur l'inscription des filles, s'avère d'une grande importance.

L'Etat doit soutenir aussi le Programme Multisectoriel d'urgence de Réhabilitation des infrastructures sociales (PMURIS) financé par la BAD qui prévoyait, en 2004, la réhabilitation (bâtiment et équipement) de 3.000 écoles primaires à 6 classes, la fourniture des manuels scolaires, la formation et le renouvellement des enseignants et le renforcement de la gestion du secteur.146(*)

La mise en oeuvre des programmes ci-contre consacrerait la réalisation de la 1ère phase (phase d'urgence) du plan-cadre de l'Education élaboré par le gouvernement en 1999, plan qui n'a jamais été adopté par le Parlement.

En effet, le Gouvernement avait, dès le début des années 1990, entamé la préparation d'une réforme en profondeur du système éducatif national. Sur base de la Charte nationale de l'Education adoptée par la Conférence Nationale Souveraine en 1992, le Gouvernement avait commencé en 1996 la préparation d'un projet d'un nouveau système éducatif, par la tenue des Etats Généraux de l'Education.

Le plan cadre de l'Education formulé en 1999, avec l'appui du PNUD et de l'UNESCO ambitionnait de reconstruire le système éducatif sur une période allant de 1998-2008 en trois phases :

· La phase d'urgence (1999-2000) seront la réhabilitation des écoles primaires, la fourniture des équipements et des manuels scolaires, le recyclage et la formation des enseignants, et la formation professionnelle ;

· La phase de mise en oeuvre proprement dite du nouveau système éducatif pour tous (2001-2004) ; et

· La phase de consolidation (2005-2008).147(*)

Malheureusement, avec la mort de Mzee Laurent Désiré KABILA, initiateur du plan cadre dont question, tout est tombé dans l'oubli. Examinons, à présent, les stratégies spécifiques à la Province du Sud-Kivu.

C). Stratégies spécifiques à la province du Sud-Kivu.

Le Sud-Kivu est l'une des 26 provinces qui constituent la RDC conformément aux dispositions de l'art. 2 de la Constitution. Elle est une entité décentralisée dotée de la personnalité juridique et jouissant de la libre administration et de l'autonomie de la gestion de ses ressources financières, économiques, humaines et techniques conformément aux dispositions de l'art. 3 de la Constitution. La part des recettes à caractère national allouées à la province est établie à 40% (art. 157). Toutefois, elle peut bénéficier des fonds supplémentaire auprès de la caisse nationale de péréquation, instituée par l'art. 181 et ayant comme mission de financer des projets et programmes d'investissement publics, en vue d'assurer la solidarité nationale et de corriger le déséquilibre de développement entre les provinces et entre les autres entités territoriales décentralisées. Elle a une population de 4.715.056 habitants.148(*) Elle compte 2384 écoles primaires dont 2033 fonctionnelles avec un effectif, au cours de l'année- scolaire 2006-2007, de 637636 élèves, en raison de 336757 garçons (soit 53 %) et 300879 filles (soit 47%).149(*) Ceci étant, nous allons passer en revue les difficultés majeures qui affectent l'enseignement universel dans la province (a), avant d'aborder les stratégies pouvant permettre de les résoudre (b).

a. Les difficultés majeures qui affectent le droit de l'enfant à l'éducation au Sud-Kivu.

Comme indiqué ci-contre, ces difficultés sont presque les mêmes au niveau national et provincial. Au plan politique, nous devons noter que la Province du Sud-Kivu, à coté de celle du Nord Kivu, a reçu en 1994, après le génocide rwandais, des réfugiés qui ont été installés sur des sites abritant des écoles, avec comme conséquence, la destruction du tissus environnemental. Qu'à cela ne tienne, elle demeure parmi les provinces qui ont subi d'énormes exactions dues à la guerre menée par des groupes rebelles qui ont occupés l'Est du pays pendant 5 ans. Elle demeure, jusque maintenant, l'une des provinces du pays dont la situation sécuritaire, à l'intérieur, cause de nombreuses perturbations dans le bon fonctionnement des institutions scolaires.

Avec l'avènement de la troisième République, il y avait une lueur d'espoir fondée sur la retenue à la source de 40% des recettes générées par la province. Mais malheureusement, la réalité n'a pas suivie d'effets en dépit de la promulgation de la Loi n° 08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces qui a transféré à la province certains domaines du droit à l'éducation, conformément aux dispositions de l'art. 203 de la Constitution.

b. Stratégies pour la réalisation du droit de l'enfant à l'éducation au Sud-Kivu.

Comme l'indique l'art. 32 de la Loi portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces, la répartition des compétences entre le pouvoir central et la province s'effectue conformément aux dispositions 202, 203 et 204 de la Constitution. Or, ces articles déterminent respectivement les matières exclusives à la compétence du pouvoir central, les matières concurrentes entre ce dernier et les provinces, et celles exclusives à la compétence de la province. Il en est ainsi de la mise en oeuvre des mécanismes de la promotion et de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales consacrés dans la Constitution qui est une matière concurrente. Toutefois, l'enseignement maternel, primaire, secondaire, professionnel et spécial ainsi que l'alphabétisation des citoyens conformément aux normes établies par le pouvoir central est désormais de la compétence exclusive de la province conformément aux dispositions des articles 204, al. 13 de la Constitution et 37, al. 7 de la Loi portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces.

Le problème majeur à résoudre par la province, en priorité, demeure la paie des enseignants. Pour y parvenir, la province doit disposer d'un budget capable de relever le défi. Malheureusement, cela ne semble pas être le cas. Si l'on pouvait croire que le budget provincial de l'exercice 2008 ne pouvait pas résoudre le défi pour la simple raison que le 40% n'étaient pas retenus à la source, le budget 2009 non plus n'a pas donné de solution. Dans le budget 2008, il était affecté à l'éducation 2,91%, soit 128.608.645.05 FC équivalent à 233.833,9 dollars. Comparativement au chantier éducation, ce montant est loin de couvrir la paie des enseignants pour ne citer que ce seul aspect. Ce pourcentage attendait, pour être concrétisé, 100.240.000 FC provenant des frais payés par des finalistes du secondaire et du primaire pour passer les épreuves de fin de cycle. Cela a amené à l'Observation du CEGEC de s'interroger si la Province ne saurait donc pas honnêtement les compter au titre de ses actions en faveur de l'éducation puisqu'elle est incapable d'organiser des épreuves sans rançonner les pauvres parents déjà tant sucés par le paiement du minerval, des primes et frais de toute nature.150(*) Et comme il fallait attendre, le budget 2009 de la province n'a pas résolu grand-chose. Ce budget de 64.066.743.437,87 FC, soit 112.397.795,5 dollars américains présente un accroissement de 41 % par rapport à celui de 2008 qui était de l'ordre de 42.493.668.169,07 FC, soit 74.550.295 dollars américains. Malheureusement, il n'a été affecté que 23, 77% aux chantiers éducation et santé. Ce pourcentage doit couvrir la paie du personnel de l'EPSP et de l'inspection provinciale de la santé, en plus de l'achat des fournitures et matériels médicaux, etc.

De ce qui précède, il appert que pour rendre l'enseignement universel effectif au Sud-Kivu, la Province doit soit, améliorer son budget 2010, ou faire appel à la caisse de péréquation pour lui venir en aide. Quoi qu'il en soit, la priorité demeure la paie des enseignants pour améliorer tant soit peu la qualité de l'éducation et parvenir à asseoir certaines stratégies internes et externes à la salle de classe.

§2. Les stratégies internes et externes à la salle de classe.

Il s'agit des stratégies dans la salle de classe (A) et des stratégies à l'extérieur de la salle de classe (B). En effet, il a été prouvé que les stratégies décrites ci-dessous, qu'elles soient appliquées à l'intérieure ou à l'extérieur de la classe, ont amélioré les taux de fréquentation scolaire et de réussite chez les filles dans certains pays. Chacune de ces stratégies met en valeur un certain type d'école proposant une méthode d'apprentissage efficace dans un environnement sûr et sain, qui tienne compte des différences entre les sexes, et où l'enfant occupe une place centrale : c'est ce que l'UNICEF appelle une école adaptée aux enfants.151(*)

A. Les stratégies dans la salle de classe.

Ces stratégies s'articulent autour de l'égalité des chances, du dévouement des enseignants, de la promotion de la santé, etc.

a) Mieux centrer la classe sur les besoins de l'enfant dans le respect des différences entre les sexes.

Cette stratégie permet d'enraciner les activités dans la vie et le contexte communautaire. Cet aspect interculturel s'appuie sur un enseignement et un apprentissage participatifs, dans lequel le jeu et l'étude se combinent de façon créative. Les enseignants doivent utiliser du maximum les langues et la culture pour imprégner aux écoliers la valeur culturelle. Cela, partant du premier objectif de l'EPT152(*), doit tenir compte des droits des enfants des peuples autochtones, des handicapés physiques (sourds muets, aveugles, etc.), des orphelins de guerre, ainsi que ceux nés issus du viol au même titre que les autres.

b) Recruter et former des enseignants soucieux d'équité entre les sexes et des droits de l'enfant et verser à ces derniers un salaire régulier leur permettant de mener une vie décente.

Les enseignants, hommes et femmes, devraient suivre une formation qui les sensibilise aux spécificités des sexes dans la salle de classe. Sans quoi, rien n'exclut que certains enseignants continuent à valoriser et encourager davantage la participation des garçons au détriment de celles des filles et qu'ils ne doivent répartir les tâches selon des schémas discriminatoires stricts, laissant aux filles le soin de balayer la classe et de nettoyer les toilettes. Cette stratégie devait s'inscrire dans le cadre de l'art 45 de la Constitution qui dispose, en son 4ème alinéa que : « Les pouvoirs publics ont le devoir de promouvoir et d'assurer, par l'enseignement, l'éducation et la diffusion, le respect des droits de l'homme, des libertés fondamentales et des devoirs du citoyen énoncés dans la présente Constitution ;

Les pouvoirs publics ont le devoir d'assurer la diffusion et l'enseignement de la Constitution, de la Déclaration universelle des droits de l'homme, de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi que de toutes les Conventions régionales et internationales relatives aux droits de l'homme et au droit international humanitaire dûment ratifiées ».

Le terme « devoir » fait que les pouvoirs publics ne s'engagent pas avec détermination dans ce que la Constitution leur a assigné comme mission. D'où le terme « obligation conviendrait mieux ». Qu'à cela ne tienne, l'on devait au besoin envisager une formation des enseignants en matière de droits de l'homme en général, et droits des enfants en particulier, afin de permettre à ces derniers d'être en même de faire connaître aux enfants leurs droits, et de les épargner des grandes difficultés lorsque cette disposition sera effective dans les programmes nationaux d'enseignement. Cela répondrait à l'adage cher aux pédagogues d'après lequel « pour enseigner court comme un doigt, il faut connaître long comme un bras ».

c) Promouvoir la santé dans les écoles.

Cette stratégie devait être tenue dans les programmes nationaux d'enseignement primaire. Cela permettrait d'adopter une approche globale de la santé fondée sur l'enseignement des aptitudes à la vie quotidienne et d'éducation pour une vie saine et de prévention du VIH/SIDA. La stratégie doit s'appliquer à toute une gamme de problèmes sanitaires et sociaux du VIH/SIDA, à l'hygiène personnelle, de la nutrition aux stupéfiants, et examiner dans le cadre d'activités destinées à développer les aptitudes à la vie quotidienne telles que la communication, la coopération et la solution des problèmes.

La réussite de cette stratégie permettrait de mettre en place des dispensaires dans des écoles et d'engager des infirmiers pouvant intervenir dans un cas d'urgence. Elle permettrait également l'amélioration de la santé des filles à l'école, et par ricochet les inscriptions massives. A Bukavu, cette stratégie a résolu beaucoup de problèmes au Lycée WIMA où les gestionnaires ont renforcé le dispensaire scolaire en médicaments et en équipement d'urgence.

d) Promouvoir le sport à l'école.

Cette stratégie permet aux filles de pratiquer le sport au même pied d'égalité que les garçons et cela contribue à la parité dans les inscriptions massives. Etant donné que le sport était réservé aux garçons dans beaucoup d'école, la participation des filles remet en question les stéréotypes sexistes et des aptitudes profondément ancrées. Au fur et à mesure que les athlètes de sexe féminin sont mieux reconnues, elles servent de modèle aux autres filles. Nul ne peut s'en douter du revenu potentiel que ces dernières ramènent dans le pays et sur le plan mondial. Le sport donne aux filles l'occasion de prendre des responsabilités tout en renforçant leur confiance et leur estime de soi. En faisant du sport, les filles apprennent à établir des relations sociales grâce aux réseaux ainsi créés, de nouvelles possibilités s'offrent à elles, ce qui leur permet de s'engager davantage dans la vie scolaire et communautaire.

Pour y parvenir, les écoles doivent être dotées des salles de gymnastique et des terrains de jeu bien équipés tenant compte de l'égalité des chances.

e) Assouplir l'enseignement.

Les enfants sont souvent exclus de l'école en raison des responsabilités familiales ou des tâches domestiques qui leur incombent. Nul ne peut s'en douter que ce problème touche plus les filles que les garçons. L'on pouvait s'inspirer de l'exemple du Bangladesh où les autorités locales ont accordé la priorité aux filles et dont leur exemple a inspiré de nombreux pays. L'horaire est souple ; les classes, qui durent deux heures par jour, sont organisées six jours par semaine, mais le moment de la journée consacré à l'étude est choisi par les parents et le calendrier scolaire s'ajuste aux besoins locaux, à l'instar des récoltes, etc.153(*)

f) Expliquer en langue locale.

Lorsque la langue d'enseignement n'est pas la langue maternelle de l'enfant, certains d'entre les écoliers sont souvent plus défavorisés pour non adaptation aux milieux sociaux extérieurs à leur famille immédiate. La difficulté peut se poser en RDC où il y a plusieurs dialectes. Mais au besoin, l'on devait procéder à l'explication en langue nationale de la région où les enfants se trouvent, et pour les écoles du milieu rural, l'explication devait se tenir en langue maternelle de l'enfant afin de s'assurer que l'enfant s'est imprégné des nouvelles connaissances apprises. Au Pérou et au Rwanda, l'enseignement du degré élémentaire (1ère année surtout), se fait d'abord en langue maternelle. Pour la suite, les enfants apprennent en espagnol, deuxième langue du pays, pour le Pérou.154(*)

B. Les stratégies à l'extérieur de la salle de classe.

Ces stratégies s'articulent autour de la mise sur pied des statistiques ventilées par sexe sur l'éducation, l'adoption des mesures spéciales pour atteindre les filles les plus désavantagées, l'ouverture des écoles plus proches du domicile des enfants, la garantie de la sécurité des écoliers, etc.

a) Réunir des statistiques ventilées par sexe sur l'éducation.

Ces statistiques, on ne le dira jamais assez, doivent porter notamment sur les résultats scolaires aux niveaux primaires, secondaire et supérieur. Elles doivent servir d'indicateur sur le taux de scolarisation des filles et des garçons. Ces données sont essentielles pour l'amélioration de la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage, et pour mesurer les progrès accomplis vers la réalisation des OMD. Outre la ventilation des statistiques par sexe, les données devraient, si possible, être ventilées par facteur notamment la situation géographique urbaine et rurale, la situation géographique de la famille (famille pauvre, famille riche), la situation des enfants handicapés, des enfants des peuples autochtones et le niveau d'éducation de la mère. L'analyse des données de ce type permet, à titre d'exemple, de comprendre comment la pauvreté d'un enfant et son origine ethnique peuvent aggraver les difficultés auxquelles un enfant se heurtait déjà à cause de son sexe.

b) Adopter des mesures spéciales pour atteindre les enfants les plus désavantagés.

L'analyse des rapports tout au long de notre recherche prouve que les enfants des milieux ruraux et ceux des familles pauvres, sont les plus souvent victimes de discrimination et d'exclusion, et particulièrement les filles qui souffrent souvent des multiples désavantages en regard de leur sexe. Plus une fille est désavantagée, plus il est important que le système éducatif l'aide en adoptant des mesures spéciales, plutôt que de supposer qu'elle prendra en marche le train de l'éducation pour tous.

c) Ouvrir des écoles plus proches du domicile des enfants.

Dans un pays comme la RDC où la guerre et l'insécurité n'ont toujours pas cessé, les enfants ont une difficulté majeure de se déplacer à une longue distance pour aller à l'école dans les zones insécurisées. Particulièrement, les jeunes filles sont les plus concernées par les multiples violences exercées sur elles et notamment le viol et l'enlèvement pour servir des rançons au d'esclaves sexuelles. A cet effet, l'expérience du Burkina Faso pourrait servir d'exemple. Ce pays, tenant compte du fait qu'il ait peu de chances que les filles aillent à l'école si elles se trouvent loin de chez elles à cause d'éventuels problèmes de sécurité sur le chemin, a créé un réseau « d'écoles satellites ». Il s'agit de petites écoles n'offrant que les trois premières classes, ce qui permet aux jeunes enfants (qui commencent l'école à 7 ans) d'acquérir leur première expérience de l'école dans leur village ou à proximité. Depuis leur création en 1995, plus de 100.000 filles et garçons ont fréquenté ces 229 écoles satellites. Comparés aux élèves qui fréquentent le système scolaire classique, les enfants qui achèvent le cycle de ces écoles satellites ont un meilleur niveau en écriture, en lecture et en mathématique, avec des taux de réussite une fois et demie, voire deux fois supérieurs. Ces écoles affichent également le taux de rétention de près de 95 pour cent. Ces résultats positifs s'expliquent par un certain nombre de facteurs, notamment l'enseignement en langue locale, ce qui accélère l'apprentissage, la motivation des parents et un nombre d'élèves par enseignant plus faible que dans les autres écoles (25 élèves par enseignant dans les écoles satellites contre 48 élèves par enseignant dans les autres écoles).155(*)

d) Garantir la sécurité des écoliers.

Cela signifie qu'il faut non seulement que les abords de l'école soient sûrs, mais aussi les locaux eux-mêmes doivent inspirer confiance. L'éducation est un facteur essentiel quant elle est de bonne qualité mais elle ne remplit pas son rôle quand elle est dispensée dans un environnement marqué par la violence. Lorsque les écoles sont associées à une violence sexuelle ou physique, ou encore à une corruption exagérée, l'accès des filles à l'éducation s'en ressent car il est évident que les parents hésiteront à les inscrire dans de tels établissements.

De même, l'accès à l'eau potable et installation des latrines est un atout important pour la santé des élèves. Les toilettes des garçons doivent être séparées de celles des filles pour éviter la promiscuité. L'eau contribue davantage à l'assainissement des écoles à côté de l'électricité et de la peinture adoptée, ces trois facteurs permettent aux élèves d'éviter des maladies nosocomiales qu'on attrape dans un environnement malsain où l'on passe la plupart de son temps.

e) Faire participer la population locale.

Appelé encore « développement endogène », cette stratégie permet à la population locale de s'approprier tout projet de développement qui est élaboré dans leur intérêt. Cela étant, la campagne destinée à l'inscription massive des enfants à l'école, tout comme la construction des nouvelles écoles dans les milieux devaient montrer à la population locale, à travers les chefs locaux, le bien fondé des activités en cause. Cela permettrait une solution de plusieurs problèmes liés au milieu respectif.

La participation locale pourrait alléger le travail domestique qui fait que beaucoup de filles restent à la maison pour aider aux tâches ménagères. En donnant aux communautés ou aux groupes des femmes des équipements tels que des moulins à céréales, des décortiqueuses, des charrettes, des jerrycans pour la conservation de l'eau, on peut alléger la charge de travail et libérer les filles qui pourront ainsi fréquenter l'école.

Il en va de même lorsque les enfants ne sont pas scolarisés parce qu'ils doivent aller tirer l'eau d'un puits traditionnel ou à une pompe éloignée ; la création de points d'eau peut soulager, tout en provisionnant en eau salubre l'ensemble de la communauté.

Quoi qu'il en soit, le droit de l'enfant à l'éducation étant à la fois programmatoire et à réalisation progressive, les stratégies ci-avant développées ne sont pas cumulatives pour un pays comme la RDC. Le gouvernement devra procéder à une analyse des obstacles particuliers que les élèves, et particulièrement les filles, doivent surmonter avant d'opter le train de mesures le plus approprié.

Toutefois, pour la RDC, rendre l'éducation gratuite et obligatoire est la pierre angulaire de tout programme national visant à éliminer les disparités entre les sexes dans l'éducation et à atteindre l'objectif de l'éducation universelle. Cela résoudrait un grand nombre de problèmes pour les parents qui sont confrontés à des difficultés économiques qui les obligent à faire un choix et qui décident enfin de compte d'envoyer les garçons à l'école à la mercie des filles. Ainsi, l'élimination des frais scolaires ou l'offre d'un soutien financier aux familles dont les filles sont scolarisées, ainsi que l'explication des avantages qui accompagnent la scolarisation des filles, revêtent à ce égard une importance capitale. Pour y parvenir, une certaine émulation doit guider les dirigeants congolais en s'inspirant des progrès des autres pays tout en respectant les engagements par eux pris au niveau international (section 3ème).

Section 3ème : Inspiration des progrès des autres pays et le respect des

engagements internationaux.

Nous allons jeter un regard sur les stratégies mises en place par le Rwanda et le Kenya (§1) avant de faire allusion aux engagements internationaux (§2).

§1. Les stratégies mises en place par le Rwanda et le Kenya.

Nous allons aborder la situation du droit à l'éducation et sa mise en oeuvre dans les deux pays dans une approche relative à l'adieu aux frais de scolarité.

A. L'adieu aux frais de scolarité au Rwanda.

Le Rwanda dont l'histoire récente a été marquée par le génocide de 1994, est en totale reconstruction depuis plusieurs années et le nouveau pouvoir rwandais a fait de l'éducation une priorité, poursuivant fidèlement les objectifs internationaux.156(*)Le pays a enregistré des sérieux progrès dans la scolarisation primaire, mais de graves problèmes subsistent dans ce pays caractérisé par une forte densité de population rurale et un nombre record d'enfants orphelins. Comment ce pays est-il parvenu à se tirer d'affaires ?

La politique éducative au Rwanda est entièrement alignée sur les OMD et la lutte contre la pauvreté. L'amélioration de l'éducation figure parmi les objectifs prioritaires du dernier DSRP. Le pays a, en outre, intégré dans sa politique le programme d'éducation pour tous et était en voie d'être élu par la FTI en 2006.

Depuis la fin du génocide, des efforts importants ont été déployés dans le but d'atteindre la scolarisation primaire universelle, tout en atteignant un niveau de parité de genre exceptionnellement élevé par rapport au reste de l'Afrique. Ainsi, le Rwanda avait déjà atteint la parité filles/garçons dans le cycle primaire, tandis que son taux net de scolarisation primaire atteint 93,5% en 2005.

Même si la politique du gouvernement vise la gratuité de l'enseignement primaire, les ménages doivent assumer une partie des frais scolaires, dire mieux les subsides au minerval en primaire qui sont passés de 300 FRW en 2004 (soit 200 FC) à 1.000 F RW en 2005 (soit 600 FC). Le Rwanda ne disposant pas d'un grand nombre d'enseignants, a adopté la politique d'importer sa main d'oeuvre de l'extérieur et principalement de la RDC. Un aspect important dans la qualité de l'enseignement est l'existence d'un programme scolaire actualisé, accompagné de manuels et du matériel pédagogique approprié. Ce programme est dispensé dans trois langues à savoir le Kinyarwanda, le Français et l'Anglais.157(*)

Le pays a réussi grâce à sa transparence dans la gestion des financements et de l'aide reçus de la communauté internationale. En plus, il a instauré le système des banques dans la gestion des salaires des enseignants et affecte depuis 2000 plus de 15% de son budget national à l'éducation, et de surcroît, il tend à informatiser la plupart de ses écoles.

Selon les Nations Unies, le Rwanda compte aujourd'hui plus de 2000 écoles primaires qui accueillent plus de 1,5 millions d'enfants. Le taux net de scolarisation primaire a sensiblement augmenté ces dernières années. A ce rythme-là, le pays devrait atteindre le premier indicateur de l'OMD 2, à savoir la scolarisation universelle en 1ère année primaire. L'objectif 3 est quant à lui atteint en ce qui concerne la parité d'accès en primaire.158(*)

Cet exemple devrait inspirer la RDC, surtout en matière de gestion des fonds publics et encore que le Rwanda demeure également un pays rangés parmi les pays pauvres de la planète.

B. L'adieu aux frais de scolarité au Kenya.

Au Kenya, il y a cinq ans l'enseignement primaire se heurtait à des problèmes sérieux comme ceux de la RDC. Cette situation défavorisait plusieurs enfants plus vulnérables en raison de la pauvreté et surtout pour ceux dont les parents sont morts du SIDA. Avant 2003, les frais scolaires étaient alourdis par le coût des cahiers, des uniformes et examens, et les responsabilités familiales, telles que les soins à apporter à des parents malades continuaient d'empêcher des familles pauvres d'une grande partie du Kenya d'envoyer leurs enfants à l'école comme dans la plupart des pays en développement.

L'UNICEF indique qu'à KIBERA par exemple, le plus gros bidonville de Nairobi, la plupart des parents n'avaient pas les moyens d'inscrire leurs enfants à l'école. Avec un revenu mensuel moyen d'environ 27 dollars, une somme qui doit servir à payer le loyer ; la nourriture, l'eau et les soins de santé, il leur était bien difficile de trouver l'argent pour la scolarisation de leurs enfants. Il était donc difficile pour un parent d'un tel rang, de payer les 133 dollars d'inscription, sans parler des 27 dollars que coûte l'uniforme de l'école159(*). La question la plus importante est celle de savoir alors comment le Kenya est-il parvenu à se tirer du gouffre des frais scolaires ?

Il est important de noter que le Kenya n'a pas connu un régime politique aussi instable comme celui de la RDC. Néanmoins, ce pays est compté parmi ceux de la région où le nombre d'orphelins du SIDA, affectés non seulement par la pauvreté mais aussi par la stigmatisation sociale et la maladie, augmente rapidement. Et pourtant, en dépit de cet état de chose, les enfants étaient prêts à aller à l'école pourvu que l'on supprime les frais de scolarité.

Cette expérience a été une réalité au Kenya. Depuis janvier 2003, plus d'1,3 million d'enfants sont allés à l'école pour la première fois dans le cadre d'une politique d'éducation primaire gratuite pour tous. La suppression des frais scolaires a fait passer les inscriptions à l'école primaire publique nationale de 5,9 millions à 7,2 millions d'élèves.

Des expériences similaires ont été rapportées au Malawi, en République-Unie de Tanzanie et en Ouganda. Le tableau qui suit illustre davantage ce qui vient d'être énoncé160(*)

Tableau récapitulatif

Pays

Nombre d'inscriptions avant la suppression des frais de scolarité.

Nombre d'inscriptions après la suppression des frais de scolarité.

KENYA

5,9 millions

7,2 millions (augmentation de 22%, soit 1,3 million, durant la 1ère semaine de 2003)

MALAWI

1,9 Million

3 millions

OUGANDA

2,5 Millions (1997)

6,5 millions (2000)

Rép-Unie de Tanzanie

1,4 Million

3 millions

Cette montée en flèche du nombre d'inscriptions au Kenya n'est pas allée sans problèmes. L'Ecole AYANI par exemple, a enregistré 100% du nombre d'inscriptions et, comme beaucoup d'établissements du pays, a souffert d'une pénurie de pupitres, de papiers et de fournitures scolaires. Dans une salle de classe prévue pour 35 élèves, d'un coup on y a retrouvé 70 élèves.

Face à cette situation, le ministère Kenyan de l'éducation en collaboration avec l'UNICEF, a lancé l'initiative dite « pour une école primaire adaptée aux enfants ». Cette initiative vise d'améliorer la qualité de l'enseignement, de sorte qu'une fois que les enfants ont commencé les classes, ils y restent et y acquièrent les compétences de base de l'enseignement primaire. Ainsi, le pays est parvenu à rendre effectif l'enseignement primaire gratuit et obligatoire grâce aux efforts nationaux et, surtout pour avoir été partie à l'équipe de 20 pays qui ont bénéficiés les avantages de la FTI. La crédibilité du Kenya en face de la Communauté internationale a permis à la Banque Mondiale, le Department for International Development du Royaume-Uni et l'UNICEF de fournir les livres ainsi que du matériel d'éducation et des équipements récréatifs. Cela a permis en plus aux enseignants qui avaient été formés en 2002 de transformer les classes de base de premier niveau en un environnement mieux adapté et qui stimule l'apprentissage. L'UNICEF a en plus contribué à la formation de quelque 1.000 enseignants et il en a formé environ 5.000 de plus durant le premier semestre 2003.

Cette expérience montre bel et bien que la RDC a du pain sur la planche. Il ne suffit pas de consacrer la gratuité des frais scolaires dans la Constitution. Il faut en plus tenir compte de plusieurs paramètres comme ceux rencontrés au Kenya et au Rwanda d'une part, et ceux envisagés en terme de stratégies aux difficultés qui affectent l'éducation en RDC. A côté de cela, le respect des engagements pris au niveau international demeure d'une importance capitale.

§2. Le respect des engagements pris au niveau international.

Point n'est besoin de revenir sur tous les engagements internationaux pris par la RDC en matière d'éducation. Néanmoins, il sied de rappeler qu'il y a à peine 7 ans depuis que 189 Etats s'étaient réunis au siège de l'ONU pour mettre sur pied la déclaration du millénaire. Au cours de la même année, 164 gouvernements, ainsi que des organisations partenaires du monde entier, prenaient ensemble l'engagement de développer spectaculairement les possibilités d'éducation offertes aux enfants, aux jeunes et aux adultes à l'horizon 2015. Tel avait été l'engagement des participants au Forum mondial sur l'éducation, tenu à DAKAR du 26 au 28 avril 2000, à l'occasion ils ont fait de cet engagement une vision globale de l'éducation ancrée dans les droits de l'homme, réaffirmant l'importance de l'apprentissage à tous les âges et soulignant la nécessité de mesures spéciales pour atteindre les groupes les plus démunis, les plus vulnérables et les plus défavorisés de la société.161(*)

Nous allons focaliser notre attention sur la stratégie d'accélération : 25 d'ici 2005, et le séminaire international sur l'Abolition des frais scolaires.

A. La stratégie d'accélération dite 25 d'ici 2005.

Quoique antérieure à notre époque, cette stratégie revêtait une importance capitale et contribuerait à l'amélioration de l'enseignement primaire en RDC si les autorités étaient engagées à respecter les engagements pris.

Pour les 24 ministres de l'éducation et d'autres personnalités éminentes de pays de l'Afrique de l'Ouest qui étaient réunis pour débattre des investissements les plus efficaces pour inciter les garçons et les filles à se rendre à l'école, les avantages de l'éducation sont incontestables. Comme l'a observé un délégué de la Sierra Leone, «  nous savons d'expérience que l'ignorance tue ».162(*)

L'UNICEF et la Banque Mondiale avaient invité à Ouagadougou (Burkina Faso) en 2004, des ministres et spécialistes de l'éducation pour qu'ils s'engagent à nouveau à atteindre l'objectif de l'éducation pour tous. Avant même qu'ils ne s'assoient à la table de conférence, une bonne partie des ministres avaient déjà signé la Déclaration de Ouagadougou qui reconnaît l'importance de l'éducation des filles pour le développement de leur pays, et qui demande aux gouvernements de s'engager à redoubler d'efforts pour scolariser autant de filles que de garçons.

Les 25 pays participants163(*) ont été sélectionnés parce qu'ils répondaient à au moins un des critères suivants: faible taux de scolarisation des filles, différence d'au moins 10% dans la scolarisation des garçons et filles pour le cycle primaire, présence d'au moins un million de filles non scolarisées, bénéficiaires de l'Initiative de la Banque Mondiale pour l'accélération de l'éducation pour tous et frappés de plein fouet par des crises qui affectent la scolarisation des filles, comme le VIH/SIDA ou des conflits armés, entre autres.

Etant entendu que la cible basée sur l'égalité des sexes était censée être atteinte dans l'enseignement universelle en 2005, l'UNICEF a estimé que si l'on ne s'intéressait pas aux besoins des filles en particulier, on ne parviendra pas à atteindre l'objectif d'une éducation primaire universelle ; ce qui l'a amené à lancer « l'initiative 25 d'ici à 2005 ». Le but n'était pas de remplacer les initiatives et efforts existants, mais de les compléter et de les renforcer pour progresser plus rapidement dans ce secteur de l'éducation des filles.

Malheureusement, après l'échéance, la RDC n'est toujours pas en même de respecter encore une fois cet engagement. Il en est de même de celui de BAMAKO pris en 2007 lors du séminaire international sur l'abolition des frais scolaires (B).

B. Le séminaire international sur l'abolition des frais scolaires.

Ce séminaire tenu à BAMAKO au Mali du 19 au 20 juin 2007 avait réuni plus de 23 pays164(*) dont la RDC. Initié par l'Association pour le développement de l'éducation en Afrique (ADEA), l'UNICEF, la Banque Mondiale en collaboration avec le ministère de l'Education national du Mali, cette rencontre a consisté en un échange d'expériences et a abouti à la conclusion selon laquelle : " les frais scolaires doivent être supprimés parce qu'ils écartent de l'école de nombreux enfants et la plupart de ceux exclus comptent parmi les plus vulnérables de nos sociétés".

A l'ouverture des travaux, le directeur exécutif de l'ADEA, Monsieur Mamadou NDOYE, a précisé que la plupart de 77 millions d'enfants n'ayant pas accès à l'éducation proviennent des familles les plus pauvres et les plus démunies. Or, cette éducation est nécessaire aux enfants pour acquérir des compétences, avoir des perspectives plus larges de promotion, bénéficier de meilleures opportunités de revenus et avoir des chances de briser le cycle inter-génération.165(*)

En fin de compte, les participants se sont accordés en signant une déclaration énonçant que l'accès de tous les enfants à l'école est un droit fondamental et essentiel auquel souvent les frais de scolarité constituent une barrière pour l'accès des enfants surtout des filles.

* 116 A titre d'exemple, Le gouvernement de Transition issu de l'accord Global et inclusif a mis sur pied un plan

pour l'éducation. Malheureusement, il a connu quatre différents ministres de l'éducation qui se sont

succédés en moins de trois ans ; ce qui ne permet évidemment pas de politique stable en la matière.

* 117 Nous soulignons que l'UNICEF a lancé cette campagne en 2004 à l'Est de la RDC pour encourager

l'inscription des filles à l'âge scolaire.

* 118 La RDC a accédé, fin juillet 2003, au point de décision de l'Initiative PTTE, ce qui a réduit le service de la

dette extérieure d'environ 40% pendant la période 2003-2006, soit environ 150 millions $ US en moyenne

par an.

* 119 OCDE, Perspectives économiques en Afrique, Rapport 2005-2006, RDC, doc. BAFD/OCDE 2006. pp. 244

et 245, disponible sur www.oecd.org

* 120 Amnisty International, cité par J.B. HABIBU, (dir), « La Réhabilitation des victimes de la torture et autres

violences : en particulier le droit à la santé » in Prévenir la torture et autres traitements cruels, inhumains ou

dégradants : mission impossible ? Mélange en mémoire de Serge MAHESHE et Pascal KABUNGULU,

Bukavu, éd. ACAT, p. 232.

* 121 Les Cours et Tribunaux, civils et militaires, appliquent les traités internationaux dûment ratifiés, les lois ainsi

que la coutume pour autant que celle-ci ne soit pas contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs.

* 122 Est puni d'une servitude pénale d'un mois au maximum ou d'une amende ne dépassant pas 500z ou d'une de

ces peines seulement, en violation de l'art.116 ci-dessus, le chef de famille qui ne remplit pas l'obligation

scolaire prévue par la présente Loi, sauf preuve du refus justifié d'accès à ses enfants ou de l'inexistence

d'un établissement d'enseignement dans un rayon de cinq kilomètres de son lieu de résidence, ou en cas

d'indigence dûment constatée. L'art.116 quant à lui prévoit que : « Le chef de famille est tenu de satisfaire à

l'obligation scolaire, en confiant ses enfants, soit à un établissement public d'enseignement, soit à un

établissement privé agréé d'enseignement. »

* 123 M.R. DRAGO « La protection des droits économiques et sociaux en France », cité par J.B. HABIBU, op.cit,

p. 239.

* 124 J.B. HABIBU, op.cit, p. 240.

* 125 Centre de Recherche et d'Information pour le Développement, DESC, vers la justiciabilité internationale,

disponible sur http://www.Crid.asso.fr/ chantiers /desc.html.

* 126 OCDE, Perspectives économique en Afrique, Rapport 2005-2006, RDC, doc BAFD/2006, pp. 244-245

disponible sur www. oecd.org/dev/publication.

* 127 Rapport National de suivi de progrès pour la RDC 2004 .

* 128 C'est nous qui soulignons.

* 129 Nous avons fait allusion à ce fait dans le point relatif aux obstacles sociaux du droit à l'éducation en RDC.

* 130 Banque mondiale, op.cit., p. 122

* 131 UNICEF, Enquête nationale sur la situation des enfants et des femmes, Rapports MICS2, 2001, p. 7

* 132 UNICEF, op.cit., p. 8

* 133 UNICEF, «  Résultats de la 4ème édition de la campagne des inscriptions massives des enfants à l'école »,

Rapport, année scolaire 2007-2008, p. 3

* 134 Le district d'ITURI n'est pas une province mais est aligné dans les indices en raison du grand nombre

d'écoles qu'il renferme.

* 135 J. COMBACAU et S. SUR, Droit International Public, 2ème éd., Paris, Mont chrétien, 1995, p. 23.

* 136 CWBCI, op.cit, p.18

* 137 En Français : Initiative de mise en oeuvre accélérée.

* 138 Efficience de l'aide à l'enseignement primaire(1), augmentation soutenue de l'aide à l'enseignement primaire

(2), politiques sectorielles dans le domaine éducatif (3), financement interne adéquat et durable pour

l'éducation (4) renforcement de l'obligation de rendre des résultats (5) et l'apprentissage mutuel au niveau

mondial sur ce qui fonctionne (6).

* 139 CWBCI, op.cit., p. 19

* 140 C'est nous qui soulignons

* 141 J. COMBACAU et S. SUR, op.cit., p.23

* 142 UNICEF, La situation des enfants dans le monde, 2004, p. 47.

* 143 RDC, Rapport national sur les OMD, op.cit, p.30.

* 144 RDC, Rapport National sur les OMD, op.cit p. 31.

* 145 C'est nous qui soulignons.

* 146 RDC, Rapport National sur les OMD, idem. p. 32.

* 147 RDC, Ibidem.

* 148 OCHA, Situation humanitaire au Sud-Kivu, Bukavu, 30 juillet 2008, Inédit

* 149 Division provinciale de l'EPSP, Rapport annuel 2006-2007

* 150 UCB, « Budget de la province ou du gouvernorat? La population du Sud-Kivu peut encore attendre (...),

Observation du CEGEC, Feuillet hebdomadaire d'informations divers, 02 juillet 2007.

* 151 UNICEF, Situation des enfants dans le monde, op.cit., 2004, p. 83.

* 152 Développer et améliorer sous tous leurs aspects la protection et l'éducation de la petite enfance, notamment

des enfants les plus vulnérables et défavorisés.

* 153 UNICEF, op.cit., p. 85.

* 154 Idem., p. 85

* 155 UNICEF, op.cit., p.86.

* 156 CWBCI, op.cit., p.31.

* 157 Banque Mondiale, op.cit., p.96.

* 158 CWBCI, op.cit, p.73.

* 159 UNICEF, op.cit, 2004, p.36.

* 160 UNICEF, Idem, p.35.

* 161 UNESCO, Rapport mondial de suivi sur l'EPT , 2008, p.3, disponible sur www.unesco.org

* 162 UNICEF, op.cit, 2004, p.3.

* 163 Afghanistan, Bangladesh, Bénin, Bhoutan, Bolivie, Burkina Faso, République Centre-africaine, Tchad, RDC,

Djibouti, Erytrhée, Ethiopie, Guinée, Inde, Malawi, Mali, Népal, Nigeria, Pakistan, Papouasie- Nouvelle

Guinée, Soudan, Turquie, République-Unie de Tanzanie, Yémen et Zambie.

* 164 Bangladesh, Benin, Burkina Faso, Burundi, Ethiopie, Ghana, Guinée, Haiti, Kenya, Lesotho, Liberia,

Malawi, Mozambique, Papouasie Nouvelle-Guinnée, RDC, Sénégal, Siérra Leone, Sri Lanka, Togo, Yémen

et Zambie.

* 165 Le Séminaire international sur l'abolition des frais scolaires, disponible sur www.maliweb.net

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