De ta tradition à la modernité: étude du manichéisme discursif dans noces sacrées de Seydou Badian. Essai d'analyse sociocritique.( Télécharger le fichier original )par Sylvère DUSABIMANA Université Nationale du Rwanda - Licence 2007 |
2.5. Les thèmesL'essor des études de thèmes, il faut le reconnaître, s'est déployé parfois dans une certaine confusion des concepts et des définitions. Ils sont étudiés par une discipline spécialisée appelée thématologie. Paul Van Tieghem écrit à propos des enquêtes thématologiques : « De pareilles études sont ou paraissent faciles et intéressantes, et nous comprendrons pourquoi l'on compte par centaines les dissertations de doctorat étrangères, les articles, où [...] un thème est étudié méthodiquement dans deux, dans plusieurs, dans la totalité des formes qu'il a reçues, de manière à amuser l'esprit [...] mais sans grande utilité pour l'histoire de la littérature » (1931 : pp. 87-88). Ce point se donne comme objectif d'étudier les thèmes majeurs dans Noces sacrées. Selon Raymond Trousson un thème est « l'expression particulière d'un motif, son individualisation ou, si l'on veut, le passage du général au particulier » (1981 : 22). 2.5.1. Le sacréLe sacré, opposé au profane, est une notion permettant à un groupe ou une société humaine de créer une séparation spirituelle et/ou morale entre différents éléments qui la composent, la définissent ou la représentent (objets, actes, idées, valeurs...). La dichotomie sacré / profane ne repose sur aucun fondement étymologique. Sacré signifie étymologiquement un objet de culte qui peut être mythologique ou théologique c'est-à-dire religieux ou idéologique. Est profane ce qui est situé hors du temple. Sacré et profane ont au moins en commun le fait d'être non religieux. À l'origine, le terme est utilisé dans les groupes humains basés sur l'initiation ou la révélation pour en décrire les éléments constitutifs et fondateurs, ainsi que tout ce qui leur est relié (manifestations, organisations, etc.). Par exemple, dans la plupart des religions le sacré désigne tout ce qui a trait au divin, à ses manifestations sur terre et au clergé qui organise son culte. Dans le christianisme, l'expression le sacré désigne spécialement l' Eucharistie. Cette notion est aujourd'hui utilisée de façon plus générale dans d'autres contextes : une nation peut définir comme sacrés ses principes fondateurs ; une société peut définir comme sacrées certaines de ses valeurs ; etc. Les anthropologues contemporains disent d'ailleurs que la notion de sacré est trop floue pour pouvoir être utilisée dans l'étude des religions. Les éléments du sacré sont généralement considérés comme intouchables : leur manipulation, même en pensée, doit obéir à certains rituels bien définis. Ne pas respecter ces règles, voire agir à leur encontre, est généralement considéré comme un péché ou un crime, réel ou symbolique : c'est ce qu'on nomme un sacrilège. La notion du sacré tel que le conçoit Mircea Eliade (écrivain et historien roumain) ne va pas être approfondi car le caractère de ce travail ne nous le permettrait pas. Plutôt nous allons déceler les éléments relatifs au sacré africain que recèle Noces sacrées comme son titre l'indique. Mircea Eliade étant spécialiste de l'histoire des religions et de l'étude des mythes nous intéresse, en ce sens qu'il étudie le sacré et le mythe dans son acception générale. Le sacré est le thème principal dans ce roman. Quels sont les éléments du sacré rencontrés dans Noces sacrées ? Nous allons relever quelques uns à titre d'illustrations : « Chaque fois que je rencontrais Soret dans une de ces cases sacrées [...], il priait face au même masque, un masque humain surmonté de cornes, c'était N'tomo » (N.S. : 13). Dans la pensée de Besnier vint une idée mais perplexe : « Je crus qu'il s'agissait du plus haut dans la hiérarchie des dieux. Je le choisis pour cible » (N.S. : 13). Nous avons également évoqué que N'tomo vivait dans un sanctuaire et à ses côtés vivaient des dieux et des déesses. En interdiscurisivité avec la mythodologie gréco-romaine, c'est Badian qui dit : « Celui auquel vous vous êtes attaqué, N'tomo, appartient à la jeunesse. Il est ni dieu de haine, ni dieu de sang. Par certains côtés, il rappelle Dionysos » (N.S. : 27). Souvent Besnier est près pour un blasphémateur car dans le coeur des gens, le tumulte disait : « on a violé notre sanctuaire » (N.S. : 86). Le sanctuaire étant dans ce contexte, la demeure des ancêtres, logis des dieux et des déesses. Les cibles étaient ici Besnier et sa fiancée Baune. Sans trop nous étendre, nous disons que le thème du sacré court dans tout le roman. En quelque sorte, l'ironie de l'écrivain montre les similarités des religions (Soret qui prie devant un masque) prouvant ainsi le caractère religieux du monde romanesque peint par Badian. |
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