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Les droits de l'employeur cotisant dans ses relations avec l'URSSAF: opposabilité de la doctrine et application du rescrit en matière sociale

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par Fathi ALI MOHAMED
Université de Nantes - Master 2 Droit social 2006
  

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A. L'opposabilité des circulaires comme des décisions individuelles

Bien que la garantie contre les changements de doctrine soit initialement destinée à trouver son usage dans le contentieux relatif aux circulaires et instructions émanant des organismes de sécurité sociale, son application est plus large encore. En effet, la garantie s'applique pareillement aux décisions individuelles prises par des organismes de recouvrement locaux que celles-ci soient expresses ou tacites51(*). Cependant, l'opposabilité de la doctrine n'est, traditionnellement, invocable qu'à l'encontre de l'administration qui en est à l'origine, c'est à dire qu'une entreprise ayant plusieurs établissements dans le ressort de différentes URSSAF ne peut, pour échapper à un rehaussement de cotisations sociales décidé par l`une, se prévaloir de la décision prise par l'autre pour une situation similaire52(*).

A cet égard, le régime de la garantie contre les changements de doctrine, s'il a pour origine l'opposabilité des circulaires et instructions d'applications nationales, trouve à présent essentiellement à s'appliquer dans le contentieux touchant aux décisions individuelles prises par les URSSAF.

C'est sans doute en constatant le développement des décisions individuelles prises par les organismes de recouvrement que le parlement a voté la loi du 11 février 1994, conférant aux décisions prises par l'URSSAF quant à l'assujettissement des travailleurs indépendants une valeur particulièrement importante53(*), avec cependant une efficacité particulièrement faible54(*). L'article L. 243-6-3 du Code de la sécurité sociale permet désormais au cotisant de solliciter une décision de l'URSSAF à laquelle il est affilié. Une fois obtenue, cette décision ne vaut que pour le cotisant.

B. La nécessité d'une décision dépourvue de réserve

Le demandeur qui souhaite faire jouer la garantie contre les changements de doctrine en sa faveur doit prouver l'existence d'une véritable doctrine de l`administration quant à sa situation, c'est à dire d'une prise de position claire, sans réserve et dépourvue de toute ambiguïté55(*), et doit également démontrer que sa situation entre précisément dans le cadre de la prise de position de l'administration,. De plus, dans l'hypothèse d'un contentieux relatif à une situation qui a déjà cessé, l'usager devra, non seulement établir que la prescription n'est pas écoulée, mais également démontrer qu'il existait à l'époque une doctrine administrative dont il aurait dû bénéficier.

Le bénéfice de la garantie contre les changements de doctrine pour l'usager rencontre une autre difficulté non négligeable. Un usager ne peut se prévaloir de la garantie contre les changements de doctrine lorsque la décision comporte une réserve explicite quant à l'interprétation qui pourrait en être retenue par les tribunaux56(*), et ce, quand bien même la circulaire ou l'instruction se prononcerait clairement et sans ambiguïtés. Dès lors, si l'administration souhaite se prémunir contre les risques qu'engendre pour elle la garantie contre les changements de doctrine, il lui sera simplement nécessaire, en pratique, d'accompagner ses décisions d'une réserve d'interprétation. Cette situation, préjudiciable à l'usager est d'autant plus regrettable que celui-ci n'a, pour l'heure, aucun moyen de s'opposer à cette pratique. Bien que cette solution jurisprudentielle apparaisse à première vue particulièrement réductrice des droits du cotisant dans la mesure où elle conduit à reconnaître une relation profondément déséquilibrée dans laquelle les droits de l'un sont fonction du bon vouloir de l'autre, elle n'est pour autant pas dénuée de sens. En effet, cette jurisprudence s'explique par le fait que le mécanisme de la garantie contre les changements de la doctrine commande de faire prévaloir, si nécessaire, la sécurité juridique de l'usager à l'application de la loi ou du règlement et en raison de la gravité de cette mesure, il est nécessaire que l'usager ait été dans une situation dépourvue de toute équivoque quant à la connaissance de ses droits.

Chapitre 2. Les ambitions de la réforme: garantir la protection du cotisant face aux changements de doctrine

Depuis quelques années, la simplification du droit semble être l'un des leitmotiv du Gouvernement. La loi du 9 décembre 2004 a en effet été précédée d'une première loi de simplification du droit en date du 2 juillet 2003 ainsi que de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 du 18 décembre 2003 ayant toutes deux comme objectif l`amélioration des relations entre les cotisants et les organismes de recouvrement et la simplification des obligations administratives des employeurs57(*).

Ayant fait le constat du fait que la sécurité juridique des cotisants n'était pas entièrement assurée par les textes en vigueur, le législateur a, par la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004, habilité le Gouvernement à établir par ordonnance un nouveau mécanisme de garantie contre les changements de doctrine.

L'ordonnance n° 2005-651 du 6 juin 2005, créant les articles L. 243-6-2 et L. 243-6-3 du Code de la sécurité a été la réponse à une réclamation insistante des cotisants ( Section 1 ), offrant à ceux-ci une sécurité renforcée mais imparfaite( Section 2 ).

* 51 CSS, art. L. 311-11 ou L. 243-6-3

* 52 Cass. Soc. 29 juin 1995, Sté Sacer c/ URSSAF du Nord-Finistère, Bull. civ. V, n°225, p. 163; D. 1996, Somm. p.44, obs. X. Prétot.

* 53 Sur la question, Voir J.-P. Chauchard, Le rescrit social, procédure d'interrogation de l'URSSAF, Dr. Soc. 1995, p. 642.

* 54 V. Alice Boucheret, Bilan de l'application de la procédure de rescrit social, dans La notion de travailleur indépendant, sous la direction de Jean-Pierre Chauchard, Université Paris I Panthéon Sorbonne, Centre de recherche de droit social, 1999.

* 55 De simples prescriptions destinées aux agents ne sauraient donc lier l'organisme. V. notamment: Cass. Soc. 12 nov. 1992, École nouvelle d'organisation économique et sociale c/ Urssaf de Paris, RJS 12/92, n° 1415.

* 56 Cass. Soc. 23 mars 1995, URSSAF de Lille c/ Banque Scalbert-Dupont, RJS 5/95, n°563.

* 57 La loi du 2 juillet 2003 est notamment à l'origine de l'harmonisation entre les différents régimes d'exonération de charges sociales alors que la loi du 18 décembre 2003 s'est plus attachée à éclaircir différentes procédures administratives.

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