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Les droits de l'employeur cotisant dans ses relations avec l'URSSAF: opposabilité de la doctrine et application du rescrit en matière sociale

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par Fathi ALI MOHAMED
Université de Nantes - Master 2 Droit social 2006
  

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Section 2. La sécurité juridique par l'opposabilité de la doctrine administrative

L' opposabilité de la doctrine administrative a pour conséquence de reconnaître à l'usager de bonne foi la faculté de se prévaloir des prises de positions de l'administration pour le passé, pour l'avenir, voire contra legem. L'opposabilité des circulaires et instructions n'est pas inconnue du droit français ( § 1 ) et est reconnue par la Cour de cassation ( § 2 ).

§ 1. La garantie contre les changements de doctrine en droit fiscal et le décret du 28 novembre 1983

A. La garantie contre les changements de doctrine issue du droit fiscal

Du point de vue du droit fiscal, la garantie contre les changements de la doctrine administrative résulte des dispositions issues, successivement, des lois du 28 décembre 195936(*), du 9 juillet 197037(*) et du 8 juillet 198738(*), codifiées aux articles L. 80 A et L. 80 B du Livre des procédures fiscales.

Les dispositions de ces articles offrent trois types de protection au contribuable. Premièrement, lorsqu'il est démontré que le contribuable a usé d'un texte conformément à l'interprétation admise par l'administration fiscale au travers de ses circulaires et instructions publiées, celle-ci ne saurait, suite à un contrôle, opérer un rehaussement en alléguant une interprétation différente39(*). D'autre part, lors d'un conflit relatif à l'interprétation de la loi fiscale opposant l'administration à un contribuable de bonne foi, ce dernier bénéficie d'une protection contre un rehaussement de l'imposition antérieure due lorsqu'il est avéré que l'interprétation sur laquelle reposait la décision initiale était admise par l'administration au moment des faits40(*). Enfin, le contribuable bénéficie également de la garantie contre les changements de doctrine dans les cas où l'administration fiscale, considérant une situation de fait, prend une décision fondée sur le droit fiscal41(*).

Bien que particulièrement développée, la garantie contre les changements de doctrine issue des articles L. 80 A et L. 80 B du Livre des procédures fiscales ne peut toutefois pas intervenir dans le contentieux touchant à la restitution ou au remboursement de l'impôt, son champ d'application étant strictement circonscrit aux litiges concernant un allègement ou une exonération d'impôt. De plus, le contribuable ne peut invoquer la garantie contre les changements de doctrine que lorsque l'interprétation de l'administration fiscale est suffisamment précise quant à l'attitude à tenir dans la situation à laquelle se rapporte le litige. Enfin, et caractéristique non négligeable, conformément à l'inspiration de l'article L. 80 B du LPF, instaurant un système de rescrit fiscal, le contribuable ne peut se prévaloir de l'interprétation du texte donnée par l'administration fiscale qu'à condition que celle-ci cible précisément la situation de fait dans laquelle il se trouve42(*). De plus, il est également nécessaire que la position de l'administration soit exposée précédemment au prélèvement, source du litige.

B. La garantie contre les changements de doctrine issue du décret du 28 novembre 1983

Le décret du 28 novembre 1983, s'inscrivant dans une perspective plus ample, a quant à lui, une ambition bien plus importante. En effet, selon le premier article de ce décret, « tout intéressé est fondé à se prévaloir à l'encontre de l'administration, des instructions, directives et circulaires publiées dans les conditions prévues par l'article 9 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, lorsqu'elles ne sont pas contraires aux lois et règlements. »43(*). D'application générale, et non pas réduites à une branche du droit comme cela est le cas pour les articles L. 80 A et L. 80 B du LPF, les énonciations de l'article 1er de la loi du décret du 28 novembre 1983, peuvent être invoquées par tout administré dans ses relations avec les différentes administrations y compris à l'égard des organismes de droit privé chargés de l'exécution d'un service public44(*),tel que les URSSAF par exemple, autant que les circulaires, instructions et directives en question soient conformes aux lois et règlements en vigueur et que leur publication soit fidèle aux dispositions de la loi du 17 juillet 197845(*).

Malgré la généralité des dispositions du décret du 28 novembre 1983, la portée de celui-ci a longtemps suscité la perplexité chez nombre d'auteurs46(*). La cause de cet embarras, tenait sans nul doute au fait que le décret semblait reconsidérer la distinction classique entre circulaires réglementaires et circulaires non réglementaires dans la mesure où le décret n'assujettissait l'opposabilité des circulaires et instructions à aucune condition autre que leur légalité et leur conformité à la loi du 17 juillet 1978.

La jurisprudence du Conseil d'État est venue apporter les réponses aux questions de la doctrine, précisant que malgré la généralité apparente du décret du 28 novembre 1983, un administré n'est autorisé à se prévaloir, à l'appui d'un recours en annulation, que d'une circulaire respectant la loi et le règlement47(*), d'une part et ayant, d'autre part, une valeur réglementaire48(*).

De son côté, la Cour de cassation, adopte une position voisine: comme le Conseil d'État, la Haute juridiction refuse de reconnaître au bénéfice de l'usager du service public la faculté de se prévaloir d'une doctrine administrative illégale49(*) et l'inclination de celle-ci va vers l'utilisation du décret du 28 novembre 1983 seulement lorsque la circulaire ou instruction en question est conforme à la loi et au règlement et qu'il lui est reconnue une valeur réglementaire50(*).

Bien que plus de vingt ans soient passés depuis la promulgation du décret du 28 novembre 1983, la Chambre sociale de la Cour de cassation n'a que rarement été confrontée à ce texte, ainsi, si elle a pu préciser quel était le type de circulaires qui étaient invocables, elle n'a jamais eu l'occasion de se prononcer sur l'identité de l'auteur de la circulaire. En effet, comme cela a été observé précédemment, la Cour de cassation s'est toujours refusée à reconnaître une quelconque valeur aux circulaires et instructions émanant du ministre chargé de la sécurité sociale. Or, l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 ne fait aucune distinction quant à l'auteur de la circulaire se contentant d'énoncer que « tout intéressé est fondé à se prévaloir, à l'encontre de l'administration, des instructions, directives et circulaires publiées (...), lorsqu'elles ne sont pas contraires aux lois et règlements ». Dès lors, le jour où la Chambre sociale de la Cour de cassation se trouvera en présence d'un contentieux dans lequel le décret du 28 novembre 1983 sera invoqué et mettant en jeu une circulaire ministérielle deux possibilités s'offriront à elles: s'en tenir à sa jurisprudence actuelle et refuser d'accorder une quelconque portée à la circulaire, ou recourir à la technique juridique classique selon laquelle le juge n'a pas à opérer de distinction là où la loi ne distingue pas.

§ 2. L'opposabilité de la doctrine reconnue par la Cour de cassation

* 36 Loi n° 59-1472.

* 37 Loi n° 70-601.

* 38 Loi n° 87-502.

* 39 V. art. L. 80 A al. 2 LPF.

* 40 V. art. L.80 A al. 1er LPF.

* 41 V. art. L. 80 B LPF.

* 42 Voir S. Austry, Garanties contre les changements de doctrine: confirmations et innovations, RJF 07/96, p. 478

* 43 Décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983, concernant les relations entre l'administration et les usagers, art 1er.

* 44 Les administrations de l'État, des collectivités territoriales et des établissements publics peuvent également être mises en cause.

* 45 Selon la loi du 17 juillet 1978, doivent faire l'objet d'une publication régulière selon les modalités par décret en Conseil d'État (décret n° 79-834 du 22 septembre 1979), d'une part, les directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles qui comportent une interprétation du droit positif ou une description des procédures administratives, d'autre part, la signalisation des documents administratifs.

* 46 Voir R. Chapus, Droit administratif général, Montchrestien, 15éme édition, 2001, t. 1, n° 687, p.516.

* 47 V. CE 18 mars 1992, Ville de Bayeux, Lebon, p. 662 et CE 16 juin 1986, Hennimann, Lebon, tables p. 464, RJF 8-9/86, n° 794.

* 48 CE 19 juin 1992, Département du Puy de dôme; AJDA 1992, p. 528; RFDA 1993, p. 689, concl. M. Pochard.

* 49 Cass. Soc. 20 octobre 1994, Urssaf de la Seine-et-Marne c/ SA Jeumont-Schneider, Bull. civ. V, p. 194, n° 286; RJS 12/94, n° 1451 (2ème espèce).

* 50 Cass. Com. 2 juillet 1991, Compagnie générale des eaux c/ Directeur général des Impôts, Bull. civ. IV, p. 172, n° 246.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe