Chapitre 2.2. : Les usines et moulins fondés en
titre
Les usines et moulins fondés en titre dont
l'activité a désormais cessé sont les plus nombreux sur
nos rivières non domaniales. En effet il s'agit ici des deux principales
caractéristiques que présentent la plus part des ouvrages
toujours existants sur le Thouet et la Sèvre Nantaise. Nombre d'entre
eux sont de construction antérieure à la Révolution, et la
quasi-totalité des moulins et usines est aujourd'hui en période
de chômage prolongé, c'est-àdire qu'ils ne tirent plus du
cours d'eau une quelconque force motrice. Cette situation de << paralysie
» des ouvrages constitue un état de fait qui, après des
années d'abandon et/ou d'oubli des pratiques qui étaient celles
des minotiers, tanneurs, et autre forgerons, résulte de l'absence de
manoeuvre des éléments mobiles des ouvrages. Ces
éléments mobiles telles les vannes ouvrières et les vannes
de décharge permettaient de toujours laisser passer une certaine
quantité d'eau, nécessaire aux moulins et usines situés en
aval.
Chaque site a évolué différemment, avec
une histoire qui lui est propre, cependant il est possible de retrouver
certains traits communs, souvent repris par la jurisprudence, pour en
déduire le droit applicable.
Ainsi le juge administratif a pu juger que les usines et
moulins fondés en titre perdaient cette qualité juridique
dès lors que la ruine ou le changement d'affectation était
constaté (voir infra). Au contraire, le simple délabrement ou
l'absence d'exploitation aussi prolongée qu'on le suppose ne sont pas
suffisant pour leur faire perdre ce fondement en titre.
93 Note de Pierre Sablière à l'AJDA 2004
page 2219 << Prises d'eau fondées en titre ou ayant une existence
légale ».
Enfin, la renonciation non équivoque est quant à
elle une des manières de faire tomber un droit d'eau, qu'il soit
fondé en titre ou sur titre.
Ces différentes hypothèses peuvent être
regroupées de manière à distinguer les cas d'usines ou de
moulins dont le fondement en titre est tombé (section 2.2.1.) et les cas
d'usines et de moulins dont le fondement en titre perdure (section 2.2.2.).
Section 2.2.1. : Les cas d'usines ou de moulins dont le fondement
en titre est tombé et les conséquences à en tirer
Il s'agit ici des usines et moulins entrant dans les
conditions jurisprudentielles évoquées plus haut (ruine,
changement d'affectation, renonciation, révocation par les pouvoirs de
police de l'eau). Ces ouvrages sont, de part leur situation, dépourvus
de tout fondement juridique, et ainsi rien ne justifie plus le maintient
d'éléments dans le lit de la rivière susceptibles
d'entraver son bon écoulement. Au contraire, un tel maintient se ferait
en contradiction avec l'obligation d'entretien du lit qu'ont les
propriétaires des fonds bordant les cours d'eau non domaniaux, puisque
le libre cours des eaux doit être assuré. Il convient dès
lors d'envisager quels sont les pouvoirs que les services de la police de l'eau
peuvent mettre en oeuvre (§ 2.2.1.1.) et de quelle manière les
collectivités territoriales peuvent intervenir (§ 2.2.1.2).
§2.2.1.1. / Les pouvoirs des services de la police de
l'eau
L'article L215-7 du code de l'environnement dispose que
« L'autorité administrative est chargée de la
conservation et de la police des cours d'eau non domaniaux. Elle prend toutes
dispositions pour assurer le libre cours des eaux ».
L'autorité administrative ici visé est le préfet, auquel
il revient depuis la Révolution d'exercer les pouvoirs de police
administrative de l'eau. L'article L214-3-1 dispose notamment que «
Lorsque des installations, ouvrages, travaux ou activités sont
définitivement arrêtés, l'exploitant ou, à
défaut, le propriétaire remet le site dans un état tel
qu'aucune atteinte ne puisse être portée à
l'objectif de gestion équilibrée de la
ressource en eau défini par l'article L211-1. Il informe
l'autorité administrative de la cessation de l'activité et des
mesures prises. Cette autorité peut à tout moment lui imposer des
prescriptions pour la remise en état du site,... ». Cet
article met à la charge du préfet le soin d'assurer le libre
cours des eaux. Il lui revient de mettre en oeuvre toutes les
prérogatives dont il dispose afin de réaliser cet objectif (mise
en demeure de rétablir le libre cours normal de la rivière,
etc...). L'objet de la police de l'eau est d'assurer le libre écoulement
de l'eau des cours d'eau non domaniaux. Elle porte donc sur les
opérations qui seraient susceptibles de réduire le volume d'eau
et donc la force motrice d'un cours d'eau et ainsi de nuire à la
répartition des eaux ou de modifier son débit. Cette police est
assurée en cherchant à préserver les droits de
propriété des riverains et à les concilier avec les
intérêts des différentes catégories d'utilisateurs
de l'eau des cours d'eau. Comme nous l'avons vu, c'est le préfet qui est
compétent dans le cadre de ses pouvoirs de police spéciale et non
le maire dans le cadre de la police générale, pour décider
que la commune doit assurer l'entretien et la manoeuvre des empellements d'une
installation hydraulique abandonnée94. Les maires peuvent
cependant, sous l'autorité du préfet, prendre toutes les mesures
nécessaires pour la police des cours d'eau95.
Le préfet doit en outre veiller à la
préservation de la salubrité publique conformément aux
prescriptions des articles L215-10 et L214-4 du code de l'environnement.
Le préfet fait appel à différents
services déconcentrés pour exercer la police de l'eau. Les
directions départementales de l'équipement (DDE), sont
chargées de la police de l'eau des cours d'eau domaniaux non navigables,
Les services de la navigation sont chargés des cours d'eau domaniaux
navigables, les directions départementales de l'agriculture et de la
forêt (DDAF) sont quant à eux chargés de la police des
cours d'eau non domaniaux. Enfin, les directions
départementales pour les affaires sanitaires et sociales (DDASS)
contrôlent la qualité des eaux brutes destinées à
l'eau potable ainsi que la qualité des eaux distribuées. Sur le
plan régional interviennent également les directions
régionales de l'industrie et de la recherche (DRIRE) et les directions
régionales de l'environnement (DIREN). En pratique cette multiplication
des services concernés est sources de confusions. Les contrôleurs
sont souvent aussi les « conseillers » des activités qu'ils
contrôlent.
94 Jugement du Tribunal Administratif de
Dijon, 15 avril 2003, Commune de Urzy contre préfet de la Nièvre,
publié à la revue juridique de l'environnement 2004, page 80.
95 Article L215-12 du code de l'environnement.
Cependant les collectivités territoriales ne sont pas
démunies face à de telles situations.
§ 2.2.1.2. / Les prérogatives des
collectivités territoriales et de leurs groupements
Le maire détient un pouvoir de police
générale96 et n'est pas habilité à
intervenir en matière de police spéciale de l'eau, cette
compétence étant exercée par le préfet, en ce qui
concerne la conservation et la police des cours d'eau non
domaniaux97. Le maire n'est habilité à intervenir en
matière de police spéciale de l'eau qu'en cas d'urgence. Il a par
exemple été jugé que le préfet commet une erreur de
droit en invoquant les pouvoirs de police générale du maire pour
décider que la commune devait assurer l'entretien et la manoeuvre des
empellements d'un ouvrage hydraulique abandonné98.
Au contraire, le maire est seul compétent pour
réglementer, pour des motifs de sécurité et de
salubrité publique, les baignades et la navigation sur un plan d'eau,
qui sans appartenir au domaine public sont ouvertes au public99.
Les collectivités territoriales et leurs groupements
ont aussi une place non négligeable en faveur de la protection des
écosystèmes aquatiques. Ainsi l'article L211-7 confit aux
collectivités territoriales et à leurs groupements la
maîtrise d'ouvrage des travaux d'intérêt
général (dans le cadre du SAGE s'il existe) visant « la
protection et la restauration des écosystèmes aquatiques
», ainsi que « l'aménagement d'ouvrages hydrauliques
existants ». Cet article permet aux collectivités
territoriales et leurs groupements d'intervenir dans le cadre d'une
déclaration d'intérêt général sur des fonds
appartenant à des propriétaires privés.
L'intervention peut ne pas nécessiter de
déclaration d'intérêt général lorsque les
travaux se font dont le cadre d'une convention avec le propriétaire de
l'ouvrage. Dans cette hypothèse l'administration accède sur la
propriété privée en accord avec le propriétaire, il
n'est donc plus besoin de tirer ce droit de l'intérêt
général préalablement déclaré.
96 Article L. 2212-2 du code général des
collectivités territoriales (CGCT).
97 Article L. 215-7 du code de l'environnement.
98 Jugement du tribunal administratif de Dijon, 15
avril 2003, n° 021426, Commune de Urzy contre préfet de la
Nièvre, publié à la revue juridique de l'environnement
2004, page 80.
99 Arrêt du Conseil d'Etat, 28 nov. 1980,
Commune de Ardres, publié au recueil Lebon 1980, page 449 et à
l'AJDA 1981, page 95.
Enfin le maire peut également, sous le contrôle
du préfet, prendre des mesures en matière de police de l'eau, et
ce en vertu de l'article L215-12 qui dispose que « Les maires peuvent,
sous l'autorité des préfets, prendre toutes les mesures
nécessaires pour la police des cours d'eau ». Dés lors
le maire peut être assimilé à « autorité
administrative au sens du code de l'environnement, et ce notamment lorsque ce
dernier pose que « L'autorité administrative est chargée
de la conservation et de la police des cours d'eau non domaniaux. Elle prend
toutes dispositions pour assurer le libre cours des eaux... ».
Le cas des ouvrages ne disposant plus de droits fondés
en titre est donc un des plus simple à régler puisqu'il rentre
parfaitement dans le cadre soit des pouvoirs de police administrative du
préfet, soit des prérogatives dont disposent les
collectivités en matière de protection des
écosystèmes aquatiques. Mais qu'en est-il des ouvrages dont les
fondements en titre perdurent ?
Section 2.2.2. : Les cas d'usines ou de moulins dont le fondement
en titre perdure et les conséquences à en tirer
Les ouvrages hydrauliques fondés en titre, comme nous
l'avons vu, ne perdent pas leur existence légale du fait de leur non
utilisation durant une période de temps même très longue,
ni du fait de leur délabrement ou de leur défaut d'entretien. De
même le changement de destination de l'usage de la force motrice (turbine
hydroélectrique remplaçant une roue entraînant une meule
à grain) n'a pas pour conséquence de faire tomber le fondement en
titre de l'ouvrage. Partant de ces constats, nombre des moulins fondés
en titre établit en bord de Sèvre mais aussi le long du Thouet
restent pourvus d'une existence légale. Il convient donc d'envisager les
pouvoirs dont disposent les services de police de l'eau (§ 2.2.2.1) mais
aussi les prérogatives des collectivités territoriales et leurs
groupements (§ 2.2.2.2) en matière d'ouvrages fondés en
titre.
§ 2.2.2.1. / Les pouvoirs des services de la police de
l'eau
Les lois du 20 août 1790 et du 6 octobre 1791 ont
attribué à l'autorité administrative un pouvoir
général de police des eaux concernant toutes les rivières
et ont instauré la pratique des règlements d'eau. Le
décret dit de décentralisation (en fait de
déconcentration) du 25 mars 1853 donne aux préfets le pouvoir de
statuer de manière définitive sur toutes les affaires
départementales et communales ce qui constitue un véritable
changement puisque jusque là les règlements d'eau, notamment,
étaient pris de manière définitive par le Chef de l'Etat
ou le Ministre de l'Intérieur. Cela ce traduit en pratique par un nombre
plus important de règlements d'eau pris par l'administration à
partir des année 1850, puisque ceux adoptés avant ces
années là, et donc le plus souvent signés du Roi Louis
XVIII (1814-1824), du Roi Charles X (1824-1830) ou du Roi Louis-Philippe Ier
(1830-1848) (sous forme d'Ordonnance Royale) mais aussi du Président de
la République Louis-Napoléon Bonaparte (1848-1852), sont
très peu nombreux, en l'état actuel des fonds conservés
aux archives départementales.
La loi du 8 avril 1898 dispose en son article 11 «
qu'aucun barrage, aucun ouvrage destiné à l'établissement
d'une prise d'eau, d'un moulin ou d'une usine ne peut être entrepris dans
un cours d'eau non navigable et non flottable sans l'autorisation de
l'administration ». Cette loi toujours en vigueur est aujourd'hui
applicable aux cours d'eau non domaniaux. Cette disposition témoigne des
pouvoirs étendus de l'administration en matière d'ouvrages
hydrauliques, même sur des cours d'eau non domaniaux pourtant largement
soumis aux règles du droit privé et aux relations entre
riverains.
L'article 12 de cette même loi prévoient que
« les préfets statuent après enquête, sur
les demandes ayant pour objet : 1° l'établissement
d'ouvrages intéressant le régime ou le mode d'écoulement
des eaux ; 2° la régulation de l'existence des usines et ouvrages
établis sans permission et n'ayant pas de titre légal ; 3°
la révocation ou la modification des permissions
précédemment accordées ;... ». Les
pouvoirs de l'administration ne s'arrêtent donc pas à
l'établissement des ouvrages hydrauliques mais ils perdurent tout au
long de la vie de l'ouvrage. Cet article n'est en fait que l'application du
principe selon lequel « nul n'a de droit acquis au maintient d'un
règlement », l'autorisation administrative approuvant
l'établissement d'un ouvrage et réglant ses principales
caractéristiques ayant valeur réglementaire.
L'application de ce principe se traduit également par
l'article 14 de la loi de 1898 qui dispose que « les
permissions peuvent être révoquées ou modifiées sans
indemnité, soit dans l'intérêt de la salubrité
publique, soit pour prévenir ou faire cesser des inondations, soit enfin
dans le cas de la réglementation générales prévues
à l'article 9. Dans tous les autres cas, elles ne peuvent être
révoquées ou modifiées que moyennant une indemnité
». L'administration peut révoquer ou modifier les
permissions sans indemnité soit dans l'intérêt de la
salubrité publique, soit pour prévenir ou faire cesser des
inondations, soit de manière à concilier les
intérêts de l'agriculture et de l'industrie avec le respect
dû à la propriété et aux droits et usages
antérieurement établis (selon l'article 9). Ces trois
hypothèses ne sont en faite que la traduction de l'esprit de la loi qui
vise au respect des droits des riverains, puisque touchant au droit de
propriété, il s'agissait là pour l'administration
d'être vigilante à la garantie d'un droit que la
Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (article 17) consacrait
dès 1789. En outre, l'article 17 de la loi de 1898 prend soin de
rappeler que « Dans tous les cas, les droits des tiers sont et
demeurent réservés ». C'est ce même souci que
l'on retrouve à la lecture de l'article L215-7 du code de
l'environnement, lequel dispose que « l'autorité administrative
est chargée de la conservation et de la police des cours d'eau non
domaniaux. Elle prend toutes les dispositions pour assurer le libre cours des
eaux. Dans tous les cas les droits des tiers sont et demeurent
réservés ».
L'usinier fondé en titre demeure, même dans les
limites de la consistance légale de son droit, soumis au pouvoir de
police de l'administration, qu'elle tient de l'article L 215-7 du code de
l'environnement pour assurer le libre cours des eaux (en matière d'eaux
non domaniales). En ce sens, l'arrêt du Conseil d'Etat du 16 mars 1960
<< Guignard »100 juge que « même des
usines fondées en titre peuvent être réglementées,
modifiées ou supprimées par la police des eaux ».
Les droits d'eau fondés en titre, droits réels
immobiliers, donne à leurs titulaires la faculté d'utiliser les
eaux courantes dans la limite de leur consistance légale sans avoir
à verser une quelconque redevance ni soumission à une
éventuelle autorisation préalable. Comme l'écrit Philippe
Marc dans son ouvrage << les cours d'eau et le droit
»101 « ces droits sont protégés
». Ainsi, sur les cours d'eau domaniaux, contrairement à une
prise d'eau de droit commun, une prise d'eau fondée en titre qui ferait
l'objet d'une modification ou
100 Publié au recueil Lebon page 500.
101 << Les cours d'eau et le droit » de Philippe Marc,
2006, éditions Johanet.
suppression de la part de l'administration ouvrirait droit
à une indemnité en application de l'article 26 du code du domaine
public fluvial. C'est en ce sens que le Conseil d'Etat a rendu l'arrêt
<< Bonnard >> le 14 février 1958102,
l'arrêt << Vautrin >> le 7 juillet 1939103 et
l'arrêt du 2 juin 1978104, (pour les cours d'eau non domaniaux
voir supra).
En outre le code de l'environnement prévoit plusieurs
dispositions traitant de manière analogue les droits fondés sur
titre et les droits fondés en titre.
Ainsi l'article L215-10 du code de l'environnement
prévoit la révocation ou la modification, sans indemnité,
des autorisations ou permissions accordées pour l'établissement
d'ouvrages ou d'usines sur les cours d'eau non domaniaux, par l'autorité
administrative exerçant ses pouvoirs de polices dans
l'intérêt de la salubrité publique notamment ; or, cet
article prévoit en son II que ces dispositions sont applicables aux
entreprises ayant une existence légales comme aux entreprises
concédées ou autorisées en vertu de l'article 16 de loi du
16 octobre 1919, les droits fondés en titre sont donc visés.
§ 2.2.2.2. / Les prérogatives des
collectivités territoriales et leurs groupements
Comme nous l'avons vu plus haut, les collectivités
disposent de prérogatives en matière de protection des
écosystèmes, cependant leurs pouvoirs peuvent se heurter aux
droits fondés en titre des propriétaires d'ouvrages hydrauliques,
surtout lorsque ceux-là perdurent. Plusieurs options s'offrent alors aux
collectivités :
La première solution d'intervention consiste à
établir avec le propriétaire consentant une convention par
laquelle ce dernier soit abandonnerait expressément son droit d'eau,
soit le céderait à la collectivité. S'agissant en
l'espèce d'un droit d'eau fondé en titre, le propriétaire
de l'ouvrage est totalement libre d'en disposer, l'article 16 de la loi du 16
octobre 1919 prévoyant une notification de la cession de l'autorisation
au préfet (pouvant donner acte ou adresser un refus motivé) ne
s'applique pas ici. Le propriétaire de l'usine ou du moulin dispose
alors d'un ouvrage sur le lit de la rivière sans en avoir les fondements
juridiques. La
102 Publié à l'AJDA de 1958 page 441.
103 Publié au recueil Lebon page 458.
104 Publié au recueil Lebon page 815.
collectivité doit donc accompagner cette renonciation ou
cession de titre en prévoyant les mesures de remise en état du
site afin de rétablir le libre écoulement des eaux.
La seconde solution, plus autoritaire, consiste pour la
collectivité à plaider auprès du préfet la
révocation ou la modification du droit fondé en titre afin de
pouvoir ensuite envisager les travaux de remise à l'état initial
du site.
Enfin, la solution d'une gestion des vannages est
également envisageable. Cette solution peut être mise en oeuvre de
plusieurs manières. Soit de façon autoritaire, le préfet
règlemente un ou plusieurs ouvrages afin de rétablir une certaine
continuité pendant des périodes déterminées. Les
ouvrages fondés en titre deviennent alors fondés sur titre. Soit
de manière conventionnelle, la collectivité établie avec
le propriétaire de l'ouvrage une convention de gestion des vannages par
laquelle sont fixées les règles d'ouverture et de fermeture des
vannes ainsi que les modalités d'application. L'ouvrage concerné
reste alors fondé en titre. Soit enfin de manière individuelle
dans l'hypothèse où l'instauration du règlement d'eau
n'était pas souhaitée par le préfet, et les rapports
conventionnels refusés par le propriétaire de l'ouvrage. Ici,
c'est le propriétaire de l'ouvrage qui de manière
unilatérale décide de rétablir la continuité
écologique du cours d'eau en réduisant l'impact de son ouvrage
fondé en titre. Cette dernière solution offre l'avantage pour le
propriétaire de ne pas le lier conventionnellement, mais la
collectivité ne dispose plus alors des garanties nécessaires
à assurer la pérennité d'une telle gestion et dès
lors hésitera davantage à engager des financements publics sur ce
type d'opération.
Notons aussi que le code de l'environnement prévoit en
son article L215-16 que « Si le propriétaire ne s'acquitte pas
de l'obligation d'entretien régulier qui lui est faite par l'article L.
215-14, la commune, le groupement de communes ou le syndicat compétent,
après une mise en demeure restée infructueuse à l'issue
d'un délai déterminé dans laquelle sont rappelées
les dispositions de l'article L435-5, peut y pourvoir d'office à la
charge de l'intéressé, ... ». Cette disposition semble
particulièrement bien adaptée aux ouvrages qui malgré leur
absence d'entretien de la part de leur propriétaire sont toujours
fondés en titre. En effet, l'article L215-14 auquel il est fait
référence pose que « Sans préjudice des articles
556 et 557 du code civil et des chapitres Ier, II, IV, VI et VII du
présent titre, le propriétaire riverain est tenu à un
entretien régulier du cours d'eau.
L'entretien régulier a pour objet de maintenir le
cours d'eau dans son profil d'équilibre, de permettre
l'écoulement naturel des eaux et de contribuer à son bon
état écologique ou, le cas échéant, à son
bon potentiel écologique, notamment par enlèvement des
embâcles, débris et atterrissements, flottants ou non, par
élagage ou recépage de la végétation des rives. Un
décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application
du présent article ». Une fois ces objectifs rappelés
il apparaît que la situation de maintient en position fermée sans
aucune manoeuvre des vannages peut être en contradiction avec l'article
L215-14. Il appartient donc à la commune, au groupement de communes ou
au syndicat compétent de mettre en oeuvre l'article L215-16 du code de
l'environnement et d'obtenir une ouverture des vannages. Mais si la
collectivité souhaite aller plus loin, c'est-à-dire vers un
effacement de l'ouvrage, le non entretien allant jusqu'à la ruine et
donc la disparition du droit d'eau est à favoriser.
Enfin, comme nous l'avons vu plus haut, le maire peut, sous le
contrôle du préfet, prendre des mesures en matière de
police de l'eau, et ce en vertu de l'article L215-12 qui dispose que «
Les maires peuvent, sous l'autorité des préfets, prendre toutes
les mesures nécessaires pour la police des cours d'eau ».
Dés lors le maire peut être assimilé à «
autorité administrative au sens du code de l'environnement, et ce
notamment lorsque ce dernier pose que « L'autorité
administrative est chargée de la conservation et de la police des cours
d'eau non domaniaux. Elle prend toutes dispositions pour assurer le libre cours
des eaux... ».
La situation des usines et moulins fondés sur titre,
bien que sensiblement identique sur le terrain, peut ne pas se
révéler aussi proche juridiquement quant à une
éventuelle intervention publique
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