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Archivage légal électronique : définition d'un nouveau paradigme ?

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par Yves KINDA
Université d'Auvergne - Clermont Ferrand I - Master II recherche en droit des affaires et de la banque 2007
  

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Section II : La fonction intellectuelle

Cette fonction intellectuelle de l'archivage électronique consiste en la pré-constitution de modes de preuve. La problématique ici peut être ainsi résumée : quel accueil le droit français réserve-t-il à l'archive électronique en tant que mode de preuve ? On assiste en la matière à l'énoncé d'un principe de validité (Paragraphe 1). Toutefois, l'archive électronique ne vaudra preuve que sous certaines conditions (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La validité de la preuve électronique

Il s'agit d'un principe légal (A) posé par le droit français, notamment la loi du 13 mars 200054(*). La validité des conventions de preuve (B) fut affirmée par la même occasion. Ces deux principes emportent des conséquences en matière d'archivage électronique. Nous les soulignerons.

A. Un principe légal

C'est à travers une définition originale de la notion d'écrit et de celle de preuve littérale que la validité ad probationem de l'écrit électronique fut affirmée. Désormais, écrit sur support papier er écrit électronique s'équivalent en tant que modes de preuve (1). Ce qui rend alors possible des conflits de preuves littérales. Comment le droit les résout-il (2)?

1. L'équivalence des preuves littérales

Pour mieux saisir la portée du principe, il convient de rappeler préalablement le contexte d'adoption de la loi du 13 mars 2000.

On le sait, en droit français, l'acte juridique55(*) est l'une des deux sources d'obligations à côté du fait juridique56(*). Son importance est considérable, de l'achat d'un journal à un kiosque à la négociation de grands contrats internationaux. En droit civil, la preuve de l'acte juridique ou celle contre le contenu d'un tel acte doit en principe être établie selon les procédés de la preuve parfaite. Et la preuve parfaite par excellence est l'écrit. Dans la mesure où il n'est pas contestable ou contesté, il lie le juge qui perd tout pouvoir d'appréciation sur sa valeur. Les autres preuves parfaites, plus rarement utilisées, sont l'aveu et le serment décisoire.

Pendant plusieurs siècles, qui disait écrit disait support papier. La notion était tellement évidente que le droit ne s'était jamais donné la peine de la définir57(*). On comprend alors la révolution que fut l'avènement de la dématérialisation. Le besoin de contracter plus vite, dans une rationalisation extrêmement économique du travail et du commerce nécessitait un dédoublement de l'écrit portant l'accord de volontés. Cela, l'usage de l'informatique, couplée aux télécommunications, le permettait. L'importance de l'écrit sur support papier se réduisait de plus en plus au profit de l'électronique.

Des incertitudes juridiques naquirent alors. En effet, quelle valeur juridique devait-on reconnaître à l'écrit sur support électronique ? Fallait-il y appliquer les règles traditionnelles de preuve ? Dans la pratique, deux tendances s'observaient. La première considérait l'écrit sur support électronique comme un commencement de preuve par écrit à compléter par tous moyens. La seconde tendance y voyait plutôt une impossibilité de se procurer un écrit, exception au principe de la preuve écrite des actes juridiques.

C'est dans ce flou juridique qu'interviendra la loi du 13 mars 200058(*). Elle opère une refonte des articles 1316 et suivants du Code civil français sur la preuve et s'intègre dans le chapitre VI du Livre III du Titre III.

La loi de 2000 adopte une position ferme et reconnaît à l'écrit électronique la même valeur juridique, la même force probante, que le document papier. Désormais, « l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier (...) »59(*) car la preuve littérale ou preuve par écrit sera indifféremment celle qui « résulte d'une suite de lettres, de caractères, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dotés d'une signification intelligible, quels que soient leur support ou leurs modalités de transmission»60(*).

En somme, l'archive électronique, qui est incontestablement un écrit électronique, est un mode de preuve littérale. Elle est équivalente aussi bien aux autres archives sur support papier, aux manuscrits non archivés, ou à tout autre écrit sur support électronique, qu'il soit archivé ou non, etc. En effet, la force probatoire de l'écrit est désormais indépendante de son support ou de ses modalités de transmission. Peu importent les signes utilisés, pourvu que ceux-ci soient intelligibles. Ce qui n'exclut donc pas le chiffrement61(*) mais interdit en revanche de considérer comme écrit une suite de signes mis au bout à bout par hasard. Une archive cryptée qui redevient intelligible pour l'homme après opération de déchiffrement répondrait parfaitement à la définition.

Si écrit sur support papier et écrit électronique s'équivalent en tant que modes de preuve, comment les conflits de preuves littérales se résolvent-ils ?

* 54 L. n° 2000-230, 13 mars 2000, portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, JO 14 mars, p. 3968.

* 55 L'acte juridique est une manifestation de volonté spécialement accomplie en vue de produire des effets de droit dont la nature et la mesure sont elles-mêmes voulues.

* 56 Le fait juridique est tout évènement indépendant de la volonté humaine, susceptible de produire des effets de droit. Il s'agira par exemple du décès ou de l'accident.

* 57 Concrètement, depuis une ordonnance de Moulins de 1566, le droit consacrait deux formes d'écrits (authentique et sous seing privé), sans jamais définir pourtant ce qu'était l'écrit.

* 58 Cette loi a été adoptée alors qu'avait été remise le 31 janv. 2000 une proposition de directive communautaire relative à certains aspects juridiques du commerce électronique dans le marché intérieur. La directive sera adoptée le 18 juin 2000 (JOCE 17 juil. 2000). Le législateur français avait ainsi anticipé sur le droit communautaire. Il faut noter d'ailleurs que dès 1997, la jurisprudence française avait préparé le terrain en jugeant qu'un écrit pouvait « (...) être établi et conservé sur tout support, y compris par télécopies, dès lors que son intégrité et l'imputabilité de son contenu à l'auteur désigné ont été vérifiées, ou ne sont pas contestées ». En l'espèce, il s'agissait de la forme d'acceptation d'une cession de créances professionnelles. En principe, l'acte de cession devait être dressé par écrit, celui-ci étant exigé ad validitatem. La Cour de cassation avait validé la cession sur la seule foi d'une télécopie dont le caractère mensonger n'avait pas été allégué. (Com. 2 déc. 1997, JCP E 1998, p. 178, note BONNEAU).

Soulignons au passage qu'un important grief avait été formulé à l'encontre de la L. du 13 mars 2000. En effet, celle-ci ne consacrait l'écrit électronique que quant il s'agissait de lui reconnaître une valeur ad probationem. Rien n'y était prévu pour les cas où l'écrit serait exigé à titre de validité de l'acte juridique. La LCEN fera taire toutes les critiques. Son art. 25-I dispose : « Lorsqu'un écrit est exigé à titre de validité d'un acte juridique, il peut être établi et conservé sous forme électronique dans les conditions prévues aux articles 1316-1 et 1316-4 et, lorsqu'un acte authentique est requis, au second alinéa de l'article 1317. Lorsqu'est exigée une mention écrite de la main même de celui qui s'oblige, ce dernier peut l'apposer sous forme électronique si les conditions de cette apposition sont de nature à garantir qu'elle ne peut être effectuée que par lui-même ». Cet article aligne donc l'ensemble du formalisme probatoire et solennel autour d'une unique notion d'écrit.

* 59 C. civ., art. 1316-1.

* 60 C. civ., art. 1316.

* 61 Le chiffrement, parfois appelé cryptage, désigne le procédé grâce auquel on rend la compréhension d'un document impossible par toute personne ne possédant pas une clé de déchiffrement.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld