1.2.2 Organisation séquentielle et interactionnelle
Pour l'ethnométhodologue Mondada (1999),
« Internet est un immense réservoir de corpus discursifs
pouvant faire l'objet d'analyses et descriptions, aussi bien que de
sensibilisation à l'hétérogénéité des
genres et des registres ». Elle cherche, dans cet article, à
« doter d'outils d'analyse et de description empiriques des formes
linguistiques et communicationnelles caractéristiques de ces
échanges ».
Retenons également que la communication asynchrone
(ou différée) sur Internet se présente, selon ce
chercheur, comme un continuum entre l'organisation de l'information -comme
à l'écrit - et les traces caractéristiques de la dimension
orale de la communication : « tout en étant privée
de la dimension paralinguistique des gestes et des regards, elle utilise des
dispositifs alternatifs pour modaliser les messages (trucages orthographiques,
ponctuation, typographie) ». Ce caractère hybride serait
« la spécificité de la CMO, au-delà des
particularités les plus emblématiques, comme le recours aux
binettes (emoticons) ».
A l'aide des outils développés par l'analyse
conversationnelle d'inspiration ethnométhodologique, elle met en relief
« l'organisation séquentielle et interactionnelle qui
caractérise les messages asynchrones » et s'intéresse
concrètement aux modalités d'enchaînement
séquentielles entre messages. Ce qui l'amène à
décrire les particularités rencontrées de la gestion des
tours de parole, qu'elle appelle des « a-tours
(c'est-à-dire des tours asynchrones, reconstitués par le
locuteur comme successif) ». Elle analyse aussi l'effet
rétrospectif et prospectif, « la structuration
séquentielle d'une parole est accomplie collectivement par les
interlocuteurs dans le fil de son déroulement », sans cesser
de constater la manifestation des paires adjacentes (question / réponse,
salutation / salutation...) à l'intérieur des tours de parole.
Notons particulièrement la jonction de
« l'analyse des réparations en analyse
conversationnelle ». Elle s'appuie sur Schegloff, Jefferson et Sacks
pour traiter de « l'importance du positionnement séquentiel de
la réparation », selon ses mots, qu'elle présente comme
« une série ordonnée de possibilités
d'intervention (...) dans le même tour s'offre la première
opportunité pour le locuteur de s'autocorriger (...): c'est la
solution préférentielle qui peut être aussi observée
dans les échanges CMO (...). Le deuxième tour est le lieu de
l'hétéro-initiation de la réparation» ce qui est peu
fréquent dans son corpus « ou bien de
l'hétéro-réparation - plus fréquente (...). La
dernière opportunité pour une réparation est offerte au
troisième tour ».
En s'appuyant sur Schegloff, elle affirme que ce
troisième tour « constitue ainsi (...) le dernier lieu
disponible pour le maintien et la défense de l'intersubjectivité
menacée par la perturbation ».
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