1.1.6 L'interaction en classe de langue
et les énoncés métalangagiers
L'analyse conversationnelle s'est aussi
intéressée à la description des interactions en
classe : Kramsch (1984 : 59, 63) se base sur une étude
ethnométhodologique faite par van Lier à l'Université de
Lancaster (Analyzing Interaction in Second Language Classrooms, 1982)
qui « tente d'élucider l'interaction complexe de la classe de
langue ». A des fins descriptives du champ des interactions
didactiques, nous retenons un des aspects, celui qui concerne les troubles
de communication :
- « les problèmes de transmission (dans
l'élocution, l'écoute ou la compréhension). Ce sont des
problèmes communs au locuteur et auditeur ;
- les erreurs, linguistiques ou discursives. Ce sont des
problèmes du locuteur ;
- les problèmes de procédure :
règles d'activité, (...) personne adressée, choix du
locuteur suivant. Ceux-ci concernent aussi bien le locuteur que
l'auditeur. »
La situation de communication didactique à distance
entre les jeunes tuteurs et les apprenants présente-elle la même
casuistique ? Quelles sont les sources de « troubles de la
communication » dans notre corpus ? Van Lier,cité par
Kramsch (ibidem : 64), pense « qu'il vaut mieux
considérer la réparation de problèmes et d'erreurs comme
un `ajustement interactionnel' ou `contrôle pragmatique' plutôt que
comme la correction de `fautes' vue dans une perspective normative »
.
Nous sommes d'accord avec Kramsch, quand elle
considère qu'une pédagogie de l'interaction doit concevoir
« la correction des troubles de l'interaction au sein de la classe de
langue » (ibidem : 64). Dans notre corpus, nous faisons le
constat suivant : les messages qui rendent compte des
« troubles » sont, d'un côté, les situations
de communication les plus sociales, `authentiques' et, d'un autre
côté, ce sont celles qui suscitent les échanges et
séquences les plus riches, quant à la longueur et au nombre de
contributions et de besoins en termes de moyens d'expression.
Maintenant, nous allons nous référer aux
segments des messages remplissant la fonction que Jakobson appelle
« métalinguistique ». Nous n'allons pas nous
arrêter là-dessus, bien qu'ils soient très présents
dans notre corpus, mais nous nous référerons ponctuellement
à ces segments présents surtout chez les tuteurs. Pour cela, nous
nous appuierons sur l'étude réalisée par De Gaulmyn
([1987] 1991) sur l'ensemble des énoncés
métalangagiers, qu'elle limite « à la classe
des énoncés qui comportent un ou plusieurs termes qui
dénotent le langage » (ibidem : 169). Elle distingue les
énoncés métacommunicationnels qui
réfèrent à la conduite de l'interaction (un exemple
tiré de son corpus : « Je vais te poser une
première question »), les énoncés
métadiscursifs qui réfèrent au discours
tenu (elle donne comme exemple : « ... donc, ça veut
aussi dire ») et les énoncés
métalinguistiques qui réfèrent à langue et
à son usage. De Gaulmyn divise la classe des énoncés
métadiscursifs en deux types : « des
énoncés qui réfèrent à des actes
illocutoires et d'autres qui réfèrent au contenu ou à la
forme des paroles, donc soit à l'énonciation - au dire -
soit à l'énoncé - au dit -,
considéré pour la forme de l'expression ou pour celle du
contenu » (ibidem : 170).
Avant de présenter la seconde sous-partie du cadre
théorique de notre étude, nous voudrions signaler que nous avons
eu recours, à différents moments, à la consultation des
notions importées de divers courants de la pragmatique et d'autres
disciplines du Guide terminologique pour l'analyse des discours,
publié par De Nuchèze & Colletta (2002).
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