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5. Le paradigme diffusionnisteL'approche de la diffusion est née de la théorie de la diffusion des innovations d'Everett M. Rogers. Ses travaux s'inscrivent dans une longue tradition anthropologique connue sous le nom de "diffusionnisme", dont le principal instigateur est un anthropologue, Kroeber (1923) qui s'est intéressé à la pénétration des innovations techniques dans le tissu culturel. Le modèle diffusionniste22(*) perçoit l'adoption comme un processus caractérisé par plusieurs phases, depuis la première exposition de l'usager à l'innovation, jusqu'à la confirmation ou le rejet de l'adoption. Selon Rogers, ce sont les caractéristiques de l'innovation telles qu'elles sont perçues par les individus, qui déterminent son taux d'adoption. Une innovation est caractérisée par cinq attributs : son avantage relatif, sa compatibilité avec les valeurs du groupe d'appartenance, sa complexité, la possibilité de la tester, et sa visibilité. Les usagers sont classés selon cinq profils types : les innovateurs, les premiers utilisateurs, la première majorité, la seconde majorité et les retardataires. Rogers établit sa théorie sur un ensemble de typologies dans le but de suivre l'évolution du taux d'adoption (qui décrit une courbe en S), considéré comme la variable descriptive essentielle de la diffusion. Les typologies des adoptants permettent selon Rogers de les classer en plusieurs catégories selon le processus de diffusion dans le temps : le profil des adoptants passerait d'un groupe restreint et marginal à un groupe plus large d'adoptants, puis à un bassin de plus en plus représentatif de la population en général. La finalité de ces études met en relief la nature prescriptive dans le processus d'adoption des innovations. Les facteurs déterminants dans la décision d'adoption sont ainsi de l'ordre de l'inter-personnalité. Le modèle diffusionniste « a permis de décrire tout le réseau social de circulation d'une innovation au sein d'une société »23(*), avec lequel la formation et les usages des communautés forment des parallèles explicites quant aux usages et attentes du web. Comme l'explique Georges Vignaux "la médiation se place à la frontière du symbolique et d'une sphère de l'expérience. La technique n'explique pas les contenus sans les usagers, les usagers n'ont pas la même pratique technologique selon les contenus qui les motivent, les contenus n'ont pas la même charge symbolique selon le dispositif". Et il précise "le média est donc identifié comme lieu et format du lien entre un acteur et un contenu. »24(*) Le diffusionnisme de l'outil Internet dans la société de consommation médiatique, articulée autour d'un déterminisme sociologique et/ou technologique a pleinement participé à l'acception de cet outil en tant que medium. Nous verrons dans la deuxième partie comment cela s'est traduit dans la consommation de media. * 22 ROGERS Everett. 1962. « The Diffusion of innovations » * 23 FLICHY Patrice. 1995. « L'innovation technique. Récents développements en sciences sociales vers une nouvelle théorie de 'innovation ». Paris: La Découverte, * 24 VIGNAUX Georges. 2003. - Du signe au virtuel - Les nouveaux chemins de l'intelligence, Seuil |