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La législation coopérative au Bénin: Etat des lieux et propositions de réforme

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par Cassius Jean SOSSOU BIADJA
Université nationale du Bénin - Faculté des sciences juridiques économiques et politiques - Maitrise 1988
  

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Section I - Etude du Statut Général de la

Coopération

Il s'agit de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966 portant statut général de la coopération et son Décret d'application 516/PR/MDRC du 28 Décembre 1966 fixant les modalités d'application du statut général de la coopération. En fait, c'est l'Arrêté 2918/DAR du 18 Novembre 1957 lui-même inspiré du Décret loi du 2 Février 1955 qui a servi de référentiel, du moins de base à la charpente de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966.

Paragraphe I - Nature et Objet - Constitution et

Agrément - Adhésion, Capital social

et Retrait

A - Nature et Objet, Constitution et Agrément

Nature

En effet, l'article 1 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966 définit les coopératives et leurs unions comme étant "des sociétés civiles particulières de personnes, à capital et personne variables, elles sont constituées entre les personnes qui s'unissent sur la base de l'égalité des droits et des obligations en vue d'entreprendre un effort commun dans un but économique notamment ".

De cette définition, on peut déjà reconnaître la nature juridique des coopératives : elles sont des sociétés civiles. Il en résulte que les coopératives sont constituées sur la base d'un contrat par lequel sept (7) personnes au moins décident de mettre quelque chose en commun dans le but de partager les bénéfices et les pertes qui pourront en résulter. Ce contrat qui crée la coopérative est de nature civile c'est-à-dire qu'il fonde la société coopérative à ne mener que des activités non commerciales. Elle n'aura donc pas à adopter la forme de société anonyme, de société à responsabilité limitée, de société en commandite simple non plus.

Puisque la loi ne permet pas aux coopératives d'adopter l'une ou l'autre des formes précitées, quelle interprétation pourrait-on faire des actes menés par la coopérative étant entendu qu'une société civile peut mener des actes qualifiés d'acte de commerce ?

A priori et d'une manière générale, les actes des coopératives sont considérés comme des actes de nature civile ; mais si dans l'acte de l'entreprise coopérative on retrouve le critère de commercialité, qui selon les juristes est le critère qui permet de déceler dans toute opération commerciale ou tout acte de commerce, l'idée de circulation, d'entremise et de spéculation, alors l'acte mené par la coopérative serait un acte de commerce avec toutes les conséquences juridiques qui pourraient s'en suivre.

Si l'on considère les critères de commercialité tels que définis ci-dessus, force est de constater que la coopérative même en achetant ne représente que ses sociétaires dans l'opération d'achat constituant de ce fait la fin de la chaîne de circulation ; pour ce faire, son opération avec ses membres ne constitue pas une vente, mais un partage.

L'idée de partage se renforce lorsque l'on sait que la coopérative est interdite de toute spéculation. Elle ne doit pas réaliser de bénéfice au profit de ses sociétaires ; les trop perçus se doivent d'être restitués à ces derniers au prorata des transactions réalisées avec eux.

Enfin, en tant qu'entité non distincte des coopérateurs, la coopérative n'achète pas pour elle-même, mais pour les coopérateurs. On pourra affirmer qu'elle ne joue pas un rôle d'intermédiaire.

La coopérative apparaît alors non comme une entreprise de rapport ( dont le but est de rapporter des bénéfices ), mais une entreprise de service ( dont le but est de satisfaire les besoins de ses membres).

· La coopérative est une société civile donc une société ayant la capacité civile et dotée de la personnalité morale, elle est donc titulaire de droits et d'obligations .A cet égard sa qualité de société civile ne lui réserve-t-elle pas de difficultés pour les formalités de publicité ?

La doctrine et la jurisprudence adoptent des positions différentes à ce sujet

La doctrine ne juge pas la nature du contrat de société civile comme étant suffisante pour l'attribution de la personnalité civile. Mais la jurisprudence, elle, attribue la personnalité civile toutefois que la coopérative justifie qu'elle dispose d'un patrimoine propre distinct de celui de ses membres, et puisque la coopérative a :

un nom qui est sa dénomination sociale,

un domicile qui est son siège social,

un patrimoine qui est sa raison sociale ( l'actif social est la propriété

de la coopérative et non de ses membres et elle gère cet actif par le

biais de ses membres), elle peut de ce fait, valablement accomplir les

formalités de publicité. (article 26 du Décret 516/ PR/MDRC du 28

Décembre 1966) puisque ayant une personnalité civile.

· La coopérative est une société particulière de personnes parce que dans cette société, c'est la qualité personnelle qui prime ; elle peut être fonction de l'honorabilité de la compétence, de la respectabilité, de l'expérience de la réputation etc. et nul ne peut être membre d'une coopérative s'il , ne justifie pas d'un intérêt dans le ressort territorial du groupement (article 6 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

· La coopérative est une société à capital et personne variable c'est-à-dire une société dans laquelle est prévue dans ses statuts, une augmentation ou une diminution du capital social (article 9 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966). Il va sans dire que l'augmentation ou la diminution du capital social peut entraîner la variabilité des personnes puisque, cet article stipule que le capital peut être augmenté par l'adjonction de nouveaux membres ou la souscription de parts nouvelles par les sociétaires. Il peut être diminué par suite de démission, exclusion décès, interdiction, faillite, déconfiture.

Objet

De la définition que donne l'article 1 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966, on retrouve en filigrane, l'objet qu'assigne la loi aux coopératives.

L'objet principal est de ne pas faire des actes de commerce en tant que tel ; l'ordonnance 59/PR/MDRC du 28 décembre 1966 assigne aux coopératives l'exploitation, la transformation, la conservation, la vente ou l'achat, le façonnage ou tout acte pouvant permettre aux coopératives d'atteindre leurs fins (article 2 paragraphe I de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966) . Des exemples d'objectifs précis sont énumérés par la loi qui affirme toujours à l'article 2 in fine que cette énumération n'est pas limitative.

Constitution

La constitution d'une coopérative selon le droit positif Béninois requiert deux (2) étapes :

q Une étape pré-coopérative ; le Groupement à Vocation Coopérative

q Une étape coopérative ; la coopérative authentique.

Pour passer d'une étape à une autre, les pré-coopérateurs doivent avoir reçu au préalable et sur demande, l'avis du Comité d'Agrément des Coopératives ; ce Comité est institué par le Décret 517/PR/MDRC du 28 Décembre 1966, relatif à la constitution à l'Organisation et au fonctionnement du Comité d'Agrément des coopératives.

L'étape pré-coopérative

Il s'agit des Groupements à Vocation Coopérative.

Toute création de coopérative doit passer par cette étape probatoire d'au moins six (6) mois, au cours de laquelle le groupement des adhérents prend la dénomination de Groupement à Vocation Coopérative (GVC). La fonction principale de ce Groupement consiste à `' étudier le fonctionnement d'une coopérative en vue d'en approuver les statuts et d'en adresser le programme d'activité'' (article 5 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

Cependant, les modalités de structure, de fonctionnement, de transformation ou de liquidation de ces groupements sont prévus par le Décret 516/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

En effet, le GVC pendant sa durée de vie légale aura à satisfaire aux dispositions légales prévues en matière d'agrément en qualité de coopérative.

Pour être admis comme structure pré-coopérative le groupement des adhérents doit déclarer dans un acte sous seing - privé de sept (7) personnes au moins, son intention de création de coopérative. Dans cette déclaration, il doit être fait état de l'objet de la société coopérative, sa dénomination, sa circonscription et son siège social. Un récépissé daté lui est délivré par le Service compétent du Ministère chargé de la Coopération.

La date et le lieu de la première Assemblée Générale Constitutive sont indiqués au service qui délègue un représentant pour y assister à titre de conseiller avec voix consultative.

Afin d'entreprendre des activités à caractère coopératif, les pré-coopérateurs demandent une autorisation qui leur est délivrée gratuitement par ledit service.

Le groupement des adhérents est appelé à constituer un dossier d'agrément pendant sa durée de vie sociale. Cependant, il reste soumis aux dispositions de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966 pour ce qui est, des stipulations relatives à la répartition des excédents, le service d'un intérêt sur le capital, le mode d'alimentation des réserves, la tenue de la comptabilité et sa vérification.

Bref la structure pré-coopérative est avant tout un embryon coopératif qui selon le législateur serait une structure très frêle puisque, les pré-coopérateurs n'ayant sûrement pas encore les notions et techniques coopératives doivent faire l'expérience de cet apprentissage afin de mener à bon port leur intention coopérative.

Mais en réalité l'esprit qui sous tendait la création des GVC était beaucoup plus le contrôle de ces structures, mieux la mainmise de l'Etat sur elles que l'assistanat déguisé sous forme de tutelle. Notons qu'il est très difficile à l'état actuelle de la loi, de faire la démarcation nette entre l'objet final des GVC et celui des coopératives dont ils n'étaient que le foetus, car les critères précis et objectifs manquent à tout point de vue.

Cette étape organisationnelle qui présentait un caractère dilatoire ne pouvait que compromettre l'élan des futurs coopérateurs car, en réalité la structure pré - coopérative pourrait pendant longtemps être considérée comme GVC toute fois que le comité d'agrément n'en aurait pas jugé l'opportunité.

Cette pratique de nos jours est en déphasage et ne doit plus entraver de quelque manière que ce soit la volonté des coopérateurs à diriger leur entreprise.

L'étape coopérative

Ce sont ici les formalités à accomplir antérieurement à la création des coopératives. En réalité on ne note dans la loi sur les coopératives aucune démarcation nette entre les actes devant prévaloir à la création d'une coopérative de ceux devant prévaloir à la création des GVC.

Les formalités ayant prévalu à la création d'un GVC sont-elles reprises en cas de maturation de celui-ci ? D'autres formalités distinctives caractérisent-elles la constitution des coopératives authentiques ?

Somme toute, il est à remarquer qu'après la durée de vie légale, le GVC ayant satisfait aux dispositions réglementaires, sollicite son agrément en déposant au Service compétent son dossier ; celui-ci est fait d'une demande, d'une copie de la délibération de l'Assemblée Générale Constitutive, le texte des statuts approuvés par cette Assemblée, l'état des versements effectués et le programme d'activités envisagées. Un récépissé daté et gratuit lui est délivré ( article 5 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966)

Dans un délai de quatre (4) mois à partir du récépissé un avis motivé d'agrément ou de rejet lui est notifié. Tout silence non justifié après un délai de six (6) mois emporte agrément obligatoire de la structure pré-coopérative comme `'coopérative authentique''.

Cependant il conviendrait de passer en revue les différentes étapes de constitution d'une coopérative.

· En principe la création d'une coopérative doit être précédée d'une étude préalable au triple plan économique, financier et technique. Cette étude prévisionnelle n'est nullement une prescription de la législation applicable au Bénin en matière coopérative ; mais il urge pour les coopérateurs qui veulent réussir leur entreprise de prendre par cette passerelle non moins importante, qui plus est une formalité à accomplir antérieurement à la naissance de la coopérative.

· La création d'une coopérative doit se manifester par une déclaration de constitution faite par acte sous seing-privé de sept (7) personnes au moins. Le législateur ici fixe le plancher de sept (7) personnes mais ne fixe pas un plafond quant au nombre de personnes nécessaires pour une coopérative. Ceci se justifie dans la mesure où le nombre de personnes nécessaires pour une coopérative dépend de l'objet de celle-ci mais aussi des dispositions statutaires.

· La déclaration de constitution consignée dans l'acte sous seing-privé est remise au service compétent qui en délivre un récépissé daté et gratuit. La loi n'a pas cependant prévu le délai qui doit séparer la remise de l'acte, de la tenue de l'Assemblée Générale Constitutive.

· Il est tenue une Assemblée Générale Constitutive des adhérents. Mais la loi est muette sur le délai qui doit séparer la convocation de cette Assemblée et sa tenue effective. Doit-elle être convoquée par voix orale ou écrite ? Par information moderne ou traditionnelle.

· Enfin une demande d'agrément est adressée au Service compétent du Ministère chargé de la Coopération (après un délai d'au moins six (6) mois de vie pré-coopérative) celui-ci en délivre un récépissé daté et gratuit.

Agrément

Pour avoir l'agrément , il faut remplir les formalités exigées par les dispositions légales et réglementaires notamment :

Déclaration de constitution par sept (7) personnes au moins.

r Remise de cet acte constitutif de déclaration au service administratif

compétent

Assemblée Générale constitutive tenue selon les normes réglementaires

Observance du délai probatoire de six (6) mois au moins comme structure pré - coopérative.

Après la période transitoire pendant laquelle le groupement des adhérents fonctionne sous la dénomination de GVC, la structure recouvre pleinement ses attributs et son nom en tant que coopérative.

Le Comité d'Agrément est saisi par le service compétent. Ce Comité donne dans un délai de quatre (4) mois à partir du récépissé, un avis d'agrément ou de rejet (article 5 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

Formalités de publicité, d'immatriculation et d'enregistrement.

En cas d'agrément, il est procédé à partir de la date d'agrément, et ceci, dans un délai d'un mois aux formalités d'immatriculation, de publicité et d'enregistrement (article 26 du Décret 516/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

L'immatriculation est faite dans un registre spécial ouvert à ce titre. Cette

immatriculation lui affecte un numéro qui lui est notifié.

La publicité doit se faire par insertion au journal officiel d'un extrait des statuts comprenant la dénomination de la coopérative, le siège social, le ressort territorial, la durée, le montant du capital social, le nom des Administrateurs et des Commissaires aux Comptes, le numéro d'immatriculation de la société.

L'enregistrement se fait par dépôt au Greffe du Tribunal de 1ère Instance

d'une copie de la délibération de l'Assemblée Générale, de l'expédition de

l'acte de société, et éventuellement de l'Arrêté autorisant la création de la

société.

Alors que c'est le Comité d'Agrément qui donne le quitus aux entreprises coopératives pour fonctionner valablement lorsque les formalités d'insertion et de dépôt sont remplies, le retrait de l'agrément est décidé par le Ministre chargé de la coopération sur avis du Comité d'Agrément (article 23 Paragraphe 2 de l'Ordonnance 59/PR/MDRC du 28 Décembre 1966).

Ce revirement résulte du fait que le retrait de pouvoir pourrait être assez préjudiciable pour les coopératives, et pour qu'il ne souffre pas d'abus de pouvoir, le législateur a mieux préféré le placer sous la tutelle de l'autorité hiérarchiquement supérieure qu'est le Ministre chargé de la Coopération.

En cas de retrait d'agrément, la coopérative dispose d'un délai de deux (2) mois à partir de la notification pour interjeter appel.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams