Analyse du canal de distribution de l'huile de cuisine au Togo( Télécharger le fichier original )par kossi Dziwonu HOTSIAME Université de Lomé - DEA- Sciences de gestion, option marketing et stratégie 2007 |
2. INTRODUCTION DU CONCEPT DE CRÉATION D'UTILITÉ AU CONSOMMATEUR FINAL DANS LES ANALYSES ÉCONOMIQUES DU CANAL DE DISTRIBUTIONLa prise en compte de la production d'utilité entraîne une évolution importante de l'analyse du canal de distribution. Les analyses économiques visent désormais à trouver une adéquation possible entre les attentes des consommateurs et la mise en marché proposée par l'ensemble du canal. Contrairement aux modèles fondés sur les baisses du coût des fonctions, ces modèles ont pour objectif la création d'utilité pour les clients finals sous contrainte d'un coût minimal. C'est ainsi que pour Helfer J-P et Orsoni J. (2001) « Un producteur délègue certaines opérations de distribution à des intermédiaires, lorsque ceux ci sont en mesure d'effectuer les tâches à moindre coût que ce fabricant, compte tenu du niveau attendu par le consommateur». Ces modèles reposent essentiellement sur l'étude des besoins des consommateurs finals. Selon Aspinwall (1962)7(*), l'organisation du canal de distribution ou plus précisément la répartition des fonctions doit permettre à ce qu'aucune rupture de stock n'intervienne dans le cheminement des produits .Cette théorie stipule que toute rupture de stock dans le canal de distribution remet en cause la maximisation de l'utilité pour le consommateur. Cette utilité sera atteinte si le canal parvient à fournir un flux régulier de produits. Dans le souci d'éviter des ruptures de stock, les intermédiaires vont prendre le risque de constituer des stocks. Ce risque pris par les intermédiaires est rémunéré par une marge appelée le profit de la distribution. Dans la continuité des travaux d'Aspinwall, Bucklin (1966) intègre l'influence du consommateur dans les analyses du canal de distribution. L'auteur estime que la raison d'être du canal c'est-à-dire la présence des intermédiaires le long du canal de distribution se justifie par une maximisation de l'utilité apportée au consommateur final (Filser M. et al, 2001). Cette utilité apportée au consommateur est atteinte dans l'accomplissement des fonctions essentielles de la distribution prises en charge par le canal de distribution. (Voir schéma1) L'auteur identifie à cet effet quatre fonctions principales de la distribution : Le délais de livraison (temps écoulé entre le moment de la commande et celui de la livraison) ; Le degré de décentralisation du marché (considération du nombre de points de vente dans le souci d'assurer un faible déplacement du consommateur final) ; L'allotissement des marchandises (modification de la taille des lots en tenant compte du volume minimal de la commande) ; La gestion par le canal de l'assortiment proposé au consommateur final. Selon Bucklin, la répartition des tâches entre les membres du canal de distribution doit permettre de fournir les produits attendus par le consommateur au coût total le plus bas possible. En intégrant les apports des travaux d'Alderson (1950)8(*) , Bucklin élabore en 1967, une deuxième théorie qu'il appelle « décalage - spéculation » (Filser Marc et al, 2001). Le comportement de décalage exprime l'idée d'aversion pour le risque c'est- à- dire le report le plus en aval possible des opérations de différenciation et de stockage qui engendrent généralement des coûts donc de risques. Le concept de décalage se base sur l'idée d'une prévision efficace des ventes. Il s'agira dans ces conditions d'un système de production sur commande dans lequel il n'existe aucun stock de produits finis. Le comportement de spéculation quant à lui, conduit au contraire, à l'anticipation des opérations de différenciation et de stockage le plus tôt possible en amont du canal pour réduire les coûts du système marketing. La réduction des coûts du système marketing s'effectue en s'appuyant sur la production à grande échelle, réduisant le nombre de transactions et en limitant le risque de rupture de stocks. Dans cette optique, le fabricant doit veiller à ce que la production ne dépasse pas les ventes, sinon l'augmentation des coûts issue d'une spéculation sur les stocks l'emportera sur les avantages issus d'une production à grande échelle et d'une réduction du nombre de transaction. Schéma 1 : Modèle explicatif du canal à partir de la création d'utilité de Bucklin Niveau de service demandé par le consommateur Niveau de service atteint Commande minimale Délai de livraison Décentralisation géographique Etendue de l'assortiment Organisation du canal Source :Helfer J.-P. et Orsoni J. (2001) Dans la même logique que Bucklin , Stern L. et Sturdivant F. (1987)9(*) quant à eux, proposent cinq questions pour appréhender les attentes du consommateur en matière de la distribution.(voire tableau 2) Tableau 2 : Cinq questions en préalable à la prise de décision
Source : Filser M. et al (2001) La prise en compte de la création d'utilité pour le compte du consommateur entraîne donc une progression importante dans l'analyse des canaux de distribution : la recherche de coût minimal est désormais subordonnée à la production d'utilité. Filser M. et al (2001) précise que « L'objectif majeur de l'industriel est de satisfaire la demande du consommateur final pour se développer sur le marché. Il est donc nécessaire de l'analyser pour définir le canal de distribution le mieux adapté » Ainsi, l'introduction de l'utilité dans les modèles économiques va donc remettre en cause l'analyse des coûts fonctionnels : comme il n'est pas possible d'associer un niveau d'utilité à chaque coût fonctionnel, il serait plus intéressant d'analyser le canal de distribution comme un ensemble autonome. L'idéal dans cette optique serait un dépassement de la conception bipolaire du marché (le producteur et le consommateur) vers une vision tripolaire (le producteur, le consommateur et le canal de distribution) (Filser M., 1992). Aussi selon l'auteur, l'objectif principal étant la production d'utilité pour le compte du consommateur, il est impossible de voir la structure du canal de distribution comme le résultat d'une décision unilatérale d'optimisation des coûts par le producteur. D'un point de vue général, les analyses économiques des canaux peuvent être résumées par la réduction du coût de distribution et la création d'utilités pour le consommateur. Cette vision économique du canal de distribution, bien que particulièrement fructueuse pour compréhension de l'organisation et de l'évolution des canaux de distribution présente un aspect un peu restrictif : comment expliquer qu'un producteur continue à réaliser lui-même ses fonctions distributives avec un niveau de coût élevé que celui d'un intermédiaire, à niveau de service équivalent ? Pour Filser M. (1992), cette question ne peut trouve sa réponse que dans l'analyse du comportement des membres du canal de distribution. Ainsi, d'autres variables d'inspiration comportementales vont guider la réflexion des auteurs pour la proposition de modèles d'abord complémentaires (les modèles comportementaux ou behavioristes), ensuite le modèle intégrateur (le modèle de l'économie politique)
Dans cette perspective, nous proposons d'aborder successivement dans le chapitre suivant l'approche comportemental du canal de distribution et le modèle intégrateur de l'économie politique. * 7 Aspinwall L.,(1962), « The Depot Thory of Distribution », Managerial Marketing,Laser W. And Kelley E.J. eds.,Richard Irwin,Homewood,III.,p 652-659,cité par Jeanmougin C. (1992) * 8 Alderson W.(1950), « Marketing Efficiency and the Principle of Postponement »,Cost and Profit Outtl * 9 Stern L. et Sturdivant F. (1987), «Costumer-driven distribution systems», Havard Business Review, vol 65,n°4,pp. 34-41. |
|