2.1.2 Définition du domaine
Vu par Raynal (2003) comme une approche
stratégique du changement, le
management par projets, plus connu sous le vocable de la gestion
de projet au Québec, est :
Un mode de management stable et durable de tout ou
partie d'organisme qui vise à articuler de manière
efficiente les
6 « distance entre le niveau de
développement actuel qu'on peut le déterminer à travers la
façon dont l'enfant résout des problèmes seul et le
niveau de développement protentiel tel qu'on peut le
déterminer à travers la
façon dont l'enfant résout les problèmes
lorsqu'il est assisté par l'adulte ou collabore avec des pairs plus
avancés
(Vygotsky, 1985) »
« activités projets » avec les
activités récurrentes (fonctions,
services, ateliers...) (p. 25).
Toujours selon cet auteur, la mise en oeuvre du management par
projets est un
« choix stratégique qui résulte d'un
besoin d'adaptation face à un environnement complexe » (p.
26). Le succès de ce choix repose non seulement sur
l'adaptabilité du personnel en fonction des besoins, mais aussi
sur la forte interactivité entre services concernés par
rapport à un projet, ainsi que sur la motivation du personnel.
Afin
« d'allier rigueur et créativité »
dans cette réalité complexe tel que vu par Raynal (2003),
il est donc indispensable de disposer d'une vision globale du
processus et d'être capable
de concevoir ainsi que de mettre en oeuvre une
méthodologie qui permet d'atteindre l'objectif poursuivi et de
réaliser un programme. Cette démarche de conduite de projet, aux
yeux de Raynal (2003) est, en effet, une méthodologie,
c'est-à-dire, « un guide pour
ne rien oublier » (p. 229), que notre recherche
tente à démontrer une nouvelle utilité dans le
domaine de l'enseignement du français langue maternelle. Cet auteur la
définit comme une structure, un outil qui, au service du groupe, est un
moyen de canaliser les énergies et apporte une rigueur. C'est bien
là une des premières préoccupations de la chercheure tel
que déjà mentionnée à l'introduction, à
savoir comment allier exigences
et persévérance en salle de classe. Avec cette
première définition, Raynal (2003) a aussi défini d'autres
facettes de cette méthode en ce qui concerne ses forces et ses limites.
D'ailleurs, la conduite de projet peut, selon ce dernier, permettre de «
progresser sur une base de raisonnement commun et de faire des zooms
successifs sur le problème à résoudre ». Elle
nécessite une nouvelle façon de voir et d'agir,
c'est-à-dire :
[...] d'aller parfois à l'encontre de son
raisonnement habituel, d'approfondir
des aspects du problème qui a priori apparaissent
clairs, de différer certaines idées spontanées, d'accepter
d'avancer lentement, d'accepter que les autres aient une autre vision et
d'accepter que l'on ne détient pas obligatoirement
la vérité (p.229).
Tout comme Barbot & Camatarri (1999) dont nous avons
rapporté les propos, l'auteur insiste sur le fait que la
méthodologie de conduite de projet n'est pas « un contenu
» ni « une fin ». C'est bien dans ce sens qu'elle offre
l'universalité et la transférabilité d'un outil. De
plus, elle ne doit pas « se substituer aux individus » et
surtout, « entraîner la rigidité ». Cette approche
méthodologique de gestion respose sur
six principes de base présentés par Raynal (2003).
Lesquels nous confirment les propos
de Develay (préface de Grangeat, 1997) qui clame haut
et fort qu' « ainsi, l'éducation se distingue-t-elle du
conditionnement et plus encore, du dressage. Elle conduit à
faire exister de l'autonomie et de la liberté là où il
pourrait n'y avoir que de la contrainte ».
Le premier principe de Raynal (2003), celui de la
clairvoyance, prévoit une place à accorder à la
méthode et aux outils de résolution de problème. Le
principe de plaisir
réserve une marge de manoeuvre dans la chronologie
des étapes, dans la création des
outils spécifiques et dans l'exploitation de nouvelles
avenues. Le principe de cohérence
assure les points de passage universels de toute
méthodologie de résolution de
problème tels sa définition, son analyse, etc.
jusqu'à son évaluation et son testage. Le
principe de réalité amène un
pragmatisme où un résultat sans méthode peut
être
préférable à une méthode sans
résultat. Le principe de tolérancedonne la forme au bon
sens et met en garde un totalirisme méthodologique. Enfin,
le principe de nécessité
intègre la méthode dans le besoin du groupe
exprimé à un moment donné. Selon cet
auteur, il est préférable de passer du temps
à pratiquer un outil plutôt que d'être
perfectionniste sur son mode d'emploi.
Ces principes orientent l'utilisation de la gestion de
projet comme un outil méthodologique qui favorise des situations
d'apprentissage expérientielles, tel que présenté au
chapitre de la problématique puisque celui-ci permet, en somme,
un encadrement dans lequel l'apprentissage de l'écriture et la lecture
est considéré comme une situation de résolution de
problèmes (Boyer, 1998, dans Préfontaine, Godard &
Fortier). Cela nécessite réflexion et coopération entre
les acteurs, car le scripteur/lecteur du premier cycle du secondaire
n'est pas laissé à lui-même dans ces tâches
dans un premier temps. Or, pour Raynal (2003), cette méthodologie
s'apparente justement à la démarche de la résolution
de problème et comporte sept étapes que sont : la
définition du projet, l'analyse du projet, la recherche de solutions, le
choix de la solution, la présentation de la ou des solutions, la
mise en place de la solution et finalement, la mesure et le suivi des
résultats. Nous constatons que les étapes s'étalant
de l'analyse du projet jusqu'à la mise en place de la
solution ne sont nulles autres que les étapes de la planification et
contrôle en gestion de projet, mais vues sous l'angle de la
résolution de problème. Présenté de cette
façon, le management de projets selon Raynal rallie deux
conceptions classiques en gestion de projet
présentées par Hazebroucq & Badot (1996) : la
conception mécanique (hard) et la conception postmoderne
(soft), c'est-à-dire l'aspect méthodologique et l'aspect
métacognitif de notre recherche. Ce combat entre les «
mécanistes » (hard) et les « postmodernes » (soft)
est maintenant d'arrière-garde, tel que prédit par ces
deux auteurs, puisque les
deux approches co-habitent et interagissent selon
les besoins de chaque projet spécifique. C'est aux acteurs, et
surtout, aux managers de mener à bien un projet dans toute sa
complexité, tout comme les élèves et leurs enseignants en
salle de classe.
Aux yeux de Raynal (2003), la réussite passe par
l'adaptation des structures aux personnes. Il croit aussi qu'« un
projet, c'est associer des compétences et non des fonctions
». C'est, en fait :
Une nouvelle philosophie de management
constituée d'une culture particulière ainsi qu'un mode
d'organisation particulier impliquant un ensemble de techniques et
d'outils pour gérer de façon efficiente et efficace
le cycle de vie des projets (p. 273).
Cette nouvelle philosophie donne naissance ainsi à une
toute nouvelle culture, car l'approche client et la priorité des besoins
propres du projet y dominent. Cette culture est, selon nous,
transférable au domaine de l'éducation où les
actions doivent se converger vers les intérêts de le
scripteur/lecteur (approche client) d'où aussi, la priorité
à donner aux « besoins propres » de son
projet de réussite. Toujours selon Raynal (2003), cette
façon de faire met non seulement l'accent sur la tâche et les
résultats, mais tient compte aussi de l'environnement et est
capable de prendre des risques en encourageant l'initiative,
l'imputabilité, l'autodiscipline. Elle favorise également
l'esprit d'équipe et de collaboration. Le management par projets a
surtout une tolérance pour l'ambiguïté et pour le stress :
ambiguïté qui, dans le chemin didactique, existe entre la
nécessité de définir et de classer les objectifs et
l'hypothèse sur une opération mentale (par exemple la
déduction, l'induction, etc.) qu'il faut effectuer pour l'atteindre
(Meirieu,
1987/1993).
Dans la section qui suit, nous allons observer les
caractéristiques d'un projet afin
de pouvoir en faire un parallèle avec le projet
de réussite que visent les acteurs du domaine de
l'éducation.
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