Les chambres régionales des comptespar Jean-Philippe SOL ENS Cachan - DEA Action Publique et Sociétés Contemporaines 2001 |
III - LE MAGISTRAT FINANCIER DE LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES DANS LE SYSTÈME DE RÉGULATION POLITICO-ADMINISTRATIF FRANÇAISNous nous retrouvons donc dans une situation désormais un peu mieux définie. D'un côté, des élus de la Nation se retrouvant dotés de compétences nouvelles, ayant désormais à coopérer dans la plupart des cas avec les services de l'Etat pour mener à bien les projets d'infrastructures et d'aménagements du territoire et continuant à être moteur dans le développement économique de leurs territoires, auxquels est attribué un principe de responsabilité, selon lequel les projets politiques, au travers des actions publiques locales et qui se voit confirmer, à posteriori, la justesse de ses actions entreprises. Comme pour une entreprise et ses commissaires aux comptes, lesquels certifient annuellement, les résultats des entreprises. Pourtant, les territoires politiques ne sont pas les lieux de marchés comme les autres. Les responsables politiques locaux, après des ajustements techniques acceptées par l'ensemble des parties, sont de plus en plus réticents. C'est que, depuis une dizaine d'années, les instances centrales et les pouvoirs politiques ont resserré les conditions de contrôle des comptes publics, notamment en raison de spectaculaires scandales politiques, qui ont touchés, sans exception, l'ensemble du spectre politique de la Nation. Publicité faite autour des lettres d'observation et développement spectaculaire des politiques d'évaluation ont rendu les élus territoriaux plus acerbes devant ce qu'ils estiment être, sur le fond, une ingérence de fonctionnaires dans leurs affaires d'hommes publics, appréciation surdéterminée par les particularités des organisations auxquelles ils ont affaire, l'invulnérabilité dont elles jouissent et les différences de comportements d'une chambre à l'autre Les scandales politico-financiers et la volonté réelle de la majorité des édiles de mener des politiques salubres et exemptes de retombées négatives ne leur font pas oublier qu'ils n'ont pas beaucoup de moyens de rétorsions face à des magistrats qui sont souvent leurs seuls contre-pouvoirs. Sous l'oeil d'un centre qui veille probablement à ne pas envenimer les rapports de forces politiques, les parties en présence, n'ayant pas la possibilité d'influer sur les régles édictées par le centre (pour de multiples raisons), se livrent à des stratégies d'ajustement permanentes, compte tenu des ressources disponibles. Les filières électives, les regroupements d'élus, les associations de conseillers ou les syndicats de magistrats sont autant de moyens, démultipliés par le cumul des mandats ou la superposition des réseaux de se positionner par rapport aux enjeux communs des multiples systèmes d'action locaux. Certes, il y a fragmentation des territoires mais il y a aussi, et surtout, un remembrement des enjeux qui définit les positions actuelles. L'utilisation des concepts de réseaux de politiques publiques va nous servir de référents afin d'élucider les récentes évolutions. Les acteurs mobilisent, chacun à l'aune de leurs propres contraintes, leurs ressources propres afin de peser dans les processus de coordination qui se créé, dans des environnements fragmentés et mouvants, perturbant ainsi les anticipations rationnelles fondées sur des systèmes de valeurs spécifiques. DÉMARCHE COMPARATIVE DES ÉVOLUTIONS POLITICO-ADMINISTRATIVES RÉCENTES[1) Les différents niveaux de l'Action Publique : l'exemple Européen
Grâce à ce tableau, nous pouvons nous rendre compte, en économie ouverte, à institutions constantes, et dans la perspective européenne, des enjeux liés à la territorialisation71(*). Les territoires prennent en charge l'aménagement opérationnel du territoire, sauf quand ils ne le peuvent pas, auquel cas, comme pour le maillage numérique, l'Etat passe des engagements avec des opérateurs privés, et le développement local. Ils sont aussi vecteur de développement économique et social. Si le rôle de l'Etat tend à s'affaiblir, c'est que celui-ci a fortement contribué à scier les branches sur lesquelles il était assis. La construction européenne , le marché, la mondialisation, la déréglementation sont autant de phénomènes venus du « haut ». D'un Etat monolithique-hiérarchique, nous sommes passé à une époque durant laquelle l'Etat dispose d'une palette d'outils variés lui permettant, à distance, de contrôler les fondamentaux économiques et de garantir la solidarité sociale. La décentralisation n'est pas, à proprement parler un outil, surtout si l'on considère l'histoire de l'administration française, mais son mode de fonctionnement actuel, avec des processus de dessaisissements partiels ou définitifs, participe de ce phénomène. Par ailleurs, avec l'existence de la Région tendant à être une forte unité politique autonome, le local est devenu un pivot important du développement. La maîtrise des enjeux administratifs et technocratiques reste donc fort puisque qu'il conditionne pour partie la scène politique locale, elle-même matrice d'un certain développement économique, puisque les territoires peuvent se retrouver en concurrence pour l'attribution de ressources permettant aux unités économiques d'effectuer des choix discriminants. L'exemple de l'installation de Toyota à Valenciennes ou d'une Usine Mercedes dans la Région de Nancy [pour fabriquer les voitures « Swatch »] est une illustration de ces mécanismes. * 71 Voir l'article de P. Le Galès, « Régulation, Gouvernance et Territoire », Les métamorphoses de la Régulation Politique, Sous la Dir. De J. Commaille et B. Jobert, LGDJ, 1998. L'auteur évoque la fragmentation des sociétés nationales et la structuration progressive d'un Espace politique, mais aussi les perspectives de recherche en Europe de l'Est. |
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