Les chambres régionales des comptespar Jean-Philippe SOL ENS Cachan - DEA Action Publique et Sociétés Contemporaines 2001 |
UNE AUTONOMIE POLITIQUE SOUS CONTRÔLECependant, voir dans le déploiement de la décentralisation un retrait des possibilités de contrôle de la gestion publique locale serait illusoire. Si la fragmentation des politiques publiques est réelle, si les relations entre le centre et la périphérie ont évolué de façon significative, le contrôle de l'action publique territoriale reste fort et s'effectue sur différents niveaux. [3) L'établissement du budget comme vecteur initial des politiques publiques localesEn effet, l'activité du Préfet s'exerce dès l'établissement du budget de la collectivité, qui observe peu ou prou les mêmes règles que lors de l'établissement du budget de l'Etat. Le budget local se fabrique de la même façon que le budget national . Avec les mêmes exceptions : Normalement, il n'y a pas de correspondance entre les recettes et les dépenses. Cependant, de nombreux textes prévoient des exceptions avec des obligations d'affectation de certaines recettes qui constituent autant d'atteinte à l'autonomie de gestion des collectivités locales. Il peut y avoir ainsi des exceptions : subventions spécifiques accordées pour un objet déterminé ; des emprunts ; voire certaines ressources fiscales comme la taxe de séjour destinée à favoriser la fréquentation touristique de la commune ou le versement destiné aux transports en commun ; enfin des dotations de l'Etat qui ne sont pas libre d'usage comme les dotations scolaires. Des activités financières de certains services publics locaux méritent d'autre part d'être individualisées dans des budgets annexes. Par exemple des activités de régie, de la production de biens ou de la dispense de prestations. Il y a donc prise en compte des mouvements financiers, en négatif ou en positif, dans les soldes généraux du budget principal, ce qui limite l'atteinte au principe d'unité budgétaire. En revanche, des pratiques de débudgétisation portent plus gravement atteinte à ce principe puisqu'on arriver à confier des opérations financières d'intérêts local à d'autres personnes morales que la collectivité, telles que les Sociétés d'Economie Mixte ou les associations, dont l'activité préoccupent souvent les magistrats des chambres régionales des comptes. Même si l'établissement du budget est doté des mêmes caractéristiques que celles observées au niveau national, les responsables politiques locaux sont en effet surveillés de multiples manières. [4) Un contrôle en forme de triangle de ferPour résumer de façon schématique, c'est une espèce de triangle de fer qui ceinture l'activité des collectivités territoriales. En amont, c'est le Préfet, qui applique essentiellement le principe de légalité ; en aval, c'est la chambre régionale des comptes, qui effectue un contrôle juridictionnel et financier ; en arrière-plan, la gestion matérielle des fonds étant confiée, comme nous l'avons déjà constaté, au Trésor. Parallèlement à ces attributions de compétences et à une relative indépendance en termes décisionnels, liée notamment à leur statut d'élus., il existe une multitude de contrôles qui encadrent solidement l'activité des collectivités locales. - Le contrôle politique Le budget primitif peut être adopté après avis du Conseil Economique et Social régional. Consécutivement au vote, le budget est transmis au représentant de l'Etat et aux citoyens, lesquels ont la faculté de poser des recours de nature administrative. Les assemblées ont le droit d'obtenir des informations en cours d'exécution de budget et elles doivent également publier des rapports annuels. Depuis 1992, la loi Sapin a renforcé le pouvoir d'information des élus locaux et le droit des habitants de la commune à être informés des affaires de celles-ci. - Le contrôle de légalité ensuite. Le représentant de l'Etat, le Préfet, a en effet la faculté d'utiliser le déféré préfectoral afin de saisir le tribunal administratif, en cas de non-respect du principe de légalité. Par ailleurs, l'intérêt pour agir est admis au bénéfice des contribuables de la collectivité et des membres de l'assemblée locale ayant apportée leur concours à l'adoption de la décision attaquée y compris les membres du Conseil économique et social régional (CE, 1988, Département du Tarn contre Limouzy et autres). Ce qui veut dire que le recours pour excès de pouvoir est accessible en cas, par exemple, d'absence d'inscription d'une dépense obligatoire28(*). L'annulation pour défaut de légalité externe peut également être invoqué puisque le vice de forme a même été prononcé pour omission d'une formalité substantielle. - Le contrôle budgétaire Plusieurs cas de figures sont ici possibles et ils font l'objet d'un contrôle notamment par la Chambre régionale des comptes. C'est le cas lorsqu'il y a un retard dans l'adoption du budget primitif, un budget voté en déséquilibre, un budget exécuté en déséquilibre ou en cas de défaut d'inscription d'une dépense obligatoire. * 28 Pour les aspects financiers, comptables et administratifs, relevant des collectivités territoriales, voir notamment : J.L. Gousseau, « Finances publiques : les finances locales », cours polycopié du CNED, unité de la licence d'administration publique, 2000-2001 et A. Sorbara, « Les institutions administratives de la France », cours polycopié du CNED, unité de la licence d'administration publique, 2000-2001. Voir également M. Bouvier, Les Finances Locales, LGDJ, 1998 ; A. Paysant, Finances locales, Droit Fondamental PUF, 1993. |
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