La règlementation des contenus illicites circulant sur le reseau internet en droit comparépar Caroline Vallet Université Laval de Québec - 2005 |
4) Le fournisseur d'hébergementCet intermédiaire technique est celui qui effectue « une prestation durable de stockage d'informations que la domiciliation sur son serveur rend disponibles et accessibles aux personnes désireuses de les consulter »346(*). Le trinôme « pouvoir - savoir - inertie » s'applique à ce dernier. Il est donc irresponsable sous certaines conditions. Il est tenu responsable s'il a de fait connaissance de documents à contenu illicite, qu'il a la possibilité d'intervenir et qu'il n'agit pas promptement pour éviter le trouble347(*). Il ne doit pas, comme les précédents intermédiaires, excéder ses fonctions d'hébergeur sinon il ne pourra pas bénéficier de l'exonération de responsabilité348(*). Ce prestataire doit ainsi fermer ou rendre l'accès impossible aux documents litigieux en préservant les droits des tiers349(*). En France, cet intermédiaire n'est pas a priori responsable350(*), puisque la Loi du 1er août 2000 ne met en place qu'un seul cas d'imputation de responsabilité. L'hébergeur n'est responsable que dans le cas où « ayant été saisi par une autorité judiciaire, il n'a pas agi promptement pour empêcher l'accès à ce contenu »351(*). Ce système est aussi en contradiction avec la Directive sur le commerce électronique. 5) Les acteurs de navigationCes PSI recouvrent différentes activités telles que les index, les hyperliens352(*), les répertoires, les annuaires353(*) et les moteurs de recherche354(*). À la différence des autres législations, la LCJTI, comme la loi américaine DMCA355(*), prévoit un régime de responsabilité spécifique pour les services de référence356(*). Ces intermédiaires sont soumis à une irresponsabilité sous conditions comme pour les fournisseurs d'hébergement. En effet, ils sont responsables s'ils savent que les services fournis sont illicites et qu'ils ne cessent pas promptement la fourniture d'un tel service. La Loi du 1er août 2000 ainsi que le Projet LEN, ne prévoient aucun système de responsabilité spécifique pour ces PSI. Par contre, une analogie avec la responsabilité des hébergeurs peut être faite357(*). Pour conclure sur ce second chapitre, il est intéressant de retenir que l'élaboration des nouvelles lois est passée par de nombreuses tentatives pour finalement dégager une réglementation se combinant avec le droit commun. Les PSI sont désormais soumis à une irresponsabilité a priori pouvant les exonérer si les conditions définies par les textes sont remplies. Les législateurs des pays étudiés ont donc choisi cette solution pour éradiquer les contenus illicites circulant sur le réseau Internet. Ce nouveau système ne paraît pourtant pas satisfaisant sur certains points, même s'il est encore tôt pour véritablement analyser les effets de ces législations. Ces dernières en permettant aux PSI de retirer les informations ou de les rendre inaccessibles, introduisent une nouvelle censure dans le système juridique. Ce remède peut, à première vue, apparaître comme radical voire antidémocratique. Mais, d'un autre côté, il semble justifié par la pléthore de contenus illicites circulant sur le réseau Internet. * 346 Lacoste c. SA Multimania Production et a., précitée, note 159. * 347 Directive sur le commerce électronique, précitée, note 176, art. 14 ; LCJTI, précitée, note 252, art. 22 et Projet LEN, précité, note 17, art. 43-8. * 348 Directive sur le commerce électronique, art. 14 al. 2 ; Voir aussi : SANTIAGO CAVANILLAS, op. cit., note 214, p.44 et P. TRUDEL, La responsabilité sur Internet, loc. cit., note 255, p.20. * 349 SANTIAGO CAVANILLAS, Id., p.46. * 350 A. LEPAGE, «La responsabilité des fournisseurs d'hébergement et des fournisseurs d'accès à l'Internet : un défi nouveau pour la justice du XXIe siècle ?», loc. cit., note 194, 15 ; Rapport n°608 de Mme M. TABAROT, op. cit., note 201 : les dispositions de la Loi du 1er août 2000 posent un principe d'irresponsabilité des hébergeurs puisqu'ils ne doivent seulement déférer aux injonctions de la justice. Ils ne sont tenus par aucun autre type de vigilance. * 351 Loi du 1er août 2000, précitée, note 17, art. 43-8. * 352 Les hyperliens sont la connexion reliant des ressources accessibles par des réseaux de communication (par exemple le réseau Internet). Ils sont composés notamment des éléments suivants, visibles ou non pour l'utilisateur : élément actif ou activable (le pointeur), adresse de destination, conditions de présentation de la ressource liée : Définition prise de la RECOMMANDATION DU FORUM DES DROITS SUR L'INTERNET, Quelle responsabilité pour les créateurs d'hyperliens vers les contenus illicites ?, 23 octobre 2003, en ligne sur : Le Forum des droits de l'Internet < http://www.foruminternet.org/telechargement/documents/reco-resphyli-20031023.pdf> (site visité le 13 mars 2004). * 353 Un annuaire est une liste de sites disposée selon des catégories et des sous-catégories. Chaque site, pour figurer dans la base de données, doit préalablement s'enregistrer par le biais d'un formulaire, indiquant un titre, une courte description et des mots clés relatifs au document. Il ne s'agit pas d'une indexation automatique effectuée par un robot mais d'un référencement humain et volontaire : définition prise à Thibault VERBIEST et Étienne WERY, La responsabilité des fournisseurs d'outils de recherche et d'hyperliens du fait du contenu des sites référencés, 2001, p.6, en ligne sur : droit et nouvelles technologies < http://www.droit-technologie.org> (site visité le 13 mars 2004). * 354 Id. : Un moteur de recherche est un logiciel d'exploration qui visite en continu les pages Web et les index de manière automatique dans une base de données en fonction des mots clés qu'ils contiennent. * 355 Loi promulguée le 21 octobre 1998 par le Congrès américain. * 356 LCJTI, précitée, note 252, art. 22 al. 3. * 357 Murielle CAHEN, La responsabilité des outils de recherche, 29 novembre 2002, en ligne sur : < http://www.clic-droit.com/web/editorial/dossier.php?dossier_id=26> (site visité le 13 mars 2004). |
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