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L'obligation d'informer la caution durant l'exécution du contrat de cautionnement en droit de l'OHADA


par Fabrice Essone Zang
Université Africaine des Sciences de Libreville (UAS) - Master en droit des affaires 2017
  

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Paragraphe 2 : le silence du législateur OHADA sur le coût de l'information

Il convient de rappeler qu'en pratique l'information ponctuelle de la caution est souvent communiquée à la caution par exploit d'huissier de justice et aux frais de celle-ci, voilà pourquoi nous n'évoquerons que le coût de l'information périodique qui pose davantage problème bien qu'il serait utile que le législateur intervienne également dans le coût de l'information ponctuelle.

Ainsi, notre travail nous conduira tout d'abord à mettre en exergue les conséquences du vide juridique laissé par les législateurs français et OHADA (A). Puis, nous suggérerons une information périodique de la caution générale aux frais exclusifs du créancier (B).

A- Les conséquences du mutisme des législateurs français et africain

Le refus de prise en compte du coût de l'information de la caution par le législateur français et africain provoque inévitablement de fâcheuses conséquences. En effet, en absence de loi, l'on ne sait pas qui devrait supporter le coût de l'information (1) voilà pourquoi le créancier profite du vide juridique pour agir de manière discrétionnaire (2). Toutefois, une idée issue de la doctrine française fait son chemin, mais ne trouve ni écho auprès des créanciers, ni auprès des juridictions françaises et encore moins auprès du législateur (3).

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1) La partie devant supporter les frais de l'information périodique en droit de l'OHADA

Pour de nombreux débiteurs africains et français, il n'y a que la lettre et son envoi qui leur sont facturés dans l'optique d'informer la caution, voilà pourquoi ils s'insurgent systématiquement contre la facturation supplémentaire dudit service. Cependant, l'on constate avec les professeurs MODI KOKO BEBEY Henri Désiré et JAMES Jean Claude que « ce formalisme [celui de l'article 25 de l'Acte uniforme portant organisation des Sûretés] pèse énormément sur les banques par l'augmentation subséquente de leurs charges d'exploitation (en personnel, moyens de communication...) que les clients concernés refusent de supporter à travers la facturation de communication de commissions supplémentaires »214.

Mais, déjà au niveau de l'envoi, le professeur Sévérine CABRILLAC précise que « même par lettre simple, l'envoi généralisé de l'information coûte cher »215. Toutefois, précisons que l'affirmation du professeur Sévérine CABRILLAC ne vaut que pour la France, car en droit de l'OHADA, nous avons déjà démontré que la masse des destinataires de l'information périodique était fortement réduite (seuls les cautionnements tous engagements sont concernés).

Cependant, si en droit de l'OHADA l'envoi généralisé de l'information périodique revient moins cher au créancier, l'article 25 de l'AUS ne prend pas en considération le caractère onéreux de l'obligation d'information, il reste notamment muet sur l'identification de la partie qui devrait assumer ledit caractère onéreux, alors qu'il s'agit d'une exigence que ledit texte impose aux créanciers.

Pourtant, l'on constate que le législateur OHADA a déjà eu à identifier la partie qui devrait prendre en charge le coût des obligations imposées par ladite organisation communautaire. En effet, par exemple, l'alinéa 1er de l'article 283 in fine de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général (AUDCG) dispose que le « vendeur a la faculté d'imposer, à ses frais exclusifs et sans délai, à l'acheteur le remplacement des marchandises défectueuses par des marchandises conformes ».

214 Ersuma, École Supérieure de la magistrature formation de juristes béninois en droit OHADA (magistrats groupe I), droit bancaire : contentieux des sûretés et du crédit, du 07 au 11 avril 2008, Porto Novo, animateurs : Pr MODI KOKO BEBEY Henri Désiré et Pr JAMES Jean Claude. Séminaire de formation disponible en format PDF sur le site biblio.ohada.org

215 M. Cabrillac et al., Op. cit., n° 319, p.229, préc.

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Si le remplacement des marchandises défectueuses au frais exclusif du contractant dominant au contrat de vente commerciale est une réalité en droit de l'OHADA, pourquoi l'obligation d'information semestrielle au profit de la caution ne pourrait-elle pas être supportée par la partie dominante au contrat de cautionnement ?

Vu le silence du législateur, les habitudes du créancier ne peuvent donc que perdurer. 2) La liberté de facturation de l'information périodique de la caution

Le problème du manque de prise en compte du coût de l'information périodique de la caution n'est pas exclusif à l'OHADA. En effet, ledit problème existe également en France où le législateur n'a pas pris en considération le coût de l'obligation annuelle des cautions, alors qu'il l'avait imposée aux établissements de crédit et aux créanciers professionnels.

Aussi, en France, afin d'éviter les abus des établissements de crédit dans la facturation de l'information de la caution, un sénateur avait proposé le chiffrage de l'information annuelle des cautions, sans succès.

En effet, en 1996, le Sénat français avait introduit la question dudit Sénateur comme suit :

« M. Louis Souvet attire l'attention de M. le ministre de l'Économie et des Finances sur l'importance des frais prélevés à l'occasion de l'information par les établissements bancaires vis-à-vis des cautions. Cette obligation n'a pas donné lieu à un chiffrage précis de la part des pouvoirs publics et laisse de ce fait la place à de nombreux abus. Il demande si pour éviter de tels abus le Gouvernement entend instituer une limite quant à la facturation d'une telle information, par ailleurs nécessaire »216.

Mais, telle fut la réponse du ministre français de l'Économie et des Finances de l'époque :

« L'envoi annuel d'une telle information à la caution est générateur de frais de recherche et de gestion non négligeables pour les établissements de crédit. Par ailleurs, le fait que l'obligation soit imposée par la loi n'est pas en soi un élément de nature à rendre injustifiée la facturation du service rendu. Bien que les établissements de crédit soient libres de facturer les services rendus aux cautions comme à leur clientèle, ils doivent respecter les dispositions de l'article 7 du décret du 24 juillet 1984 relatif à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, qui dispose que «les établissements de crédit sont tenus de porter à la connaissance de leur

216 Question écrite n° 16170 de M. Louis Souvet (Doubs-RPR) publiée dans le JO Sénat du 20/06/1996 -- page 1491. Disponible sur le site www.senat.fr

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clientèle et du public les conditions générales de banque qu'ils pratiquent pour les opérations qu'ils effectuent». Cette obligation d'information préalable s'applique à toutes les opérations de banque ; elle est la contrepartie nécessaire de la liberté de facturation des services bancaires. Le Gouvernement n'entend par revenir sur le principe de la liberté de facturation de ces services, puisque celle-ci a comme corollaire le développement de la concurrence et la transparence des conditions de banque »217.

Le ministre de l'Économie faisait donc tout d'abord ressortir l'augmentation des charges d'exploitation des établissements de crédit que les professeurs MODI et JAMES avaient évoquée plus supra (l'envoi de l'information de la caution est « générateur de frais de recherche et de gestion non négligeables pour les établissements de crédit »).

Mais, ensuite ledit ministre alla plus loin en rejetant le caractère gratuit de l'information de la caution du fait de son caractère légal. Ce n'est donc pas parce que la loi oblige le créancier à informer la caution qu'il doit le faire à ses propres frais. Pis, le ministre de l'Économie continua en faisant de l'obligation d'information sur les conditions générales de la banque une condition sine qua non à de la liberté de facturation de l'information des cautions. Il suffit donc que le débiteur eût été informé au préalable du coût des services bancaires qu'il sollicite (ou en l'occurrence ceux que la loi veut qu'il assume) pour que lesdits services bancaires légalement prescrits (information de la caution) lui soient facturés par le créancier...

Enfin, le ministre rejette le chiffrage gouvernemental préalable de l'information annuelle de la caution en évoquant la liberté de la concurrence.

Toutefois, le blog de la banque et du patrimoine rappelle que les motifs du ministre de l'Économie de 1996 à savoir les « frais de recherche et de gestion non négligeables pour les établissements de crédit » sont aujourd'hui désuets. En effet, le blog constate que « l'informatisation des banques et l'automatisation des systèmes font que les recherches sont aujourd'hui nulles ou quasi nulles et qu'il ne reste plus aux banques que les frais d'affranchissement et d'édition »218.

217 Réponse du ministère : Économie publiée dans le JO Sénat du 29/08/1996 - page 2219. Disponible sur www.senat.fr

218 Le blog de la Banque et du patrimoine, les frais de lettre d'information aux cautions, article disponible sur http://leblogdelabanqueetdupatrimoine.blogspot.com/2014/06/frais-lettre-dinformation-aux-cautions.html [site consulté le 04 janvier 2017]

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Pour revenir à l'OHADA et à ses pays membres, nos investigations nous ont permis de constater qu'aucune banque parmi les banques gabonaises avec lesquelles nous sommes rentrés en contact ne facturait l'information semestrielle de la caution.

En effet, par exemple, pour un chargé d'appui juridique à Banque internationale du commerce et de l'industrie du Gabon (BICIG) dont nous tairons le nom pour des soucis de confidentialité, l'élaboration de l'information de la caution ne pose aucune difficulté majeure puisque la banque dispose d'un fichier à même de fournir en temps les informations de chaque client. Toutefois, ledit chargé d'appui juridique évoque des difficultés quant à la transmission de l'information dès lors que le client change d'adresse ou lorsque celui-ci ne possède aucune adresse personnelle certaine...

À ce sujet, nous pouvons dire que l'établissement de crédit n'est pas tenu pour responsable du défaut de réception de l'information de la caution en cas de changement d'adresse qui n'a pas été au préalable notifié à l'établissement de crédit219.

En revanche, en ce qui concerne l'arbitraire dans la facturation de l'information périodique, sur internet, nous avons eu accès à un document en format PDF de la Banque commerciale internationale de la République du Congo (BCI) qui renseignait sur les tarifs des services bancaires proposés par ladite banque et l'on a constaté que celle-ci facturait l'information semestrielle au client à 19.230 FCFA220 pour l'année 2016. Cette facturation discrétionnaire de l'information de la caution d'une banque à une autre et d'un état membre à un autre met en évidence le vide juridique sur la prise en considération du coût de l'information semestrielle de la caution par le législateur OHADA.

Donc, au vu de l'arbitraire régnant dans la facturation de l'information périodique, une idée a germé dans l'esprit de plusieurs juristes français.

219 CA Bastia, 5 mars 2014, n° de RG 12/00726.

220 Conditions générales des principales opérations de la clientèle professionnelles et entreprises, fichier PDF disponible sur www.bci.banquepopulaire.com/.

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3) L'inclusion des frais relatifs à l'information de la caution dans le taux effectif global

Le taux effectif global est le taux incluant, outre les intérêts proprement dits, les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux destinés à des intermédiaires intervenus dans l'octroi du prêt221.

Toujours en France, selon l'avocat Marcelin SOME, « Les frais d'information annuelle de la caution prélevés sur le compte de l'emprunteur sont des débours au sens de l'article L.331-1 de [l'ancien] Code de la consommation et le banquier doit impérativement les inclure dans le calcul du taux effectif global. En effet, l'apport d'une caution est très souvent une garantie exigée par les banques avant l'octroi du crédit par conséquent les frais d'information annuelle de la caution sont une charge liée à l'opération de prêt. Lorsque la banque omet d'inclure les frais d'information annuelle dans le calcul du taux effectif global il encourt la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ou de substitution du taux légal ou taux conventionnel »222.

Donc, afin d'éviter la variabilité des frais de l'information périodique, l'avocat considère ceux-ci comme étant des débours que le banquier devrait inclure dans le calcul du taux effectif global, autrement dit lesdits frais seraient des dépenses destinées à des intermédiaires intervenus dans l'octroi du prêt.

Toutefois, l'avocat au barreau de Lyon précise que son raisonnement est fondé sur la jurisprudence de plusieurs Cours d'appel223 françaises et non sur la jurisprudence de la Cour de cassation française elle-même. De ce fait, une telle jurisprudence n'est pas représentative du droit positif français du cautionnement dans sa généralité.

Cependant, l'idée de l'inclusion des frais relatifs à l'information de la caution dans le calcul du taux effectif global permettrait d'éviter la surfacturation de l'information au cours de l'exécution du contrat de cautionnement ainsi que les abus, à défaut d'un chiffrage gouvernemental précis comme le suggérait le Sénateur SOUVET au ministre de l'Économie de l'époque.

221 Raymond Guillien et al., Op. cit., p. 840.

222 Marcelin Some, les frais d'information annuelle de la caution doivent être inclus dans le calcul du TEG, article disponible www.some-avocat.com.

223 C.A Lyon, Civ.3, Section A, 12 juin 2008, n° 07/03698 et CA, Poitiers, 19 juillet 2011, n° 10/03218.

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La prise en compte du coût de l'information de la caution aurait alors lieu à la formation du contrat de prêt puisque les frais de l'information de la caution seraient calculés à ce moment.

Ainsi, en France, aucune banque ne pourrait plus affirmer « qu'aucun texte ni la jurisprudence n'imposent à la banque d'intégrer les frais relatifs à l'information annuelle des cautions pour calculer le taux effectif global -- que cette information n'existe que pour autant que la caution subsiste -- que les frais s'y rapportant sont facturés à la caution qui est seule bénéficiaire de cette information -- que ces frais ne relèvent donc pas du TEG »224.

En zone OHADA, étant donné que le législateur communautaire demeure silencieux sur le coût de l'information, l'inclusion dudit coût dans le taux effectif global n'est pas encore envisageable d'un point de vue juridique du moins, car cette inclusion pourrait toujours se faire de manière discrétionnaire par le créancier voilà pourquoi nous recommandons une information aux frais exclusifs du contractant dominant qu'est ledit créancier.

B- L'information de la caution générale au frais exclusif du créancier en droit de l'OHADA

Si la BICIG au Gabon ne facture pas l'envoi de l'information périodique de la caution générale, alors pourquoi la BCI au Congo ne pourrait-elle pas faire de même ? Nous recommandons donc au législateur OHADA d'alléger le poids de la dette de la caution générale (qui se porte déjà garant de tous les engagements du débiteur principal) en mettant les frais de l'information à la charge du créancier.

D'ailleurs, il est reconnu que le législateur prenne souvent le parti des contractants les plus faibles en faisant payer les contractants les plus forts. En effet , par exemple, l'article 189 de la loi n° 12/2000 portant Code du travail gabonais fait supporter les frais du déplacement du travailleur à l'employeur lorsque l'exécution du contrat de travail entraîne un changement de lieu ou de localité.

Nous suggérons alors un déséquilibre au profit de la caution qui est le contractant vulnérable dans le contrat de cautionnement d'autant plus qu'il serait injuste de lui imposer le coût de l'information. En effet, le principe en droit des contrats veut que l'on impose des obligations à la partie dominante au contrat.

224 C.A Lyon, Civ.3, Section A, 12 juin 2008, n° 07/03698, préc.

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Donc, les problèmes que nous avons relevés dans la communication de l'information de la caution sont l'effectivité de l'information de la caution et le caractère onéreux de celle-ci. Mais, lesdits problèmes sont également dus à la nature même de l'obligation d'information, une nature qui ne permet pas aux bénéficiaires des informations de contraindre le créancier à les tenir informés.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein