L'obligation d'informer la caution durant l'exécution du contrat de cautionnement en droit de l'OHADApar Fabrice Essone Zang Université Africaine des Sciences de Libreville (UAS) - Master en droit des affaires 2017 |
Paragraphe 2 : la protection d'un contractant et l'État interventionnisteMonsieur Laurent BRUNEAU remarque une invasion dans la sphère contractuelle depuis l'avènement de l'État providentiel qui est interventionniste contrairement à l'État libéral, abstentionniste. En effet, l'État providentiel s'immisce jusque dans les rapports entre contractants afin d'« imposer le respect des valeurs qu'il juge primordiales »26. C'est ainsi que naît un corps de règles spéciales et impératives : le droit de la protection du contractant (A). Toutefois, dans le droit des contrats, les règles protectrices et exorbitantes du droit commun sont soumises à certaines conditions notamment en matière de cautionnement (B). A- Le droit de la protection du contractantMonsieur Laurent BRUNEAU définit le droit de la protection du contractant comme « l'ensemble des règles juridiques qui ont pour objet ou pour effet de protéger, dans un contrat donné, l'un des contractants »27. En effet, le juriste fait remarquer qu'en ce qui concerne la France, il existe une multitude de dispositions légales qui tendent à protéger une catégorie de personnes en particulier et qui ne légifèrent que sur les rapports de ceci avec des justiciables particuliers souvent plus riches et plus puissants (employeur, créancier professionnel). Lesdites lois sont souvent codifiées et portent alors des intitulés évocateurs tels que Code du travail ou encore Code de la consommation. 24 L. Aynès, P. Crocq et Ph. Malaurie (dir.), Les sûretés : la publicité foncière, 7e éd., Coll. Droit civil, Defrénois, 2013, n ° 297, p. 136-137. 25 A. S. Barthez et D. Houtcief, Les sûretés personnelles, LGDJ, 2010, n° 662 et s. 26 L. Bruneau, Contribution à l'étude des fondements de la protection du contractant, Thèse de l'université des sciences sociales de Toulouse, 2005, n° 6, p. 9-10. 27 Ibid., n° 8, p. 11. 17 L'auteur constate également que « le contractant protégé est un contractant soustrait au droit commun »28. En effet, « les règles classiques qui régissent le contrat sont remplacées par d'autres, qui vont avoir pour objet ou pour effet de protéger l'une des parties »29. Toutefois, l'ingérence de la loi dans le domaine du travail et celui de la consommation n'est pas injustifiée, car il s'agit de domaines très sensibles dans lesquels les travailleurs et les consommateurs doivent être protégés contre de nombreux abus, voilà pourquoi l'autonomie de la volonté dans les rapports entre employeurs et employés et ceux entre créanciers professionnels et consommateurs est souvent contrôlée. On constate que le législateur français est fortement inspiré par la citation d'Henri LACORDAIRE « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c'est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ». En effet, c'est afin de prévenir les abus que le législateur s'immisce dans les rapports contractuels inégaux. Monsieur Laurent BRUNEAU ajoute que, relevant de l'ordre public de protection, « le droit de la protection du contractant est un droit impératif : les contractants ne peuvent déroger aux règles qui le composent »30. D'ailleurs, en France, en ce qui concerne notre sujet d'étude, à savoir les obligations d'information de la caution, il convient de signaler que lesdites obligations sont d'ordre public et que les cautions ne peuvent y renoncer31. En droit de l'OHADA, les clauses contraires aux dispositions des actes uniformes sont réputées non écrites. En outre, on constate de manière chronologique que les obligations d'information durant l'exécution du cautionnement en droit de l'OHADA s'inspirent fortement de l'article 48 de la loi française n° 84-184 du 1er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises (une loi spéciale). Lesdites obligations d'information sont par conséquent des règles dérogeant au droit commun et visant à la protection du contractant. Si les obligations d'information sont des dispositions d'ordre public dérogeant au droit commun et visant à la protection d'un contractant, il n'en demeure pas moins que certaines 28 Ibid. 29 Ibid. 30 Ibid. 31 Cass. Com., 14 déc. 1993, Bull. Civ. IV, n° 467, p. 340. 18 conditions doivent être remplies pour que la communication d'une information spécifique à un contractant soit obligatoire. |
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