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L'obligation d'informer la caution durant l'exécution du contrat de cautionnement en droit de l'OHADA


par Fabrice Essone Zang
Université Africaine des Sciences de Libreville (UAS) - Master en droit des affaires 2017
  

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Chapitre 2 : Réflexions sur les obligations d'information au profit de la caution

L'étude des obligations d'information au profit de la caution amène à s'interroger en particulier d'une part sur des difficultés à informer les cautions dans la pratique (Section 1) et d'autre part sur l'identité de nature des « obligations » d'information (Section 2).

Section 1 : L'effectivité et le coût de l'information

Malgré l'imposition de certaines obligations onéreuses (Paragraphe 2), on constate que ni le législateur français ni le législateur africain n'ont souhaité s'assurer de l'effectivité des mesures prises afin d'informer les cautions (Paragraphe 1).

Paragraphe 1 : l'absence de formalisme de l'information de la caution : une incompréhension vicennale

Imposer des obligations contraignantes à un professionnel est sans doute ce qu'il convient de faire vu l'inégalité patente entre celui-ci et le profane. Mais, en ce qui concerne la communication d'une information essentielle, comment le législateur peut-il oublier de s'assurer que le profane puisse réellement recevoir l'information (A), alors même que des procédés permettant une meilleure communication de l'information existent (B) ?

A- L'absence de formalisme de l'article 24 de l'AUS

En France, il a été jugé que l'information ponctuelle de la caution peut résulter de la mise en demeure adressée à celle-ci suite à la défaillance du débiteur188.

D'ailleurs, la Cour d'appel d'Abidjan a reconnu ladite procédure en jugeant qu'« il demeure qu'un seul exploit peut bien, comme en l'espèce constater la défaillance du débiteur et réclamer le paiement à la caution ; de sorte que la Société africaine de crédit automobile (SAFCA) n'a pas violé les articles 13 et 14 de l'AUS (de 1997) »189.

Notons que l'information de la caution est une obligation portable et non quérable190. En effet, une créance quérable est une créance dont le créancier doit aller réclamer l'exécution au domicile du débiteur alors qu'une créance portable est une créance que le débiteur doit

188 CA Paris, 31 oct. 1998, préc.

189 CA Abidjan, arrêt n° 370 du 28 mars 2003, Daniel BRECHAT et Alain MASSOULIER c/SAFCA ; Ohadata J-03280.

190 CA Grenoble, 11 sept. 1996 : JurisData n° 1996-044625.

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spontanément acquitter au domicile du créancier ou dans le lieu fixé par la convention191. C'est donc au débiteur de l'obligation d'information (le créancier garanti) de faire parvenir l'information jusqu'au bénéficiaire de l'information (la caution).

En droit de l'OHADA, comme en droit français, l'article 24 de l'AUS de 2010 ne prévoit pas de formalisme pour la mise en demeure de la caution bien qu'en pratique plusieurs créanciers préfèrent recourir aux services d'un huissier de justice sans doute à cause de la force probante des actes authentiques. Au demeurant, une simple lettre suffit pour tenir la caution informée.

Toutefois, nous avons constaté que certains créanciers trop diligents annexaient directement la lettre de mise en demeure de la caution à une ordonnance d'injonction de payer adressée elle aussi à ladite caution. Or, le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou (Burkina Faso) a jugé « que l'ordonnance d'injonction de payer est un titre qui permet d'engager les procédures d'exécution et ne saurait être assimilée à une mise en demeure »192.

Donc, si l'information ponctuelle de la caution n'est soumise à aucun formalisme en droit de l'OHADA, l'autre information de la caution étudiée dans notre travail paraît plus complexe d'où la suggestion d'une information au moyen d'un procédé permettant une meilleure effectivité de l'information. Ledit procédé pourrait également être imposé pour prouver la communication de l'information ponctuelle.

B- La nécessité de la lettre recommandée avec avis de réception pour la communication de l'information périodique

En France, en dépit des avantages de la lettre recommandée avec avis de réception (2), l'utilisation de la lettre recommandée n'a pas été imposée par la Cour de cassation. En effet, selon la haute juridiction non seulement « l'information de la caution constitue un fait qui peut être prouvé par tous moyens »193, mais aussi la Cour a jugé qu'« il n'incombe pas à l'établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée »194, ce qui est une contradiction flagrante avec la volonté de tenir la caution informée de l'état de la dette. En revanche, la suggestion, en droit de l'OHADA, du courrier

191 Raymond Guillien et al., Op. cit., p. 652 et 707.

192 TGI de Ouagadougou, jugement n° 53/2005 du 16 février 2005, NIKIEMA Arouna c/PNAR-TD ; Ohadata J-07227.

193 Cass. Com., 17 oct. 2000, Bull. civ. IV, n° 154, p. 138.

194 Ibid.

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en recommandé permettrait au créancier de s'acquitter du formalisme informatif imposé par l'Acte uniforme en plus de vérifier l'effectivité de la communication de l'information (1).

1) Le formalisme informatif de l'article 25 de l'AUS et l'absence de forme dans la communication de l'information périodique

Mention manuscrite obligatoire, signature et contenu précis du contrat sont des mesures formelles de protection du contractant profane qu'est la caution (a). Lorsqu'une lettre est soumise à un tel formalisme, il est évident qu'elle devrait impérativement parvenir jusqu'à son destinataire (b).

a. Définition

Le professeur François Terré explique que le formalisme informatif est le fait en vertu duquel « l'une des parties, fréquemment un professionnel, est obligée de rédiger le contrat par écrit et d'y insérer des mentions destinées à informer son cocontractant, le plus souvent, mais pas toujours un consommateur, sur les droits et les obligations qui en sont issus, sur l'objet même du contrat ou encore sur l'existence de dispositions légales protectrices »195.

Toutefois, l'auteur met en garde le législateur contre l'indolence des consommateurs à qui bénéficie ce formalisme informatif. En effet, François Terré explique que « celui-ci [le consommateur] est ainsi mis en mesure de s'engager en connaissance de cause s'il a pris la peine de lire attentivement le contrat avant de le signer, ce qui est loin d'être toujours le cas »196.

Si en droit français des mentions spéciales sont insérées dans l'information destinée à un contractant, il en est de même en droit de l'OHADA.

b. Le formalisme informatif de l'article 25 de l'AUS

Il est assez paradoxal de constater que l'information de l'article 25 n'impose aucun formalisme dans sa communication, mais qu'il existe tout de même un formalisme informatif qui devrait être respecté par le créancier.

195 F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Op. cit., n ° 262, p.292.

196 Idem.

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En effet, si l'article 25 de l'AUS n'impose d'emblée aucun formalisme en ce qui concerne la manière utilisée pour communiquer l'information à la caution197, l'alinéa 1er de l'article 25 impose la « reproduction littérale des dispositions de l'article 19 du présent acte uniforme » dans la notification.

En outre, l'article 19 de l'AUS de 2010 circonscrit tout d'abord l'information de la caution au seul cautionnement tous engagements et, sauf clause contraire, aux dettes contractuelles directes et nées après la conclusion du contrat de cautionnement. Puis, ledit article évoque non seulement le plafonnement de la somme garantie à peine de nullité de l'engagement, mais aussi le renouvellement de celle-ci. Enfin, l'article 19 met en exergue la faculté de révocation unilatérale de l'engagement.

Il est donc clair que, contrairement à l'information ponctuelle de l'article 24 de l'AUS, l'information périodique de l'article 25 renferme un formalisme dont le défaut entraîne la sanction du défaut d'information : la déchéance des intérêts contractuels. En effet, une information incomplète ne vaut pas information, du moins en théorie198.

Au vu de ce qui précède, l'on comprend que si l'information périodique de la caution doit contenir des éléments destinés à mieux renseigner la caution sur le type d'engagement qu'elle souscrit, alors des procédés adéquats devraient être imposés par le législateur afin de garantir que l'information parvienne jusqu'à ladite caution.

2) Le besoin d'une communication par lettre recommandée avec avis de réception

Bien que la communication de la lettre d'information en recommandée avec avis de réception offre plusieurs avantages au créancier (a), il n'en demeure pas moins que c'est à la caution qu'elle pourrait causer des désagréments sur le plan de la preuve si elle est mal utilisée (b). Toutefois, nous constatons également une certaine marginalisation de la caution en droit de l'OHADA (c).

197 Le législateur africain semble s'être rangé du côté de la Cour de cassation française qui a toléré l'absence de formalisme de l'information périodique : Cass. Com., 27 nov. 1991 : JCP G 1992, IV, 367 ; RJDA 1992, n° 182.

198 TGI de Ouagadougou, 27 juin 2007, préc. ; Le TGI de Ouagadougou a violé le formalisme de l'information périodique en ayant autorisé une information périodique communiquée au moyen de simples relevés de compte bancaire ;

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a. Les avantages de la lettre recommandée avec avis de réception

D'une part, le site WIKIPEDIA nous enseigne que « par sa nature et ses implications juridiques, le courrier envoyé en recommandé avec avis de réception est adapté à la préparation d'un dossier de type contentieux lorsque l'on souhaite être en mesure de prouver juridiquement l'envoi d'un courrier, d'une mise en demeure, ou de prendre date concernant un événement particulier encadré par des dispositions contractuelles »199.

D'autre part, en dépit de l'inflexibilité de la Cour de cassation française200, le tribunal de grande instance de Saint-Étienne avait jugé qu'il était « inadmissible, en raison de leur importance, que les avis à caution aient été, dans un établissement de crédit, adressés par lettre simple sans récépissé, soumis à toutes les vicissitudes et à toutes les dénégations »201. La Cour d'appel de Paris, quant à elle, avait retenu que l'usage de la lettre recommandée avec avis de réception s'imposait202.

Ainsi, nous comprenons que le formalisme latent de l'article 25 de l'AUS devrait imposer la communication de l'information périodique au moyen de la lettre recommandée avec accusé de réception. En effet, d'une part l'imposition du formalisme de la lettre recommandée aurait pour effet d'étouffer dans l'oeuf le contentieux de la preuve de l'envoi et celui du contenu de la lettre d'information - en France, le débiteur de l'information doit prouver l'envoi de la lettre d'information ainsi que le contenu de celle-ci203 .

D'autre part, ledit formalisme a le mérite de permettre à la caution d'être réellement informée ou du moins sur un plan juridique. En effet, « L'utilisation d'un courrier en recommandé avec avis de réception permet de disposer d'une preuve de l'envoi, d'une preuve de la réception par le destinataire (avis de réception retourné), et donc de prendre date dans l'hypothèse d'une utilisation de ces preuves dans un contexte juridique »204.

De manière plus explicite et juridique, nous pouvons démontrer la pertinence de l'usage dudit formalisme au moyen du Code de procédure civil français. Ainsi, tout d'abord, l'article 668 du

199 https://fr.wikipedia.org/wiki/Lettrerecommand%C3%A9eavecaccus%C3%A9der%C3%A9ceptionenFr ance

200 Cass. Com., 27 nov. 1991, préc.

201 TGI Saint-Étienne, 30 juin 1987 : RD bancaire et bourse 1987, p. 124, obs. Crédot et Gérard.

202 CA Paris, 29 et 30 mai 1997 : JurisData n° 1997-021354 et 1997-021367.

203 Cass. Com., 25 nov. 1997, Bull. civ. IV, n° 326.

204 https://fr.wikipedia.org/wiki/Lettre recommand%C3%A9e avec accus%C3%A9 de r%C3%A9ception en Fr ance

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Code de procédure civile français dispose que : « la date de réception d'une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception est celle qui est apposée par l'administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire ».

Ensuite, l'article 670 dudit Code de procédure dispose que « La notification est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire. La notification est réputée faite à domicile ou à résidence lorsque l'avis de réception est signé par une personne munie d'un pouvoir à cet effet ». L'effectivité de l'information de la caution est alors établie.

Donc, grâce à la lettre recommandée avec avis de réception, le créancier pourrait prouver (de manière pertinente) non seulement l'envoi et la réception de l'information, mais aussi le respect du formalisme informatif de l'article 25 de l'AUS (la reproduction littérale de l'article 19 dudit Acte uniforme). Le droit de l'OHADA pourrait ainsi résoudre les problèmes français en la matière. En effet, d'une part, en France, la Cour de cassation avait retenu qu'« il n'incombe pas à l'établissement de crédit de prouver que la caution a effectivement reçu l'information envoyée »205 -- seul l'envoi de la lettre d'information devant être prouvé. D'autre part, la Cour d'appel d'Angers avait retenu maladroitement que la preuve de l'envoi de l'information emportait présomption de conformité de son contenu206.

Cependant, la communication par lettre recommandée ne présente pas que des avantages. b. Les inconvénients de la lettre recommandée avec avis de réception

Les inconvénients de la lettre recommandée avec avis de réception tiennent d'abord à son caractère onéreux, puis au renversement de la charge de la preuve.

Premièrement, en ce qui concerne le caractère onéreux du procédé susmentionné, le professeur Séverine CABRILLAC, en citant l'exemple de la France, explique qu'« en pratique, l'information est adressée par lettre simple, car la lettre recommandée avec accusé de réception serait d'un coût prohibitif et se prête mal au traitement automatique qu'impose la masse des destinataires. Avec cette formule, la preuve de la réception serait impossible à rapporter, aussi la Cour de cassation en a-t-elle dispensé les banquiers »207. Cependant, en droit de l'OHADA, la « masse de destinataires » est considérablement réduite par la restriction des bénéficiaires de l'information périodique étant donné que seules les cautions générales sont concernées, alors qu'en France plusieurs cautions bénéficient de ladite

205 Civ. 1re, 25 nov. 1997, préc.

206 CA Angers, 27 janv. 2009 : jurisData n° 2009-378354.

207 M. Cabrillac, et al., Op. cit., n° 319, p.229, préc.

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information208. Ainsi, en droit communautaire africain, le caractère onéreux de ce procédé de communication ne se fera pas ressentir.

Deuxièmement, concernant le renversement de la preuve, le site WIKIPEDIA nous informe que « lors de l'envoi d'un courrier en recommandé avec avis de réception, le destinataire est supposé avoir pris connaissance de la notification qui lui a été faite, et il y a inversion de la charge de preuve. Si le destinataire prétend que l'enveloppe reçue était vide, il lui incombe alors de prouver que celle-ci était effectivement vide (ce qui, de fait, sera difficile à établir). Il en va de même si le destinataire allègue que le contenu de l'enveloppe était autre que ce qu'indique l'expéditeur : ce sera au destinataire de prouver ses dires, et non à l'expéditeur de prouver sa bonne foi »209.

En effet, un arrêt de la Cour de cassation français confirme les propos de l'encyclopédie en ligne : « la notification par la voie postale est réputée faite à personne lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire et qu'en cas de notification sous enveloppe, il appartient au destinataire de prouver que celle-ci était vide et non pas à l'expéditeur d'établir que l'acte notifié était contenu dans cette enveloppe »210.

Donc, la caution devra vérifier la conformité du contenu de l'enveloppe avant d'accuser réception de la lettre d'information au risque d'être dans l'impossibilité de prouver qu'elle n'a pas reçu l'information ou que l'information reçue n'était pas conforme. Cependant, au-delà des avantages et inconvénients de la lettre recommandée avec avis de réception, l'on remarque une attitude incompréhensible de la part du législateur africain à l'égard de certains acteurs du monde des affaires.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore