Paragraphe 2 : les bénéficiaires des
informations obligatoires
En ce qui concerne les bénéficiaires des
informations obligatoires de la caution, il n'y a pas de restrictions majeures,
sauf lorsqu'il s'agit de l'information sur l'évolution de la dette. En
effet, si presque toutes les cautions sont bénéficiaires de
l'information sur la défaillance du débiteur principal ayant
contracté un prêt dans un établissement de crédit,
des interrogations subsistent quant à la nature de certains
bénéficiaires de l'information sur l'évolution de la dette
(A). Toutefois, nous constatons, toujours dans le cadre de
l'information sur l'état de la dette, que le législateur OHADA a
étendu le bénéfice de ladite information à des
cautions que le législateur français ne considère pas
comme telles (B).
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A- La pluralité de bénéficiaires des
informations obligatoires
Si les débiteurs des obligations d'information sont peu
nombreux et facilement reconnaissables, il n'en est pas de même pour les
bénéficiaires qui forment un ensemble plus
hétéroclite d'où une certaine bienveillance du
législateur qui souhaite alors que toutes les cautions soient
informées en temps utile (1) et que certaines d'entre
elles bénéficient d'une protection optimale au moyen de
l'information (2).
1) L'immensité du champ d'application de
l'obligation d'information ponctuelle
En droit de l'OHADA comme en droit français, presque
toutes les cautions sont bénéficiaires de l'information sur la
défaillance du débiteur principal. En effet, en tant que
débitrice potentielle du créancier, la caution doit être
mise en demeure123 lorsque le débiteur est défaillant
et la mise en demeure vaut information ponctuelle124.
Il n'y a donc aucune difficulté en ce qui concerne le
champ d'application de l'information ponctuelle de la caution dès lors
que ladite caution a un lien de droit avec le créancier et le
débiteur principal. En revanche, pour des raisons de
sécurité juridique, le champ d'application de l'information
périodique a été largement réduit.
2) La restriction du champ d'application de
l'obligation d'information périodique
Si en France, l'information sur l'évolution de la dette
est presque généralisée, il n'en est rien en droit de
l'OHADA (a). D'ailleurs, l'on se demande pourquoi certaines
cautions revendiqueraient la communication d'une telle information
(b).
a. L'information exclusive des cautions
générales
Comme nous l'avons signalé, seules les cautions
générales sont les bénéficiaires de l'information
périodique sur l'état de la dette en droit de l'OHADA. En droit
communautaire africain, l'information périodique de la caution est donc
liée uniquement à la nature du
123 L'article 1139 du Code civil français ancien
disposait que « Le débiteur est constitué en demeure, soit
par une sommation ou par autre acte équivalent, telle une lettre missive
lorsqu'il ressort de ses termes une interpellation suffisante, soit par l'effet
de la convention, lorsqu'elle porte que, sans qu'il soit besoin d'acte et par
la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure
».
124 CA Paris, 31 oct. 1998 : JurisData n° 1998-023660.
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cautionnement souscrit. Toutefois, nous n'avons pas
précisé ce que l'on entendait par cautionnement
général.
Ainsi, le professeur Dominique LEGEAIS prévient que le
cautionnement général est « le plus dangereux qui puisse se
concevoir »125. En effet, la caution peut garantir les dettes
présentes et à venir du débiteur principal pour une
durée indéterminée et comme nous le fait remarquer le
professeur Séverine CABRILLAC, « l'accroissement du montant des
dettes garanties peut être brutal et se dérouler sur un laps de
temps inférieur à un an »126 -- en France la
fréquence de l'information périodique étant annuelle.
D'ailleurs, il se peut qu'au début du cautionnement, le débiteur
principal ne doive rien au créancier.
En France, en 2003, à cause de la dangerosité
d'un tel engagement, le législateur a pris certaines mesures visant
à protéger les personnes physiques surtout par le biais du Code
de la consommation.
Ainsi, le législateur français a, tout d'abord,
limité l'engagement de la caution :
« Toute personne physique qui s'engage par acte sous
seing privé en qualité de caution envers un créancier
professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire
précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et
uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la
somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et,
le cas échéant, des pénalités ou
intérêts de retard et pour la durée de ..., je m'engage
à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes
biens si X... n'y satisfait pas lui-même" »127.
Ensuite, le législateur français a
créé une proportionnalité de l'engagement de la caution
par rapport aux biens de celle-ci :
« Un créancier professionnel ne peut se
prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique
dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement
disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le
patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée,
ne lui permette de faire face à son obligation »128.
125 D. Legeais, Op. cit., n° 188, p.155.
126 M. Cabrillac, et al., Op. cit., p. 238,
n° 328 in fine ; TGI de Ouagadougou, 27 juin 2007, préc. ; en
l'espèce, le créancier présente à la caution une
somme plus importante que celle due à cause des « forçages
de paiement assortis de frais élevés ».
127 Article L.341-2 du l'ancien Code de la consommation, actuel
article L.331-1.
128 Article L.341-4 de l'ancien Code de la consommation, actuel
article L.332-1.
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En droit de l'OHADA, bien qu'il soit moins attentionné
que le législateur français, le législateur africain s'est
largement inspiré des innovations françaises. En effet, non
seulement, le cautionnement doit être constaté par un écrit
signé et rédigé en partie par la caution129,
mais aussi tout cautionnement prévoit toujours la mention d'une somme
maximale garantie130 à peine de nullité de
l'engagement131.
Ainsi, si la caution générale est l'unique
bénéficiaire de l'information périodique en droit de
l'OHADA, l'on pourrait se poser la question de savoir si certaines cautions ne
pourraient pas se passer de l'information sur l'état de la dette dont
elles garantissent le paiement.
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