b. L'information ponctuelle : une formalité
à respecter
La nécessité d'informer la caution sur la
défaillance du débiteur principal tient aussi son fondement au
principe selon lequel le créancier doit mettre en demeure son
débiteur de payer avant d'exercer toute poursuite contre lui.
En effet, d'une part, l'article 2288 du Code civil
français ancien disposait que « celui qui se rend caution d'une
obligation se soumet envers le créancier à satisfaire à
cette obligation, si le débiteur n'y satisfait pas lui-même
». Ledit article impose tacitement l'information ponctuelle de la caution,
car la caution ne peut être poursuivie qu'à condition que le
débiteur principal soit défaillant. Le créancier doit
alors constater cette défaillance et la prouver à la caution en
la lui rapportant.
D'autre part, nous pouvons constater que la caution doit
nécessairement être informée par le créancier sur la
défaillance de débiteur. En effet, le nouvel article 1344 du
Nouveau Code civil français de 2016 dispose que « le
débiteur est mis en demeure de payer soit par une sommation ou un acte
portant interpellation suffisante, soit, si le contrat le prévoit, par
la seule exigibilité de l'obligation ». Or, la caution est
également le débiteur du créancier même si elle
n'est pas tenue par la même obligation que le débiteur principal.
En conséquence, le créancier doit la mettre en demeure de payer
au même titre que le débiteur principal.
Donc, l'information ponctuelle de la caution découle
non seulement du fait que le cautionnement soit une obligation accessoire qui
ne se confond pas à l'opération principale, mais aussi par le
fait que le créancier se doit d'informer ses débiteurs.
Toutefois, une fois encore, le législateur français a
multiplié les obligations d'information ponctuelle.
2) Le foisonnement des obligations d'information
ponctuelle en France
À l'instar des dispositions de l'obligation
d'information périodique, les textes sur l'obligation d'information
ponctuelle sont nombreux. Ainsi, la première disposition imposant au
créancier la communication de la défaillance du débiteur
principal date de 1989. Il s'agissait alors de l'article 7-3 de la loi
française n° 89-1010 du 31 décembre 1989 relative à
la prévention et au règlement des difficultés liées
au surendettement des particuliers et des familles et elle se présentait
comme suit (elle fut abrogée) :
39
« Toute personne physique qui s'est portée caution
à l'occasion d'une opération de crédit relevant de la
présente loi doit être informée par l'établissement
prêteur de la défaillance du débiteur principal dès
le premier incident de paiement caractérisé susceptible
d'inscription au fichier institué à l'article 23 de la loi
n° 89-1010 du 31 décembre 1989 relative à la
prévention et au règlement des difficultés liées au
surendettement des particuliers et des familles. Si l'établissement
prêteur ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne
saurait être tenue du paiement des pénalités ou
intérêts de retard échus entre la date de ce premier
incident et celle à laquelle elle en a été informée
».
En outre, l'article 7-3 de la loi de 1989 a été
intégré dans l'ancien Code de la consommation en son article
L.313-9.
Ensuite, une autre obligation d'information ponctuelle a vu le
jour en 1994 par le biais de l'article 47 II de la loi n° 94-126 du 11
février 1994 citée plus haut. Ledit article pose les mêmes
bases que la loi de 1989, mais la dette cautionnée est maintenant
d'ordre professionnel et appartient à une entreprise individuelle ou
sociétaire.
Aussi, ladite loi précise l'incident de paiement
faisant l'objet de l'information ponctuelle ainsi que le point de départ
de la communication de ladite information en notant que « le
créancier informe la caution de la défaillance du débiteur
principal dès le premier incident de paiement non
régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement
».
Puis, il y a eu l'article 102 de la loi n° 98-657 du 29
juillet 1998 citée plus haut, qui fait du créancier professionnel
le débiteur de l'obligation d'information ponctuelle. Ladite loi a
été intégrée dans l'ancien Code de la consommation
en son article L.341-1, aujourd'hui L.333-1.
Le reproche fait par les professeurs Séverine CABRILLAC
et François TERRE sur la multiplicité des obligations
d'information est à peu près le même pour les informations
ponctuelles. En effet, une fois de plus, il y a un enchevêtrement des
lois et aucune abrogation des dispositions devenues inutiles.
D'ailleurs, comme le faisait remarquer le doyen SIMLER pour
les obligations d'information périodique de la caution, sur le plan de
la sanction, les omissions d'informations ponctuelles sont toutes punies par la
déchéance des pénalités et des
intérêts de retard échus alors qu'elles ne concernent
même pas les mêmes situations ni les mêmes protagonistes,
à l'exception du bénéficiaire des obligations
d'information ponctuelle qui est, à chaque fois, une personne
physique.
40
Ainsi, le zèle du législateur français en
matière d'obligations d'information de la caution est loin de faire
l'unanimité en doctrine. Pourtant, le droit français en
matière d'obligation d'information a dépassé les
frontières françaises.
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