Approche communicationnelle des films de fictionpar Alexandre Chirouze Université Montpellier 3 - Doctorat 2006 |
VII- Le code des mouvements de caméra210(*)La mobilité du cadre est une caractéristique spécifique au cinéma et à la vidéo. « Il y a mobilité du cadre lorsque dans les limites de l'image, le cadrage des objets change, lorsque la hauteur, l'angle de prise de vues ou la taille du plan se modifient au sein d'un même plan » (Bordwell, Thompson, 2000, p.297). Pour bien comprendre ce code spécifique au cinéma, il est nécessaire : - en premier lieu, d'opposer le plan fixe aux différents types de mouvement de caméra, - en deuxième lieu, de distinguer les mouvements de caméra des mouvements des acteurs ou des objets animés à l'intérieur d'un plan, même si la caméra les accompagne dans leur mouvement. Les mouvements à l'intérieur d'un plan relèvent de l'énoncé (la fiction) tandis que les (véritables) mouvements de caméra sont du domaine de l'énonciation (le filmage). Comme les plans et les angles de prise de vues, les mouvements de caméra permettent d'imiter la vision humaine. Le réalisateur a différents moyens de faire bouger sa caméra : - en la tenant à l'épaule, ce qui donne généralement un mouvement haché pouvant évoquer, dans certaines conditions, notamment avec un accompagnement sonore, une course à pied, une course poursuite, un état émotionnel, une grosse fatigue, un état d'ébriété ; - sur un outillage spécifique tel qu'une grue211(*), une dolly (un chariot sur lequel est fixée une petite grue), un pied, un travelling (chariot sur rail ou sur roues), la steady cam212(*) afin de donner un mouvement coulé, sans à-coup, à vitesse constante, qui a « comme effet principal l'oubli de la présence de la caméra, ce qui permet le phénomène psychologique bien connu de l'identification du spectateur aux événements présentés à l'écran (diégétiques) » (Opritescu, 1997, p.42). Il est, toutefois, plus fréquent d'utiliser une classification - fondée non pas sur le matériel utilisé mais sur le type de mouvement volontairement effectué par le réalisateur - qui distingue le panoramique, le travelling et le zoom. A- Le panoramiqueIl consiste à faire pivoter la caméra, horizontalement ou verticalement, sur son axe, sans se déplacer. La caméra peut, éventuellement, à l'extrême, réaliser un cercle de 360°. C'est une figure rare mais parfois utilisée pour donner une impression de danse, de tournoiement, de vertige, etc. qui poussée trop loin peut devenir désagréable provoquant chez le spectateur une sensation de vertige physique. Selon l'angle de déplacement du rayon visuel de la caméra, sans la bouger de place, on distingue plusieurs panoramiques : - le panoramique horizontal : la caméra balaye, comme un « mouvement de tête », de gauche à droite, ou de droite à gauche, par exemple, un paysage - le panoramique vertical : la caméra pivote de haut en bas, ou de bas en haut ; par exemple, un acteur est montré progressivement des pieds à la tête - le panoramique oblique : la caméra suit un cerf-volant ou la descente d'une luge - le panorama brisé : la caméra suit une ligne brisée pour mettre en valeur des éléments, par exemple du paysage, pour attirer l'attention du spectateur sur des détails, par exemple, du décor. Dans le cadre de notre recherche, une autre classification nous semble plus intéressante. Certains auteurs distinguent, en effet, les panoramiques selon le résultat recherché par le réalisateur : - le panoramique d'exploration, en général lent, montre tous les détails d'un paysage, d'un décor, etc. et a, donc, surtout une fonction descriptive. - le panoramique d'accompagnement qui a pour objet de suivre un sujet en mouvement (acteur, véhicule, etc.) afin que le spectateur concentre son attention sur lui. - Le panoramique rapide qui permet de réunir deux sujets sans coupure visuelle, par exemple, deux acteurs en train de discuter, de combattre. Les panoramiques rapide et d'accompagnement ont donc, souvent, une valeur dramatique. * 210 C'est un code réellement spécifique au cinéma contrairement aux précédents. Les caractéristiques telles que la perspective, la relation entre un champ et un hors-champ, la taille du plan se définissent aussi en peinture, en photographie ou en bande dessinée. * 211 Une grue permet de placer la caméra en hauteur ou dans un endroit difficile d'accès. Un axe de rotation et un contrepoids soulèvent une plateforme sur laquelle s'installent une ou plusieurs personnes et une caméra. Certaines grues sont téléguidées depuis le sol. La Louma qui fut utilisée pour la première fois par René Clément, en 1971, est une grue articulée sur un chariot dont le bras télescopique supporte la caméra dont les prises de vues sont télécommandées. * 212 Il s'agit d'un stabilisateur de caméra porté par un homme. Le caméraman ou opérateur enfile un système de harnais autour du torse. Le steady cam, de la marque déposée Steadicam ou non, lui permet alors de réaliser des mouvements très fluides en supprimant les vibrations. Lorsque le caméraman marche ou court, la caméra reste horizontale et donne une impression de fluidité. Ce système a été utilisé pour la première fois dans le film Rocky avec Sylvester Stallone, notamment dans le scène où ce dernier monte un grand escalier. Depuis, il est utilisé dans de nombreux films et téléfilms. |
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