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Les créanciers face aux impératifs de sauvetage des entreprises en difficulté en droit OHADA


par Ganiyou BOUSSARI
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Master 2 en droit privé et sciences criminelles/Carrières judiciaires 2022
  

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PARAGRAPHE 2 : LA REVUE DE LA SITUATION DES CREANCIERS A TRAVERS LA MODIFICATION D'AUTRES DISPOSITIONS

Seront essentiellement abordées, les modifications relatives à l'ouverture des procédures collectives (A) et la particulière amélioration de la situation de certaines catégories de créanciers (B).

A- Les modifications relatives à l'ouverture des procédures collectives

Pour tenter de revaloriser la prise en compte des intérêts des créanciers dans les procédures de sauvetage des entreprises, plusieurs modifications textuelles sont intervenues en matière d'ouverture des procédures prévues par l'AUPC. Ces modifications concernent, entre autres, l'élargissement du périmètre des personnes sujettes à l'ouverture des procédures collectives et un renforcement de l'implication des créanciers dans l'ouverture des procédures.

L'AUPC du 10 avril 1998 s'appliquait, au titre des trois procédures qu'il régissait, à toute personne commerçante, à toute personne morale de droit privé et à toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé. Ainsi, ce texte originel limitait les procédures collectives aux seules personnes physiques commerçantes. Or, les personnes physiques s'investissent de plus en plus dans les domaines autres que le commerce tel que l'immobilier et la construction. Le domaine de l'immobilier et de la construction représentent des domaines civils qui occupent une place non négligeable dans le secteur économique165(*). Cette limitation du champ des personnes pouvant bénéficier des procédures collectives s'était avérée peu satisfaisante et catastrophique pour les créanciers en raison de l'absence d'organisation de la déconfiture166(*). Avec l'AUPC révisé, « toute personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante, civile, artisanale ou agricole » peut demander l'ouverture d'une procédure parmi celles qui sont prévues par le législateur OHADA167(*). C'est dire que l'innovation ne concerne que les personnes physiques168(*).

Sous l'empire de l'AUPC de 1998, il y a lieu de relever que les créanciers étaient quasiment absents dans l'ouverture des procédures préventives. En effet, en matière de règlement préventif, seul le débiteur, qui remplissait les conditions fixées par la loi, avait l'initiative d'une demande aux fins d'un jugement déclaratif ouvrant un règlement préventif. Ainsi, la juridiction compétente était saisie par requête du débiteur exposant sa situation économique et financière et représentant les perspectives de redressement de l'entreprise et d'apurement du passif169(*). Le débiteur agissait unilatéralement et avait la latitude de choisir les créanciers à l'égard desquels il voulait obtenir des suspensions depoursuites individuelles170(*). Il pouvait masquer sa situation économique réelle et utiliser le règlement préventif comme un moyen de fraudes aux droits des créanciers171(*). Ainsi, les créanciers étaient soumis contre vents et marées, selon le gré du débiteur, ce qui était de nature à plonger ceux-ci en difficultés vis-à-vis de leurs propres créanciers. En termes plus clairs, les créanciers partenaires du débiteur ont besoin de recouvrer le montant de leurs créances pour pouvoir faire face à leurs diverses charges et obligations dans le cadre de leurs affaires. C'est un système circulaire qui peut subir l'effet de contamination des difficultés économiques si une seule entreprise du système se retrouve en cessation des paiements.

Pour redonner une place aux créanciers dans la politique de sauvetage des entreprises, le législateur a procédé à une réorganisation de l'ouverture du règlement préventif. De nouvelles conditions de formes de l'ouverture d'un règlement préventif ont été adoptées. Parmi ces conditions, la saisine de la juridiction compétente est désormais prévue par l'article 6 AUPC révisé. Selon l'alinéa 2 dudit article, la requête aux fins d'ouverture du règlement préventif peut être introduite soit par le débiteur agissant seul, soit agissant conjointement avec un ou plusieurs créanciers. Ce qui facilite le contact du débiteur avec ses créanciers en une période difficile de son existence et favorise l'ébauche d'un accord concordataire avec ceux-ci. Le ou les créanciers qui participent à l'ouverture du règlement préventif disposent mieux des informations leur permettant d'anticiper sur les conséquences du retard de paiement dont ils seront à coup sûr victimes et de prendre des mesures idoines pour pouvoir honorer leurs propres engagements envers leurs créanciers.

En matière de redressement judicaire et de liquidation des biens, le débiteur conserve l'initiative de l'ouverture des procédures. C'est l'article 25 alinéa 3 et 4 qui fixe les conditions de saisine de la juridiction compétente. En effet, aux termes de l'alinéa 3 de cet article, le débiteur qui est en cessation des paiements doit faire une déclaration aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens quelle que soit la nature de ses dettes. L'alinéa 4 ajoute que cette déclaration doit être faite par le débiteur dans un délai bien défini. Le seul changement réside dans la définition de l'expression « cessation des paiements »172(*). En effet, l'ancien article 25 considérait la cessation des paiements comme « l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Avec la nouvelle écriture de l'article 25 alinéa 2 AUPC, « La cessation des paiements est l'état où le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, à l'exclusion des situations où les réserves de crédit ou les délais de paiement dont le débiteur bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face à son passif exigible ». La nouvelle définition tient compte lege ferenda de la théorie de la réserve de crédit consentie par certains créanciers et largement prise en compte par la jurisprudence internationale.

A titre d'exception et à l'instar de l'article 28 alinéa 1er de l'AUPC originel, la nouvelle formulation prévoit que la procédure collective peut être ouverte sur la demande d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance, pourvu qu'elle soit certaine, liquide et exigible.Cette règle permet d'éviter l'ouverture d'une procédure sur le fondement de créances contestables, à terme non échu ou dont le montant n'est pas déterminé. La saisine par les créanciers aux fins d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens s'effectue par voie d'assignation et non de requête. Ce qui appelle l'intervention d'un huissier de justice173(*).

L'implication améliorée des créanciers dans l'ouverture des procédures de sauvetage des entreprises s'accommode bien avec la philosophie du législateur OHADA qui veut préserver les activités économiques et maintenir les emplois dans son espace géographique.

La tentative de revalorisation de la situation des créanciers ne se limite pas à l'implication accrue de ceux-ci dans l'ouverture des procédures collectives. Elle concerne certaines catégories de créanciers qui jouissent de traitements particuliers.

* 165 TCHOMTE (E.), préc.

* 166 Ibid.

* 167 Art. 1-1 AUPC révisé.

* 168 SAWADOGO (F. M.), préc., p. 1119.

* 169 Art. 5 alinéa 1er ancien AUPC.

* 170 FENEON (A.), « Règlement préventif : analyse critique », Penant 870, n° 15, p. 19.

* 171 DELABRIERE (A.), préc., p. 56, V. aussi FENEON (A.), préc., p. 18.

* 172 SAWADOGO (F. M.), préc., p. 1116.

* 173 L'huissier de justice est un auxiliaire de justice dont la profession est régie au Sénégal par le Décret n° 2020-1589 du 6 août 2020, https://www.google.com/url?sa=t&source=web&cd=&ved=2ahUKEwjwqvjchY38AhUvnf0HHSOFBukQFnoECAgQBg&url=https%3A%2F%2Fjustice.sec.gouv.sn%2Fwp-content%2Fuploads%2F2021%2F01%2FDecret-2020-1589-du-06-aout-2020-portant-statut-des-huissiers-de-justice.pdf&usg=AOvVaw1d47zkMAIbGzSCJV0C8FvP, consulté le 4 janvier 2023 à 19H50 .

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand