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La protection internationale des déplacés environnementaux


par Aimé OUEDRAOGO
Université privée de Ouagadougou  - Master 2 2022
  

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B- La carence du contenu du droit conventionnel général

Le droit conventionnel général est composé de traités. Le régime juridique des traités est déterminé par la Convention de Vienne sur le droit des traités entre Etats51. Selon l'article 2 de ladite convention, « l'expression [traité] s'entend d'un accord international conclu par écrit entre Etats et régi par le droit international, qu'il soit consigné dans un instrument juridique ou dans deux ou plusieurs instruments connexes et quelle que soit sa dénomination particulière52». Il existe une multitude de traités en droit conventionnel général qui porte généralement sur des aspects spécifiques du droit international. Mais jusque-là, la question de la protection des déplacés environnementaux n'est pas prise en compte par ces traités.

Cette situation s'explique par le fait qu'il n'y a pas de convention internationale dédiée aux déplacés environnementaux, et aussi par le fait qu'aucun instrument conventionnel ne traite de la question des déplacés environnementaux.

D'abord, contrairement à certaines questions d'ordre international qui sont prises en compte par le droit conventionnel général comme la question de la paix et de la sécurité internationale53 et la question de la protection de la nature54, la question des déplacés environnementaux demeure une situation qui n'est pas régulée par le droit conventionnel général. Il n'y a ni droit international des déplacés environnementaux, ni convention internationale relatif aux déplacés environnementaux.

Ensuite, les conventions internationales qui existent dans le droit conventionnel général, ne traitent pas de la question des déplacés environnementaux. C'est le cas de la

50 (C.) COURNIL, « Les réfugiés environnementaux : les déplacés en quête de protection », Presse de l'Université de Toulouse, 2010, p.148. Disponible sur le site www.openédition.org/6540. Consulté le 16 novembre 2020.

51 Voir Convention de Vienne sur le droit des traités entre Etats, Vienne, 23 mai 1969. Elle est entrée en vigueur le 27 janvier 1980. Nations Unies, Recueil des traités, v. 1155, p. 331.

52 Voir article 2, al.1, paragraphe-a.

53 Voir Charte des Nations Unies, Sans Francisco, 26 juin 1945.

54 Voir Charte mondiale de la nature, Johannesburg, 28 octobre 1982.

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Charte des Nations Unies55 et la Charte mondiale de la nature56. La Charte des Nations unies, qui est vue aujourd'hui comme le fondement du droit international moderne, offre un cadre aux Etats pour assurer leur coopération dans la poursuite d'objectifs fondamentaux d'intérêt commun. L'article 1 de ladite charte définit le maintien de la paix et la sécurité internationale comme objectif fondamental de l'Organisation des Nations Unies. Mais, en lisant les dispositions de ce texte, on remarque que celles-ci désignent plutôt les situations de guerre, les conflits et les hostilités comme des situations qui peuvent menacer la paix sans inclure la situation des dégradations environnementales57. La Charte mondiale de la nature, quant à elle, porte uniquement sur la préservation de la nature58. Bien qu'elle recommande de préserver la nature des déprédations causées par la guerre ou d'autres actes d'hostilité59, ce qui la lie plus à la Charte des Nations Unies, la Charte de la nature n'inclut pas les déplacés environnementaux dans les problèmes à résoudre. Toutes ces conventions qui traitent les questions de protections des personnes ou de la nature ont montré leurs limites. Aucune ne porte une attention formelle à la question des déplacés environnementaux60.

En outre, selon Joe VERHOEVEN, le droit conventionnel général est un droit volontariste61. Le manque de conventions relatives aux déplacés environnementaux témoigne, ici, du fait que les acteurs principaux que sont les Etats n'ont pas encore eu de discussions décisionnelles sur le nouveau concept de déplacés environnementaux. Pourtant, en tant que droit volontariste, le droit international est en constante évolution et est mu par des intérêts individuels ou collectifs des Etats en fonction du rapport de leurs puissances respectives.

Ainsi, la carence du droit conventionnel général et le caractère nouveau de la notion de déplacés environnementaux permettent de démontrer qu'il n'existe pas un statut international de ces déplacés environnementaux dans le droit conventionnel général.

55 La Charte des Nations unies a été signée le 26 Juin 1945 à Sans Francisco à la fin de la Conférence des Nations unies pour l'Organisation internationale, par 51 pays représentant l'ensemble des continents. Elle est entrée en vigueur le 24 octobre 1945.

56 La Charte mondiale de la nature a été adoptée par l'Assemblée Générale des Nations Unies dans la Résolution 37/7 de sa 48e séance plénière du 28 octobre 1982.

57 (A.) PELLET et (J-P.) COT, La Charte des Nations Unies : commentaire article par article, Tome I, Paris, Economica, 2005, p. 328 et Ss.

58 Voir article 1 de la Charte Mondiale de la Nature.

59 Ibid, article 5.

60 (M.) MOREL et (N.) MOORE, « Migration climatique, quel rôle pour le droit international ? », Revue Cultures et Conflits, hiver 2012, p. 61.

61 (J.) VERHOEVEN, Précis de Droit international public, Bruxelles, Larcier, 2000, p. 89.

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Paragraphe 2 : L'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans le droit international général non-conventionnel

Le droit international général non-conventionnel regroupe l'ensemble des règles de portée générale mais, à caractère non-conventionnel. Celles-ci ne sont pas classées dans le droit international général conventionnel, tel que vu ci-dessus. Nous allons apprécier deux d'entre elles, que sont les Principes Généraux de Droits (A) et la coutume internationale (B). Aucune de ces sources ne permet d'établir l'existence d'un statut juridique des déplacés environnementaux.

A- L'inexistence d'un statut international des déplacés environnementaux dans les Principes Généraux de droit international.

Les Principes Généraux de Droit International sont, selon l'article 38 du statut de la CIJ, « [...] les principes généraux de droit reconnus par les nations les plus civilisées [...]. Tel qu'il est visé à l'article 38, le principe général de droit international repose sur la convergence de solutions (nationales) données dans les ordres internes au problème similaire à celui dont est saisi le juge international. Selon Jean VERHOEVEN, il appartient à celui-ci, lorsqu'il constate cette convergence, de transposer dans l'ordre international, le « principe » qui est commun à ces droits nationaux, après les avoir dépouillés des particularités techniques qui s'opposent à sa généralisation62.

Cependant, il convient de dire que dans leur état actuel, les principes généraux de droit international ne définissent pas un statut des déplacés environnementaux. Deux raisons expliquent cela.

Premièrement, il n'y a pas un principe général de droit tel que décrit, qui porte sur le statut des déplacés environnementaux. En effet, si les principes généraux de droit sont appliqués par le juge international, force est de reconnaître qu'à ce jour, celui-ci n'a jamais fait explicitement application d'un principe général ainsi compris. Il s'est contenté, le cas échant, de les écarter expressément63. Ce qui montre qu'il est difficile d'identifier un principe général de droit qui définit un statut pour les déplacés environnementaux.

62 (J.) VERHOEVEN, Op. Cit, p. 347.

63 (J.) VERHOEVEN, Op. Cit, p. 349.

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Deuxièmement, il convient de dire que la question des déplacés environnementaux peut être délicate politiquement. Etant donné que les principes généraux de droit résultent de la convergence des solutions nationales, il est difficile, à cet effet, que puisse naître un principe général de droit. Selon Joe VERHOEVEN, il n'y a pas à en être vraiment surpris. Il y a gros à parier qu'entre des sociétés devenues très peu homogènes, il n'y a guère de principes communs qui puissent présentement être trouvés.64

En somme, les principes généraux de droit international ne définissent pas un statut pour les déplacés environnementaux. Cela s'explique par l'absence de principe général qui consacre le statut et aussi, par la difficile convergence des solutions nationales, afin de permettre la naissance d'un principe général qui porte statut des déplacés environnementaux. Mais qu'en est-il de la coutume internationale ?

B- L'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans la coutume internationale

La coutume est par excellence la source du droit général non conventionnel dans l'ordre juridique international. Elle se définit comme la « preuve d'une pratique générale acceptée comme étant du droit »65. Elle se développe en prenant en compte des pratiques couramment admises dans l'ordre interne des Etats. La coutume internationale à ce jour, occupe une place importante dans l'encadrement juridique des questions de protection qui se posent en droit international66. Cependant, l'existence d'un statut pour les déplacés environnementaux n'est pas encore établie dans la coutume internationale. Plusieurs raisons expliquent cela.

Premièrement, il convient de reconnaître que parmi les normes coutumières existantes67, certaines traitent des questions spécifiques de la protection de l'environnement. Mais, il n'y a aucune qui porte sur la question de la protection des déplacés environnementaux. Cela démontre qu'il n'existe pas une reconnaissance statutaire des victimes des dégradations environnementales dans l'état actuel de la coutume internationale.

64 Ibid.

65 Voir article 38 de la CIJ.

66 (H.) RUIZ-FABRI, Règles coutumières générales et droit international fluvial, Annuaire Français de Droit International, Editions du CNRS, 1990, p. 819.

67 (J.) BARBERIS, Réflexion sur la coutume internationale, Annuaire français du droit international, Editions du CNRS, 1990, p. 11.

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Deuxièmement, la naissance d'une norme coutumière suppose la réunion de deux éléments-clés que sont : l'élément objectif qui fait de la coutume une pratique générale et constante et qui s'appuie sur l'ensemble des conduites effectivement suivies par les Etats68, l'élément subjectif ou l'opinio juris sive necessitatis qui veut que la pratique sur laquelle repose la coutume soit « acceptée comme étant de droit ». Elles sont généralement l'objet de découvertes par le juge international. Pour qu'on puisse parler de l'existence d'une norme coutumière de protection des déplacés environnementaux, il faut que ces deux éléments soient réunis. Pourtant, dans l'état actuel des relations entre les Etats, il y n'a pas cette convergence dans les pratiques et les comportements de la part des Etats qui puisse permettre la naissance d'une norme coutumière qui va porter sur le statut des déplacés environnementaux69. En plus, les questions sur les déplacés environnementaux divisent les Etats en raison de leurs enjeux politiques qui sont très délicats. Les Etats du Sud semblent aborder facilement la question de l'existence des déplacés environnementaux, tandis que les Etats du Nord montrent une tendance à d'objection et de repli face à la question70.

En somme, les normes existantes dans la coutume internationale ne définissent pas un statut pour les déplacés environnementaux. Les enjeux de la question des déplacés environnementaux rendent difficile la naissance d'une norme coutumière qui prend en compte cette question. Mais qu'en est-il au niveau du droit international spécial ?

Section 2 : L'inexistence d'un statut juridique des déplacés environnementaux dans le droit international spécial

Le droit international spécial est composé des branches du droit international qui traitent des questions spécifiques d'ordre international. Il existe plusieurs branches, mais dans cette partie de la réflexion, c'est le droit international de l'environnement que nous allons examiner, au regard du lien étroit qui existe entre la question de la protection des déplacés environnementaux et cette branche spécialisée du droit international71. Le droit international de l'environnement est composé de conventions spéciales et de textes non conventionnels qui

68 (J.) VERHOEVEN, Droit international public, Bruxelles, éditions Larcier, 2000, Pp.318.

69 (J.) BARBERIS, Op Cit, p. 12.

70 (M.) MOREL et N. MOOR, « Migrations climatiques : quel rôle pour le droit international ? » Cultures et conflits, n°88, 2012, p. 67.

71 (A.) KISS et (J- P) BEURIER, Droit international de l'environnement, 4ème édition, Paris, Pédone, Collections Etudes internationales, 2010, p. 349.

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sont adoptés dans le cadre de la protection de l'environnement72. En vue de démontrer l'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans le droit international de l'environnement, il convient d'examiner le contenu de celui-ci, en commençant par les instruments conventionnels (paragraphe 1) ensuite les instruments non conventionnels (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'inexistence d'un statut de déplacés environnementaux dans les instruments conventionnels de protection de l'environnement

La conférence de Stockholm tenue en 1972, une année après l'adoption de la Convention de Ramsar73, a marqué le point de départ du droit international conventionnel de l'environnement. Après la conférence de Stockholm, de nombreux problèmes dont les conséquences n'avaient pas été totalement perçues ont émergé74. Cela a conduit à l'adoption de plusieurs conventions dont les plus remarquables sont la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) de 199275 et la Convention internationale sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification en particulier en Afrique (CCUND) de 199476. Nous allons ainsi, examiner ces deux conventions à savoir la CCNUCC (A) et la CCNUD (B) dans la recherche du statut des déplacés environnementaux.

A- L'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique

Au moment de l'adoption de la CCNUCC en 1992, l'accent était mis sur l'atténuation du réchauffement climatique et ses effets néfastes. Le protocole additionnel a aussi été adopté pour renforcer les obligations de limitation des émissions mondiales de Gaz à Effet de Serre

72 (J. P.) BEURIER, Droit International de l'environnement 4ème édition, Paris, Pédone, Collections Etudes internationales 2010, p. 37.

73 La convention de Ramsar a été adoptée le 2 février 1971 et est entrée en vigueur le 21 décembre 1975.

74 On peut citer la pollution de l'atmosphère à longue distance, le dépérissement des forêts tropicales, la diminution de la couche d'ozone et la survenance des catastrophes comme Bhopal en décembre 1984 ou Tchernobyl en avril 1986.

75 Voir Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques adoptée au cours du sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992 et entrée en vigueur le 21 mars 1994 et disponible sur le site www.treaties.un.org. Consulter le 25 juillet 2021 à 11 h 59 mins.

76 Voir la Convention internationale sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification en particulier en Afrique. Elle a été ouverte pour signature le 14 et 15 Octobre 1994 à Paris et est entrée en vigueur le 26 décembre 1996 conformément au paragraphe 1 de l'article 36. Le texte est disponible sur le site www.treaties.un.org. Consulté le 25 juillet 2021 à 12 h 24 mins.

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(GES). Ainsi, ni la CCNUCC ni le protocole de 199777 ne traite pas de la question des déplacés environnementaux. Plusieurs raisons expliquent cela.

Premièrement, aucun de ces deux textes n'a abordé la mobilité humaine liée au climat. En effet, les dispositions de la CCNUCC sont très claires sur son objet. A son article 1er portant sur les définitions, la notion d'« effets néfastes du changement climatique » a été définie comme « [...] les modifications de l'environnement physique ou des biotes dues à des changements climatiques et qui exercent des effets nocifs significatifs sur la composition, la résistance ou la productivité des écosystèmes naturels et aménagés sur le fonctionnement des systèmes socio-économiques ou sur la santé et le bien-être de l'homme ». En limitant exhaustivement les effets du changement climatique à travers cette définition, on constate que la CCNUCC n'entend pas prendre compte le déplacement des populations comme effet de changement climatique.

Deuxièmement, l'article 2 fait de la stabilisation des concentrations de Gaz à Effet de Serre la priorité dans la CCNUCC et dans les instruments juridiques connexes. S'appuyant sur l'article 2, le protocole de 1997 a été uniquement consacré à la concentration de GES78. Toutes ces dispositions sont orientées vers les mesures de préservation et de protection du climat. Elles ne comportent pas de dispositions qui abordent l'effet des déplacements environnementaux dus à des changements climatiques79 .

Enfin, il n'y a pratiquement pas de lien établi entre les dégradations environnementales et les déplacements environnementaux dans la CCNUCC et son protocole additionnel. Cela justifie l'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans ces textes. Mais, qu'en est-il au niveau de la CCNUD ?

B- L'absence de statut des déplacés environnementaux dans la Convention des Nations unies pour la lutte contre la désertification et la sécheresse

La CCNUD semble avoir évoqué, dans ses textes, la question des « déplacements de populations » comme l'un des effets du changement climatique et ce, dès son préambule. A la huitième ligne des considérants, la Convention fait mention de la désertification et la

77 Le Protocole de Kyoto à la Convention cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques a été signé le 11 décembre 1997 au Japon et est entré en vigueur en 2005.

78 Voir article 3 du protocole additionnel (de 1997) à la convention cadre des nations unies sur les changements climatiques.

79 Exemple de l'île Tuvalu cité dans l'introduction.

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sécheresse comme des causes des migrations des populations. Cependant, cette mention est juste formelle et ne permet pas de dire que la Convention reconnaît les déplacés environnementaux statutairement. La CCNUD ne traite pas de la question des déplacés environnementaux pour deux raisons.

D'abord, on peut dire que la selon la Convention, le déplacement des populations une véritable conséquence de la désertification et de la sécheresse. Elle a juste mentionné cette conséquence d'une manière purement formelle, pour ensuite l'exclure matériellement. Au lieu d'établir clairement le déplacement de populations comme une conséquence de la désertification, l'article premier relatif à « l'emploi des termes80 » définit parmi d'autres notions, l'expression « d'atténuation des effets de la sécheresse ». Elle fait allusion à cet effet, à des activités liées à la prévision de la sécheresse et visant à réduire la vulnérabilité des sociétés face à la désertification81.

Ensuite, l'objectif de la Convention est clairement établi à son article 2. Il s'agit de lutter contre la désertification et d'atténuer les effets de la sécheresse dans une partie du monde jugée gravement touchée. L'objectif ainsi formulé, exclut les éventuelles confusions ou de tentative d'inclusion des éléments nouveaux comme le déplacement des populations parmi les effets.

Toutes ces raisons démontrent l'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans la CCNUD. Ce texte ne traite pas de la question des déplacés environnementaux.

En somme, l'analyse des principales conventions permet de démontrer que le droit international conventionnel de l'environnement ne dispose pas d'instruments qui reconnaissent les déplacés environnementaux. Il en est de même des autres conventions dans le droit international de l'environnement82. Elles traitent toutes des questions spéciales et n'abordent pas les déplacés environnementaux. Mais, qu'en est-il des instruments non-conventionnels ?

80 Voir article 1er de la convention cadre des Nations Unies sur la désertification.

81 Voir article 1er -d.

82 (M.) MOREL et (N.) MOOR, « Migrations climatiques : quel rôle pour le droit international ? » Cultures et conflits, n°88, 2012, p 71.

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Paragraphe 2 : l'inexistence d'un statut des déplacés environnementaux dans les instruments non-conventionnel de protection de l'environnement

Les instruments non-conventionnels dans le droit international de l'environnement regroupent des textes qui n'ont pas le statut de convention. Ces instruments ne permettent pas d'établir l'existence d'un statut particulier des déplacés environnementaux. On peut les regrouper en deux à savoir : les instruments non-contraignants (A) et les instruments contraignants (B). Il s'agit, dans le cadre de notre travail, des déclarations, et des résolutions de l'ONU sur l'environnement.

A- L'inexistence de statut des déplacés environnementaux dans les instruments internationaux non-contraignants de protection de l'environnement

Selon le secrétaire général de l'ONU « La complexité des problèmes environnementaux, alliée à l'urgence d'agir et aux difficultés inhérentes à la négociation des instruments internationaux juridiquement contraignants ont donné naissance à un corpus considérable d'instruments non-contraignants en droit international de l'environnement : déclarations, résolutions, directives et recommandations »83. Des exemples notables en la matière sont les déclarations de Stockholm84 et de Rio85.

La Déclaration de Stockholm et la Déclaration de Rio sont les documents finaux des première et deuxième conférences mondiales consacrées à la protection de l'environnement. Ces déclarations sont des acquis considérables, car elles constituent d'importants jalons à l'évolution du droit international de l'environnement qui, posés à 20 ans d'intervalle, en définissent la période « moderne ». Mais, force est de reconnaitre que ces instruments ne traitent pas de la question du statut des déplacés environnementaux selon plusieurs raisons.

Premièrement, de façon générale, la Déclaration de Stockholm est composée de 26 principes et celle de Rio, de 27 principes. Les deux déclarations accordent une place importante à l'être humain. Dans la logique de la Déclaration de Rio qui affirme dans son principe 1, que « les êtres humains sont au centre des préoccupations relatives au développement durable », la Déclaration de Stockholm, à travers ses principes 1, 2, 5 et à

83 Rapport du Secrétaire général à la soixante-treizième session de l'AG/NU/73/419 du 13 décembre 2018 « Les lacunes du droit internationale de l'environnement : vers un pacte mondial pour l'environnement ». p.5.

84 Conférence des Nations unies sur l'environnement tenue, à Stockholm du 5 au 12 juin 1972.

85 Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement, tenue à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992.

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plusieurs points du préambule, s'inscrit dans une conception anthropocentriste de l'environnement. Mais, cette prise en compte de l'être humain dans ces déclarations concerne a priori essentiellement la conservation de l'environnement comme une forme de protection de l'homme. Les effets de la dégradation de l'environnement ne sont pas évoqués et la question des déplacés environnementaux n'est pas traitée dans ces déclarations.

Deuxièmement, dans aucune des deux déclarations, il est fait mention du phénomène de la mobilité des populations. Cette carence traduit la négligence du phénomène, lors des conférences internationales sur l'environnement, ainsi que la sous-évaluation des effets des dégradations environnementales. On peut dire qu'au moment de la prise de ces déclarations, le sujet des déplacés environnementaux n'était pas une question prioritaire des préoccupations de la communauté internationale. C'est ainsi que l'on peut déduire des principes 22 de Stockholm et 13 de Rio, un appel aux Etats à développer davantage le droit en matière de responsabilité environnementale et d'indemnisation des victimes, sans pour autant faire cas des situations où il n'était pas question d'indemnisation, mais de déplacements de populations, parce que le milieu affecté ne serait plus vivable.

86.

Troisièmement, on peut dire que ces instruments non-conventionnels ne comportent pas de règles relatives au statut juridique des populations touchées par les effets des dégradations environnementales. Dans ces déclarations, l'Homme n'est pas vu comme une victime des dégradations environnementales, mais plutôt comme un acteur et un responsable. Il en est responsable selon le principe 4 de la Déclaration de Stockholm qui dispose que « l'homme a une responsabilité particulière dans la sauvegarde et la sage gestion du patrimoine constitué de la flore et de la faune sauvage et de leur habitat qui sont aujourd'hui, menacés par de nombreux facteurs défavorables [...] »

En somme, il convient d'admettre que les déclarations sur la protection de l'environnement ne portent pas un statut des déplacés environnementaux. Dans ces déclarations, la protection de l'environnement est le seul objectif et l'homme est responsable des dégradations environnementales. Mais, en est-il de même au niveau des résolutions de l'ONU ?

86 Principe 4 de la déclaration de Stockholm de 1972 citée ci-dessus.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore