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La protection internationale des déplacés environnementaux


par Aimé OUEDRAOGO
Université privée de Ouagadougou  - Master 2 2022
  

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B- L'adoption d'un protocole additionnel à la CCNUCC

Il existe des réflexions allant dans le sens de l'adoption d'un protocole à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques pour la protection des déplacés environnementaux. Frank BIERMANN et Ingrid BOAS ont proposé l'élaboration d'une protection qui va reconnaître légalement le concept de déplacés environnementaux255, grâce à l'adoption d'un protocole additionnel à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques256.

250 (M.) HOCHULI, « Protection et perspectives pour les réfugiés climatiques », Genève, Caritas, 2017, p.6.

251 (A.) COSTI, « De la définition et du statut des « réfugiés climatiques », une première réflexion », Yearbook of the New Zealand Association for Comparative Law 489-505, Wellington, Victoria University of Wellington, 2011, p. 399.

252 Coordination et Initiatives pour Réfugiés et Etrangers, « Ceci n'est pas un réfugié climatique », Bruxelles, 2010, p. 6.

253 (J.) Mc ADAM, « Environmental Migration Governance », UNSW Law Research Paper N°2009-1, 2009, p. 12.

254 (C.) COURNIL, « Quelle protection juridique pour les réfugiés écologiques ? Quel statut pour les réfugiés environnementaux ? », Actes de la journée du 14 décembre 2007, Collection les journées d'études, Paris, 2008, p. 21.

255 (J. G.) SPETH et (P. M.) HAAS, « Global environmental governance », Pearson Education, Delhi 1100107 Inde, 2007, p. 12 et Ss

256 (F.) BIERMANN et (I.) BOAS, «Preparing for a Warner World : Towards a Global Governance system to protect Climate Refugees» Working paper N° 33, Global Governance, 2007.

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L'option de ce protocole est à explorer plus amplement pour deux raisons. Premièrement, il s'agit du lien entre la protection de l'environnement et la protection des déplacés environnementaux. Ce lien s'établit dans le sens selon qu'une protection efficace de l'environnement permet, d'une part, de prévenir les dégradations environnementales qui provoquent les déplacements environnementaux et d'autre part, de protéger le droit des déplacés environnementaux à un environnement de qualité. Selon Sophie PECOURT257, la protection des déplacés environnementaux va de pair avec la protection de l'environnement. Conformément à l'article 1er de la Déclaration de Stockholm, le déplacé environnemental a un droit fondamental « ... a des conditions de vie satisfaisantes, dans un environnement dont la qualité lui permet de vivre dans la dignité et le bien-être 258».

Ensuite, ce protocole présente l'avantage d'offrir une protection efficace aux déplacés environnementaux, car il comportera les principes de prévention et celui de pollueur payeur. La mise en oeuvre de ces principes permettra de protéger le droit des déplacés environnementaux, dans les cas où le déplacement serait dû à une rupture environnementale d'origine humaine comme la pollution. Ce fut le cas dans l'affaire Tatar259 dans laquelle la Cour européenne des droits de l'homme a condamné l'Etat roumain à réparer les droits des déplacés environnementaux, en déclarant que les autorités roumaines ont violé le principe de précaution, car « Les conditions d'exploitation fixées par elles se sont révélées insuffisantes260». La cour a estimé qu'« au regard de l'existence d'un risque sérieux et substantiel pour la santé et pour le bien-être des requérants », l'Etat se devait d' « agir afin d'assurer la jouissance par ces derniers, d'un environnement sain et protégé ».

En termes de portée, le protocole additionnel à la CCNUCC relatif à la protection des déplacés environnementaux aura la même force juridique que la Convention tirée du principe Pacta Sun Servanda qui lie les Etats par leur adhésion. Cependant, un tel protocole présenterait le risque de ne pas aboutir facilement, au regard des divergences des Etats sur les questions des changements climatiques et le lien entre les changements climatiques et les déplacements environnementaux. Il y a également, la crainte que la protection des déplacés

257 (S.) PECOURT, « Protections des déplacés et réfugiés climatiques. Migrations forcées, droits de l'homme et changement climatique », Mémoire en vue de l'obtention du Certificat de formation continue en droits de l'homme, l'Université de Genève, 2008, p. 16.

258 Principe 1er de la déclaration de Stockholm de 1972.

259 CEDH, affaire TATAR c. Roumanie, 27 janvier 2009, 67021/01. « Les requérants alléguaient que le procédé technologique de la société S.C Aurul Baia Mare représentait un danger pour leur vie »

260 CEDH, Tatar c. Roumanie. Cité par Nicolas HERVEUX in analyse « catastrophe écologique de Baia Mare et droit à un environnement sain », publié dans la rubrique Combat des droits de l'homme (CPDH), le 28 Janvier 2009.

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environnementaux soit reléguée au second plan par les parties à la CCNUCC, du fait que les enjeux climatiques sont déjà énormes.

A la lumière de ce qui précède, on peut dire que la protection des déplacés environnementaux peut se faire à travers l'adoption de nouveaux protocoles additionnels aux Conventions de protection existantes. Toutefois, cette hypothèse comporte des limites non négligeables qu'il faudrait prendre en compte. Cela amène à envisager l'hypothèse de la naissance d'une convention spécifique à la protection des déplacés environnementaux.

Paragraphe 2 : l'élaboration d'une convention spécifique aux déplacés environnementaux

L'approche de la mise en place d'une nouvelle convention internationale autonome pour les déplacés environnementaux se justifie, au regard des limites et des difficultés que présentent les hypothèses de réforme et d'adoption d'instruments additionnels qui ont été développées dans le paragraphe précédent261. L'idée serait d'élaborer une convention spécialement relative à la protection des déplacés environnementaux. A cet effet, plusieurs projets de convention relatifs aux déplacés environnementaux ont été proposés par des chercheurs262. Mais, le projet de convention relative au statut international des déplacés environnementaux263 proposé par le Centre de Recherches Interdisciplinaires en Droit de l'Environnement de l'Aménagement et de l'Urbanisme (CRIDEAU) de l'Université de Limoges, en collaboration avec la Revue de Droit de l'Université de Sherbrooke (RUDS), a retenu notre attention. Dans le cas de la présente étude ; nous allons examiner ce projet parce que, d'une part, il est bien abouti dans la forme et dans le fond et, d'autre part, il semble apporter des solutions concrètes aux situations des déplacés environnementaux. Pour ce faire, nous allons donc, analyser le contenu de ce projet de convention (A) et apprécier sa portée (B).

261 (S.) MALJEAN-DUBOIS, « La « fabrication » du droit international au défi de la protection de l'environnement » in le droit de l'environnement face aux enjeux environnementaux, colloque d'Aix-en-Provence, Société Française pour le Droit International, Juin 2010, p. 490

262 (C.) COURNIL, « Les défis du droit international pour protéger les « réfugiés climatiques », in réflexions sur les pistes actuellement proposées ; ouvrage collectif, Acte de la journée d'études sur les changements climatiques et les défis du droit, 24 mars 2009, Villetaneuse. Bruylant Bruxelles, 2009, p. 17.

263 Projet de convention internationale relative au statut des déplacés environnementaux, adoptée à Paris le 2 décembre 2008.

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A- Le contenu du projet de convention relative au statut international des déplacés environnementaux

Le projet de convention relative au statut des déplacés environnementaux est spécialement conçu pour apporter une protection adéquate aux déplacés environnementaux. Le contenu du projet de convention est réparti en cinq (05) chapitres qui comportent les définitions et le champ d'application264, les droits garantis265, les institutions266, des mécanismes de mise en oeuvre267 et les dispositions finales268. Il renferme au total, 23 articles. Pour nous, le contenu de ce projet de convention est formellement satisfaisant selon plusieurs raisons.

Premièrement, il s'agit de l'objet du projet de convention. Selon l'article 1, « l'objet de la présente convention est de contribuer à garantir des droits aux déplacés environnementaux et à organiser leur accueil, ainsi que leur éventuel retour, en application du principe de solidarité »269. Afin de garantir les droits des déplacés environnementaux, le projet de convention s'appuie sur des principes tels que le principe de responsabilités communes mais différenciées, le principe de proximité, le principe de proportionnalité ou encore le principe d'effectivité. Ces principes sont exposés à l'article 4 du projet de convention.

Deuxièmement, il s'agit des droits garantis. Dans le projet de convention relatif aux déplacés environnementaux, il y a trois catégories de droits qui sont garantis. Il s'agit des droits communs270 aux déplacés environnementaux qui sont au bénéfice de toute personne qui tomberait dans la définition-cadre des déplacés environnementaux271. Il y a également les droits des déplacés environnementaux temporaires272. Aussi, il y a les droits des déplacés environnementaux définitifs273 et les droits spécifiques aux familles et populations274. Avec tous ces droits énumérés, on peut dire que le projet de convention relatif aux déplacés

264 Voir Chapitre 1 du projet de convention relative au statut international des déplacés environnementaux

265 Voir Chapitre 2

266 Voir Chapitre 3

267 Voir Chapitre 4

268 Voir Chapitre 5

269 Voir Article 1.

270 Voir Article 5.

271 Voir Article 2, alinéa 2.

272 Voir Article 6.

273 Voir Article 7.

274 Voir Article 8.

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environnementaux couvre suffisamment le besoin de protection des déplacés environnementaux.

Troisièmement, il s'agit des institutions et mécanismes de mise en oeuvre prévus par le projet de convention pour la protection effective275 des déplacés environnementaux. A cet effet, le projet de convention prévoit l'Agence Mondiale pour les Déplacés Environnementaux (AMDE) et le Fonds Mondial pour les Déplacés environnementaux (FMDE) pour l'application de la convention276. L'AMDE sera une institution qui aura le statut d'une organisation spécialisée des Nations Unies et dont les missions seront celles de conduire des travaux, de mobiliser des moyens, d'évaluer les programmes mis en oeuvre pour prévenir, traiter et assister les déplacés environnementaux. Le FMDE permettra la mise en oeuvre des aides financières et matérielles pour la protection des déplacés environnementaux277. Les mécanismes de mise en oeuvre que sont la coopération, la conférence des parties et les rapports nationaux d'application278 sont prévus, afin d'assurer l'application effective de la convention.

Enfin, on peut dire que le projet de convention relative aux déplacés environnementaux pourra être l'instrument juridique tant attendu pour la protection des déplacés environnementaux, au regard de son contenu. Toutefois, il s'agit d'un projet, et il convient d'apprécier sa portée juridique.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus