La protection internationale des déplacés environnementauxpar Aimé OUEDRAOGO Université privée de Ouagadougou - Master 2 2022 |
A- La réforme des règles de protection dans le droit international des réfugiésLes règles de protections des personnes dans le droit international des réfugiés sont essentiellement issues de la Convention de Genève de 1951 qui constitue le fondement du droit international des réfugiés. La réforme de la Convention de Genève pour prendre en compte les déplacés environnementaux comportera l'intégration des déplacés environnementaux dans la Convention et l'aménagement de leur protection. L'étape de l'intégration consistera à ériger des critères qui déterminent les facteurs déclencheurs pour la demande du statut de déplacé environnemental. A ce propos, il conviendra tout d'abord de procéder à la consécration du statut du déplacé environnemental à travers une définition claire, précise et dûment établie. Cela peut se faire par l'intégration de la notion de déplacés environnementaux dans l'article 1er233 de la Convention qui comporte les termes et leurs définitions. Cela va nécessiter alors, à appréhender le phénomène de la rupture environnementale comme une « persécution », à la lumière de la contrainte que cela impose aux déplacés environnementaux, étant entendu que la crainte d'être persécuté existe soit en amont soit en aval de la rupture environnementale. Les déplacés environnementaux ont vécu ou vivent sous la crainte de la persécution par le simple fait de savoir que les prévisions météorologiques ont annoncé des fortes pluies diluviennes, ou que les volcanologues234 ont eu à démontrer que la zone habitée par ceux-ci serait assise sur du volcan ou que le niveau de la mer augmente de 2 cm, tous les 10 ans ou encore que l'avancée du désert s'avère inarrêtable 233 Article 1 paragraphe (A) alinéa 2 de la convention de Genève. 234 Des spécialistes de l'étude des volcans selon le dictionnaire français « le Larousse.fr ». 64 dans le Sahara235. Les habitants des zones à haut risque d'une inondation ou d'éruption d'un volcan se lèvent tous les matins avec l'idée que la situation pourrait se produire à tout moment. Ceux-ci souffrent déjà de la crainte d'être persécuté par la survenue instantanée, future, proche ou lointaine du phénomène de la rupture environnementale. Ensuite, après avoir intégré les déplacés environnementaux dans la Convention, il faudrait penser aux particularités de leur situation et ériger des droits adaptés à leur profit. Il s'agira, à cet effet, de prendre en compte, en plus des droits communs aux réfugiés, les éventuelles réinstallations des déplacés environnementaux et leur garantir un droit à la réinstallation qui pourra entériner leur retour inconditionnel dans leur pays d'origine, quand les conditions le permettraient. Ce droit serait particulier, dans la mesure où il n'est pas au bénéfice des réfugiés ordinaires, mais nécessaire pour les déplacés environnementaux du fait que ceux-ci seraient toujours animés de la volonté de retourner chez eux, aussi et surtout, par le fait que « le lien juridique avec leur Etat n'est pas rompu mais temporairement inopérant236». Enfin, la réforme de la Convention de Genève en vue de prendre en compte la protection des déplacés environnementaux présente les avantages d'obtenir l'adhésion des Etats parties et de bénéficier de la force juridique de la Convention. Néanmoins, on peut souligner des difficultés liées même à la convention de Genève. Sur le plan juridique, il y a le risque de bouleversement du droit d'asile et sur le plan politique, le risque de fermeture des frontières237. Aussi faut-il rappeler que la Convention de Genève a été adoptée dans un contexte d'après-guerre et par conséquent, dans un contexte migratoire bien différent de celui de nos jours, tandis que les déplacements pour des raisons de rupture environnementale sont des nouvelles causes d'exil qui sont progressivement apparues dans des contextes quasiment différents. En somme, la réforme du droit international des réfugiés permet de voir qu'il est possible de protéger les déplacés environnementaux, à travers la Convention de Genève, malgré ses limites, au regard des particularités de la protection des déplacés environnementaux et aussi, des réalités contextuelles de la convention. On peut dès lors nous 235 (R.) MAIRE et autres, « Enregistreurs et indicateurs de l'évolution de l'environnement en zone tropicale », Pessac, Presse Universitaire de Bordeaux, 1994, p. 32. Disponible en ligne à travers le lien http://www.openedition.org/6540. Consulter le 23 mai 2021 à 13 h 29 mins. 236 (V.) MAGNINI, « Les réfugiés de l'environnement, l'hypothèse juridique à-propos d'une menace écologique », Thèse de droit, Université de Panthéon Sorbonne, Paris, 1999, p. 462. 237 (F.) RENAUD, «Control, Adapt or Flee: How to Face Environmental Migration? », UNU Institute for Environment and Human Security, 2007, p 18. 65 tourner vers d'autres branches du droit international spécial pour chercher de nouvelles possibilités. |
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