Rapport de stage effectué à l'auditorat militaire de garnison Kinshasa/Matetepar Eliel MATOKA Université de Kinshasa - Graduat 2021 |
Section 1 : L'HISTORIQUE DE LA JUSTICE MILITAIREEn règle générale, les infractions commises par les Militaires sont violentes et complexes au point que seuls leurs semblables pourraient avoir le courage et les moyens humains pour rechercher et réprimer les infractions ainsi commises.Son juge naturel doit être celui qui a la pratique du commandement et de l'obéissance, qui parle son langage et qui, soumis aux mêmes devoirs et sacrifices, vivant au sein de cette communauté Militaire, connait sa mentalité et ses difficultés. Si les magistrats civils sont intellectuellement aptes à appliquer les codes de justice et pénal Militaires, ils sont cependant, empiriquement et techniquement inaptes à les appliquer, d'où la nécessité qui s'était imposer pour instituer une justice Militaire à côté de la justice de droit commun, la première rendue par les hommes en uniforme et la seconde par les hommes en toge. Il était donc nécessaire de penser à un système répressif permettant de poursuivre les infractions commises par les Militaires pour éviter qu'elles restent impunies. Ainsi naquit la justice Militaire. On compte cinq périodes dans l'évolution du droit pénal Militairecongolais. Ces périodes sont celles marquées par le Décret du 8 mai 1958, leDécret-loi du 18 décembre 1964 portant Code provisoire de justice Militaire,l'Ordonnance-loi du 25 septembre 1972 portant institution d'un Code dejustice Militaire et la Loi n°024/2002 du 18 novembre 2002 portant Codepénal Militaire. A toutes ces périodes, il doit être ajouté celle ayant précédéle décret du 8 mai 1958, qui constitue, en fait, une période à part entière1(*).L'histoire de la justice Militaire de la RDC remonte avant l'Etat Indépendant du Congo avec la création de la Force Publique par Décret du 22Décembre 1888 carla naissance des juridictions Militaires en RDC coïncide avec la création de la force publique sous le décret du 22 décembre 1888 et elles ont considérablement évolué dans un espace de 114 ans, c'est-à-dire de la période précoloniale à la promulgation de la dernière loi judiciaire Militaire. Le décret du 22 décembre 1888 avait créé les Conseils de guerre et les conseils de guerre d'appel présidés par un juge du tribunal de première instance et assisté des officiers tout en respectant le principe hiérarchique.Ces conseils étaient compétents, d'abord pourconnaitre des fautes Militaires graves érigées en infractions, ensuite pour connaitre de toutes les infractions commises par les officiers, sous-officiers et soldats de la Force Publique. Le décret indiquait en outre les peines et les fautes militaires graves érigées en infraction. C'est ainsi que l'article 22 dudit décret prévoyait le passage aux armes pour tout militaire condamné à mort. Après le décret du 22 décembre 1888, fut promulgué le décret du 8 mai 1958. Sur le plan judiciaire, ce décret avait remplacé les conseils de guerre d'appel par les cours militaires avec les mêmes prérogatives et les conseils de guerre ne connaîtront que des mutilations volontaires et des fautes militaires graves érigées en infraction. Sous l'empire de ce décret, les tribunaux répressifs sont désormais investis du pouvoir de connaître les infractions de droit commun commises par les militaires. Le décret du 8 mai 1958 sera suivi du décret-loi du 14 août 1964 portant code provisoire de justice militaire qui à son tour institua une cour militaire et un Auditorat général pour toute la République, un conseil de guerre par ressort territorial du tribunal de première instance et des tribunaux militaires de police. Sur le plan de la procédure, les voies de recours n'étaient plus reconnues aux justiciables des juridictions militaires sous l'empire du texte sous examen. Au plan de la compétence, les juridictions militaires instituées par le décret-loi de 1964connaissaient de toutes les infractions de quelques natures que ce soit, commises par les militaires. Mais, c'est avec l'ordonnance-loi du 25 septembre 1972 portant institution d'un Code de justice militaire que l'organisation, la compétence et la procédure vont être plus améliorées qu'avant. En effet, Sur le plan de l'organisation, il est créé un ensemble juridictionnel qui se veut intégral et complet, capable en tout temps de se suffire à lui-même tout en consignant l'administration de la justice militaire aux magistrats militaires et aux officiers des Forces Armées;Sur le plan de la compétence et de la procédure, le Code de justice militaire de 1972 reconnait aux conseils de guerre une compétence personnelle, tout en délimitant les domaines respectifs des tribunaux ordinaires et des tribunaux militaires ; Sur le plan des incriminations, il est défini toute une série d'infractions susceptibles de compromettre l'ordre public militaire et la sécurité de l'Etat2(*). Le Code de justice militaire est, en fait, le format définitif de ce qu'était censé être le Décret-loi du 18 décembre 1964. Il arrive sept ans après la prise de pouvoir par le général Mobutu, qui entendait parachever l'oeuvre qu'il avait commencée dans la disciplinarisation de l'armée. Mieux, le Code de justice militaire est présenté comme une réponse aux lacunes relevées dans l'application du Code provisoire de justice militaire3(*). Sur le plan de la procédure, contrairement au précédent texte, le code de justice militaire de 1972 reconnaît le droit de recours aux justiciables de juridictions militaires. Suite au renversement du régime dictatorial de la deuxième Républiquepar l'AFDL, la justice militaire congolaise connaître un nouveau texte régulateur. En effet, le décret n°17 du 23 août 1997 portant création de la cour d'ordre militaire (COM) avait institué une seule juridiction militaire dotée des compétences matérielles, personnelles et territoriales illimitées pour tout le pays. Ces décisions étaient irrévocables, car elles étaient susceptibles d'aucuns recours. Actuellement la justice militaire congolaise est régie par la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire. En effet, cette loi a modifié celle du 25septembre 1972 ayant porté Code de justice militaire et a apporté une série d'innovations, notamment celles liées à l'usage d'une certaine terminologie. Ainsi, avec le Code judiciaire militaire du 18 novembre 2002, le législateur parle de tribunal et cour militaires en remplacement des conseils de guerre, appellation jadis usitée dans le Code de justice militaire, devenu anachronique4(*). Elle a été modifiée le 10 mars 2017 par la loi organique n°17/003 du 10 mars 2017 modifiant et complétant la loi n° 023-2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire. Cette modification concernait que deux articles, 115 et 119, et avait pour objectif de régler la question de la juridiction compétente lorsque les civils et les militaires se trouvent dans un lien de correité ou de complicité par 1'harmonisation du Code judiciaire militaire avec la Loi organique n° 13/011-B du 11 avril 2013 portant organisation, fonctionnement et compétences de juridiction de l'ordre judiciaire et de régler le problème de la juridiction compétente en cas d'infraction continue s'étendant d'une part sur une période ou le justisiable relevait de la juridiction de droit commun et d'autre part, sur une période pendant laquelle i1 rélève de la juridiction militaire ou vice-versa. Conformément à l'article premier du code judiciaire militaire de 2002, La justice militaire est rendue en République Démocratique du Congo par les juridictions militaires ci-après : · Les Tribunaux Militaires de Police ; · Les Tribunaux Militaires de Garnison ; · Les Cours Militaires et les Cours Militaires Opérationnelles ; · La Haute Cour Militaire. Près chacune de ces juridictions militaires, il est rattaché les parquets militaires appelés « AUDITORATS MILITAIRES » qui sont : · L'Auditorat militaire Général rattaché à la Haute Cour militaire · L'Auditorat militaire Supérieur rattaché à la Cour militaire · L'Auditorat militaire de Garnisonrattaché aux Tribunal militaire de Garnison et le Tribunal militaire de police. Les magistrats du siège sont placés sous l'autorité du Premier Président de la Haute Cour Militaire tandis que ceux du parquet sont dirigés par l'Auditeur Général. Le code judicaire militaire de 2002 est accompagné par la loi n°24-2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire et celle-ci a été modifiée par la loi n°15/023 du 31 décembre 2015 modifiant et complétant la loi n°023/2002 du 18 novembre 2002 portant code judiciaire militaire. En bref, la justice militaire a considérablement évolué dans un espace de 114 ans, c'est-à-dire de la période précoloniale à la promulgation de la dernière loi judiciaire militaire. * 1 L. BAMBI LESSA, Traité de droit judiciaire : La justice congolaise et ses institutions, Kinshasa, PUC, 2018, P. 257 * 2 A. NGUMBI AMURI, Notes de cours de droit pénal et procédure pénale militaires, Faculté de droit, UNIKIN, 2016-2017, p. 37-38. * 3L. BAMBI LESSA, op.cit. p. 273 * 4L. BAMBI LESSA et A. BAYONA Ba MEYA, Manuel de procédure pénale, Kinshasa, PUC, 2011, p.113 |
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