§2. La saisie immobilière
La saisie immobilière est la voie d'exécution
ouverte au créancier qui entend saisir et faire vendre un immeuble de
son débiteur pour se payer sur le prix d'adjudication. Contrairement aux
saisies mobilières nombreuses et complètement remaniées
appelant des procédures différentes, la saisie immobilière
relève d'une
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procédure unique. Avant la législation
communautaire, elle était régie par les articles 390 à 414
du code de procédure civile et commerciale. Le législateur OHADA,
aux articles 246 à 323 de l'AUVE198, n'y a pas apporté
de changements majeurs qui font que la saisie immobilière reste encore
aujourd'hui une procédure coûteuse, complexe et surtout longue qui
protège tout autant le créancier comme on peut s'en rendre compte
en examinant ses conditions (I) et sa mise en oeuvre (II).
I Les conditions de la saisie
immobilière
Parce que la propriété immobilière
constitue parfois le seul élément de la fortune du
débiteur, lui servant dans bien des cas à l'habitation, le
législateur l'a entourée d'un formalisme très strict en
cas de saisie. Certes ces formalités sont nécessaires pour la
protection du débiteur poursuivi, mais en réalité, elles
traduisent également le souci du législateur d'assurer au
créancier le droit de recouvrer ce qui lui revient dans la
sérénité. Cela se vérifie à travers
plusieurs d'entre elles.
Il convient d'observer d'emblée que tous les
créanciers peuvent déclencher une saisie immobilière,
même si le chirographaire est tenu de commencer l'exécution de sa
créance en premier sur les biens meubles199.
Ensuite, les caractères de la créance. En effet,
il est une règle bien connue que le créancier qui désire
poursuivre en exécution forcée la vente d'un immeuble doit
disposer, comme dans toutes saisies, d'une créance certaine, liquide et
exigible constatée dans un titre exécutoire. Néanmoins, il
résulte de l'article 247 al. 2 que le créancier peut initier les
poursuites non seulement en vertu d'un titre exécutoire par provision,
mais aussi pour une créance en espèces non encore liquidée
en attendant le titre définitif ou la liquidation de la créance
pour procéder à la vente de l'immeuble. Il va de soi qu'une telle
faveur ainsi offerte au créancier lui fera gagner un temps
précieux pour accomplir d'autres formalités.
198 Avant l'OHADA, elle était régie par le
Code de procédure civile et commerciale (articles 390 à
414) issus pour l'essentiel d'un décret-loi du 21 juillet 1932
applicable au Cameroun et dans les pays francophones d'Afrique.
199Acte uniforme sur les procédures
simplifies de recouvrement de créance et voies d'exécution, art.
28 al. 2.
200Idem, art. 283.
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En outre, dirigée contre le débiteur,
propriétaire de l'immeuble ou titulaire d'un droit réel
immobilier, contre le tiers acquéreur ou la caution réelle, la
saisie ne peut porter que sur des immeubles immatriculés au
préalable. Cette exigence qui découle de l'article 253 de l'Acte
uniforme s'explique par la nécessité de préserver les
intérêts des acquéreurs de l'immeuble qui ont besoin d'un
droit inattaquable à l'issue de l'adjudication. Rappelons-nous les
caractères du titre foncier, inattaquable, intangible et
définitif. Or, ce tiers acquéreur peut être le
créancier lui-même qui sera déclaré adjudicataire de
l'immeuble pour la mise à prix à défaut d'enchères
plus élevées200. Cela explique aussi pourquoi le
créancier doit avoir la capacité requise pour ester en justice et
accomplir les actes de disposition, la vente d'un immeuble étant un acte
suffisamment grave pour le patrimoine d'une personne.
Enfin, le créancier peut poursuivre la vente
forcée des immeubles contre les deux époux communs en biens,
même simultanément sous certaines conditions. C'est ce qui
résulte d'une combinaison des articles 250 et 252 de l'Acte uniforme.
Comme on le voit, plusieurs conditions attestent de la
protection du créancier. Celui-ci se trouve également
protégé pendant le déroulement de la procédure.
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