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Les conséquences du principe général de responsabilité pénale des personnes morales en droit camerounais.


par Ivan De NGUIMBOUS TJAT LIMBANG
Université de Yaoundé II-SOA - Master en droit privé 2020
  

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2- L'exploration des solutions découlant des législations appliquant des mécanismes d'imputation différents du droit interne

185. Il s'agit des législations appliquant des mécanismes d'imputation directe de l'infraction à la personne morale. Elles ne font pour la plupart même pas intervenir le terme « organe » ou « représentant » dans l'énoncé des conditions de mise en oeuvre de la responsabilité pénale des personnes morales423, pour certaines. Et pour d'autres fondent la responsabilité pénale des groupements sur l'idée de faute diffuse424.

L'un des exemples les plus marquant est tiré du Code pénal belge qui ne fait pas d'entrée de jeu allusion à l'implication d'un organe ou d'un représentant. Son article 5 dispose que « Toute personne morale est pénalement responsable des infractions qui sont intrinsèquement liées à la réalisation de son objet, ou à la défense de ses intérêts ou de celles dont les faits concrets démontrent qu'elles ont été commises pour son compte »425. Le législateur belge a pourtant fait montre de prudence dans la mesure où cette responsabilité directe n'est applicable qu'à titre « subsidiaire »426. Elle ne s'applique pas dans les cas où la personne physique auteur des actes incriminés est identifiable. Dans ce cas l'imputation ne se fera pas de façon directe, mais par identification427. En fonction du degré de la faute commise par la personne physique, il y aura ou non cumul de responsabilité428.

423 D'autres auteurs n'envisagent le caractère indirect que sous cet angle, ainsi pour eux, lorsque la responsabilité pénale du dirigeant n'est pas une condition de celle de la personne morale, on est en présence d'une condition d'imputabilité directe. Il nous semble néanmoins que l'imputation directe de l'infraction à la personne morale est celle dans laquelle on n'envisage même pas la notion d'organe ou de représentant.

424 SAINT-PAU (J-C), La responsabilité des personnes morales : réalité et fiction, op.cit. p. 96.

425 Même si pour certains auteurs belges, l'article 5 fait implicitement allusion aux organes et aux représentant car selon eux, seul ces derniers peuvent légitimement engager la responsabilité pénale du groupement. Voir dans ce sens MASSET (A), « Consécration du principe de la responsabilité pénale des personnes morales en droit belge : le principe, les peines et les particularités procédurales », La responsabilité pénale de la personne morale - enjeux et avenir, L'Harmattan, 2015, Comité international des pénalistes francophones.

1615. A. Jacobs, « La loi belge à l'aune de la jurisprudence », La responsabilité pénale de la personne morale - enjeux et avenir, op.cit., p. 113 et s.

426 BOULANGER (A.), Restructurations sociétaires et responsabilité pénale, op.cit. p. 419- 415.

427 Voir TRICOT (J.) « Le droit pénal à l'épreuve de la responsabilité des personnes morales : l'exemple français » op.cit. 19 et s.

428 Art. 5 al. 2 du CP belge « Lorsque la responsabilité de la personne morale est engagée exclusivement en raison de l'intervention d'une personne physique identifiée, seule la personne qui a commis la faute la plus grave est

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186. Dans certaines législations anglo-saxonnes, un mode d'imputation directe de l'infraction pour « faute diffuse », c'est-à-dire une faute de la structure429 est envisagé. Cette vision s'est développée en droit Australien430, puis en droit anglais431. Aussi qualifiée de « corporate culture »432, elle se fonde sur « la politique de l'entreprise en tant que volonté de la structure »433. Elle ne concerne que la responsabilité pénale des personnes morales434. Ce texte dispose que la personne morale sera pénalement responsable lorsque la façon dont ses activités sont organisées cause la mort d'une personne ou découlent de la violation « grossière » d'une obligation de sécurité ayant entrainé la mort435.

Dans les deux cas suscités les législateurs émettent des réserves à chaque fois, tout simplement parce que les activités de l'entreprise sont nécessairement organisées par les personnes physiques dirigeantes436. Au fond, aucune des solutions envisagées par les différents systèmes étrangers ne saurait être considérées comme la panacée. Le législateur camerounais, pour optimiser les mécanismes d'imputation de l'infraction à la personne morale, pourra adopter un mécanisme hybride admettant la faute diffuse lorsque l'identification de l'organe ou du représentant est impossible à établir. Pour l'heure, et en attendant une réaction du législateur, les organes de la procédure pénale devront adopter une certaine attitude pour palier eux même à certaines carences.

condamnée. Si la personne physique identifiée a commis la faute sciemment et volontairement, elle peut être condamnée en même temps que la personne morale responsable ».

429 BOULANGER (A.), Restructurations sociétaires et responsabilité pénale, ibid. p. 419 et s.

429 Ibid.

430 Article 12§3 du Code pénal australien aux termes duquel l'infraction pourra être imputée à la personne morale lorsque « il est prouvé que ... c) une culture d'entreprise existant au sein de la personne morale a commandé, encouragé, toléré ou conduit à la violation de la réglementation... ; ou d) s'il est prouvé que la personne morale a échoué dans la création ou le maintien d'une culture d'entreprise qui exigeait la mise en conformité avec la réglementation ».

431 BOULANGER (A.), Restructurations sociétaires et responsabilité pénale, op.cit. pp. 497 et s.

432 Elle permet « L'imputation directe de l'infraction à la personne morale en cas d'homicide involontaire ». Propos emprunté à BOULANGER (A.) ibid., p. 419 et s. V. également la Corporate Manslaughter and corporate homicide Act.

433 DESNOIX (E.), « Plaidoyer (français) pour la consécration de l'infraction de corporate killing en Angleterre », Rev. pénit. 2007, n° 1, p. 131, spéc. p. 135.

434 « Et non celle des personnes physiques qui restent responsables suivant les fondements de l'infraction de la common Law » BOULANGER (A.), Restructurations sociétaires et responsabilité pénale, Op.cit. p. 419 et s.

435 Article 1§1 du projet de loi sur la Corporate Manslaughter and corporate homicide Act, traduit par J. Pradel, op.cit., spéc. p. 193, n° 127.

436 Article 1§1 du projet de loi sur la Corporate Manslaughter and corporate homicide Act, traduit par J. Pradel, op. cit., spéc. p. 193, n° 127.

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