1- L'utilisation des mécanismes de fusion et de
scission pour mettre en échec
l'action publique
156. La fusion et la scission peuvent
permettre à une personne morale contre qui est dirigé des
poursuites de mettre en échec l'action publique. Ainsi ce n'est pas les
mécanismes en eux même qui posent problème en droit
pénal camerounais, mais leur instrumentalisation. Comme on l'a
vu364, la fusion et la scission entrainent la dissolution d'une
personne morale et la transmission de son patrimoine à une ou à
plusieurs autres personnes morales.
Le problème soulevé par cette opération
est lié au sort de l'action de publique lorsque celle-ci était
engagée contre la société absorbée. Ainsi si
pendant le procès pénal deux sociétés s'entendent
pour fusionner ou alors pour se partager le capital d'une société
pour permettre à celle-ci d'échapper aux poursuites
pénales, l'action publique pourra-t-elle être redirigée
contre la société absorbante ou les nouvelles
sociétés bénéficiaires ?
En l'état actuel du droit pénal positif
camerounais la réponse à une telle question ne peut être
que négative. Car cela reviendrait à poursuivre la
société absorbante ou la nouvelle société pour une
infraction qu'elle n'a pas commise, et même pour une infraction dont elle
ignorait peut-être l'existence jusqu'à la fusion, cela
s'apparenterait donc une responsabilité pénale du fait d'autrui.
Non pas que la responsabilité pénale du fait d'autrui soit
étrangère en droit camerounais365, mais parce qu'en ce
qui concerne les personnes morales au regard des dispositions de l'article 74-1
du code pénal de 2016, elles sont pénalement responsables de leur
propre fait. Bien plus, l'une des causes d'extinction de l'action publique est
la mort du suspect de l'inculpé, du prévenu ou de
l'accusé366, pour la personne morale c'est
l'équivalent de la dissolution et donc de la perte de la
personnalité morale, même si la loi ne vise pas
expressément ce cas de figure367. Pourtant la question de la
transmission de la responsabilité pénale des personnes morales
mérite d'être posée avec acquitté, en raison de leur
capacité à disparaitre
364 N°164.
365 En effet il existe une responsabilité pénale
du fait d'autre en l'occurrence celle du chef d'entreprise. Lire à cet
effet NTONO TSIMI (G.), « Le devenir de la responsabilité
pénale des personnes morales en droit camerounais. Des lois
spéciales vers un énoncé général ? »
op.cit. pp. 221 et s.
366 Art. 62 CPP camerounais.
367 Là encore c'est une preuve que le code de
procédure pénale camerounais est taillé à la mesure
de la personne physique.
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pour mieux renaitre368 il serait contreproductif de
leur appliquer tous les principes propres aux êtres humains. La fusion et
la scission peuvent également intervenir avant l'exécution de la
sanction pénale.
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