1- La typologie des sanctions applicables à la
personne morale
49. Le législateur impose une distinction
théorique entre peine principale, peine alternative et peine accessoire
mais aussi les mesures de sûretés. Cette distinction
théorique est clairement affichée dans les articles 18 et
suivants du Code pénal camerounais.
La peine principale c'est celle qui est attachée
à titre fondamentale à une incrimination158. C'est
elle qui permet de déterminer la nature de l'infraction (crime,
délit contravention). La peine principale est prévue par chaque
texte incriminateur159. Elle doit être expressément
prononcée par le juge pour pouvoir s'appliquer au condamné. La
peine accessoire est une peine qui découle de plein droit du
prononcé d'une peine principale qu'elle vient renforcer sans que le juge
ait à la maintenir dans son jugement. Elle se distingue ainsi de la
peine alternative qui s'ajoute principale mais ne découle pas de plein
droit de la condamnation160.
L'intérêt de la distinction peine et mesure de
sûreté dans le cadre de la sanction pénale de la personne
morale permet, d'agir « ante délictum
»161, c'est à dire à des personnes
qui n'ont pas commis une faute ou qui ne peuvent pas commettre de faute mais
présentent un état dangereux162. À cet effet,
les mesures de sûretés peuvent être décidées
avant la déclaration de culpabilité et même à
l'encontre des personnes qui ne sont pas pénalement responsables
comme
157 Ibid. pp. 221 et s.
158 MINKOA SHE (A.), cours polycopié de droit
pénal général, dispensé en Licence II droit
privé, année académique 2015-2016.
159 Ibid.
160 Ibid.
161 Ibid.
162 Ibid.
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le dément ; des groupements dont le fonctionnement
représente un danger pour l'ordre public qu'ils soient dotés ou
non de la personnalité juridique.
50. L'autre question soulevée par la distinction entre
peine et mesure de sûreté est de savoir si on admet seulement
l'emploi alternatif de la peine et de la mesure de sûreté ou si on
peut infliger à la fois les deux types de sanctions ? Le
législateur n'a pas apporté une réponse précise
pour les personnes morales, mais il est possible d'appliquer les deux types de
sanctions de façon alternative dans certains cas et de façon
cumulative dans d'autres cas.
2- La détermination de cause d'aggravation de la
sanction pénale des personnes
morales
51. Au-delà la détermination d'un régime
général de la sanction applicable à la personne morale, le
législateur anticipe sur les causes qui pourraient influencer cette
dernière. À cet effet, le législateur Camerounais s'est
limité expressément à l'aggravation de la sanction
applicable à la personne morale et n'a décidé que d'une
seule cause : la récidive. L'article 88 du code pénal de 2016 qui
traite de la récidive des personnes physiques et morales prend soin de
définir le récidiviste et les effets de la récidive.
Le législateur prend le soin de distinguer la
récidive suivant la gravité des infractions, à cet effet,
une distinction est faite entre la récidive des crime et délits,
et la récidive des contraventions. Ainsi est considérée
comme récidiviste toute personne morale condamnée pour un crime
ou délit, qui commet un nouveau crime ou délit à la date
de sa condamnation définitive ou avant l'expiration d'un délai de
cinq (05) ans après l'exécution de la peine prononcée ou
de sa prescription163. Mais aussi toute personne morale qui connait
une nouvelle condamnation après avoir déjà
été condamnée pour contravention à compter de la
date à laquelle la condamnation est devenue définitive et
jusqu'à 12 mois après l'exécution de la peine
prononcée ou sa prescription164.
163 Article 88 alinéa 1 (a) du code pénal
camerounais de 2016 « est récidiviste toute personne physique
ou morale qui, après avoir été condamnée pour crime
ou délit, commet une nouvelle infraction qualifiée de crime ou de
délit dans un délais qui commence à courir à
compter de la date de la condamnation définitive et qui expire cinq (05)
ans après l'exécution de la peine prononcée ou de sa
prescription ».
164 Article 88 alinéa 1 (b) du code pénal
camerounais de 2016 « est récidiviste (...) toute personne
physique ou morale qui, après avoir été condamnée
pour contravention, commet une nouvelle contravention dans un délai qui
commence à courir à compter de la date de la condamnation devenue
définitive, qui expire douze (12) mois après l'exécution
de la peine prononcée ou sa prescription ».
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Toute personne morale reconnue comme récidiviste,
encoure le double du maximum de la peine prévue165.
52. La volonté du législateur de décrire
un cadre général de la sanction pénale applicable aux
personnes morales pénalement responsable est louable, et à
côté de cette consécration explicite des circonstances
aggravant la sanction des personnes, l'on peut déceler implicitement que
les mesures tendant à effacer la condamnation et ou la sanction comme la
réhabilitation ou même l'amnistie peuvent également
être étendue à la personne morale.
Au-delà de la détermination
générale se déployant dans un cadre théorique, le
législateur détermine aussi de façon concrète les
sanctions qui seront appliquées le cas échéant à la
personne morale.
B- La détermination concrète des
sanctions pénales applicables à la personne morale
53. Concrètement, le législateur camerounais
envisage plusieurs façons de punir la personne la personne morale.
À cet effet, la punition peut avoir une connotation économique,
politique (...) Une analyse des article 18 et suivant du code pénal
camerounais de 2016 laisse paraitre à côté des sanctions
visant le patrimoine de la personne morale (1), les sanctions visant son
existence et son honorabilité (2).
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