Analyse critique des resolutions du conseil de securite des nations uniespar William BALIKA LWAMUSHI Universté libre des pays des grands lacs (ULPGL) - Licence en droit 2000 |
B. L'inflation des résolutions du CS.Tout État membre des Nations Unies ne se sentant pas impliqué par une résolution du CS reste, toutefois, lié en vertu du mandat donné au CS de maintenir la paix et la sécurité internationales et admet que le conseil agit à son nom ( art 24 de la Charte ). A ce titre, cependant, sa participation sera passive à l'exécution de la résolution : manque de volonté politique. Ces derniers (c'est-à-dire les États ne se sentant pas impliqués par une résolution à laquelle ils n'ont pas été représentés ), en plus des sentiments de frustration et de marginalisation des autres membres du conseil sont les principaux responsables des faillites des opérations/interventions onusiennes. Ce manque de transparence du P5 vis-à-vis des autres États de l'organisation n'a pas, comme inconvénient, que de mettre les autres membres du conseil devant le fait accompli et dans l'impossibilité politique d'amender le projet de résolution prêt à être adopté, mais aussi que les parties à un différend ne sont pas à mesure de donner leur point de vue, qui pourrait être fondamental dans la recherche de la solution. Cela fait que si les résolutions sont adoptées par les États non permanents, c'est uniquement parce qu'ils veulent assistent les membres permanents dans la réalisation de leur dessein ou parce que les membres permanents ont misés sur leurs clientèle. La conséquence sera qu'une inflation des résolutions tendant à résoudre un différend succédera à une participation des États de l'organisation. Ce que l'échec peut d'abord prendre la forme de l'inflation des résolutions. Compte tenu de l'effet mal déterminé qu'ont ces textes, on peut faire deux remarques : - d'une part, étant donné que ces résolutions sont souvent peu suivies d'effets précis, on a tendance à les réitérer, ce qui constitue tout à la fois un signe de l'échec et une volonté de dépasser ce résultat négatif. Il n'est donc pas étonnant que le nombre de textes adoptés dépasse la centaine en moyenne chaque année. La production prouve peu l'efficacité. - mais d'autre part, compte tenu des faibles résultats concrets engendrés par les textes, on peut au-delà du simple rituel, débusquer un comportement pervers.101 Par ailleurs, quand un différend oppose deux ou plusieurs parties, le CS ne cherche pas à attaquer le mal par la racine; mais préfère, par d'innombrables résolutions, privilégier d'abord 100 Idem, P. 8 101 Martin P.M., Op.cit, P. 38 103 www. 104 Annexe ( Résolutions du CS - 2000 ). 102 Idem, Op. cit, P. 42 48 un réglement pacifique, en vertu de l'art 33 de la charte, de la crise. il emploie des moyens indirects comme les mesures provisoires, la médiation ou autres moyens prévus par la Charte pour sauvegarder ou restaurer la paix. Le danger est que la crise perdure et cause d'indicibles souffrances à la population et menace la paix internationale. Entretemps, le CS continue à faire pleuvoir des résolutions jusqu'à ce qu'elle decide enfin que le différend est grave ( art 1er §1, 34 et 35 de la Charte ). En effet, cette inflation n'est pas nécessairement un signe de réussite. La plupart de ces textes n'ont guère plus d'effet, malgré leur valeur obligatoire, que les recommandations de l'A.G. Même s'il est vrai qu'ils concernent des situations de crise aiguë ( par exemple, celle de l'ex-Yougoslavie )... Ainsi par les résolutions du CS, la société internationale montre sa résolution à adopter des textes; elle montre encore mieux son irrésolution aboutissant à une solution convenable.102 Durant l'année 2000, Le CS fut saisi de 172 questions pour n'adopter que 50 résolutions103. Les 122 autres questions non adoptées concernent soient les communiqués, soit les notes, soit les S/PRST, etc. Les 50 résolutions adoptées104 font notamment état de 8 résolutions soit 16 % sur la Sierra Léone, 5 résolutions soit 10 % sur la RDC, 4 résolutions soit 8 % sur l'Éthiopie et l'Érythrée, 4 résolutions soit 8 % sur le Moyen Orient, 2 résolutions soit 4 % sur l'Angola,... Dans l'ensemble, toutes ces résolutions totalisent les 46 % des décisions que le CS a estimé nécessaire pour restaurer la paix et la sécurité internationales dans ces conflits armés. On ne peut pas lui en vouloir en tant que garant principal du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Mais, ces résolutions ont-elles permises de régler les différends ? Bien sur que NON parce qu'en agissant, le CS ne cherche pas impérativement à régler le différend quant au fond que ce soit en vertu du chapitre VII ou autre. Il arrive essentiellement à remettre les parties sur des bases qui peuvent les stimuler à se mettre d'accord sur des moyens pacifiques. D'où même s'il fait usage de la force comme prévu à l'art 48 point 2 de la charte, c'est dans la limite de l'énoncé précédent. Mais cela n'empêche pas que le CS, au lieu de dorer la pullule, agisse de façon déterminante et invite les États membres à se conformer aux mesures qu'il juge nécessaire pour le rétablissement de la paix internationale. C'est ainsi qu'il peut, dans la transparence totale surtout des P5, inciter les États membres de l'organisation à unir leurs forces pour maintenir la paix et la sécurité 49 internationale.105 Et pour y parvenir, ce n'est pas par un océan des résolutions qu'il faudra régler un différend ni moins encore par des résolutions « carresseuses », mais plutôt par la prise de conscience par tous les peuples de l'ONU de leur responsabilité commune en matière de sécurité collective. Ceci signifie qu'il importe avant tout d'instaurer la transparence dans la prise des décisions et la participation des tous les Etats impliqués directement dans le différend pour mettre un terme définitif à celui-ci. Depuis le déclenchement de la crise Sierra léonaise, plusieurs résolutions ont déjà été adoptées par le CS, toujours selon la logique qu'il faut recommander des moyens d'arranger le différend entre le gouvernement et Sierra léonais et le RUF. Les membres du CS ont fini par constater l'existence d'une rupture de la paix internationale dans cette partie du monde et ont recommandé les mesures à prendre. Ils demeurent cependant constamment incapables de dénoncer l'acte d'agression dont est victime la Sierra Léone, et en conséquence, de rétablir la paix, surtout lorsque ce sont les exportations des diamants du RUF qui dictent le comportement à prendre face aux résolutions du CS. Partant, le nombre des résolutions n'a véritablement rien changé. Une, deux ou trois résolutions au maximum et bien dosées valent mieux que toutes ces « célèbres »résolutions qui ne peuvent aucunement changer substantiellement la nature du différend. La situation n'est pas tout à fait différente avec les impressionnantes résolutions sur la RDC. Depuis le début du conflit en Août 1998, une dizaine des résolutions ont été adoptées. Le conseil est arrivé, au paragraphe 2 de sa résolution 1304 (2000 ), au point de condamner « sans réserve les combats entre les forces ougandaises et rwandaises à Kisangani, en violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de la RDC » sans oser faire allusion à un acte d'agression. Et pour remercier les « agresseurs », le conseil a demandé tant aux forces invitées par le gouvernement qu'aux forces d'agression, de quitter le territoire congolais au même moment sous prétexte que l'omniprésence des uns insécurisait les autres. Or, en réalité, « en exigeant le retrait de toutes les forces étrangères, le CS n'oeuvre pas en faveur de la paix et de la sécurité internationales. Une distinction doit être faite entre les forces d'agressions et les forces alliées se trouvant sur le territoire congolais à la demande du gouvernement légal. Les criminels et les victimes ne sauraient être traités de la même manière.106 En définitive, que ce soit en Sierra Léone, en RDC, en Éthiopie ou en Érythrée, en Angola ou au Moyen Orient, pour ne citer que ceux-là; les résolutions du CS sont adoptées en 105 Voir Préambule de la Charte des Nations Unies. 106 CIJ, Livre blanc, Affaire relative aux activités armées sur le territoire du Congo ( RDC c. Rwanda ), T1, Kinshasa, Décembre 1998. P. 12 107 www. 108Ibidem. 50 grand nombre apparemment dans le but de restaurer la paix et la sécurité internationales; mais en réalité, dans celui de se positionner soit stratégiquement, soit économiquement, soit financièrement,... Aucune résolution du CS n'est vide de sens en soi. Derrière elles il y a chaque fois un mobile caché et que seuls les membres permanents savent appréhender. Si non, en l'absence d'un intérêt quelconque, c'est le veto qui tranche. Ceci ne veut pas dire que le veto a uniquement pour role d'extérioriser une absence d'intérêts dans une résolution, il peut également signifier la protection de ce dernier. La problématique qui se crée dans les résolutions du CS est liée au fait qu'il faut satisfaire les appétits de chacun de P5. En voulant les satisfaire, c'est le mandat entier de l'art 24 de la charte qui est boycotté. Mais les P5 prétendent agir toujours au nom des Etats membres. C'est ce qui fait que les résolutions sont en quelque sorte un rassemblement d'intérêts divergents entre les P5 mais au nom des Etats membres. D'où les résolutions sont ambiguës et imprécises, l'essentiel est que chacun y trouve son compte, l'inflation des résolutions pour ne rien résoudre importe peu. On peut aisément se demander qu'est- ce qui peut justifier que le Koweït soit agressé et même annexé à l'Irak et qu'au bout de quelques mois, il recouvre toute sa souveraineté et son intégrité territoriale et qu'ensuite une force américaine de 1100 soldats107 veuille y stationner en permanence pour le protéger ? Certainement, ce n'est pas parce que c'est un petit pays démographiquement ou géographiquement; ce n'est pas non plus parce que le CS a recouvré l'unanimité des P5 ou qu'il a voulu mettre les mécanismes de la Charte en mouvement; c'est tout simplement parce qu'il fallait protéger les importants intérêts économiques occidentaux dans ce pays. Ce sont ces intérêts économiques qui justifient même les quelques résolutions « dosées » du CS. Et pour rassurer davantage le Koweït les USA sont disposés à attaquer l'Irak même contre la volonté du CS108 chaque fois que ses intérêts seront insécurisés/menacés. C'est seulement le jour où des intérêts importants seront garantis à l'un quelconque des P5, surtout la coalition americano-britanique, que les conflits armés Sierra léonais, congolais, angolais,... prendront fin. Qu'est-ce qui fait que plusieurs dizaines des résolutions du CS sur la situation au Moyen Orient n'ont jamais produits d'effets, que l'Israël continue à entretenir des colonies tout en marchant sur les cadavres de ces résolutions ? C'est simple. C'est le jour où cessera le clientélisme au sein du CS que la situation redeviendra normal même sans résolution du CS. 51 |
|