SECTION II .: LES CAUSES DE L'INEFFICACITE DES
RESOLUTIONS DU CS.
Les causes de l'inefficacité sont très
nombreuses. Néanmoins, il est difficile de traiter chacune de
façon détaillée. c'est pourquoi le regroupement facilite
la compréhension et la consistance de cette analyse. Ces causes qui, du
reste, constituent un travail de diagnostic, permettraient de prendre des
mesures susceptibles de rendre le conseil plus apte à répondre
efficacement aux nouveaux défis de l'après-guerre froide. Il lui
permettrait également de répondre d'une meilleure manière
aux problèmes qui mettent en cause la paix et la sécurité
internationales.
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La doctrine, André FAYE en tête, regroupe les
critiques essentiellement en deux ordres à savoir la
confidentialité très forte des travaux du CS et l'extension
« abusive » du champ de compétence de l'organe90.
Les deux constituent chacun, les paragraphes de cette section.
Paragraphe 1. La confidentialité des travaux du
CS.
Partant de l'analyse de l'art 24 §1 de la Charte qui
dispose : « Afin d'assurer l'action rapide et efficace de
l'organisation, ses membres confèrent au CS la responsabilité
principale du maintien de la paix et de la sécurité
internationales et reconnaissent qu'en s'acquittant des devoirs que lui impose
cette responsabilité, le CS agit en leur nom. », il est
à constater que c'est pour des raisons de célérité
dans la prise des décisions que la responsabilité ainsi
conférée au CS est « principal » et non exclusive.
Cette disposition se réfère plutôt aux actions en cas de
menace contre la paix, de rupture de la paix ou d'actes d'agression ( chapitre
VII )91. Cependant, pour la plupart des États, les
méthodes de fonctionnement du conseil ne sont pas perceptibles. Elles ne
permettent pas aux autres États d'avoir connaissance de la teneur des
décisions avant qu'elles ne soient adoptées
définitivement. En effet, le CS est considéré comme trop
replié sur lui-même. Ce qui pour certains est préjudiciable
à l'organe qui y perd de sa crédibilité et de la confiance
de la communauté internationale...92
Ces considérations ont des retombées non
agréables sur le bon fonctionnement du conseil. C'est ainsi qu'il se
développe en son sein l'hypocrisie des P5 (A), l'inflation des
résolutions du CS(B), le replie vers les déclarations du
Président du CS(C) et la crainte du veto et son impact sur les
résolutions(D).
A. L'hypocrisie des P5.
L'hypocrisie des P5 demeure une réalité
manifeste quand nous savons que l'intérêt est la mesure de
l'action de ces grands. Il est à observer un comportement
déplorable car pour certaines questions, les membres permanents violent
les résolutions du CS alors qu'ils ont participé à leur
vote. C'est le cas notamment de la résolution 864 ( 1993 ) du CS qui
interdit la vente et l'approvisionnement en armes ou en produits
pétroliers aux troupes de l'Unita. Le paragraphe 19 de cette
résolution accorde au gouvernement le droit de communiquer au
90 Idem, P.8
91 Bedjaoui M., Op.cit, T 1, P. 588
92Faye A. in Le CERRI, Op. cit, P. 8
93 Anonyme. Le réglement du
conflit angolais et son inscription dans l'espacegéopoloitique de
l'Afrique Australe, s.l., s.d., P.
94 Martin P.M., Les échecs du
droit international, coll.Que sais-je ? éd. PUF, Paris, 1996.
P.39
95 www.
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secrétaire général de l'ONU la liste des
points d'entrée qu'il désigne où les armements ou
équipements militaires peuvent provenir pour approvisionner l'Unita. Par
cette résolution, l'État angolais pouvait jouir de toute sa
liberté d'approvisionnement en armes contre la rebellions. Cependant, la
résolution 976 ( 2000 ) du CS frappe à son tour le gouvernement
de l'interdiction d'approvisionnement en armes. Autrement dit, celle-ci,
contrairement à la résolution 864 ( 1993 ), son paragraphe 12,
décrète un embargo sur la vente d'armes au gouvernement angolais
et réaffirmer celui de l'Unita. Mais, en dépit de cet embargo sur
la vente d'armes, il ne fut pas total qu'il devrait l'être puisque la
Russie, le Brésil et le Portugal continuent de fournir des armements au
gouvernement alimentant ainsi le cycle de la violence, même
légale. Le gouvernement justifie ses achats d'armements en revendiquant
son droit d'Etat souverain, légal et sa fonction de défense du
territoire national. Ce qui implique pour lui la nécessité
d'importer des armes. 93
En fait, comme on peut s'en rendre compte, même au sein
du CS, les autres États membres auront à croire que tous les
membres ont consentis fermement à une résolution vu le
caractère très discret des consultations des P5. Or, il n'en est
pas ainsi : certains États, n'ayanr nullement envie de donner à
un texte un effet quelconque, n'hésiteront pas à l'approuver pour
ne pas se démarquer de la majorité habituelle et pour ne pas
mécontenter leurs allié. C'est seulement lorsque leur opposition
sera irréductible qu'ils voteront contre un texte qu'ils estiment
inacceptable. Une attitude médiane consiste à s'abstenir, ce qui
suggère également, mais en filigrane, l'absence de volonté
de donner effet à la résolution.94 Ce qui explique
qu'en dépit de l'unanimité des P5 obtenue lors du vote de la
résolution 976 ( 1995 ) par le CS, la Russie a intentionnellement
continué à fournir des armements au gouvernement angolais.
En outre, la crise du Golfe a intéressé le CS au
point qu'il a adopté à plusieurs reprises des décisions
obligatoires notamment les résolutions 660, 661 et 687. Le but de ces
résolutions était de favoriser l'arrêt des
hostilités et le retrait de l'Irak du Koweït95. Comme
cela ne fut pas aisé, le CS décida alors que l'ONU agisse de
façon résolue et consistante c'est-à-dire qu'elle
intervienne en application du chapitre VII de la charte. C'est ainsi que des
opérations militaires furent autorisées par la résolution
678 du CS. Cependant, comme en témoigne certains auteurs en l'occurrence
Bertrand M., il s'est agi de faire couvrir par le CS l'intervention
décidée par les USA pour réprimer l'invasion du
Koweït par l'Irak. Il s'agissait d'intérêts précis
concernant l'équilibre au Moyen Orient, la sécurité des
approvisionnements en pétrole de l'occident et la
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protection de l'État l'Israël. Ces
intérêts étaient suffisamment importants pour que les USA
se décident à une intervention militaire. L'existence d'une
situation dans laquelle l'URSS et la Chine n'avaient pas le moyen de s'opposer
à une telle opération ou d'en déterminer les
modalités, a abouti à une acceptation des décisions
américaines par les quatre autres membres permanents du CS .96
Au nom du gouvernement américain, la secrétaire
d'État Madeleine Albright avait déclaré que l'objectif des
USA était bel et bien de renverser le régime de Saddam
Hussein...- Ce qui fait que - la politique américaine s'est affranchie
de toute entrave extérieure, qu'il s'agisse de la communauté
internationale ou, plus concrètement du CS de l'ONU 97 et qui
justifie, également, que les USA ont plutôt
préféré intervenir dans la crise dans le cadre de la
légitime défense ( art 51 de la charte ). Pour ce faire, aucune
procédure prévue par le chapitre VII ne fut respectée et
toutes les résolutions du CS n'ont servies qu'à autoriser
l'opération militaire mais, en définitif, dans le sens où
les USA doivent intervenir en légitime défense contre l'Irak.
D'où pour que l'opération « Tempête du désert
» soit déclenchée, il faut l'accord du congrès
américain le 14 janvier 1997.98
Il importe, cependant, de remarquer que les USA peuvent se
passer de l'ONU en ce sens que le comportement des USA ces dix dernières
années révèle que Washington utilise l'organisation au
besoin et dans d'autres situations, n'hésite pas de s'en
démarquer officiellement... Aujourd'hui, Washington continue de
bombarder l'Irak et justifie son action au motif qu'ils n'ont ( avec le Royaume
Uni ) plus besoin des résolutions du CS. Aussi l'opération Renard
du Désert a été menée en violation du droit
international et en dépit de l'avis contraire de la plupart des
État membres du CS. l'autorisation de l'ONU pour tout usage de la force
armée est bafouée. Les USA préfèrent recourir
à l'OTAN plutôt qu'à mettre à la disposition de
l'ONU leurs soldats.99
Compte tenu de ce qui précéde, les cinq membres
permanents tiennent souvent des consultations officieuses avant les
réunions proprement dites du CS. C'est au cour de ces consultations du
P5 que la plupart de décisions du conseil sont formellement
arrêtées avant même la discussion avec les autres membres
non permanents. Ainsi, les discussions avec l'ensemble des membres du conseil
ne sont en réalité qu'un compte rendu de l'accord obtenu entre
les P5. Cette situation engendre des sentiments de frustration, de
marginalisation des
96 Bertrand M., Op.cit, P. 29
98 www.
97 Jeune Afrique,Le temps du monde,
Op.cit, PP.12 et 14
99 Faye A. in Le CERRI,Op. cit, P.
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autres membres du conseil. C'est pourquoi certains pays en
développement demandent à ce qu'il y ait un contrôle soit
politique, soit juridique, des décisions prises par le conseil .100
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