B. Applicabilité des résolutions.
Dans l'exercice de ses fonctions, le CS est organisé
à l'art 29 de la Charte de manière qu'il peut «
créer les organes subsidiaires qu'il juge nécessaire à
l'exercice de ses fonctions ». Ainsi, en vertu de l'art 98 de la
Charte, il peut charger le secrétaire général «
d'autres fonctions ». Ce qui fait qu'il n'est pas nécessaire
d'indiquer sur quel article ou quels articles de la charte préposent les
résolutions du CS : l'important est de savoir si la paix et la
sécurité
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internationales ont été menacées et si
les mesures de caractère militaire ou préventif contre un
État quelconque ont été autorisées.
Les opérations au Congo ont été
autorisées à l'origine par le CS dans sa résolutions du 14
Juillet 1960, adoptée sans vote contraire. Cette résolution,
compte tenu de l'appel adressé par le gouvernement du Congo, du rapport
du Secrétaire général et des débats au CS, a
été évidemment adoptée en vue du maintien de la
paix et de la sécurité internationales... C'est le
secrétaire général qui a décidé
lui-même quels États participeraient à l'opération,
soit fournissant des contingents armés, soit autrement... On ne saurait
conclure que les opérations en question empiéteraient sur les
prérogatives conférées au CS par la Charte ou les
usurpaient87. Contrairement à d'autres opérations,
aucune mesure préventive ou coercitive ne fut prise contre un
État quelconque en vertu du chapitre VII; les Nations Unies sont
seulement intervenues dans un conflit interne. Sans cette intervention des
Nation Unies, on peut essayer de s'imaginer ce qui aurait pu se passer dans ce
cas. Très probablement, on aurait dans ce cas assisté à
une prolongation et à une multiplication des ingérences
politico-militaires de l'extérieur, aggravant les tensions dans le pays
et conduisant celle-ci à un éclatement
définitif88. Ce qui aurait comme conséquence, la
menace contre la paix et la sécurité internationales.
Les art 31 et 32 combinés de la
Charte, prévoient que tout État qui n'est pas membre du CS ou des
Nations Unies peut être invité à participer à la
discussion d'un différend qui sera examiné par le CS; seulement,
sans droit de vote. Il peut y être invité lorsque ses
intérêts sont concernés par la question ou discussion et
dans cette situation, on estime même que cette invitation lui revient de
droit. Ceci n'empêche pas que d'autres États
intéressés par le différend puisse participer au
débat s'ils le demandent. Eux aussi n'ont pas le droit de vote, ce
dernier revenant uniquement aux 15 du CS, si l'un d'entre eux n'est pas partie
au différend à examiner ( art 27 §3 de la Charte ).
Ce principe ( participation sans vote par toute partie
intéressée par un différend à examiner)
consacré par la charte est la résultante de ce que les
pères fondateurs des Nations Unies souhaitaient que celle-ci soit.
Cependant, compte tenu de la complexité des relations internationales,
faire partir du CS ou pas, avoir le droit de vote ou pas ne signifie rien si
l'une des parties à un différend jouit de la clientèle de
l'un des P5. Tout projet de résolution qui tendrait à mettre en
mouvement les mécanismes de la charte contre la clientèle se
verra opposer une fin de non recevoir par un veto. Que ce veto
s'interprète comme abusif ou dissuasif, cela
87 capaldo G.Z., Repertoire de la jurisprudence de
la Cour internationale de Justice ( 1947-1992 ), V.1, éd.
Martinus...., London,1995.P. 550
88 Gendebien P.H., L'intervention des Nations
Unies au Congo : 1960-1964, Paris,éd. Mouton et cie, 1967. P.259
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importe moins. L'important est que refuser à un
État, partie à un différend, de voter n'a, en
définitive, servi à rien si ce n'est qu'un simple respect d'un
maigre principe.
Eu égard à tous ceux qui
précédent, on peut se rendre compte que en dépit du mandat
confié au CS (art 24 de la Charte), les États membres n'ont pas
une réelle volonté politique d'accorder à l'organisation
la possibilité de mener aisément sa mission. Ce sont eux, les
membres, qui causent les difficultés connues par l'ONU dans ses missions
de maintien de la paix et de la sécurité internationales. C'est
ce manque de volonté politique qui est le principal responsable des
échecs connus par les Nations Unies. Ainsi Madeleine Albright,
représentante américaine auprès de l'ONU, a
expliqué le 11 Juin 1993, devant le Council of Foreign Relations que les
échecs de l'ONU dans les opérations de maintien de la paix, de la
Yougoslavie à la Somalie en passant par l'Angola, étaient dus
à l'amateurisme des Nations Unies en ce domaine, et que c'est en
reformant la méthodologie de ces interventions que le succès
deviendra possible89. L'habileté de l'ONU à
sauvegarder la paix a atteint un point critique. Avant l'adoption de tout
projet de résolution, les membres du conseil, particulièrement
ceux permanents, se trouvent dans une situation de compétition dans
laquelle ils sont conscients de l'incompatibilité des positions
possibles et dans laquelle chaque partie eut occupé une position
incompatible avec celle que veut occuper l'autre. Et même si,
après consultations officieuses, les points de vue s'harmonisent, il
reste à savoir si les effets réservés à la
résolution ainsi adoptée seront respectés.
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