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Analyse critique des resolutions du conseil de securite des nations unies


par William BALIKA LWAMUSHI
Universté libre des pays des grands lacs (ULPGL) - Licence en droit 2000
  

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B.La légitime défense.

La défense des États est une prérogative réservée au CS des Nations Unies en vertu de l'art 24 §1 de la charte. Aucun État ou groupe d'États ne peut se rendre justice à soi-même ( art 2 §4 de la charte). Telle est la conception actuelle du droit international qui,, prend ses racines aux Nations Unies.

Toutefois, il arrive des situations où la rigueur de ces principes doit fléchir : c'est par exemple le cas, lorsqu'un État ou un groupe d'États est exposés à une agression grave qui causerait un mal irréparable s'il devait attendre la prise des mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales par le CS ( art 51 de la charte ). Dans ce cas, il a non seulement le droit, mais aussi le devoir de repousser la force par la force.

56 Nguyen Q. D. et alii, Op. Cit., T , P. 929

57 Bedjaoui M., Op. Cit., T , P. 593

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Cependant, cette façon de se protéger contre l'agresseur s'appelle « légitime défense ».Et la légitime défense peut donc se défini comme étant l'emploi direct et nécessaire de la violence pour repousser une agression injuste qui se commet contre58 son indépendance politique, sur son territoire ou celle d'un État tiers.

C'est pourquoi, la légitime défense est un droit qui peut être mis en oeuvre, collectivement tout autant qu'individuellement; ce qui est de nature à assurer les petits États qui ne peuvent compter, pour leur sécurité dans les conditions traditionnelles, que sur une alliance classique 59.

De plus, le recours à la force armée n'est autorisé que pour repousser une agression armée. Le recours légitime à la force, sous toutes ses formes, et non pas seulement sous la forme militaire, n'est donc légitime que s'il fait respecter le droit60.

1. Les conditions d'existence de la légitime défense.

Situé au coeur de la charte, au chapitre VII ( action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'actes d'agression ), l'art 51 constitue la plus grande exception à l'interdiction de l'emploi de la force qui soit prévue par la charte.

L'art 51 dispose, en effet qu' « aucune disposition de la présente charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un membre des Nations Unies est l'objet d'une agression, jusqu'à ce que le CS ait pris des mesures nécessaires pour maintenir la paix et la sécurité internationales... »

Néanmoins, la façon exacte dont il convient d'interpréter l'art 51, ainsi que ses rapports

avec l'art 2 §4 de la même charte, ont donné lieu à plus de controverses que tout autre article de

la charte. Qu'à cela ne tienne, certains éléments de légitime défense sont clairs.

Pour que soit retenue la légitime défense, quatre conditions doivent être remplies :

- L'actualité de l'attaque

- La proportionnalité dans la riposte à l'attaque

- l'instantanéité pour repousser l'attaque.61

A ces trois éléments, le droit international public ajoute un quatrième qu'est l'agression armée

dirigée contre un État.

58 NYABIRUNGU M., Droit Pénal Général Zairois, Kinshasa, éd. DES, 1989. P.130

59 Nguyen Q. D.et alii, Op. Cit., éd , P. 863

60 Bedjaoui M., Op. cit, T2, P.762

61 NYABIRUNGU M., Op.Cit. P.

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a. L'actualité de l'attaque.

Cet élément est essentiel dans la légitime défense en ce sens que l'État qui l'exerce doit réagir à un préjudice subi, une agression armée. Dans ce cas, il faut que la défense soit simultanée à l'agression.. Il n'y aura pas de justification si le danger est passé ou réalisé, ou encore si le mal est futur.

C'est dans ce cadre même que la légitime défense peut être organisée collectivement ou individuellement. Mais la question à laquelle il convient de trouver une solution est celle de savoir : à quelle condition doit répondre un accord de légitime défense collective pour correspondre aux prévisions de l'art 51 de la Charte.

La question a parfois fait l'objet des controverses, en particulier de la part de l'URSS à l'égard de l'alliance Atlantique. Il doit s'agir d'un accord librement consenti62 par lequel les parties s'engagent à considérer qu'une agression dirigé contre une autre constitue une agression pour toutes les autres.

L'existence d'un tel accord autorise tout État partie, et non pas seulement la première victime de l'agression armée, à invoquer la légitime défense Collective pour entrer dans le conflit armé. Au titre de l'art 51, chaque État exerce son droit propre.

Il n'est pas nécessaire que l'accord sur lequel se fondent les États soit antérieur au déclenchement de l'agression. On admet qu'une intervention sollicitée par un Etat victime d'une agression armée reste soumise au droit de la légitime défense collective63.

C'est ainsi que lors de la guerre du Golf, bien que les sanctions économiques aient été décidées en vertu du chapitre VII de la charte, les États-Unis eux-mêmes, bien décidés à garder entièrement le contrôle de l'opération, n'ont pas demandé la mise en application de ce même chapitre VII en ce qui concerne les sanctions militaires. Ce n'est pas le comité d'état-major tel qu'organisé par l'art 47 de la charte qui a pris la direction de l'opération; et, contrairement à ce qui s'était passé pour la guerre de Corée, ce n'est pas le drapeau des Nations Unies qui a été distribué aux troupes, même si des nombreux pays ont envoyé quelques unités modestes pour soutenir symboliquement l'action des États-Unis.64 Les États-Unis ont préféré plutôt agir sur base de l'art 51 de la Charte ( la légitime défense collective ). Et la preuve c'est que les États-Unis se sont affranchis de toute entrave extérieure, qu'il s'agisse de la communauté internationale ou, plus concrètement, du conseil de sécurité de

62 Art 52 de la Convention de Vienne sur le droit des traités.

63 Nguyen Q. D.et alii, Op. Cit., P.865

64 Bertrand M., Op. Cit.T , P. 96

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l'ONU. Pour la seconde fois, l'Irak fut bombardé dans la nuit du 16 au 17 Décembre 1998 aussitôt après la publication du rapport Butler. Et ce, sans l'aval préalable du conseil de sécurité de l'ONU. Peu importe la position prise par la Russie et la Chine qui, cette fois, ont bel et bien dit qu'elles « condamnaient » l'initiative américaine, et les regrets de la France importent encore moins. L'Amérique fait ce qu'elle a décidé de faire, la complicité docile et prévisible de la Grande Bretagne lui suffit65.

Dans le même ordre d'idées, l'éventualité d'une agression commise par un membre d'une organisation régionale contre un membre d'une organisation rivale s'inscrivait non pas dans le cadre du chapitre VIII mais dans celui de l'art 51, sur base duquel avait été créés l'OTAN et le Pacte de Varsovie, précisément pour surmonter le blocage de l'ONU66.

En outre, si l'agression est lointaine ou future, l'État ou les États n'ont pas le droit de recourir à la violence, car ils ont le temps de régler pacifiquement leur différend ( art 2 §4; 33 de la Charte) et de saisir le CS, en tant que « responsable principal du maintien de la paix et de la sécurité internationales »( art 24 §1 de la Charte), pour leur protection.

b. L'injustice subie.

Il est évident que la légitime défense, par ses mesures, doit être proportionnée à la menace et nécessaire. Cependant, l'application de ce principe peut poser des difficiles questions d'équilibre et d'appréciation : un État est-il par exemple fondé à recourir à une attaque nucléaire limitée pour arrêter une colonne blindée ? Toutefois, ce principe est néanmoins fort utile parce qu' il freine l'escalade de la force.67

.

c. L'instantanéité de la riposte.68

En outre, les mesures prises dans l'exercice de la légitime défense doivent être instantanées, irrésistibles, ne laissant ni le choix des moyens ni le temps de délibérer ... Toutefois, quand il est impossible de prendre immédiatement des mesures parce que, par exemple, la victime ne dispose pas d'une force armée dans la région où l'attaque a eu lieu, les

65 Jeune Afrique, Le temps du Monde, Kabila peut-il encore réussir ? 39 ème année, hebdomadaire international indépendant, n°1980-1981 du 22 Décembre 1998 au 4 Janvier 1999,.P.14

66 Charpentier J., Op. Cit., P. 99

67 Bedjaoui M., Op. Cit., T2, P. 774

68 ibidem

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actes de légitime défense ne sont pas interdits même s'ils ne peuvent pas normalement être considèrer comme immédiats.

d. L'agression armée dirigée contre un Etat.

La légitime défense est fondée d'abord lorsque l'agression armée est dirigée contre un État :contre son indépendance politique, sa souveraineté, son territoire, ses richesses ou ses frontières. L'art 51 de la charte rend ainsi nécessaire la défense d'autrui ( la défense collective ) lorsqu'elle ne comporte aucun risque pour soi-même ou pour les tiers ( les États non impliqués dans le conflit ). C'est pourquoi, la consécration de la légitime défense vise d'abord la protection physique de l'Etat victime.

Par ailleurs, font également corps avec la légitime défense, les agressions génératrices des catastrophes humanitaires : exécutions sommaires, extermination, mise en péril de l'intégrité corporelle ou sexuelle, etc. Ce qui fait qu'il ne faut pas seulement retenir la légitime défense contre l'atteinte à la personnalité de l'État, elle est également la défense est autorisée pour repousser toute pratique allant dans le sens de crime contre l'humanité ou contre la paix.

Cependant, la riposte aux atteintes à l'honneur telle que la diffamation, la calomnie, la réputation ou l'insoumission n'est pas justifiée pour prétendre agir en vertu de l'art 51 car on considère que la victime ne se trouve pas menacée par un danger grave et irréparable. Elle peut recourir aux us et usages diplomatiques pour obtenir réparation.

2. Conditions d'exercice de la légitime défense.

La condition d'exercice sous-entend la mise en oeuvre de la légitime défense. Comment doit procéder la victime d'une agression pour la repousser ?

La riposte, pour être justifiée, doit être proportionnée à l'attaque subie ou dont on est menacée. Mais il est difficile d'évaluer avec exactitude le degré de proportionnalité quand un État victime riposte à une agression dirigée contre lui alors même que les modalités d'exercice de la légitime défense ne sont pas définies de manière complète par l'art 51 de la charte et - qu'ils - se trouvent précisées par des normes coutumières.69

Dans la plus part des cas, seules les pratiques de destruction massive sont interdites. Autrement dit, le droit international humanitaire qui peut seul évaluer la proportionnalité parce

69 Nguyen Q. D.et alii, Op. Cit., éd , P.865

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que l'agresseur occupe, envahit ou annexe déjà le territoire de l'État qui doit se défendre contre l'injustice.

Cependant, il est généralement admis que l'appréciation de la proportionnalité doit tenir compte du fait que celui qui repousse une agression injuste prend sa décision dans le vif de l'action et qu'il ne saurait être question de lui tenir rigueur de n'avoir pas fait une évaluation quasi-mathématique entre le danger qu'il encourait et le mal qu'il a infligé. On exigera toutefois une appréciation raisonnable, compte tenu des circonstances. On pourra même tolérer que le bien sacrifié par la défense soit légèrement supérieur au bien sauvegardé. Ce qu'il faut rejeter, c'est la nette disproportion entre, d'une part, la défense et d'autre part, le caractère et le danger de l'agression.

En cas d'excès non intentionnel dans la défense, celle-ci pourra néanmoins être prise en compte en conduisant à une qualification moins grave.70

3. Les cas regrettables de la sécurité collective face à la légitime défense.

L'art 51 de la Charte poursuit en ces termes : « ... les mesures prises par les membres dans l'exercice de ce droit de légitime défense sont immédiatement portées à la connaissance du CS et n'affectent en rien le pouvoir et le devoir qu'à le conseil, en vertu de la présente charte, d`agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales ».

Cet article ramene toujours les États à la mission principale qu'ils ont confiés au CS,

particulièrement l'art 24 §1 de la charte, celle de la responsabilité principale du maintien
de la paix et de la sécurité internationales. Bien au-delà de cette mission, il convient aussi de remarquer qu'aucune action, surtout dans le cadre des accords régionaux, ne peut être entamée pour maintenir la paix sans l'aval préalable et « exprès » du CS.

En effet, cet organe joue un role décisif dans la mise en application de l'art 51. Le droit de légitime défense ne peut être invoqué qu'aussi longtemps que le CS n'a pas pris les mesures nécessaires pour maintenir la paix et il doit être exercé en tenant immédiatement informé le conseil des mesures prises.71 Peut-être que les « Pères fondateurs » des Nations Unies avaient estimés qu'il ne faut pas que la théorie de légitime défense collective puisse servir de prétexte aux États pour s'arroger le droit de recourir à la force dès qu'ils estiment la paix mondiale menacée.

70 NYABIRUNGU M,Op.cit, P. 136

71 Nguyen Q. D.et alii, Op. Cit., éd, P.864

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Ainsi, l'ONU, même s'elle ne s'oppose à l'existence des accords ou des organismes régionaux destinés à régler les affaires qui touchent au maintien de la paix et de la sécurité internationales »( art 52 §1 de la Charte ), exerce cependant sur eux un droit de regard sur les activités des institutions spécialisées; sur le plan de la sécurité, les organismes régionaux ( comme l'OTAN ou le Pacte de Varsovie ) ne peuvent prendre d'initiative militaire sans l'accord préalable du CS72

En plus, la charte fut rédigée en se fondant sur deux postulats : tout d'abord, une action coercitive d'exécution ne peut être menée avec succès que si toutes les grandes puissances y consentent. Essayer d'obtenir l'exécution par la contrainte en l'absence d'un tel consentement reviendrait à déclencher une guerre mondiale. Ensuite, les grandes puissances ont toutes le même intérêt général à empêcher les guerres.73 Toutefois, le droit de veto peut s'exercer comme conséquence, une puissance n'appartenant pas à la région peut opposer son veto, au CS, à une action coercitive de caractère régional, soit pour protéger sa clientèle, soit pour toute autre raison. Lorsque, paralysé par un veto ou par les divergences d'opinion de ses membres, le CS n'est pas en mesure de qualifier une situation - ni même de la constater ( art 39 de la Charte ) - ou de prendre des mesures coercitives, il laisse un champ inédit au principe de légitime défense. Et l'on sait combien est fréquente cette hypothèse.74

Partant, les États ou les organismes régionaux sont donc investis du pouvoir d'apprécier eux-mêmes la licéité de leurs actions en invoquant la légitime défense, et que le CS ne procédera même pas à une constatation faisant autorité. De même, parce que paralysé par le veto, le CS ne prendra pas des mesures coercitives prévues à l'art 41 de la charte alors que la légitime défense n'est qu'un droit temporaire pour faire face à l'agression jusqu'à ce que le CS agisse. Faute d'intervention du CS, les États agissent de façon licite, en vertu de l'art 51, et se trouvent contraints à l'escalade et amenés à livrer une guerre majeure. Une façon polie et mature de légitimer la rupture de la paix et de la sécurité internationales.

72 Merle M., Op. Cit., P.363

73 BedjaouiM., Op. Cit, T ,P. 788

74 Nguyen Q. D.et Alliés, Op. Cit., T , P. 864

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