Section II
Les fondements conventionnels et constitutionnels de
la légalité de preuve en droit français
294. La Déclaration universelle des droits de
l'homme de 1948. Il est important de souligner que la Constitution
française n'a pas intégré la Déclaration
universelle des droits de l'homme dans son Préambule comme l'a fait la
Constitution libanaise. Un avant-projet de Déclaration fut
rédigé par un grand juriste français, M. René
Cassin, et le texte final fut adopté à Paris le 10
décembre 1948. La Déclaration universelle des droits de l'homme
de 1948
. La
1575
n'ayant pas été transposée en droit interne
n'a aucune valeur juridique en droit français
Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948
n'a aucune force contraignante explicitement sur les États. Pour avoir
une force juridique, la Déclaration doit être
explicitement incorporée dans les textes
constitutionnels en vigueur d'un État1576. Selon M. Michel
Simon, le cas de la France est intéressant puisque la Constitution de
1958 fait référence à la Déclaration
française des droits de l'homme et du citoyen de 1789, lui donnant ainsi
une force juridique, mais elle ne fait aucune mention explicite de la
Déclaration universelle de 1948. Les rédacteurs de la
Constitution française de 1958 ont voulu rester dans une tradition
purement française, sans faire référence ni relier les
lois françaises à l'édifice
international en cours de constitution 1577 . Si la
Déclaration universelle des droits de l'homme possède une forte
valeur symbolique ou philosophico-morale, elle n'a pas pour autant vocation
à faire l'objet d'une application concrète
|
1578
|
. La Déclaration universelle des droits de l'homme
|
391
n'a pas valeur obligatoire pour ceux qui l'ont adoptée,
même si certains auteurs lui reconnaissent cette force sans aucun
fondement légal. Donc, la portée juridique de la
Déclaration universelle des droits de l'homme est faible. Il s'agit en
fait d'une résolution de l'assemblée générale des
Nations unies. Elle n'a pas donc la valeur juridique d'un traité
international et est dépourvue de dimension contraignante, elle ne peut
donc être invoquée
1575 A. Bertrand-Mirkovic, Droit civil :
personnes, famille, Studyrama, 2004, p. 194.
1576 M. Simon, Les droits de l'homme: guide
d'informations et de réflexion, Chronique Sociale, 1985, p. 27.
1577 M. Simon, Les droits de l'homme: guide
d'informations et de réflexion, Chronique Sociale, 1985, p. 27 ; V. sur
ce point : N. Nelson Daniel, La coopération juridique internationale
des démocraties occidentales en matière de lutte contre le
terrorisme, L'Harmattan, Paris, 1987, p. 152.
1578 X. Latour et B. Pauvert,
Libertés publiques et droits fondamentaux, Editeur : Studyrama
- Vocatis, 2006, p.
43.
devant un juge. Sa portée est donc morale, s'appuyant
sur l'autorité que confère la signature
de la majorité des États du
monde1579. Pour que la Déclaration ait une portée
normative, il faut qu'elle soit intégrée dans une constitution
nationale. On peut dire que la Déclaration universelle des droits de
l'homme n'a pas une valeur juridique dans le système pénal
français puisque la Constitution et son Préambule ne proclament
pas explicitement son engagement à la Déclaration universelle des
droits de l'homme. L'absence de l'intégration expresse dans la
Constitution de la Déclaration universelle des droits de l'homme peut
être la cause directe de l'impact trop timide de cette Déclaration
universelle sur les lois internes notamment sur la procédure
pénale surtout en comparaison avec l'impact trop envahissant de la
convention européenne des droits de l'homme sur la loi nationale en
France. Mais il y a une autre cause pour ce faible impact de la
Déclaration universelle sur le droit interne français, c'est
l'influence du texte révolutionnaire de la Déclaration des droits
de l'homme et du citoyen de 1789 sur le droit international des droits de
l'homme notamment sur la Déclaration universelle des droits de l'homme.
À notre avis, il n'était pas logique de faire intégrer la
Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 dans le texte de
la Constitution française puisque les principes de la Déclaration
de 1789 qui ont influencé le plus fortement la Déclaration
universelle ont été largement reconnus dans le système
juridique français.
295. Les Pactes de 1966. Le 4 novembre 1980, la
France a adhéré au Pacte du 16 décembre 1966 avec une
entrée en vigueur trois mois plus tard. Alors que la Déclaration
universelle était une résolution à la valeur morale
évidente, mais dont la majorité des juristes estiment qu'elle
n'implique pas de la part des États d'engagement juridique
précis, les Pactes de 1966 ont été traduits sous forme de
traités juridiquement contraignants, et ont donc force contraignante
pour ceux qui y ont adhéré
|
1580
|
. On constate pourtant que les deux Pactes de 1966 n'ont pas
|
392
non plus joué un rôle essentiel en droit
français, en tant que facteur de renforcement des libertés
fondamentales. Toutefois, de manière à assurer plus efficacement
le respect des libertés fondamentales sur le plan international, il a
été décidé de rédiger des
déclarations des droits ayant valeur juridique. Tel est l'objet des deux
pactes adoptés le 16 décembre 1966 : le
1581
.
premier relatif aux droits civils et politiques, le second aux
droits économiques et sociaux
Mais les Pactes de 1966 mettant en oeuvre cette
déclaration de 1948 ont pleine force
1579 P. Gévart, C. Crettaz-Nedey, B.
Modica et Ch. Mondou, Les droits de l'homme, Editeur : L'Etudiant,
2006, p. 76.
1580 D. Lagot, Droit international
humanitaire : États puissants et mouvements de résistance,
L'Harmattan, Paris, 2010, p. 80.
1581 P. Gévart, C. Crettaz-Nedey, B.
Modica et Ch. Mondou, Les droits de l'homme, Editeur : L'Etudiant,
2006, p. 76.
obligatoire pour les États ayant ratifié ces
conventions1582. Ces deux textes sont entrés en vigueur en
France en 1981. Ils ont pour principal intérêt de reprendre, en
détail, l'ensemble des libertés évoquées dans la
Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et de leur
1583
conférer une valeur juridique
: «il figure également (le principe
légaliste), non seulement à
l'article 11§2 de la Déclaration universelle
des droits de l'homme du 10 décembre 1948 (qui n'a cependant pas de
valeur normative), mais aussi à l'article 15-1 du Pacte
international
relatif aux droits civils et politiques du 16
décembre 1966 »
|
1584
|
. L'article 15-1 du Pacte
|
international relatif aux droits civils et politiques du 16
décembre 1966 dispose : « nul ne sera condamné pour des
actions ou omissions qui ne constituaient pas un acte délictueux
d'après le droit national ou international au moment où elles ont
été commises. De même, il ne sera infligé aucune
peine plus forte que celle qui était applicable au moment où
l'infraction a été commise. Si, postérieurement à
cette infraction, la loi prévoit l'application d'une peine plus
légère, le délinquant doit en bénéficier
».
§ 1. Jalons pour une valeur supra-législative
en droit français.
296. La Convention de sauvegarde des droits de
l'homme. Mme Michèle-Laure Rassat nous rappelle qu'il y a quelque
quarante ans, M. Georges Levasseur grommelait : « il paraît que
la ratification de la Convention européenne des droits de l'homme ne
nous posera aucun problème, car notre procédure pénale est
strictement conforme. Ils vont voir ». Mme Michèle-Laure
Rassat poursuit après les multiples condamnations de la France par la
Cour européenne
des droits de l'homme en disant : « ils ont vu et ils
continuent de voir »
|
1585
|
. La Convention de
|
393
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales, qui est généralement appelée Convention
européenne des droits de l'homme, a été adoptée par
le Conseil de l'Europe en 1950 et est entrée en vigueur en 1953. Cette
Convention internationale a pour objectif essentiel d'assurer la protection des
droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour aboutir à
cette protection envisagée, la Cour européenne des droits de
l'homme exerce et
1582 G. Chianéa et J.-L. Chabot,
Les droits de l'homme et le suffrage universel, L'Harmattan, Paris,
2000, p. 265, V. spec le bas de page n° 15.
1583 P. Gévart, C. Crettaz-Nedey, B.
Modica et Ch. Mondou, Les droits de l'homme, Editeur : L'Etudiant,
2006, p. 76.
1584 W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 32.
1585 M.-L. Rassat, « Encore et toujours
la Cour européenne des droits de l'homme », in JCP G, 15
Avril 2009, n° 16, act. 200, pp. 3-4.
assure un contrôle judiciaire. La motivation qui a
poussé à l'adoption de la Convention européenne
était la même que celle qui animait les rédacteurs de la
Déclaration universelle des droits de l'homme: il s'agissait
d'établir un ensemble coordonné de principes et de
règles
1586
destinés à protéger les droits de toutes les
personnes
.
297. La prééminence du droit. Ce
principe est rappelé dans le Préambule de la Convention
européenne des droits de l'homme, ce principe de la
prééminence du droit revêt une importance
considérable, d'autant plus qu'il est une condition sine qua non
à l'adhésion d'un
État au Conseil de l'Europe1587. Le respect
de la légalité criminelle constitue l'un des principes les plus
importants du droit pénal dans une démocratie parce qu'elle
protège et garantit la liberté des individus. Cependant, la
rédaction de l'article 7 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales constitue
une base solide pour le respect de ce principe de légalité.
L'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme consacre
sans aucune ambiguïté et très clairement le principe de
légalité
criminelle
|
1588
|
. Donc, les fondements du principe de légalité
sont : « les fondements
|
internationaux. La Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui a
vocation à s'appliquer en France depuis 1974 (V. Décret n°
74360 du 3 mai 1974, JORF, 4 mai 1974, p. 4570.), comporte également une
disposition relative
au principe de légalité pénale
»
|
1589
|
. Ainsi, l'article 7 précise que « nul ne peut
être condamné
|
pour une action ou une omission qui, au moment où
elle a été commise, ne constituait pas une infraction
d'après le droit national ou international. De même il n'est
infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au
moment où l'infraction a été commise ».
L'article 7 consacre le principe de légalité, à l'image
des articles 5 et 8 de la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen
|
1590
|
. De son côté, la Cour européenne des
droits de l'homme affirme le
|
394
1586 M. Robinson, « Intervention lors de
la cérémonie commémorative du 50e anniversaire
de la Convention européenne des droits de l'homme », in
Conférence ministérielle européenne sur les droits de
l'homme et cérémonie commémorative du 50e
anniversaire de la Convention européenne des droits de l'homme,
Rome 3 et 4 novembre 2000, Éditions du Conseil de l'Europe,
2002, pp. 160 et s., V. spec. p. 160.
1587 J.-F. Renucci, Droit européen
des droits de l'homme : contentieux européen, 4e
éd., L.G.D.J., Paris, 2010, n° 18, p. 25.
1588 L'article 7 de Convention
européenne des droits de l'homme dispose : « 1.Nul ne peut
être condamné pour une action ou une omission qui, au moment
où elle a été commise, ne constituait pas une infraction
d'après le droit national ou international. De même il n'est
infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au
moment où l'infraction a été commise».
1589 W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 31.
1590 W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 31.
22 novembre 1995 dans l'affaire C.R. c/ Royaume-Uni que «
la garantie que consacre l'article 7 (art. 7), élément
essentiel de la prééminence du droit, occupe une place
primordiale dans le système de protection de la Convention, comme
l'atteste le fait que l'article 15 (art. 15) n'y autorise aucune
dérogation en temps de guerre ou autre danger public. Ainsi qu'il
découle de son objet et de son but, on doit l'interpréter et
l'appliquer de manière à assurer
1591
.
une protection effective contre les poursuites, les
condamnations et sanctions arbitraires »
298. La supériorité des traités
ratifiés sur la loi interne en France. Depuis sa ratification en
1974, la Convention européenne des droits de l'homme est
appliquée directement par les
1592
juridictions nationales françaises. En France, les
traités ratifiés et publiés ont une valeur
supérieure à celle de la loi. La Cour de cassation a par exemple
jugé que « le cannabis se définit non par
référence aux dispositions réglementaires du Code de la
santé publique, mais à la Convention internationale unique du 30
mars 1961, qui, en application de l'article 55 de la Constitution, a acquis une
autorité supérieure à la loi interne dès sa
publication au Journal
officiel du 2 mai 1969 »
|
1593
|
. Le juge pénal français ne peut
apprécier leur conformité à la
|
Constitution, car il n'a pas les pouvoirs pour le faire :
« Il n'appartient pas aux juridictions de l'ordre judiciaire de se
prononcer sur la constitutionnalité des traités non plus que de
la
loi» 1594 . Dans le cas de conflit
entre une disposition d'un traité ratifié et une loi interne
française, la primauté appartient sans aucun doute au texte
international, quand bien même la
1595
loi serait postérieure au Traité . En France, le
système est dit moniste, ce qui signifie que les conventions
internationales produisent ses effets d'une façon directe devant le juge
national, c'est-à-dire d'application immédiate devant les
juridictions : « Selon le système moniste auquel prétend
appartenir la France, droit interne et droit international ne sont pas
d'essence
différente mais au traité est reconnu une
autorité supérieure à la loi »
|
1596
|
. L'article 55 de la
|
395
Constitution du 4 octobre 1958 reconnaît la
suprématie du droit communautaire sur le droit national : « les
traités ou accords régulièrement ratifiés ou
approuvés ont, dès leur publication, une autorité
supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque
accord ou traité, de son application par l'autre partie».
Depuis sa ratification, la Convention européenne
1591 CEDH, 22 novembre 1995, C.R. c. /
Royaume-Uni, Requête n° 20190/92, §32.
1592 J. Godard, Les atteintes à la
liberté avant jugement comparaison des systèmes Français,
Anglais et Écossais, Thèse de droit, Université de
Poitiers, 2008, p. 68.
1593 V. Cass. crim., 9 mars 1992, B. C.,
n° 103, p. 267.
1594 V. Cass. crim., 27 février 1990,
B. C., n° 96, p. 251.
1595 V. Cass. crim., 17 octobre 1988, B. C.,
n° 347, p. 934.
1596 P. Puig, « Hiérarchie des
normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001, p.
749, v. spec. n° 19.
des droits de l'homme, a une autorité supérieure
à la loi votée par le Parlement français : «...
l'article 55 de la Constitution affirme la suprématie du traité
sur la loi que les juges acceptent
d'écarter la seconde pour faire prévaloir le
premier »
|
1597
|
. De surcroît, la convention est
|
d'application directe c'est-à-dire qu'elle peut
être invoquée par les justiciables eux-mêmes devant les
tribunaux ou les juridictions 1598 , ainsi que l'a consacré la chambre
criminelle de la Cour de cassation française dans la décision
Raspino du 3/6/1975 : « Les dispositions de la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales
1599
doivent être appliquées par les juridictions
françaises ». En ce qui concerne la charte des droits
fondamentaux de l'Union européenne, elle dispose, en son article II-49,
que 1600 « nul ne peut être condamné pour une action ou
une omission qui, au moment où elle a été commise, ne
constituait pas une infraction d'après le droit national ou le droit
international. De même, il n'est infligé aucune peine plus forte
que celle qui était applicable au moment où l'infraction a
été commise. Si, postérieurement à cette
infraction, la loi prévoit une peine plus légère, celle-ci
doit être appliquée ». De même, ce principe de
légalité fut consacré par le statut de la Cour
pénale internationale : « enfin, le principe est inscrit aux
articles 22 et 23 du statut de la
Cour pénale internationale »
|
1601
|
. Un auteur évoque la diversité des fondements du
principe de
|
396
légalité en écrivant : « il s'agit
là d'un principe (de légalité) dont les fondements
sont
1602
nombreux et la nature diversifiée ».
A. L'impact des normes européennes sur le droit
français.
299. L'application directe de la convention
européenne des droits de l'homme. En général, les
modalités d'application de la convention dans l'ordre juridique interne
sont multiples. La modalité technique la plus utilisée
étant l'applicabilité directe, encore appelée effet direct
ou
1603
self-executing . Il ne faut pas oublier que cette
modalité est la plus efficace pour mettre en
1597 P. Puig, « Hiérarchie des
normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001, p.
749, v. spec. n° 9.
1598 P. Feuillée-Kendall et H.
Trouille, Justice en question: le juge mis en examen, Peter Lang
International Academic Publishers, Berne, 2004, p. 243.
1599 Cass. crim., 3 juin 1975, B. C.,
n° 141, p. 382.
1600 V. W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 32.
1601 W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 32.
1602 W. Benessiano,
Légalité pénale et droits fondamentaux,
Thèse de droit, Université Paul Cézanne-Aix-Marseille III,
Presse Universitaire d'Aix-Marseille, 2011, Préface Guy Canivet, n°
24, p. 32.
1603 G. Barnabe-Georges, Le Bénin et
les droits de l'homme, l'Harmattan, Paris, 2001, p. 115.
oeuvre les droits garantis par la Convention et pour obliger
les États à se conformer à leurs obligations afin
d'appliquer les dispositions de la Convention en droit interne. À notre
avis, plus cette modalité est pratiquée, plus elle devient
efficace. D'une manière générale, une convention est
dite self-executing ou auto-exécutoire lorsqu'elle crée
des règles au niveau international d'où découlent des
obligations ou simplement lorsque le droit constitutionnel des
États parties à la convention l'admet comme
telle1604. Cette applicabilité directe de la Convention
européenne des droits de l'homme découle de l'article
1er de la Convention. Ainsi, tout individu peut se prévaloir
directement des dispositions de la Convention européenne des droits de
l'homme devant les juridictions internes : le caractère
self-executing de ces
dispositions ne fait aucun doute
|
1605
|
. Selon M. Fréderic Sudre, l'applicabilité
directe suppose,
|
en premier lieu, que la règle internationale n'a pas
besoin, pour être applicable, d'être introduite dans l'ordre
juridique interne par une disposition spéciale. Cette question de la
réception de la règle conventionnelle relève du
régime constitutionnel des États, qui définit
l'attitude générale de l'État face au
droit international1606. À cet égard, la lettre de la
CEDH (tout comme celle du Pacte) n'impose pas l'intégration de la
Convention européenne en droit interne français. S'agissant de la
France, c'est l'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 qui affirme que
les traités sont supérieurs aux lois et ont une autorité
supérieure à celle de la
loi interne dans les conditions fixées par l'article 55
de la Constitution 1607 . Donc, c'est de l'article 55 de la Constitution du 4
octobre 1958 que résultent l'intégration directe de la
règle conventionnelle - CEDH ou PIDCP - dans l'ordre juridique interne
français et la définition de
son rang dans la hiérarchie des normes 1608 : l'article
55 de la Constitution française en vigueur dispose que « les
traités ou accords régulièrement ratifiés ou
approuvés ont, dès leur publication, une autorité
supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque
accord ou
traité, de son application par l'autre partie
»
|
1609
|
. Incontestablement l'influence du droit
|
397
européen sur les droits nationaux a contribué
à hausser le niveau de protection du citoyen, au regard des droits de
l'homme et de la dignité, grâce à l'effet direct du droit
européen et à sa supériorité sur le droit national.
Le principe de légalité exprimé souvent par le droit de
n'être
1604 G. Barnabe-Georges, Le Bénin et
les droits de l'homme, l'Harmattan, Paris, 2001, p. 115.
1605 J.-F. Renucci, Droit européen
des droits de l'homme : contentieux européen, 4e
éd., L.G.D.J., Paris, 2010, n° 17, p. 25.
1606 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 136, p. 194.
1607 V. sur ce point: H. Batiffol et P.
Lagarde, Traité de droit international privé, L.G.D.J.,
1993, Vol. 1, pp. 70 et s.
1608 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 136, p. 194. 1609 F. Sudre, Droit
européen et international des droits de l'homme, 9e
éd., P.U.F., Paris, 2008, n° 136, p. 194.
poursuivi et puni qu'en vertu d'une loi existante,
relève aussi de la confiance légitime qui constitue un principe
fondamental classique en matière de procédure et de jugement
300. Primauté de la norme conventionnelle. La
question de la primauté de la règle conventionnelle se
dédouble selon qu'on l'aborde dans l'ordre international ou dans l'ordre
interne 1611 . Dans l'ordre international, s'agissant de la Convention
européenne des droits de l'homme, la Cour européenne a clairement
affirmé la primauté de la convention sur tous les
. La Convention
1612
actes internes, quelle que soit leur nature ou l'organe qui les
adoptées
l'emporte donc sur les actes constitutionnels. L'affaire Open
Door et Dublin Well Women C/
Irlande1613 illustre le conflit entre la
Convention européenne et la Cour suprême irlandaise basée
sur l'article 40 § 3 alinéa 3 de la Constitution irlandaise
reconnaissant le droit à la vie de
1614
l'enfant à naître
|
. L'arrêt Parti communiste unifié de Turquie, du
30 janvier 1998
|
1615
|
rappelle que la Convention l'emporte 1616 parce que la Cour
européenne des droits de l'homme, dans cet arrêt (Parti communiste
unifié de Turquie et autres c. la Turquie, 30 janvier 1998, § 29) a
affirmé clairement que la Convention européenne des droits de
l'homme « ne fait aucune distinction quant au type de normes ou de
mesures en cause et ne soustrait aucune partie de la juridiction des
États membres à l'empire de la Convention (...) ».
Donc, aucune exception de nature constitutionnelle n'existe devant la Cour
de Strasbourg dans l'application des exigences ou normes issues de la
Convention européenne des droits de l'homme. Une confirmation
éclatante en est donnée par la Cour de Strasbourg dans
l'arrêt Zielinski et Pradal
et Gonzalez et autres c/ France, du 28 octobre 1999
|
1617
|
, par lequel la Cour européenne
|
398
considère qu'une loi de validation jugée conforme
à la Constitution par le Conseil
1610 V. « Influence de la CEDH et de la
jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme sur le droit
français et polonais », in Conférence Cracovie des 22 et
23 octobre 2010.
1611 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 136, p. 194. 1612 G. Cohen-Jonathan,
La Convention européenne des droits de l'Homme, P.U.A.M., 1989,
p. 246.
1613 CEDH., 29 octobre 1992, GACEDH, n°
70.
1614 Kémal Gözler, Le pouvoir
de révision constitutionnelle, Villeneuve d'Ascq, Presses
universitaires du Septentrion, 1997, Vol 1, p. 342 ; V, encore : CEDH.,
Ruiz-Mateos c/ Espagne, 23 juin 1993, GACEDH, n° 2.
1615V. GACEDH., n° 6.
1616 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 137, p. 195.
1617 V. D. Dokhan, Les limites du
contrôle de la constitutionnalité des actes
législatifs, Thèse de droit, L.G.D.J., 2001, p. 236 :
« L'arrêt Zielinski, Pradal et Gonzales / France du 28 octobre
1999 ' concerne la question de la conventionnalité des lois de
validation au regard de l'article 6 § 1 de la Convention et de l'article
1er du premier protocole additionnel à la convention ».
1618
constitutionnel français est néanmoins contraire
à la Convention. En d'autres termes, la Cour européenne des
droits de l'homme a jugé inconventionnelle une loi de validation
déclarée conforme à la Constitution française par
le Conseil constitutionnel français. M. Louis Favoreu considère
en ce sens que « même les normes constitutionnelles doivent
s'incliner
devant les normes européennes »
|
1619
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. Il faut prendre en compte que la
prééminence du
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399
droit international sur le droit interne français est
partielle ou relative en ce qui concerne la coutume internationale, celle-ci
étant une règle non écrite : « la
prééminence de la norme internationale sur les lois ne
présente pas un caractère absolu. Si l'article 55 de la
Constitution confère aux traités internationaux
régulièrement ratifiés ou approuvés, sous
réserve de réciprocité, une autorité
supérieure à celle des lois, cette suprématie ne
bénéficie pas à la coutume internationale. Telle est du
moins l'interprétation qui ressort d'un important arrêt rendu le 6
juin 1997 par le Conseil d'État...
»1620. C'est ce que nous enseigne l'arrêt
Aquarone rendu le 6 juin 1997 par le Conseil d'État : «
considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 55
de la Constitution du 4 octobre 1958 "les traités ou accords
régulièrement ratifié, ou approuvés ont, dès
leur publication, une autorité supérieure à celle des
lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son
application par l'autre partie"; que ni cet article ni aucune autre disposition
de valeur constitutionnelle ne prescrivent ni n'impliquent que le juge
administratif fasse prévaloir la coutume internationale sur la loi en
cas de conflit entre ces deux normes » 1621 . Le Conseil
d'État confirme clairement dans cet arrêt que l'article 55 de
Constitution de 1958 n'accorde pas au juge administratif la compétence
ou le droit d'écarter une loi contraire à une coutume
internationale en cas d'existence d'un conflit entre les deux. M. Pascal Puig
considère que la solution donnée par le Conseil d'État
dans l'arrêt Aquarone est basée sur une distinction faite par le
Conseil d'État entre coutume internationale qui est parmi les sources
non écrites du droit international et les normes de droit écrites
désignées par l'article 55 de la Constitution « cette
solution, implicitement fondée sur la reconnaissance d'une
différence de nature entre la coutume et les normes de droit
écrites visées par l'article 55, en l'occurrence les
traités internationaux, pourrait avoir des prolongements susceptibles
d'affecter un peu plus encore la suprématie du droit international
» 1622 . Il apparaît que, selon le Conseil
d'État français, la coutume internationale n'entre pas dans la
notion de traités ou accords régulièrement ratifiés
ou
1618 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 137, p. 196. 1619 L. Favoreu, «
Souveraineté et supraconstitutionnalité », in
Pouvoirs, 1993, n° 67, p. 76.
1620 Pascal Puig, « Hiérarchie
des normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001,
p. 749, v. spec. n° 20. 1621 CE Ass., 6
juin 1997, Aquarone, requête n° 148683.
1622 P. Puig, « Hiérarchie des
normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001, p.
749, v. spec. n° 20.
approuvés qui ont une autorité supérieure
à celle des lois selon la disposition de l'article 55 de la Constitution
française.
301. La suprématie constitutionnelle en
France. M. Pascal Puig souligne que « la Constitution
apparaît comme la norme juridique supérieure de laquelle
découlent toutes les autres sources de droit au point que la loi
votée par le Parlement n'exprime plus la volonté
1623
générale que dans son respect ».
L'arrêt de la Cour constitutionnelle n° 85-197 du 23 août 1985
exprime la place et la supériorité que revêt la
Constitution sur les autres normes juridiques « considérant
donc que la procédure législative utilisée pour mettre en
conformité avec la Constitution la disposition déclarée
non conforme à celle-ci par le Conseil constitutionnel a fait de
l'article 23 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique une
application ne méconnaissant en rien les règles de l'article 10
de la Constitution et a répondu aux exigences du contrôle de
constitutionnalité dont l'un des buts est de permettre à la loi
votée, qui n'exprime la volonté générale que dans
le respect de la
. Dans l'ordre interne français, la
1624
Constitution, d'être sans retard amendée
à cette fin »
solution est très différente de celle de la Cour
de Strasbourg. La controverse a été tranchée par les
juridictions françaises : le Conseil d'État et la Cour de
cassation ont tous deux affirmé, dans l'ordre juridique interne, la
supériorité de la Constitution sur toutes les autres
règles, y
compris communautaires
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1625
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. L'article 55 de la Constitution implique que la Constitution
ait
|
400
primauté sur le traité international. Le Conseil
d'État français, dans son arrêt d'Assemblée du 30
octobre 1998, Sarran, Levacher et autres, énonce clairement le principe
que « la suprématie conférée (par l'article 55 de
la Constitution) aux engagements internationaux ne s'applique pas, dans l'ordre
interne, aux dispositions de nature constitutionnelle ». D'autre
part, la Cour de cassation se prononce de manière similaire «
la suprématie conférée aux engagements internationaux ne
s'applique pas dans l'ordre interne aux dispositions de valeur
1626
constitutionnelle ». Elle reconnaît
à la Constitution la qualité de norme supérieure de
l'ordre juridique français 1627 . Les juridictions supérieures
refusent ainsi de s'engager dans la
1623 P. Puig, « Hiérarchie des
normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001, p.
749, n° 4. 1624 DC n° 85-197 du 23 août 1985,
Loi sur l'évolution de la Nouvelle-Calédonie (§ 27).
1625 D. Roman, L'indispensable du droit
administratif, 2e éd., Studyrama, 2004, p. 57.
1626 Cass. Ass. Plen., 2 juin 2000, B.C.,
n° 4, p. 7.
1627 V. P. Puig, « Hiérarchie des
normes : du système au principe », in RTD Civ., 2001, p.
749, v. spec. n° 29 : « Bénéficiant d'une
suprématie relative à l'égard des règles ayant au
moins valeur législative, les normes internationales sont de
surcroît subordonnées à celles de rang constitutionnel. Au
regard des textes, cette soumission résulte principalement des
dispositions de l'article 54 de la Constitution qui impliquent, certes, que la
Constitution peut être révisée en considération d'un
traité international mais signifient surtout qu'aucune
1628
.
voie d'un contrôle de conventionalité de la
Constitution, c'est-à-dire d'un contrôle de la
compatibilité d'une disposition constitutionnelle avec une stipulation
conventionnelle
L'article 55 de la Constitution pose également le
principe de la primauté du traité international sur la loi
nationale et, en conséquence, sur les actes juridiques internes
subordonnés à la
loi
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1629
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. Par sa décision 74-54 du 15 janvier 1975 relative
à la loi sur l'IVG
|
1630
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, le Conseil
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constitutionnel refuse de contrôler la
conventionalité de la loi dans le cadre du contrôle de
constitutionnalité, au motif, notamment, que la
supériorité du traité sur la loi a un caractère
«
relatif et contingent » ce qui est très
discutable s'agissant d'un traité de caractère objectif1631
|
.
|
B. La valeur supra-législative du principe de
légalité en droit français.
302. Valeur supra-législative des traités en
droit français. La Convention européenne des droits de
l'homme revêt une valeur supra-législative dans le système
juridique français donc, elle est plus forte que la loi, sa valeur
juridique est supérieure à celle de la loi, cela découle
de l'article 55 de la Constitution de 1958. Parmi les engagements de la France,
figure la Convention européenne des droits de l'homme de 1950. Cette
convention comporte l'énoncé de la garantie de la plupart des
droits et libertés consacrées par la Déclaration de 1789
et le Préambule de 1946 et même de nombreux droits qui ne figurent
pas dans ces deux textes. La Convention ayant une autorité
supérieure à celle des lois, il est désormais possible aux
citoyens français (les justiciables) de s'en prévaloir contre
celles-ci devant les Cours et tribunaux, les parties du procès peuvent
s'en prévaloir devant les Cours et tribunaux qui doivent bien veiller
à la faire respecter, sous peine pour la France d'être
condamnée par la
Cour de Strasbourg
|
1632
|
. De ce qui précède, on peut déduire que
« le juge français, juge de
|
droit commun du droit communautaire, applique la
primauté du droit communautaire (traité,
protocoles, règlements, directives et
décisions) au niveau juridique interne »
|
1633
|
. M. Jean-
|
401
François Renucci souligne que les dispositions de la
Convention européenne des droits de
ratification n'est possible tant que la révision
n'a pas été opérée. En s'opposant ainsi à
l'insertion du texte international dans l'ordonnancement juridique national, la
Constitution marque bien sa prééminence dans l'ordre interne
».
1628 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 137, p. 196. 1629 F. Sudre, Droit
européen et international des droits de l'homme, 9e
éd., P.U.F., Paris, 2008, n° 137, p. 197. 1630
L'IVG désigne l'interruption volontaire de grossesse.
1631 F. Sudre, Droit européen et
international des droits de l'homme, 9e éd., P.U.F.,
Paris, 2008, n° 137, p. 197. 1632 B. Chantebout,
Droit constitutionnel, 27e éd., Sirey, coll. Sirey
Université, Paris, 2010, p. 606.
1633 L. Delicostopoulos, Le procès
civil a l'épreuve du droit processuel européen, Thèse
de droit, Université Panthéon-Assas (Paris II), 1999, n°
315, p. 428.
l'homme sont d'applicabilité directe et que tout
individu peut s'en prévaloir devant les juridictions internes et les
juges européens de la Cour de Strasbourg eux-mêmes,
interprètes
1634
officiels de la Convention
. Mais il faut bien distinguer l'applicabilité directe de
la
Convention européenne devant la Cour de Strasbourg de
l'application de cette Convention
devant les juridictions nationales en droit interne
|
1635
|
. Le juge doit écarter la loi française
en
|
402
cas de contradiction flagrante entre la législation
interne française et la loi européenne pour appliquer sans
hésitation les dispositions de la Convention européenne.
303. Valeur supra-législative du principe de
légalité de preuve. L'article 5 de la Convention EDH qui
concerne précisément les actes de procédure attentatoires
aux libertés individuelles - comme la détention avant jugement et
l'arrestation -, requiert qu'elles soient légalement
réalisées. Cela suppose qu'elles soient prévues par la loi
de manière précise. Il y a donc bien sur cette base un principe
de légalité en procédure du moins pour les actes les
plus
1636
coercitifs
. L'article 7 de la convention EDH avait adopté
expressément le principe de la
légalité criminelle 1637 . De ce qui
précède, on peut conclure sans aucune hésitation que le
principe de légalité de preuve revêt une valeur
supra-législative dans le système pénal français,
conformément à tous les arguments déjà
mentionnés, qui justifie l'application du principe de la
légalité criminelle sur le droit pénal de forme
(procédure pénale).
1634 J.-F. Renucci, Introduction
générale à la Convention européenne des droits de
l'homme, Éditions du Conseil de l'Europe, 2005, p. 6.
1635 L. Delicostopoulos, Le procès
civil à l'épreuve du droit processuel européen,
Thèse de droit, Université Panthéon-Assas, 1999, n°
15, p. 61 : « L'applicabilité directe de la Convention devient
de fait une notion bidimensionnelle dès lors que l'intégration de
la Convention dans le droit national n'est pas imposée en droit
européen. Dans l'ordre juridique européen - et devant la Cour de
Strasbourg - la Convention est directement applicable (article 1 Convention)
car elle confère directement aux individus des droits qui ont un
caractère objectif - ils s'attachent à la seule qualité de
personne humaine dont ils vont pouvoir se prévaloir devant les
juridictions nationales. Mais dans l'ordre national, cette applicabilité
directe restait lettre morte dans l'hypothèse où la Convention
n'avait pas été insérée dans l'ordre juridique
interne ».
1636 M. Herzog-Evans, Procédure
pénale, 2e éd., Éditions Vuibert, 2009,
n° 144, p. 53.
1637 L'article 7 de la convention EDH dispose
: « Nul ne peut être condamné pour une action ou une
omission qui, au moment où elle a été commise, ne
constituait pas une infraction d'après le droit national ou
international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte
que celle qui était applicable au moment où l'infraction a
été commise ».
§ 2. Jalons pour une valeur constitutionnelle en
droit français.
304. Le doyen Duguit attribue un rang supra
constitutionnel à la légalité. M. Léon Duguit
affirme dans son « traité de droit constitutionnel »,
que la Déclaration de 1789 avec tous ses principes et notamment celui de
la légalité criminelle, avaient non seulement une valeur de
droit positif, mais aussi une valeur supra-constitutionnelle
|
1638
|
. « D'abord, si l'on croit comme
|
moi que la Déclaration des droits de 1789 a encore
force de loi supérieure aux lois ordinaires et même aux lois
constitutionnelles, on doit dire : que le législateur ne pourrait, sans
violer une règle positive supérieure qui s'impose à lui,
décider qu'une loi pénale aura un effet rétroactif. Quant
aux lois autres que les lois pénales, le législateur peut
certainement décider,
sans violer une règle constitutionnelle
écrite, qu'elles auront un effet rétroactif »
|
1639
|
. Selon
|
403
l'avis de M. Léon Duguit, le principe de la
légalité criminelle constitue une loi fondamentale ayant force de
loi supérieure aux lois ordinaires et même aux lois
constitutionnelles. La légalité est un principe qui ne
connaît ou ne supporte aucune exception comme l'affirme fort justement M.
Léon Duguit. « Si l'on fait une seule exception au principe de
légalité matérielle, on ne sait pas où cela peut
conduire ; et si certaines circonstances se présentent, on peut
1640
.
facilement arriver au despotisme »
|