La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanaispar Ali Ataya Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013 |
Chapitre IIVers la constitutionnalisation et la conventionnalisation du droit de la preuve
362 permet aux conventions internationales relatives aux droits de l'homme de donner les moyens nécessaires d'influencer d'une manière efficace le droit et la procédure pénale. En France, il 1461V. G. Burdeau, F. Hamon et M. Troper, Droit constitutionnel, 22e éd., Librairie générale de droit et de jurisprudence, Paris, 1991, p. 36 : Au sens formel, le droit constitutionnel est «l'ensemble des normes qui ont une valeur supérieure à celle des autres normes, qui peuvent servir de fondement de validité à d'autres normes et qui elles-mêmes ne sont fondées sur aucune norme juridique ». 1462 M. Duverger, Institutions politiques et droit constitutionnel, 18e éd., P.U.F., 1990, t. 1 Les grands systèmes politiques, p. 196. 1463 E. Roucounas, « L'application du droit dérivé des organisations internationales dans l'ordre juridique interne», in P. Michel Eisemann, L'intégration du droit international et communautaire dans l'ordre juridique national: étude de la pratique en Europe, Kluwer Law International, 1996, pp. 39-49, V. spec. p. 47. n'est pas discutable que l'influence des traités adoptés au plan européen surtout la Convention européenne des droits de l'homme ne cesse d'augmenter. La procédure pénale n'échappe pas à ce phénomène et à cette influence européenne. La Convention européenne et la Cour européenne des droits de l'homme posent un certain nombre de principes auxquels le droit interne doit être conforme 1464 . Sur le plan du droit libanais, le préambule de la
363 respect de ses chartes et notamment la Charte universelle des droits de l'homme. Le préambule de la Constitution libanaise reconnaît la primauté de la Charte universelle des droits de l'Homme, l'adhésion ou la ratification du Liban à toutes les conventions internationales reliées aux droits de l'homme et leurs protocoles facultatifs vont cohabiter avec les règles de procédure pénale en vigueur. Bien évidemment les conventions internationales reliées aux droits de l'homme viennent améliorer la protection des droits fondamentaux et combler certaines lacunes de notre dispositif de protection des droits de l'homme surtout dans la recherche des preuves dans le cadre du procès pénal. 268. La constitutionnalisation et la conventionnalisation du droit de la preuve. Mmes Geneviève Guidicelli-Delage et Haritini Matsopoulou expriment le mouvement vers la constitutionnalisation et la conventionalité de la procédure pénale notamment en matière de preuve, par une expression significative : « procéduralement, la constitutionnalisation et/ou conventionnalisation de plus en plus forte du droit de la preuve, par un développement des droits de la défense, du principe du contradictoire et de l'oralité, de l'égalité des armes et de la place des parties privées dans la recherche de la vérité, par les exigences de proportionnalité, d'adéquation et de loyauté des modes de recueil et d'administration des 1466 preuves ». Mme Laurence Burgorgue-Larsen considère que la conventionnalisation des branches du droit a succédé à leur constitutionnalisation, qui faisait suite à la naissance et au . Il s'agit, bien évidemment, des limites 1467 développement de la justice constitutionnelle imposées par les normes internationales conventionnelles dans le cadre d'une procédure 1464 CEDH, (Grande Chambre) 15 novembre 1996, Cantoni c/ France Affaire, n° 45/1995/551/637 (principe de légalité des délits et des peines, définition claire et précise des infractions par les textes.) 1465 L'Organisation des Nations unies. 1466 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, p. 2. 1467 L. Burgorgue-Larsen, « La France et la protection européenne des droits de l'homme », in Annuaire Français de relations internationales, 2005, pp. 598-612, v. spec. p. 605. 364 1468 pénale tendant à la recherche de preuves. Il est indéniable que l'évolution de la procédure pénale moderne tend vers la constitutionnalisation et la conventionnalisation du droit de la preuve. 269. Rapport entre droit pénal et droit constitutionnel. Longtemps, il n'existait aucun rapport direct entre le droit pénal et la Constitution qui sont restés fort étrangers l'un à l'autre 1469 comme souligne M. Jean-François Seuvic . Le droit pénal et le droit constitutionnel sont très loin l'un de l'autre et le droit public est en général opposé au droit privé, car d'après les conceptions classiques, le droit interne se divise en deux branches, le droit public, dont le droit 1470 constitutionnel fait partie et le droit privé, auquel appartient le droit pénal . Le droit pénal comme les différentes branches du droit n'a pas échappé à ce mouvement constitutionnel. En . En 1471 1985, M. Loïc Philip a invoqué la constitutionnalisation du droit pénal français revanche, le droit pénal est considéré comme une matière de droit public si l'on prend en compte l'objet du droit pénal qui vise à définir et réprimer les comportements contraires à un certain ordre social et à la sécurité juridique et en prenant compte que le droit pénal exprime traditionnellement l'autorité de l'État et l'exercice de la souveraineté étatique. En ce qui concerne le contenu de la constitutionnalisation du droit pénal, il est à la fois formel et 1472 substantiel comme le souligne M. Jean-François Seuvic . Un avis opposé à celui de M. Jean-François Seuvic porte un doute remarquable sur la force et la faiblesse qui entourent le droit constitutionnel en matière de procédure pénale. Cet avis est soutenu par M. Guy 1468 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, p. 3 : « La manifestation de la vérité ne justifie nullement le recours à tout moyen de preuve. C'est qu'en effet, des traités posent, au niveau international ou européen, un certain nombre de limites à la recherche de preuves ». 1469 V. J.-F. Seuvic, « Force ou faiblesse de la constitutionnalisation du droit pénal », in Cycle Procédure pénale 2006, Troisième conférence 16 mars 2006 : « La constitutionnalisation du droit pénal a un double contenu, relevant d'une part d'une constitutionnalisation formelle et d'autre part, d'une constitutionnalisation substantielle » :Disponible sur le site officiel
de la cour de cassation française : 1470 V. J.-F. Seuvic, « Force ou faiblesse de la constitutionnalisation du droit pénal », in Cycle Procédure pénale 2006, Troisième conférence 16 mars 2006 : « La constitutionnalisation du droit pénal a un double contenu, relevant d'une part d'une constitutionnalisation formelle et d'autre part, d'une constitutionnalisation substantielle » :Disponible sur le site officiel
de la cour de cassation française : 1471V. L. Philip, « La Constitutionnalisation du droit pénal français », in R.S.C., 1985, n° 4, pp. 711-723 ; V. encore : D. Mayer, « L'apport du droit constitutionnel au droit pénal en France », in R.S.C., 1988, pp. 439-446. 1472 Intervention de J.F. Seuvic, « Force ou faiblesse de la constitutionnalisation du droit pénal », in Cycle Procédure pénale 2006, Troisième conférence 16 mars 2006. 1473 Canivet . Il nous paraît illogique, puisque la reconnaissance de l'existence du droit 365 constitutionnel en matière de procédure pénale entraîne nécessairement la reconnaissance de sa valeur juridique complète sans aucune réserve concernant sa valeur juridique.
1473 G. Canivet, « Propos introductifs », in « Force ou faiblesse de la constitutionnalisation du droit pénal », in Cycle Procédure pénale 2006, Troisième conférence 16 mars 2006 : « s'il est admis par tous qu'il existe un véritable droit constitutionnel en matière de procédure pénale, des interrogations subsistent sur la force ou la faiblesse de cette constitutionnalisation ». 1474 J.-L. Nadal, « Propos introductifs », in Force ou faiblesse de la constitutionnalisation du droit pénal, Cycle Procédure pénale 2006 Troisième conférence 16 mars 2006. 1475 V. sur La constitutionnalisation de la matière pénale en Allemagne : K. Tiedemann, « La constitutionnalisation de la matière pénale en Allemagne », in R.S.C., 1994, pp. 1 et s. de la législation 1476 nationale pour répondre aux impératifs conventionnels. Par exemple, la Cour européenne des droits de l'homme reconnaît les interceptions téléphoniques comme une
attentatoire à la vie privée. Cependant, elle ne le fait qu'avec beaucoup de réserve remarquable, en soulignant d'une façon très particulière que de ce moyen d'investigation est d'une nature exceptionnelle et en imposant sa réglementation qui vise un encadrement strict de manière explicite et détaillée par la loi. Les différents législateurs dans les pays européens sont tenus de respecter les exigences imposées par la Cour de Strasbourg et ne pouvaient de toute sorte que recevoir positivement les messages de la Cour européenne des droits de l'homme et s'efforcer d'harmoniser leur législation aux impératifs posés par la Convention 1478 . Sans doute, l'harmonisation des procédures pénales de manière compatible avec les exigences de la Convention européenne des droits de l'homme n'est pas une tâche facile et il est selon Mme Anne Weyembergh, très certainement un des domaines de l'espace 1479 pénal européen parmi les plus délicats, sinon le plus délicat . Là, l'influence du droit international est indéniable, et plus précisément s'agissant de l'Europe, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur la preuve pénale. La CEDH encadre doublement le système de preuve par les exigences du procès équitable et par
366 hongroise en 2000, Mme Ibolya David affirme l'impact indéniable de la jurisprudence rendue par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) sur les législations nationales des pays membres de l'Union Européenne « les centaines d'arrêts de la Cour ont eu un impact considérable sur les législations des États membres et, par conséquent, sur la vie de millions 1476 V. sur l'harmonisation des législations: A. Weyembergh, L'harmonisation des législations: condition de l'espace pénal européen et révélateur de ses tensions, Éditions de l'université de Bruxelles, Bruxelles, 2004 1477 Prima facie : terme dérivé du latin qui désigne de prime abord. 1478 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, pp. 6-7. 1479 A. Weyembergh, « l'harmonisation des procédures pénales au sein de l'union européenne », in Arch.pol.crim., 2004/1, n° 26, pp. 37-70, v. spec. p. 37. 1480 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, p. 8. 1481 de citoyens européens » . Au Liban, malheureusement négligés par la doctrine libanaise, 367 l'importance cruciale du principe de légalité et l'impact de la Charte universelle des droits de l'homme et des autres conventions et obligations internationales de l'État sur le droit national précisément sur la procédure pénale libanais n'ont pas reçu toute l'attention qu'ils méritent face aux risques et menaces des libertés et des droits fondamentaux qui sont en péril pendant la recherche et l'administration de la preuve dans le procès pénal. Au Liban, nous pensons qu'il est nécessaire d'harmoniser les lois libanaises en vigueur qui touchent la procédure pénale et la recherche des preuves qui ne sont pas en conformité avec la Constitution libanaise et les obligations et les engagements internationaux du Liban parce que certaines lois libanaises en vigueur posent la question de la légalité des preuves et continuent de faire obstacle à la création de l'État de droit ou mettent en doute l'État de droit. Le législateur libanais doit redoubler d'efforts pour harmoniser la législation nationale en vigueur avec les obligations découlant des engagements internationaux et traités internationaux de protection des droits de l'homme. L'harmonisation des lois nationales avec les instruments internationaux est souhaitable afin d'éviter les conflits en matière d'application des lois et les problèmes d'applications, mais l'harmonisation n'a qu'un rôle limité puisque le juge peut et doit appliquer directement les conventions qui ne nécessitent aucune codification préalable par le législateur, 1482 , car les conventions respectent et répondent strictement aux différents critères sur la clarté
La première section de ce chapitre porte sur les fondements conventionnels et constitutionnels de la légalité de preuve en droit libanais. La deuxième section de ce chapitre porte sur les fondements conventionnels et constitutionnels de la légalité de preuve en droit français. 1481 I. David, Conférence ministérielle européenne sur les droits de l'homme et cérémonie commémorative du 50e anniversaire de la convention européenne des droits de l'homme, Rome 3-4 novembre 2000, Éditions du Conseil de l'Europe, 2002, p. 84. 1482 V. sur ce point : V. Lasserre-Kiesow, La technique législative: étude sur les codes civils français et allemand, L. G. D. J., préface de Michel Pédamon, 2002. 1483 V. en général sur ce point : Ph. Malauri, « L'intelligibilité des lois », in Pouvoirs, 2005/3, n° 114, pp. 131137. 368 Section ILes fondements conventionnels et constitutionnels de
la
système pénal fondé sur la souveraineté nationale et l'exigence de légalité 1486 . Les fondements du principe de légalité en droit international et européen sont hérités de la Révolution française de 1789. Cette révolution a promulgué la première charte des droits de l'homme ou la première déclaration des droits de l'homme de l'époque moderne 1487 . Les principes généraux de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée le 27 juin 1981 à Nairobi, la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations 1484 L'article 14 de la Charte arabe des Droits de l'Homme a été adoptée par le Conseil de la Ligue des États arabes le 15 septembre 1994 dispose : « Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation, d'une perquisition ou d'une détention arbitraire et sans mandat légal; Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour les motifs et dans les cas prévus préalablement par la loi et conformément à la procédure qui y est fixée ». 1485 J. Effa, La responsabilité pénale des ministres sous la Ve république, L'Harmattan, Paris, 2011, Préface de Dmitri Georges Lavroff, p. 156. 1486 P. Beauvais, Le principe de la légalité pénale dans le droit de l'union européenne, Thèse de droit, Université Paris X Nanterre, 2006, n° 60, p. 59. 1487 Le Cylindre de Cyrus (VIe s. av. J-C) est largement mentionné comme la première charte des droits de l'homme, découvert en 1879. Unies, le 10 décembre 1948 1488 et la Convention européenne de sauvegarde des droits de
369 droits de l'homme et du citoyen (DDHC) qui a constitué le texte fondamental de la Révolution française, qui énonce un ensemble de droits naturels individuels et collectifs et les conditions de leur mise en oeuvre. La Convention européenne des droits de l'homme s'inspire de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 qui s'inspire à son tour de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. La légalité des peines est un principe affirmé depuis la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Le principe de la légalité des incriminations confère au législateur la charge de définir les éléments constitutifs des incriminations. Le principe de légalité des délits et des peines (en latin, Nullum crimen nulla poena sine lege) trouve sa source dans deux articles de la Déclaration des droits de . Les articles 7 et 1490 l'homme et du citoyen de 1789 définissant le principe de la légalité pénale 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 présentent l'une des innovations majeures dues à la Révolution française, puisqu'ils font échapper la procédure 1491 judiciaire à tout arbitraire. Donc, ce principe trouve son fondement originaire dans l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 selon lequel «la Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». L'article 7 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu'elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l'instant : il se rend coupable par la résistance ». Selon M. Yves Bot, le 1488 La Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen adoptée par la première Assemblée nationale française dans le contexte révolutionnaire, en 1789, largement inspiré, avec les Déclarations américaines des droits (1776), les rédacteurs (le juriste français René Cassin a été, avec Eléonore Roosevelt, l'un des principaux rédacteurs) de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies, le 10 décembre 1948. 1489 La Déclaration universelle a ainsi directement inspiré le Conseil de l'Europe dans la rédaction de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, traité unique en son genre puisqu'il prévoit aussi un mécanisme de surveillance de son respect de nature judiciaire et obligatoire : la Cour européenne des droits de l'homme. 1490 M. Cliquennois, La Convention européenne des droits de l'homme et le juge français, ademecum de pratique professionnelle, L'Harmattan, Paris, 1997, p. 113. 1491 S. Fauconnet, De la rétention de sûreté à la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, Master Affaires Européennes et Internationales, Université de Pau et des Pays de l'Adour, 2008, p. 24. 370 principe de légalité tel que défini par cette Déclaration des droits de l'homme en son article 8, 1492 englobent les règles de fond et de forme. 274. L'impact de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et les Pactes. La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) est adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948 à Paris au Palais Chaillot. Cette déclaration est généralement reconnue comme étant le fondement du droit international relatif aux droits de l'homme. Adoptée il y a près de 60 ans, la DUDH a inspiré un corpus abondant de traités internationaux légalement contraignants relatifs aux droits de l'homme et le développement de ces droits à l'échelle internationale au cours des six dernières décennies. L'article 11 alinéa 2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 dispose « nul ne sera condamné pour des actions qui, au moment où elles ont été commises, ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment ou l'acte délictueux a été commis ». Il faut noter que la Déclaration universelle des droits de l'homme est un texte qui n'a pas d'obligations et de valeur juridique. La question de la valeur juridique de la Déclaration 1493 . En universelle fait l'objet d'une controverse parmi les auteurs, selon M. Marion Raoul réalité la déclaration a indubitablement une très grande valeur morale, mais qui n'implique pas, de la part des États signataires, d'engagement juridique précis, sauf pour les États qui y font référence dans leur Constitution. Sans doute la Déclaration de 1948 peut être considérée comme l'une des sources d'inspiration d'un grand nombre de règles juridiques internationales, mais aussi nationales. L'alinéa 1 de l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) qui a été adopté à New York le 16 décembre 1966 par l'Assemblée générale des Nations Unies dispose « tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraires. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs et conformément à la procédure prévus par la loi ». Ce texte affirme clairement le principe de la légalité procédurale en exigeant que tout acte qui menace la liberté et les divers droits des citoyens doit être conforme à la procédure prévue par la loi, la procédure pénale n'échappe pas à ce phénomène. La procédure pénale est en effet une matière qui constitue un acte attentatoire à la liberté individuelle, ce qui nécessite que le législateur fixe légalement les limites de la liberté individuelle afin d'éviter l'arbitraire. L'alinéa 1er de l'article 9 du Pacte international relatif aux 1492 Y. Bot, « Principes constitutionnels et autonomie du droit pénal », in Ch. Guettier et A. Le Divellec (dir.), La responsabilité pénale du président de la République, L'Harmattan, Paris, 2003, p. 81. 1493 M. Raoul, Déclaration universelle des droits de l'homme et réalités sud-africaines, Unesco, 1983, p. 16. 371 droits civils et politiques (PIDCP) impose que les actes de procédure qui portent atteinte à la liberté individuelle comme ceux qui tendent à prouver les éléments de l'infraction, doivent être strictement limités conformément à la procédure prévue par la loi, c'est-à-dire consacrés par un texte de loi. L'alinéa 1er de l'article 15 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques reprend le même texte que l'alinéa 2 de l'article 11 la Déclaration universelle des 1494 . droits de l'homme qui consacre la légalité criminelle 275. L'impact de la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, l'objectif premier de la Convention européenne est d'assurer, au plan régional, la mise en oeuvre effective de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies 1495 . La Convention européenne des droits de l'homme, signée à Rome le 4 novembre 1950 et entrée en vigueur le 3 septembre 1953 fonde aujourd'hui selon M. Frédéric Sudre la protection européenne des droits de l'homme et fournit le modèle le plus perfectionné d'une garantie effective de ces droits proclamés au plan international, en offrant aux individus le bénéfice d'un contrôle juridictionnel 1496 . La Convention européenne des 1497 droits de l'homme consacre de façon générale le principe de légalité. Dans un État de droit, le principe de légalité criminelle exprime l'idée de la soumission à la loi de la responsabilité pénale. Naturellement, ce principe exclut toute répression pénale consécutive à des faits qui ne . Le principe de 1498 seraient pas érigés en infraction par un texte préalable à leur commission 1494 « Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international au moment où elles ont été commises. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise. Si, postérieurement à cette infraction, la loi prévoit l'application d'une peine plus légère, le délinquant doit en bénéficier ». 1495 P. Beauvais, Le principe de la légalité pénale dans le droit de l'union européenne, Thèse de droit, Université Paris X Nanterre, 2006, n° 70, pp. 74-75. 1496 F. Sudre, La Convention européenne des droits de l'homme, 8e éd., P.U.F., Paris, 2010, p. 3. 1497 V. sur la contribution de l'Union européenne au renouvellement de la légalité pénale : J. Tricot, Étude critique de la contribution de l'Union européenne au renouvellement de la légalité pénale, Thèse de droit, Université Panthéon-Sorbonne, 2009, V. spec. le résumé : « Le droit pénal a élaboré sa propre théorie générale de la loi, fondée sur la sécurité juridique et la prééminence du droit, exigences traversées par l'idéal démocratique. Elle est aujourd'hui l'objet d'importantes transformations, auxquelles l'Union européenne, à la suite de l'autre Europe, n'apparaît pas étrangère. Mais si l'Union européenne participe au renouvellement de la théorie générale de la loi pénale de fond, sa contribution se révèle ambivalente. Elle nourrit tout à la fois sa consolidation, en protégeant les droits fondamentaux et en maintenant l'ancrage national du droit pénal, et sa subversion, en révélant les faiblesses existantes de la légalité pénale et en en générant de nouvelles. Consolidation et subversion dessinent les contours de la contribution - qui s'avère diversifiée, complexe et inachevée - de l'Union européenne, au renouvellement de la théorie générale de la loi pénale de fond. Combinées, elles pourraient augurer sa recomposition ». 1498 X. De Roux, « La défense devant le T.P.I.Y » In S. Gaboriau et H. Pauliat, La justice pénale internationale, actes du colloque organisé à Limoges les 22-23 novembre 2001, P.U.L.I.M., 2002, Préface de Claude Jorda, p. 130. légalité criminelle subordonne l'existence d'une infraction à un texte qui doit définir toutes les 1499 composantes de l'infraction pénale, c'est-à-dire l'incrimination et la sanction . La loi 372 adoptée par le législateur (parlement) qui répond à la caractéristique de la loi formelle et démocratique a perdu sa place axiologique au sein des systèmes juridiques européens contemporains. Le principe de légalité est doté d'une nouvelle signification plus étendue . L'alinéa 1500 désormais qui s'entend désormais comme le règne de droit ou principe de droit 1er de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme consacre clairement le 1501 principe de la légalité. 276. La question de la valeur juridique. La question de la valeur juridique des principes méritent une importance particulière parce que la valeur juridique du principe va préciser sa force et déterminer son effectivité et efficacité surtout son application dans le système juridique. Il existe plusieurs types de lois, mais les lois n'ont pas toutes la même valeur juridique. Dans un système juridique, la valeur juridique des lois et des principes n'est pas aléatoire, la hiérarchie des normes est le principe fondamental qui organise et fixe la valeur juridique des lois du pays. La hiérarchie des normes au regard de sa valeur intrinsèque constitue un système pyramidal qui implique que la norme de niveau supérieur s'impose à celle de niveau inférieur. Cette pyramide des normes est parfois appelée pyramide de Kelsen. Selon M. Hans Kelsen « l'ordre juridique n'est pas un système de normes juridiques placées toutes au même rang, mais un édifice à plusieurs étages superposés, une pyramide ou hiérarchie formée (pour ainsi dire) d'un certain nombre d'étages ou couches de normes 1502 juridiques ». L'importance de cette pyramide de Kelsen prend sa source dans le fait que le droit n'est pas un ensemble homogène et que la hiérarchie des normes constitue une nécessité démocratique dans chaque État1503. 1499 X. De Roux, « La défense devant le T.P.I.Y » In S. Gaboriau et H. Pauliat, La justice pénale internationale, actes du colloque organisé à Limoges les 22-23 novembre 2001, P.U.L.I.M., 2002, Préface de Claude Jorda, p. 130. 1500 É. Carpano, État de droit et droits européens: l'évolution du modèle de l'État de droit dans le cadre de l'européanisation des systèmes juridiques, L'Harmattan, Paris, 2005, Préface de Thierry Debard, n° 332, p. 320. 1501 L'alinéa 1 de l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose : « Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise ». 1502 H. Kelsen, Théorie pure du droit, Traduite par C. Eisenmann, Dalloz, 1962, p. 2 1503 V. Ph. Malaurie, Introduction à l'étude de droit, Cujas, Paris, 1991, p. 160: « La hiérarchie des normes est un principe capital dans les pays démocratiques ... La hiérarchie des normes s'exprime sous forme d'une pyramide. En partant de la règle la plus élevée... ». § 1. Jalons pour une valeur supra-législative en droit libanais.
373 troisième République française connue sous le nom de Constitution de 1875. La Constitution libanaise de 1926 témoigne clairement de l'esprit de la IIIe République française 1506 qui exclut toute idée de contrôle de constitutionnalité des lois 1507 . Ensuite, la Constitution libanaise 1504 C.-L. Popescu, « Les rapports entre le droit international des droits de l'homme et le droit roumain », in Universitas : Revista de Filosofía, Derecho y Política, Roumanie, 2008, n° 8, Communication scientifique présentée le 27 mai 2004, à l'Animation scientifique régionale sur le thème « Les droits fondamentaux: perspectives francophones », organisée par le Comité du Réseau « Droits fondamentaux » de l'Agence Universitaire de la Francophonie, en coopération avec le Centre des droits de l'homme de la Faculté de droit de l'Université de Bucarest et du Collège juridique d'études européennes de l'Université de Paris I Panthéon Sorbonne, à l'occasion de la Réunion du Comité de Réseau « Droits fondamentaux », qui a eu lieu à Bucarest, les 22-29 mai 2004, pp. 121-134, v. spec. p. 124. 1505 V. sur La genèse de la Constitution libanaise de 1926: A. Hokayem, La genèse de la Constitution libanaise de 1926, Le contexte du mandat français, les projets préliminaires, les auteurs, le texte final, Les Éditions universitaires du Liban, 1996. 1506 C. Koch, « La Constitution libanaise de 1926 à Taëf, entre démocratie de concurrence et démocratie consensuelle », in Egypte monde arabe, 2005, Troisième série n° 2, pp. 159-190. 1507 V. sur la Constitution libanaise avant la modification la plus importante résultant des accords de Taef du 22 octobre 1989 : I. Rabbâ?, La Constitution libanaise: origines, textes et commentaires, Éditeur: Université libanaise, Beyrouth (Liban),1982. s'inspire de la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui consacre le principe de la primauté de la loi1508. 279. Amendement constitutionnel de 1990. Après le dernier amendement constitutionnel de
374 Préambule de la Constitution libanaise comme « l'une des conséquences d'une expérience nationale vécue, pendant et après la guerre » 1510 . Ce qui caractérise ce Préambule est qu'il contient plusieurs références à des engagements internationaux explicitement visés par le Préambule de la Constitution. En fait, la Constitution libanaise avant l'amendement constitutionnel de 1990, n'a jamais contenu de mention relative à un traité ou à un engagement international. « Le Liban est arabe par son identité et son appartenance. Il est membre fondateur et actif de la Ligue des États Arabes et engagé par ses pactes; de même qu'il est membre fondateur et actif de l'Organisation des Nations Unies, engagé par ses pactes et par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. L'État concrétise ces principes dans tous les champs et domaines sans exception », ce que prévoit l'alinéa (b) du Préambule de la Constitution libanaise. La question de la capacité du juge libanais à intégrer tous ces engagements, vu la pluralité de ceux-ci s'est posée largement. Si l'on veut savoir si le juge se réfère à ce Préambule, il faut nécessairement qu'on traite sa valeur juridique. Le Conseil constitutionnel libanais s'est référé dans un premier temps explicitement au Préambule de la Constitution de 1990 sans révéler sa position sur la valeur juridique du 1511 Préambule de la Constitution qui est restée plusieurs années incertaine avec beaucoup de points d'ombre. 280. Le principe de la légalité et le Préambule de la Constitution libanaise en vigueur. La Constitution libanaise s'est dotée d'un Préambule. Le principe de la légalité qui est énoncé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et ces deux Pactes a été pleinement intégré au Préambule de la Constitution libanaise qui a été ajouté par la loi constitutionnelle 1508 H. Mouannes, « Le fonctionnement et l'autorité du conseil Constitutionnel Libanais », in Droit écrit, mars 2001, n° 1, p. 118. 1509 W. Wehbe, « Le contrôle de constitutionnalité des actes administratifs: Expérience des conseils d'État libanais et français », in Magazine de défense, Liban, 1/4/2005, n° 55. 1510 B. Mnassa, La Constitution libanaise : dispositions et interprétations, Imprimerie de Ghazir, Beyrouth, 1998, p. 36. 1511 C.C. lib., n 3/95,18 septembre 1995. du 21/9/1991 1512 . Cette disposition du Préambule de la Constitution libanaise est entérinée par 375 l'article 2 du Code de procédure civile libanais, mentionnant la suprématie des engagements internationaux du Liban sur son droit national. Autrement dit, même si la loi libanaise est en contradiction avec les engagements internationaux du pays, ce sont néanmoins ces derniers qui ont force de loi. Il faut noter que l'article 6 du Code de procédure civile libanais dispose que les principes généraux du Code de procédure civile s'appliquent dans l'hypothèse où il y a une lacune dans les autres Codes et lois de procédure. Bien évidemment, l'article 2 du Code de procédure civile libanais rend les traités et les conventions internationaux ratifiés par le parlement libanais directement applicables en matière pénale. 281. Les pactes internationaux ratifiés par le Liban. Le Liban a adhéré au Pacte international relatif aux droits civils et politiques en 1972. La Constitution libanaise contient un préambule qui proclame dans la partie (b) l'adhésion du Liban à l'organisation des Nations-Unies et son engagement au respect de ses chartes et notamment la Charte universelle des droits de l'homme et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques. De même, la partie (b) de ce Préambule proclame encore qu'il est membre fondateur et actif de la Ligue des États Arabes et engagé par ses pactes. Donc, tous les pactes internationaux ratifiés par le Liban ont la nature de l'obligation juridique parce que ces pactes contiennent des principes généraux et directeurs en droit pénal et procédural. La fin de la partie (b) du Préambule libanais précité exige textuellement que L'État libanais concrétise ces principes dans tous les champs et domaines sans exception, ce qui inclut le champ pénal qui nous intéresse dans notre thèse. L'effet d'un engagement international est un acte lourd de conséquences, mais ce Préambule de la Constitution a été l'occasion d'un long débat juridique sur les valeurs constitutionnelles du Préambule et des principes énoncés dans la Charte universelle des droits de l'homme et dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques d'où la relation entre droit constitutionnel, pacte international et droit interne. De surcroît, il faut noter que selon l'article 2 du Code de procédure civile libanais, les règles de source internationale prévalent sur les règles de droit interne surtout que ces règles consacrent ou touchent la matière pénale et certaines garanties du justiciable. La législation pénale au Liban devra donc respecter un certain nombre de principes posés par la Constitution et le Préambule de la Constitution. 1512L'article b du préambule de la Constitution libanaise dispose : « Le Liban est arabe dans son identité et son appartenance. Il est membre fondateur et actif de la Ligue des États Arabes et engagé par ses pactes ; de même qu'il est membre fondateur et actif de l'Organisation des Nations-Unies, engagé par ses pactes et par la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme. L'État concrétise ces principes dans tous les champs et domaines sans exception ». 376 B. Les principes à valeur supra-législative en droit libanais. 282. La primauté des conventions internationales sur les lois nationales. En vertu de l'application combinée du Préambule de la Constitution libanaise et de l'article 2 du Code de procédure civile qui donne la prééminence à l'application des dispositions des traités internationaux sur celles de la loi ordinaire, les traités internationaux ratifiés par le Liban sont applicables en droit interne dès leur publication au Journal officiel1513 . Sans doute, l'efficacité effective des traités internationaux dépend principalement de leur valeur vis-à-vis du droit interne, c'est-à-dire l'affirmation de la supériorité de leurs normes met en évidence la valeur des traités internationaux en cas de conflit avec les dispositions de l'ordre juridique interne et en cas de lacune dans le droit national. L'article 2 du Code de procédure libanais affirme clairement la supériorité des traités sur les lois interne en accordant la primauté aux conventions internationales sur les lois. En même temps les dispositions de l'article 2 du Code de procédure civile interdisent explicitement au juge libanais de déclarer la nullité d'un acte législatif pour non-conformité à la Constitution, il est évidemment mentionné dans l'article 2 que la déclaration de nullité par le juge libanais est interdite « ... les tribunaux ne pourront déclarer la nullité des activités du pouvoir législatif pour cause de non conformité des lois ordinaires à la Constitution ou aux traités internationaux ». Mais si la déclaration de nullité 1514 par le juge est strictement prohibée , la non-application de la loi inconstitutionnelle ou d'une loi qui n'est pas conforme avec les dispositions d'un traité international1515 devrait être 1513 M. Mansour et C. Daoud, « L'indépendance et l'impartialité du système judiciaire- Le cas du Liban », in Rapport REMDH 2010, F Copenhague, février 2010, Publication: Réseau euro-méditerranéen des droits de l'Homme, p. 8. 1514 V. M. Mansour et C. Daoud, « L'indépendance et l'impartialité du système judiciaire- Le cas du Liban », in Rapport REMDH 2010, F Copenhague, février 2010, Publication: Réseau euro-méditerranéen des droits de l'Homme, p. 8 : « Les normes incluses dans les traités ratifiés peuvent ainsi être appliquées par les tribunaux en vue de réaliser effectivement les droits des individus chaque fois que la législation interne est en contradiction avec ces normes. Elles priment donc sur celles de la législation interne qui resteront cependant valides jusqu'à leur harmonisation avec les termes du traité en question ». 1515 V. N. Diab, « Un droit processuel fondamental façonne par le conseil constitutionnel libanais », in Le conseil constitutionnel libanais : gardien, régulateur, protecteur, Colloque de Beyrouth 2002, Bruylant, Publié en 2003, p. 10 : « L'article 2 de l'ancien Code de procédure civile de 1933 interdisait aux magistrats de contrôler la conformité des lois à la Constitution. Cette prohibition a été atténuée dans l'article 2 du nouveau Code où elle ne concerne que l'annulation des lois pour inconstitutionnalité ou pour non-conformité avec les dispositions d'un traité international, sans semble-t-il toucher au pouvoir du juge d'écarter l'application des lois qu'il considérerait inconstitutionnelles : après avoir imparti aux magistrats, dans le premier alinéa de l'article 2 du nouveau Code, de respecter le principe de la hiérarchie des normes, le législateur leur a spécifié, dans le deuxième alinéa, qu'en cas de contradiction entre les dispositions de conventions internationales et les dispositions du droit commun, les premières prévalent sur les secondes, avant de déclarer expressément, dans le tout à fait admise, ce qui est plus respectueux des droits de l'homme 1516 . Le juge doit prendre lui-même l'initiative ou d'office de ne pas appliquer une loi contraire à la Constitution ou contraire à un traité international. En droit libanais, le juge national fait preuve d'une timidité remarquable dans l'application pleine et entière des traités internationaux comme faisant partie du droit interne. M. Georges Saad considère que « le juge libanais, même lorsqu'il adopte un système juridique continental, son comportement timide est bien visible: il suffit de constater 1517 qu'il n'applique pas les traités internationaux, même en l'absence d'une loi ». Le problème essentiel du Préambule de la Constitution libanaise réside dans la question de savoir s'il revêt une force juridique, et si oui laquelle. M. Georges Saad souligne que cette problématique « se pose pleinement en droit libanais depuis le dernier amendement constitutionnel du 21/09/1990 conformément aux accords de Taëf qui a introduit dans notre
377 le problème de la primauté des conventions et traités internationaux sur le droit interne. Il faut pour cela que le juge applique le principe hiérarchique des normes qui impose d'appliquer la norme la plus élevée conformément à la disposition de l'article 2 du Code de procédure civile libanais qui rend l'application des traités internationaux ratifiés par le parlement libanais directement applicables en cas de conflit avec les dispositions du droit interne. Effectivement, et il est remarquable que le juge libanais n'ait pas encore accordé ou renforcé la valeur de la primauté aux traités sur les lois, alors même que les textes prévoient cette primauté surtout sur 1519 la procédure pénale. 283. Valeur supra-législative des traités en droit libanais. L'article 2 du Code de procédure civile libanais accorde la primauté des conventions internationales sur les lois. Sans doute la valeur supra-législative des traités en droit libanais va influencer directement la valeur juridique du principe de la légalité de preuve pénale parce que les traités englobent le principe troisième alinéa, que les tribunaux ne sont pas autorisés à déclarer la nullité des actes législatifs pour non-conformité des lois ordinaires avec la Constitution et les traités internationaux ». 1516 G. Saad, « Droits de l'homme, droit public musulman, droit administratif libanais », in Colloque International 2001, l'Odyssée des Droits de l'Homme, Grenoble 22-23-24 octobre 2001, pp. 25-26. 1517 G. Saad, « Droits de l'homme, droit public musulman, droit administratif libanais », in Colloque International 2001, l'Odyssée des Droits de l'Homme, Grenoble 22-23-24 octobre 2001, p. 23. 1518 G. Saad, « Droits de l'homme, droit public musulman, droit administratif libanais », in Colloque International 2001, l'Odyssée des Droits de l'Homme, Grenoble 22-23-24 octobre 2001, p. 12. 1519 y. W. Wehbe, « Le contrôle de constitutionnalité des actes administratifs : Expérience des conseils d'État libanais et français », in Magazine de défense, Liban, 1/4/2005, revue n° 310 : « l'article 2 du Code de procédure civile a donné le droit de contrôle de constitutionnalité des lois aux juridictions ordinaires par voie d'exception et non par voie d'action. Il dispose que le droit confié aux juridictions ordinaires est limité à la mise à l'écart de la loi, sans avoir le droit d'annuler cette loi». de la légalité criminelle. En effet, un problème essentiel concerne l'application effective des traités internationaux par les juges libanais malgré la reconnaissance de la valeur supra-législative des traités en droit libanais « les droits de l'homme ne peuvent frayer leur chemin tant que le juge libanais reste attaché avec chauvinisme à la loi parlementaire... puisque le juge libanais n'a pas encore fait le pas qui consiste à accorder de manière générale la primauté aux conventions internationales sur des lois, même antérieures. Et surtout il n'a pas encore fait le pas qui consiste à interpréter extensivement (dans le sens de la sauvegarde des droits de l'homme) les conventions internationales, et notamment les deux pactes
378 efficace des traités internationaux s'il a le courage d'appliquer la hiérarchie des normes juridiques ainsi que des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme en vigueur ayant une force supérieure (une valeur supra-législative)1521 . L'article 2 du Code de procédure civile libanais interdit au juge de déclarer la nullité d'un acte législatif pour non-conformité à la Constitution, mais si la déclaration de nullité est prohibée, la non-application de la loi à travers l'exception d'inconstitutionnalité devrait être tout à fait admise, ce qui caractérise une tendance suffisante vers le respect des droits de l'homme en droit libanais. Donc les traités ont une valeur infra-constitutionnelle et supra-législative dans la hiérarchie des normes, mais dans le système juridique libanais la Déclaration universelle et les Protocoles facultatifs (ces deux Pactes internationaux constituent la Charte des droits de l'homme) constituent une partie du Préambule de la Constitution libanais qui a une valeur constitutionnelle. Il est permis de dire que la légalité criminelle est un principe de valeur supra-législative en droit libanais. En conséquence, le principe de la légalité procédurale en droit libanais doit avoir une valeur juridique identique à celle du principe de la légalité criminelle qui a une valeur supra-législative. De ce qui précède, il découle qu'on peut considérer que le principe de la légalité de preuve en matière pénale est l'un des principes fondamentaux à valeur supra-législative. 1520 G. Saad, « La réception des droits de l'homme en droit administratif libanais », in J. Ferrand, H. Petit et collectif , Mises en oeuvre des droits de l'homme, Colloque international organisé à l'Université Pierre Mendès-France (Grenoble 2), Faculté de droit, Centre Historique et Juridique des Droits de l'Homme 2001, L'Odyssée des droits de l'homme Grenoble - 22-23-24 octobre 2001, t. 2 L'odyssée des droits de l'homme, L'Harmattan, Paris, 2004, V. spec. p. 202. 1521 G. Saad, « La réception des droits de l'homme en droit administratif libanais », in J. Ferrand, H. Petit et collectif , Mises en oeuvre des droits de l'homme, Colloque international organisé à l'Université Pierre Mendès-France (Grenoble 2), Faculté de droit, Centre Historique et Juridique des Droits de l'Homme 2001, L'Odyssée des droits de l'homme Grenoble - 22-23-24 octobre 2001, t. 2 L'odyssée des droits de l'homme, L'Harmattan, Paris, 2004, V. spec. p. 202 : « Dans certains cas, le juge a la possibilité de faire bonne réception des droits de l'homme en appliquant tout simplement la loi interne, et à vrai dire en appliquant la loi dans le sens des droits de l'homme; même dans ces cas, une certaine dose de courage est exigée, voire d'amour pour les droits de l'homme ». 379 § 2. Jalons pour une valeur constitutionnelle en droit libanais.
1523 . clairement « aucune infraction et aucune peine ne peuvent être établis que par la loi » Pourtant, certains auteurs soutiennent que la Constitution libanaise n'a pas fixé le champ du principe de la légalité et qu'il existe des points d'ombre qui peuvent subsister quant à l'interprétation de l'article 8 de la Constitution, et principalement sur l'application du principe 1522 L. Favoreu, « Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République », in B. Mathieu et M. Verpeaux (dir), La république en droit français, actes du colloque de Dijon 10 et 11 décembre 1992 ; organisé par le Groupe d'études constitutionnelles appliquées et comparées (CRDPE) de Dijon et l'Association française des constitutionnalistes, Économica, 1996, pp. 231-240, V. spec. p. 233. 1523 A. Khair, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, communication présentée au colloque organisé par le centre d'études des droits du monde arabe, Université St-Joseph de Beyrouth en novembre 2003, Beyrouth. sur le droit pénal de forme (procédure pénale)1524 . Néanmoins, le législateur constitutionnel 380 n'est pas tenu de préciser le champ d'application du principe de légalité criminelle, car nous pensons que l'article 8 de la Constitution libanaise en énonçant expressément et clairement le principe de la légalité des délits et des peines, désigne sans ambiguïté l'adoption du principe de la légalité criminelle général qui s'applique sans doute comme on l'a déjà évoqué plus haut dans cette thèse à tous les domaines du droit criminel, c'est-à-dire au droit pénal de fond et de forme. Bien évidemment, l'intégration du principe de légalité criminelle dans la Constitution libanaise d'une façon explicite a tranché un débat sur la valeur constitutionnelle du principe de légalité criminelle permettant d'affirmer pour la première fois que le principe de la légalité de preuve en matière pénale est un principe à valeur constitutionnelle en se basant sur la justification de l'application du principe de la légalité criminelle sur droit pénal de forme (procédure pénale) qui s'applique à son tour en matière de preuve pénale. Bien entendu, ceci n'empêche pas d'aborder la question de la valeur juridique des principes qui ont été introduits dans le Préambule de la Constitution libanaise puisque le Préambule fait référence à la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui consacrent expressément le principe de la légalité criminelle. A. La valeur constitutionnelle du Préambule de la Constitution libanaise.286. Le problème de la valeur juridique du Préambule de la Constitution. Il faut bien noter le problème de la valeur ou force juridique du Préambule de la Constitution libanaise précisément depuis le dernier amendement constitutionnel du 21/9/1990 conformément aux
Préambule. L'insertion du Préambule dans la Constitution résultant de l'accord de Taëf a ouvert le débat sur la valeur juridique de ce Préambule. Le paragraphe b du Préambule de la Constitution libanaise dispose que le Liban est membre fondateur et actif de la Ligue des pays arabes et lié par ses Pactes, et qu'il est membre fondateur et actif de l'O.N.U. et lié par ses 1524 V. en ce sens : M.-D. Mouchy, «Les Droits Fondamentaux en Droit Pénal International », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, Beyrouth, Date de publication : novembre 2003, Éditeur : Université Saint-Joseph, Faculté de droit et des sciences politiques, CEDROMA : Centre d'études des droits du monde arabe, p. 6, disponible en ligne sur : http://www.cedroma.usj.edu.lb/pdf/drtsfond/meouchy.pdf 1525 Le 22 octobre 1989, réunis à Taëf (Arabie Saoudite) à l'initiative de la Ligue des États Arabes et du pays hôte pour tenter de mettre fin à la guerre civile au Liban, 31 députés musulmans et 31 députés chrétiens libanais signent un "document d'entente nationale", connu depuis sous le nom d'accords de Taëf. Ce document prévoit un plan de désarmement progressif des milices et une révision de la Constitution de 1943 pour adapter le système politique libanais au poids démographique actuel des diverses communautés. Pactes et par la Déclaration universelle des droits de l'homme. Une telle affirmation va de soi pour les Déclarations de 1966, mais la référence à la Déclaration universelle et son insertion dans le Préambule acquièrent une nouvelle portée puisque les résolutions de l'Assemblée générale ne sont pas obligatoires pour les États membres de l'Organisation. Mme Marie-Denise Mouchy pose la question: « est-ce à dire que le Constituant a opté pour la protection de droits qu'il a reconnus aux libanais, ou bien la protection s'étend-elle à tous les droits établis par les documents internationaux auxquels réfère le Préambule ? C'est au Conseil
droits fondamentaux par l'amendement du 21 septembre 1990 ait institutionnalisé la reconnaissance de l'existence de droits fondamentaux comme le souligne Mme Marie-Denise Mouchy qui affirme encore que la question reste entière: « quelle sera l'attitude du Conseil constitutionnel face à un recours en annulation d'une loi contraire aux Chartes suscitées, aux Pactes de 1966 ou à la DUDH ? Malgré ses efforts dans ce sens le système juridique libanais révèle une résistance à l'universalisme objectif et abstrait de la notion, sinon le Constituant se serait contenté, à l'instar de la Constitution française de 1948 au Préambule (concernant la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen) de laquelle réfère celui de 1958, d'adopter 1527 . la DUDH ou les Pactes de 1966 comme repères des droits fondamentaux des libanais » 287. Rôle vigilant du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel libanais par une décision du 25 février 1995 pose comme principe, que « chaque fois qu'une loi parle de restreindre les conditions d'exercice d'un droit fondamental elle s'expose à être sanctionnée
381 profiter de l'adoption, par le Préambule de la Constitution libanaise, de textes internationaux tels que les pactes de la Ligue des États Arabes et la Déclaration universelle des droits de l'homme et les deux protocoles de 1966, pour offrir aux Libanais l'une des plus importantes garanties extrinsèques au système législatif libanais. Pour avancer vers la garantie de l'État de 1526 M.-D. Mouchy, «Les Droits Fondamentaux en Droit Pénal International », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, Beyrouth, Date de publication : novembre 2003, Éditeur : Université Saint-Joseph, Faculté de droit et des sciences politiques, CEDROMA : Centre d'études des droits du monde arabe, p. 6, disponible en ligne sur : http://www.cedroma.usj.edu.lb/pdf/drtsfond/meouchy.pdf 1527 M.-D. Mouchy, «Les Droits Fondamentaux en Droit Pénal International », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, Beyrouth, Date de publication : novembre 2003, Éditeur : Université Saint-Joseph. Faculté de droit et des sciences politiques. CEDROMA : Centre d'études des droits du monde arabe. Beyrouth, p. 5. 1528 A. Khaier, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, intervention présentées au colloque de Beyrouth en novembre 2003, et a fait l'objet d'une publication en 2005 aux éditions Bruylant (Bruxelles). droit, le Conseil constitutionnel libanais va introduire le Préambule dans le bloc de constitutionnalité qui occupe une place dans les limitations apportées au pouvoir législatif et qui constitue l'une des plus importantes garanties de l'État de droit. Le Conseil constitutionnel 1529 créé par la loi du 14 juillet 1993a commencé à contrôler depuis le 15 avril 1994 après le serment de ses membres, toute loi jugée contraire aux principes du Préambule ainsi qu'aux pactes, traités, accords internationaux qui sont les garanties des droits fondamentaux et des libertés publiques, signés par le Liban. Le mode de saisine accorde le droit de saisine au président de la République, au président du Conseil des ministres, au président de l'Assemblée nationale et à 10 députés, en plus, la réalité confessionnelle libanaise impose aux juristes de donner aux chefs des communautés le droit de saisir le Conseil constitutionnel pour . À notre 1530 toutes les atteintes à l'éducation religieuse, au statut personnel et au droit de culte avis, un tel mode de saisine n'est pas très fréquent et limité ne peut pas répondre aux besoins d'offrir une garantie fondamentale des droits du justiciable, car il n'existe pas de recours direct pour les justiciables. De surcroît, nous invitons le législateur libanais à intervenir rapidement pour réformer le droit de contester la constitutionnalité d'une loi parce qu'il y a une nécessité de donner à 10 avocats le droit de former un recours auprès du Conseil constitutionnel. 288. Termes employés par le Conseil constitutionnel. Les termes utilisés par le Conseil Constitutionnel libanais qui visent à donner une valeur constitutionnelle à un principe sont divers. Pour ne pas confondre les termes utilisés par le Conseil Constitutionnel libanais, M. Hassãn-Tabet Rifaat précise minutieusement les différents termes et formules que le Conseil
382 1529 Loi n° 250 du 14 juillet 1993, J.O libanais du 15 juillet 1993. 1530 V en même sens H. Mouannes, « Le fonctionnement et l'autorité du Conseil constitutionnel libanais », in Droit écrit, mars 2001, n° 1, p. 118. 1531 H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », in Les dénominateurs communs entre les principes généraux du droit musulman et des droits des pays arabes et les principes généraux du droit français, Beyrouth, octobre 2001, Centre d'études des droits du monde arabe (CEDROMA) Faculté de droit et des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph (Beyrouth), p. 1. 1532 C.C. lib., n° 2001-1, 10 mai 2001, JO 2001, n° 24, p. 1794. 1533 C.C. lib., n° 2001-2, 10 mai 2001, JO 2001, n° 24, p. 1798. 1534 C.C. lib., n° 1997-1, 12 septembre 1997, JO 1997, n° 44, p. 3203 et C.C. lib., n° 2000-4, 22 juin 2000, JO 2000, n° 28, p. 2225. et les règles ayant valeur constitutionnelle » 1535 ainsi que « les principes généraux ayant 15361537 valeur constitutionnelle », « les principes ayant valeur constitutionnelle »,ou « les
383 explicite du Conseil constitutionnel libanais pour exprimer qu'un tel principe acquiert une valeur constitutionnelle ou pour affirmer que le Conseil constitutionnel a consacré la valeur constitutionnelle d'un principe. 289. La position du Conseil constitutionnel. La question de la valeur juridique du Préambule de la Constitution s'est posée. Quelle valeur faut-il attribuer à ce Préambule ? Évidemment, la protection des droits fondamentaux est d'abord l'oeuvre du Conseil constitutionnel. Devant contrôler la conformité des lois à la Constitution, le Conseil constitutionnel libanais a dû se prononcer sur le caractère du Préambule de la Constitution qui se réfère expressément à la Déclaration universelle des droits de l'homme et énonce que l'État doit « en concrétiser les principes dans tous les champs et domaines, sans exception ». Selon M. Wassim Wehbe, il a fallu attendre la décision du 7 août 1996 pour qu'il soit déclaré 1539 que : « le Préambule de la Constitution fait partie intégrante et inséparable de celle-ci 1540 ». Il a également déclaré dans la décision du 12 septembre 1997 que «les principes qui figurent dans le Préambule de la Constitution sont considérés comme partie intégrante de 1541 celle-ci ; qu'ils ont la même valeur juridique que les dispositions de la Constitution » . Donc le Conseil constitutionnel libanais a expressément et directement affirmé que les 1542 principes du Préambule de la Constitution avaient une valeur constitutionnelle, et cette importante prise de position lui a permis à diverses reprises d'annuler des lois estimées 1535 C.C. lib., n° 1997-1, op. cit. 1536 C.C. lib., n° 1999-2, 24 novembre 1999, JO 1999, n° 57, p. 3375. 1537 C.C. lib., n° 1999-2, op. cit. 1538 C.C. lib., n° 2000-4, 22 juin 2000 et C.C. lib., n° 2000-5, 27 juin 2000, JO 2000, n° 28, p. 2228. 1539 W. Wehbe, « Le contrôle de constitutionnalité des actes administratifs : Expérience des conseils d'État libanais et français », op. cit. 1540 C.C. lib., n° 4/96, 7 août 1996. 1541 C.C. lib., n° 1/97, 12 septembre 1997 (loi relative à la prorogation du mandat des conseils municipaux). 1542 Voir notamment la décision du conseil constitutionnel libanais du 12 septembre 1997 qui a annulé la loi du 24 juillet 1997 prorogeant le mandat des Conseils municipaux, et la décision du 24 novembre 1999 relative au droit au secret des communications, J.O. 1999, n° 57, p. 3375, et la décision du 21 novembre 2003 relative aux droits des travailleurs des raffineries de Tripoli et du Zahrani, postérieurement à la privatisation de celles-ci (J.O. n 55 du 4 décembre 2003, p. 6395) contraires aux droits fondamentaux 1543 . Il faut noter qu'au Liban la question de la valeur 384 juridique du principe de la légalité criminelle n'a pas été invoquée directement et n'a pas fait l'objet d'étude spécifique jusqu'à maintenant. Mais, puisque le principe de légalité est notamment consacré dans la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 et le pacte international relatif aux droits civils et politiques qui fut intégré au Préambule de la Constitution libanaise, par la consécration de la valeur constitutionnelle du Préambule de la Constitution par le Conseil constitutionnel, cela montre que tous les principes du Préambule sont visés par le Préambule de la Constitution. B. Le principe de légalité et la théorie du bloc de constitutionnalité en droit libanais. 290. Théorie du bloc de constitutionnalité au Liban. Le Conseil constitutionnel libanais comme on l'a déjà mentionné déclare dans deux décisions du 12 septembre 1997 que « les principes inclus dans le préambule sont considérés comme faisant partie intégrante du texte constitutionnel et ont la même valeur constitutionnelle que les dispositions du corps même de la Constitution ». Il s'est en outre référé 1544 au Pacte sur les droits civils et politiques du 16 décembre 1966, qui est l'un des pactes d'O.N.U. mentionnés dans le Préambule, ainsi qu'au 1545 paragraphe C du Préambule. Mais ce qui est remarquable, c'est que le Conseil constitutionnel libanais ne se limite pas à ces 2 arrêts précités. Il a eu le courage d'adopter une formulation qui est encore plus nette et plus exacte dans une décision du 24 novembre 1999 qui énonce « le préambule est considéré comme faisant partie intégrante de la Constitution et
constitutionnel libanais consacre explicitement et sans ambiguïté une pleine valeur constitutionnelle à tous les alinéas du Préambule qui comprend également le principe de la légalité criminelle, car tous les principes mentionnés dans le Préambule ont la même valeur et constituent un tout. Ce sont des principes constitutionnels. Le Conseil constitutionnel libanais 1543 P. Gannagé, « Les Droits fondamentaux entre la tradition et la modernité: l'exemple libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, communication lors du colloque organisé par Centre d'étude des droits du monde arabe de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth, Beyrouth, novembre 2003, p. 5. 1544 C.C. lib., n° 1997-1 et n° 1997-2,12 Septembre 1997, JO 1997, pp. 3205-3210. 1545 H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », op. cit., p. 4. 1546 H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », op. cit., p. 4. adopte la théorie du bloc de constitutionnalité qui reflète un incontestable indice de l'influence 1547 du Conseil constitutionnel français . La décision du 12 septembre 1997 proclame explicitement et très clairement le point de vue du Conseil constitutionnel libanais qui affirme que « les principes contenus dans le préambule de la Constitution en font partie intégrante et jouissent d'une valeur constitutionnelle certaine et égale à celle des dispositions mêmes du
constitutionnel libanais, est que les principes qui découlent de l'application de l'alinéa b du
conséquence directe de tout ce qui précède, M. Antoine Khaier affirme que « la jurisprudence du Conseil constitutionnel libanais eût l'occasion d'habiller de valeurs constitutionnelles
385 jurisprudence précédente du Conseil constitutionnel allait faire du juge constitutionnel ou du Conseil constitutionnel un véritable protecteur des droits et libertés des citoyens, partenaire essentiel d'un État de droit, car il a contribué par sa jurisprudence, de manière innovante à un renforcement de l'État de droit. 291. Une décision remarquable du 10 mai 2001. Cette nouvelle décision ou jurisprudence du Conseil constitutionnel libanais constitue une action confirmatrice de sa jurisprudence courageuse du 12 septembre 1997 1551 . M. Hassãn-Tabet Rifaat souligne que la décision du 10 1547 A. Khaier, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, intervention présentées au colloque de Beyrouth en novembre 2003, et a fait l'objet d'une publication en 2005 aux éditions Bruylant (Bruxelles) : « Le Conseil constitutionnel libanais a adopté la théorie du bloc de constitutionnalité à l'instar de son homologue français et ce dès ses premières décisions ». 1548 A. Khaier, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, intervention présentées au colloque de Beyrouth en novembre 2003, et a fait l'objet d'une publication en 2005 aux éditions Bruylant (Bruxelles). 1549 V. A. Khaier, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, intervention présentée au colloque de Beyrouth en novembre 2003, et a fait l'objet d'une publication en 2005 aux éditions Bruylant (Bruxelles) : « Dans la même décision le Conseil cita une convention internationale à laquelle le Liban avait officiellement adhéré pour faire jouer l'alinéa du paragraphe b du préambule disant que l'État libanais étant membre fondateur et actif de l'Organisation des Nations Unies, engagé par ses pactes et par la déclaration universelle des droits de l'Homme, il devrait concrétiser ces principes dans tous les domaines sans exception ; la même allusion était faite également au Pacte de la Ligue des États arabes et aux pactes y afférant ». 1550 A. Khaier, « Droits fondamentaux et Droit constitutionnel libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, intervention présentées au colloque de Beyrouth en novembre 2003, et a fait l'objet d'une publication en 2005 aux éditions Bruylant (Bruxelles). 1551 V. sur ce point : H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », in Les dénominateurs communs entre les principes généraux du droit musulman et des droits des pays arabes et les principes généraux du droit français, Beyrouth, octobre 2001, mai 2001 fait également application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques : « ledit pacte constitue un maillon qui complète la Déclaration universelle des droits de l'homme ». De surcroît, la décision du 10 mai 2001 applique également la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, approuvée par l'Assemblée générale de l'ONU le 21 décembre 1965 et à laquelle l'adhésion du Liban a été autorisée par la loi n° 71-44 du 24 juin 1971 1552 . Le Conseil en conclut qu'« il est acquis que ces pactes auxquels renvoie expressément le préambule de la Constitution constituent avec ce préambule et la Constitution un ensemble indivisible et ont valeur
386 permet d'affirmer de nouveau que le principe de la légalité criminelle est un principe à valeur constitutionnelle puisqu'il fait partie des principes inclus dans le Préambule de la Constitution qui sont déjà considérés comme faisant partie intégrante du texte constitutionnel et ont la même valeur constitutionnelle que les dispositions du corps même de la Constitution. De nouveau on peut affirmer et souligner pour la première fois en droit libanais que le principe de la légalité de preuve en matière pénale est un principe à valeur constitutionnelle puisqu'on a déjà confirmé et justifié que le principe de la légalité criminelle s'applique sur le droit pénal formel (procédure pénale) qui s'applique à son tour en matière de preuve pénale. 292. Légalité insuffisante. Devant cette jurisprudence bien établie et plus d'une fois confirmée du Conseil constitutionnel libanais, ce dernier a fortement contribué à renforcer le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales au Liban. Il est inévitable de parler d'un renforcement considérable et remarquable conformément à l'avis de M. Hassan Tabet Rifaat qui affirme que les libertés et droits fondamentaux ont reçu un appui renforcé. C'était vraisemblablement le dessein du législateur lorsque, par la loi constitutionnelle du 21/9/1991, il ajoutait un préambule à la Constitution et décidait, dans le paragraphe B du Préambule, que le Liban est "engagé par (les) pactes (de l'O.N.U) et par la Déclaration universelle des droits de l'homme. L'État concrétise ces principes dans tous les champs et domaines sans Centre d'études des droits du monde arabe (CEDROMA) Faculté de droit et des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph (Beyrouth), p. 4. « Enfin, dans une décision prise le 10 mai 2001, le Conseil constitutionnel Libanais a considérablement enrichi sa jurisprudence sur ce plan ; elle a, en effet, fait application du paragraphe "d" du préambule, ainsi que de la Déclaration Universelle des droits de l'homme...» 1552 H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », in Les dénominateurs communs entre les principes généraux du droit musulman et des droits des pays arabes et les principes généraux du droit français, Beyrouth, octobre 2001, Centre d'études des droits du monde arabe (CEDROMA) Faculté de droit et des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph (Beyrouth), p. 4. 1553 C.C. lib., n° 2001-2, 10 mai 2001, J.O. 2001, p. 1797. exception 1554 . Ce qui précède n'empêche pas de dire que la légalité est toujours insuffisante et 387 souffre de manière continue dans le système juridique libanais. Les causes de recours y compris ceux de la cassation (article 296 du CPP libanais) n'autorisent que le contrôle de 1555 . conformité des jugements à la légalité englobant la loi et les principes généraux de droit Cette protection constitutionnelle, si précieuse soit-elle, demeure cependant insuffisante pour défendre la légalité. Elle est en effet limitée par les dispositions rigoureuses relatives à la saisine du Conseil constitutionnel. L'intervention du Conseil constitutionnel libanais dépend en effet de l'initiative des parlementaires qui à son tour dépend largement de la volonté politique sans prendre en considération les exigences constitutionnelles et sans tenir compte de la légalité dont on peut redouter l'inertie ou la complaisance. Le recours en inconstitutionnalité n'est pas en effet ouvert aux particuliers et aux justiciables qui ne peuvent davantage soulever l'exception d'inconstitutionnalité devant les juridictions ordinaires. Enfin, l'absence de toute instance régionale habilitée à recevoir ces recours fragilise encore davantage cette protection 1556 et l'efficacité réelle de cette protection 1557 . Il faut toujours souligner que le problème réside dans le manque ou l'absence de mécanismes procéduraux efficaces qui permettent de contrôler par le juge l'application des droits fondamentaux consacrés. On ne peut pas pousser le juge libanais à élargir le champ de son contrôle de la légalité. Le Conseil constitutionnel1558 libanais qui caractérise la deuxième République libanaise se présente comme juge et sauveur selon M. Chadi El-Hajal qui ajoute que « le Conseil constitutionnel libanais fut établi dans le but de protéger la Constitution libanaise et 1554 H.-T. Rifaat, « L'expérience du Conseil constitutionnel libanais en matière de principes généraux ayant valeur constitutionnelle », op. cit., p. 5. 1555 M.-D. Mouchy, «Les Droits Fondamentaux en Droit Pénal International », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, Beyrouth, novembre 2003, p. 16. 1556 P. Gannagé, « Les Droits fondamentaux entre la tradition et la modernité : l'exemple libanais », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, communication lors du colloque organisé par Centre d'étude des droits du monde arabe de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth, Beyrouth, novembre 2003, p. 5. 1557 V. M.-D. Mouchy, «Les Droits Fondamentaux en Droit Pénal International », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie générale, Beyrouth, novembre 2003, p. 16 : « L'ensemble des droits individuels ainsi protégés par le Code pénal ne sont autres que les droits fondamentaux, retenus par le chapitre II de la Constitution comme il apparaît des textes y relatifs. Cependant ces textes constituent aussi une limitation légale à l'exercice de tels droits comme l'a voulue la Loi suprême. Dans ce cadre comment empêcher le juge de vérifier leur respect par la norme d'incrimination ou du moins de permettre à la Cour de Cassation de procéder à tel contrôle ? Rien dans les textes de droit libanais ne le permet. Les causes de recours y compris ceux de la cassation (article 296 du Code de procédure pénale) n'autorisent que le contrôle de conformité des jugements à la légalité englobant la loi et les principes généraux de droit. La constitutionnalisation des droits fondamentaux, l'internationalisation du droit interne et l'alignement du droit interne sur le droit international, constituent des bornes à la dictature législative et à l'autocratie judiciaire, et prétendent parfaire le cheminement contre l'arbitraire du politique initié par le droit à la légalité ». 1558 V. D. Khair, Le Conseil constitutionnel, gardien des libertés fondamentales : étude comparative du Conseil constitutionnel libanais, Mémoire DEA : Droit public interne, Université Paris 2, 2004. d'assurer le respect de ses règles, en plus de protéger l'entité de l'État et son existence, désirant ainsi instaurer un État juste »1559. Pour M. Pierre Gannage, les pouvoirs du Conseil constitutionnel, dans le domaine du contrôle de la constitutionnalité des lois reposent sur la nécessité de vérifier la conformité des lois aux textes constitutionnels. Or, ces textes étant libellés sous forme de principes le Conseil constitutionnel contrôlera donc la conformité des lois aux principes fondamentaux caractérisant l'État de droit, à des dispositions générales, 1560 ou même à des déclarations solennelles qui figurent dans le Préambule de la Constitution . Mais ce qui est important est que les déclarations qui ont été ajoutées à la Constitution libanaise par la loi constitutionnelle du 21 septembre 1991, suite à l'accord de Taëf, se réfèrent notamment à la Déclaration universelle des droits de l'homme, pour assurer d'une manière générale la protection des libertés publiques. Le Conseil constitutionnel libanais, comme son homologue français, a dû résoudre le point de savoir si de pareilles déclarations qui précèdent l'énoncé des dispositions mêmes de la Constitution avaient une valeur
juillet 1997 prorogeant le mandat des conseils municipaux ne laissent aucun doute à ce sujet, l'arrêt affirme : « Attendu que les principes énoncés dans le préambule de la Constitution constituent un élément de la Constitution, qu'ils ne peuvent en être dissociés, qu'ils ont la même valeur constitutionnelle que les dispositions de la
388 manière considérable les attributions du Conseil constitutionnel et l'érige d'abord en un défenseur des libertés publiques. Il est vrai que cette protection était déjà assurée par les dispositions précises de la Constitution relatives aux libertés essentielles, comme la liberté de conscience, la liberté de l'enseignement, la liberté d'expression et celle d'association (art. 8, 9, 10, 13 de la Constitution). Mais aucun texte général n'en énonçait le principe et la loi constitutionnelle du 21 septembre 1991 est venue combler cette lacune. En lui conférant une valeur constitutionnelle, le Conseil Constitutionnel s'arroge désormais un pouvoir général sur les activités du législateur en veillant à ce que la loi respecte, dans tous les domaines, les droits fondamentaux de l'homme et les libertés qui s'y rattachent. Dans l'appréciation de ces 1559 Ch. El-Hajal, Le Conseil constitutionnel libanais, Thèse de droit, Université Jean Moulin Lyon 3, 2007, V. spec. le résumé. 1560 P. Gannage, « Le conseil constitutionnel libanais », in Les Constitutions des pays arabes, Actes du colloque de Beyrouth, Février 1998, Ouvrage publié en1999, Distribution : Éditions Bruylant, Bruxelles et Librairie Le Point, Beyrouth, p. 7. 1561 P. Gannage, « Le conseil constitutionnel libanais », in Les Constitutions des pays arabes, p. 8. 1562 P. Gannage, « Le conseil constitutionnel libanais », in Les Constitutions des pays arabes, p. 8. droits, le Conseil Constitutionnel devra tenir compte de la structure et de la physionomie 1563 propres de la nation libanaise. 293. L'utilisation des normes constitutionnelles par le juge du fond. Selon Mme Hiam Mouannes, lorsque le juge cherche la règle de droit adaptée au litige qui lui est soumis, il ne peut se limiter aux textes législatifs sans remonter jusqu'à la Constitution, surtout si la loi est
conférée au juge sur la base de l'alinéa premier de l'article 2 du Code de procédure civile libanais qui demande, « aux tribunaux de respecter le principe de la hiérarchie des normes ». . Pour M. 1565 Le juge est donc tenu par le principe du respect de la hiérarchie des normes Ibrahim Chiha, le principe de la séparation des pouvoirs ne peut être considéré comme un obstacle au contrôle de la constitutionnalité. La recherche de la règle de droit applicable au litige qui lui est soumis rentre en effet intrinsèquement dans la mission du juge 1566 . Dès lors, en cas de contradiction entre deux normes juridiques c'est la norme supérieure qui s'applique, sans pour autant prononcer l'annulation de la norme inférieure. Le juge est ainsi tenu de dire le droit conformément aux normes juridiques en vigueur qu'elles soient d'ordre constitutionnel, législatif ou réglementaire. Le Liban est un membre fondateur et actif de l'Organisation des Nations-Unies, engagé par ses pactes et par la Déclaration universelle des droits de l'homme. Donc l'État concrétise les principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme dans tous les champs et domaines sans exception, consacrant la garantie légale des justiciables
389 1563 P. Gannage, « Le conseil constitutionnel libanais », in Les Constitutions des pays arabes, p. 8. 1564 H. Mouannes, « Le fonctionnement et l'autorité du conseil Constitutionnel Libanais », in Droit écrit, mars 2001, n° 1, p. 121. 1565 H. Mouannes, « Le fonctionnement et l'autorité du conseil Constitutionnel Libanais », in Droit écrit, mars 2001, n° 1, p. 121. 1566 H. Mouannes, « Le fonctionnement et l'autorité du conseil Constitutionnel Libanais », in Droit écrit, mars 2001, n° 1, p. 120. 1567 Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. 1568 Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi. 1569 Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé 1570 Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. 15714 . Toute personne accusée d'un acte délictueux est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie au cours d'un procès public où toutes les garanties nécessaires à sa défense lui auront été assurées. 2. Nul ne sera condamné pour des actions ou omissions qui, au moment où elles ont été commises, ne 390 contiennent des principes applicables au déroulement de la procédure pénale libanaise et qui constituent, avec d'autres textes du Code de procédure pénale libanais, le fondement du principe de la légalité dans le système libanais. Mais il ne faut pas oublier que dans le système libanais les particuliers n'ont pas accès à la justice constitutionnelle, ni directement, ni par voie d'exception soulevée devant les juges ordinaires 1573 . À notre avis, il est souhaitable que le législateur libanais intervienne afin d'adopter un système semblable ou identique ou au moins fortement inspiré de celui du système français en vigueur qui est le système de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC)1574. En effet, l'instauration de ce système par le législateur libanais comme nouveau droit reconnu permettrait au justiciable libanais de contester la constitutionnalité d'une disposition législative lors d'une instance en cours devant une juridiction, lorsqu'il estime que ce texte, applicable au litige ou à la procédure, ou constituant le fondement des poursuites, porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution libanaise garantit. constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international. De même, il ne sera infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'acte délictueux a été commis. 1572 Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes. 1573 P. Gannage, « Le Conseil constitutionnel, protecteur des libertés», in Le Conseil constitutionnel libanais : gardien, régulateur, protecteur, op. cit. 1574 V. Question prioritaire de constitutionnalité : O. Hasenfratz, Question prioritaire de constitutionnalité et procédure pénale, états des lieux et perspectives, Thèse de droit, Université Montpellier 1, 2012. |
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