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La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanais


par Ali Ataya
Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013
  

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Section II

La légalité criminelle appliquée en matière de preuve

pénale

257. L'application du principe de légalité dans le contexte des preuves. Selon MM. Serge Guinchard et Jacques Buisson, « la légalité dans l'administration de la preuve trouve donc essentiellement l'application en amont de l'audience pénale, mais elle ne peut évidemment être étrangère au juge de jugement, que ce soit au titre de l'obligation qui lui est faite de vérifier la légalité de la preuve produite, ou dans l'exécution du complément d'enquête qu'il

peut - et même doit - ordonner »

1433

. La preuve pénale est soumise au principe de la légalité.

1434

La procédure pénale fait une large place aux règles de preuve . En général, la procédure pénale dans tous les systèmes pénaux a pour objet essentiel la constatation des infractions, le rassemblement de leurs preuves, la recherche de leurs auteurs. Le principe de la légalité procédurale trouve son application et son expression dans le cadre de la preuve pénale. Le problème fondamental que doit aborder toute procédure pénale est la preuve. Le but ultime de toute procédure pénale, en effet, qu'elle soit système de droit continental ou de common law vise à la manifestation de la vérité à travers la recherche et l'administration de la preuve. Pour autant, la recherche de la preuve ne peut se faire à n'importe quel prix, mais uniquement par

1435

des voies non seulement légales, mais encore légitimes . Le principe de légalité procédurale a donc un rôle particulier à jouer en matière de preuve pénale. « Mais cette liberté du moyen de preuve et de son appréciation ne doit pas masquer l'existence d'un principe de légalité de l'administration de la preuve, aspect de la légalité procédurale, qui signifie que les moyens de preuves doivent résulter d'actes d'investigation ou de recherche régulièrement prévus par la

loi » 1436 . Ce principe de légalité procédurale s'applique sur la preuve surtout si on prend en compte que le principe de la légalité criminelle est un excellent outil juridique qui contribue largement et efficacement en vue de l'élaboration de l'État de droit. C'est autour de la preuve

1433 S. Guinchard et J. Buisson, Procédure pénale, 9e édition, LEXIS NEXIS/LITEC, 2013, n° 582, p. 587.

1434 P. Bolze, Le droit à la preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit, Université Nancy 2, 2010, p. 4.

1435 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, p. 10.

1436 J.-Ch. Saint-Pau, « L'enregistrement clandestin d'une conversation », in Droit pénal, n° 9, Septembre 2008, étude 17, spec. n° 20.

pénale que la procédure pénale toute entière gravite, affirment MM. Roger Merle et André Vitu: « la procédure pénale toute entière gravite autour du problème essentiel de la preuve, ce qui explique la place prééminente que lui réservent certains droits étrangers, par exemple

anglo-saxons »

1437

. Un arrêt rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation française

le 19 juin 1989 constitue à notre avis une reconnaissance presque parfaite de l'existence juridique du principe de la légalité de preuve : « si, selon les dispositions combinées des articles 342 et 451 du Code des douanes, tous délits en matière douanière ou cambiaire peuvent être prouvés par toutes les voies de droit, c'est à la condition que les moyens de preuve produits devant le juge pénal ne procèdent pas d'une méconnaissance des règles de procédure et n'aient pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense, ni au principe énoncé à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de

1438

.

l'homme et des libertés fondamentales»

§ 1. Légalité procédurale appliquée en matière de preuve pénale.

258. Notion du principe de la légalité de preuve. Selon Mme Michèle-Laure Rassat « chaque mode de preuve est doté d'une procédure d'obtention particulière qui fait l'objet d'une réglementation spécifique et détaillée : l'aveu ne peut résulter d'un interrogatoire dont tous les détails sont prévus par le Code de procédure pénale ; le témoignage est recueilli au cours d'une audition, etc. Des preuves obtenues sans respect de ces règles sont irrecevables.

Il y a là des formalités spécifiques à chaque élément de preuve ... »

1439

. La loi réglemente la

353

recherche de la preuve, la constatation, la production et la discussion ; c'est ce qu'on appelle le principe de la légalité dans la recherche et l'utilisation des preuves, prolongement du principe général de la légalité criminelle comme l'affirment MM. Roger Merle et André

Vitu 1440 . La recherche des preuves en matière pénale ne peut non plus être abandonnée à l'arbitraire des autorités parce que la procédure pénale ne doit pas être fortement axée vers la recherche des preuves à tout prix. La liberté de preuve ne signifie pas qu'il convienne d'obtenir à tout prix les preuves ou le droit de rechercher les preuves à tout prix et de n'importe quelle manière comme l'affirme M. Jean Pradel : « n'importe quelle preuve peut être utilisée, mais

1437 R. Merle et A. Vitu, Traité De Droit Criminel, 5e éd., Cujas, Paris, 2001, t. 2 Procédure Pénale n°140, p. 177.

1438 Cass. crim., 19 juin 1989, B.C., n° 261.

1439 M-L. Rassat, Procédure pénale, 2e édition, Éditeur : Ellipses, 2013, n° 256, p. 265.

1440 R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, 5e éd., Cujas, Paris, 2001, t. 2 Procédure pénale, n° 168, p. 211.

elle ne peut pas être recherchée de n'importe qu'elle manière. En d'autres termes, s'il n'y a pas de régime légal des preuves, il y a un régime de la recherche et de l'administration des

1441

preuves »

. La liberté de preuve donne le pouvoir de choisir tout moyen de preuve pour

354

établir la vérité et laisse aux autorités étatiques la liberté de choisir entre les différents procédés de preuve sans reconnaître une hiérarchie entre les moyens et les modes de preuve, ou imposer un moyen de preuve recevable notamment pour prouver une infraction spécifique. Il résulte de ce qui précède que les procédés ou moyens de preuve non expressément prévus

1442

par le Code de procédure pénale devraient être bannis. En effet, la procédure pénale en droit libanais et français est régie par le principe de la liberté des preuves. Cette liberté n'est toutefois pas sans limites. Il ne peut être recouru à des moyens qui sont incompatibles avec les principes fondamentaux et généraux du droit reconnus ou consacrés par les lois, qui portent atteinte à la dignité humaine, qui entament la liberté personnelle sans base légale suffisante ou encore qui sont formellement interdits par la loi elle-même et encore avec des nuances.

A. L'application des principes de procédure pénale en matière de preuve.

259. La légalité s'applique à la preuve. Après avoir identifié et justifié l'existence du principe de légalité procédurale, la question fondamentale qui est posée concerne l'application de ce principe en matière de preuve pénale. Les principes généraux relatifs à la procédure pénale s'appliquent également en matière de preuve. Le système pénal libanais et français ne consacre pas un Code spécifique et indépendant à la recherche et l'administration de la preuve pénale. Face à l'unité des règles de preuve en common law, dans les pays appartenant au système romano-germanique notamment le Liban et la France, on peut parler de l'unité des règles de procédure pénale étant donné que la procédure pénale repose beaucoup sur la question des preuves et tient à organiser légalement les moyens de rechercher et d'établir la

culpabilité et l'innocence.1443

1441 J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 782, p. 716.

1442 V. sur la réglementation de la recherche des preuves : H. Matsopoulou, Les enquêtes de police, Thèse de droit, L.G.D.J., Paris, 1996, n° 1074, p. 498 : « Entendue dans son sens matériel, cette réglementation de la recherche des preuves signifie que chaque acte d'administration de la preuve est régi strictement par un texte ».

1443 V. E. Verges, Procédure pénale, 2e éd., Litec, 2007, n°107, p. 80 : « le principe de licéité de la preuve signifie avant tout que la recherche, la production et l'appréciation des preuves pénales doivent se faire conformément au droit. Il s'agit là d'un énoncé tout à fait trivial, mais encore faut-il préciser ce que l'on entend par conforme au droit. D'un côté l'établissement de certaines preuves est soumis à un cadre législatif très précis. Ainsi en est-il des perquisitions, des écoutes téléphoniques ou procédures de sonorisation. Ces preuves sont, en réalité, des actes de procédures soumis à un formalisme lourd... Pour autant, la licéité de la preuve ne s'étend

355

B. La légalité procédurale applicable à la preuve pénale.

260. L'application de la légalité procédurale à la preuve. Dans un système fondé sur la prééminence du droit, le principe de légalité, ou encore l'exigence d'une « loi préalable » occupent pourtant une place centrale très essentielle en procédure pénale, même s'ils n'ont, en cette matière, ni la même raison d'être, ni la même portée qu'en droit pénal de fond1444

.

Pendant la recherche des preuves, les agents d'investigation ne sont pas libres, car si la présentation des preuves est bien libre, leur recueil ne l'est pas. Dans un État de droit comme en France et au Liban, les policiers et les magistrats sont tenus de respecter diverses conditions légales pendant tout acte de procédure tendant à rechercher les preuves. Le processus d'obtention de la preuve en matière pénale est strictement réglementée parce qu'il est sous-tendu par certains principes eux-mêmes presque sacrés. Certains auteurs croient que la légalité procédurale issue du principe de légalité des délits et des peines autorise les autorités étatiques (surtout judiciaires) à faire tout ce qui n'est pas interdit par la loi. Cette notion précédente ou interprétation est erronée, car tout acte de procédure criminelle attentatoire à la liberté individuelle ou contrevenant à la vie privée est interdit sauf si la loi prévoit légalement cette atteinte légale. Le Code de procédure pénale doit justifier expressément ces atteintes à la liberté individuelle afin de rechercher la preuve, mais à condition de ne pas porter atteinte aux garanties constitutionnelles, d'où la nécessité de réglementer légalement les différents procédés de preuve sans reconnaître aucune hiérarchie entre les divers modes de preuve et sans fixer la valeur probante des preuves. En matière criminelle, toute preuve est admise pour prouver une infraction, mais ceci ne veut pas dire que l'administration des preuves n'est pas réglementée. La légalité procédurale est applicable dans la recherche de preuve pénale. Le Conseil constitutionnel français dans sa décision n° 2004492 DC du 02 mars 2004 concernant la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a confirme l'application du principe de légalité criminelle sur les règles des preuves pénale : « 5. considérant, enfin, que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis ; que cette exigence s'impose non seulement pour exclure

pas uniquement de l'encadrement formel prévu par la loi. Elle consiste aussi dans le respect de principes inscrits dans le Code de procédure pénale ou établis par la jurisprudence ».

1444 F. Desportes et L. Lazerges-Cousquer, Traité de procédure pénale, 3e éd., Economica, 2013, n° 248, p. 153.

l'arbitraire dans le prononcé des peines, mais encore pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infractions ... »1445.

C. La preuve pénale, l'essence de la procédure pénale.

261. La preuve est l'objet de la procédure pénale. Selon M. René Garraud, l'idée de l'instruction et de la preuve dans le cadre du procès pénal, c'est-à-dire tous les procédés qui seront employés pour rechercher les délits et les délinquants et sans doute pour convaincre le juge de la culpabilité de l'accusé constituent le fond même de la procédure pénale, dont toutes les règles sont dirigées vers ce but : des moyens légaux, la découverte des crimes et la

1446

punition des criminels. Ensuite de la bonne ou de la mauvaise organisation de ces règles, dépend, avant tout, la sécurité de la société et celle de l'individu, c'est ce qu'affirme M. René

Garraud

1447

. Les règles de procédure pénale sont orientées vers la recherche et la production

356

de preuves. En réalité, la plupart des actes de procédure pénale visent l'obtention des éléments de preuve d'une infraction, par exemple, le procès-verbal constitue un instrument essentiel de la preuve au pénal, la perquisition ne peut avoir d'autre objet que de rassembler les preuves relatives à une infraction 1448 . L'interrogatoire n'a pas cessé d'être un moyen important de preuve. L'expertise est un moyen qui permet d'obtenir un avis non juridique basé sur des connaissances scientifiques, techniques ou artistiques spéciales et qui sert à découvrir certains indices et certaines preuves. À vrai dire, la preuve constitue l'essentiel de la procédure, ce qui confirme que la légalité procédurale doit être appliquée en matière de preuve pour encadrer légalement l'étendue de la liberté de preuve.

1445 DC n° 2004-492 du 02 mars 2004 concernant la loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.

1446 R. Garraud, Traité théorique et Pratique d'instruction criminelle et de procédure Pénale, L. Larose & L. Tenin, 1907, t. 1, p. 9.

1447 R. Garraud, Traité théorique et Pratique d'instruction criminelle et de procédure Pénale, L. Larose & L. Tenin, 1907, t. 1, p. 9.

1448 J. De Codt, Des nullités de l'instruction et du jugement, Larcier, Bruxelles, 2006, p. 54.

357

§ 2. Reconnaissance du principe de légalité de la preuve pénale.

262. Résoudre le conflit entre droits individuels et efficacité de la répression. Selon M. Bernard Bouloc et Mme Haritini Matsopoulou, la liberté de la preuve subit une restriction extrêmement importante du fait qu'il est exclut- en principe - qu'un policier ou tout autre

1449

.

citoyen se permette de commettre une infraction afin d'acquérir la preuve d'une infraction

M. Jacques Buisson affirme que « ... dans un État de droit, la légalité imprègne forcément l'administration de la preuve, c'est-à-dire dans la recherche ou le recueil de la preuve, à

1450

. La

peine de nullité, voire de condamnation civile ou pénale de l'enquêteur responsable »

procédure pénale vise d'abord à l'efficacité de la répression par la recherche des preuves afin de trouver l'auteur de l'infraction. Cette procédure vise encore à garantir les droits individuels des personnes pendant les différentes phases du procès. La recherche de preuve évoque plusieurs conflits entre intérêt public et intérêt privé, droits de l`individu et droits de la société, entre l'atteinte au droit individuel et l'intérêt général sauvegardé. La procédure pénale doit être équitable, elle doit donc trouver l'équilibre entre les droits des parties et l'équité de la procédure pénale, afin d'assurer les intérêts de la société et les droits des individus. En ce qui concerne la preuve, le principe, en droit pénal, est celui de la liberté de preuve. Cette liberté de preuve largement reconnue dans le domaine pénal ne nous empêche pas d'affirmer que lors de la recherche des preuves, toute procédure pénale tend à trouver l'équilibre entre le respect des droits de la défense et l'efficacité niveau des preuves suffisantes. La procédure pénale doit réserver l'équilibre des droits des parties. La reconnaissance d'une liberté absolue en matière de preuve détruirait l'équilibre en donnant à la recherche de la preuve la dominance sur la légalité. La procédure pénale recherche l'équilibre entre la protection des libertés individuelles, notamment ceux de la défense, et l'efficacité de la répression destinée à protéger

1451

la société . La légalité de preuve est un principe qui tend à renforcer l'équilibre de la procédure pénale et, en même temps, à l'humaniser et à améliorer l'équilibre des droits entre les parties. Le principe de la légalité de preuve vient résoudre complètement les conflits qui interviennent dans la recherche de preuve et leur efficacité qui peuvent porter atteintes à certains droits et libertés individuels. Contrairement à l'idée traditionnelle présentée,

1449 B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et Procédure pénale, 18e éd., Sirey, Paris, 2011, n° 441, p. 255.

1450 J. Buisson, « La légalité dans l'administration de la preuve pénale », in Procédures, Décembre 1998, Chr. n° 14, pp. 3-6, V. spec. p. 3.

1451 É. Espérance Nana, Droits de l'homme et justice: le délai de procédure pénale au Cameroun, L'Harmattan, Paris, 2010, Préface de Jean-Didier Boukongo, p. 34.

l'efficacité de la répression n'est pas toujours en opposition avec les droits et libertés. Le principe de la légalité de preuve offre une très bonne figure d'une procédure pénale respectueuse des droits individuels et efficace en même temps.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein