Chapitre II
Preuve entachée d'une illégalité
matérielle
159. Mode de preuve illicite. Le principe de la
légalité dans l'administration des preuves en matière
pénale implique l'obligation et le devoir de respecter les principes
généraux du droit et les principes fondamentaux des droits de
l'homme. Les principes de base des droits de l'homme, et
particulièrement le respect de la dignité de la personne humaine
fait partie
intégrante du principe de la légalité de la
preuve pénale
930
. Il n'est pas permis d'adopter des
modes de preuve qui ne respectent pas l'individu, ses droits
et sa dignité 931 . Il est donc inadmissible et formellement interdit
d'arracher des aveux sous la violence, la torture ou la contrainte morale, ou
de soumettre l'accusé à l'hypnose, ou encore lui administrer des
produits dans le but d'affaiblir sa volonté et réveiller son
subconscient, afin qu'il apporte son
témoignage sans conscience ni réflexion 932 . Il
est interdit d'user de procédés de violence physique à
l'encontre des suspects, inculpés ou témoins. Sont
également prohibées les méthodes qui impliquent une
diminution ou une suppression du contrôle de soi-même comme
933
la narco-analyse.
160. Respect de la dignité humaine et violence
physique. Le respect de la dignité humaine
934
exige l'interdiction absolue du recours à la violence
physique sous toutes ses formesafin
930 V. sur l'effet de la Convention
européenne des droits de l'homme sur le respect de la dignité
humaine : B. Maurer, Le principe de respect de la dignité humaine et
la Convention européenne des droits de l'homme, Editeur : La
documentation française, 1999.
931 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les
principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar
Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, 1993, p. 326 ; V. en même sens : C.
Ambroise-Casterot, La procédure pénale, 2e
éd., Gualino éditeur, Paris, 2009, n° 246-1, p. 173.
932 V. en ce sens : J.-Y. Chevallier, «
La preuve en procédure pénale comparée (Rapport de
synthèse pour les pays d'Europe continentale) », in Revue
internationale de droit pénal, 1er-2e
trimestre1992, vol. 63, Actes du Séminaire International organisé
par l'Institut Supérieur International de Sciences Criminelles à
Syracuse (Italie) du 20 au 25 janvier 1992, pp.43-55, V. spec. p. 53 :
« Quand il s'agit d'apprécier la preuve, tout le monde sait
qu'il y a deux systèmes applicables : ou bien le juge devant qui une
preuve prévue par la loi est régulièrement apportée
est lié par cette preuve et doit automatiquement considérer que
le suspect est coupable et entrer en condamnation : système de la
légalité des preuves ; ou bien ce même juge apprécie
librement les preuves qui sont apportées devant lui : système de
l'intime conviction ».
933 V. sur ce point : P. Bolze, Le droit
à la preuve contraire en procédure pénale,
Thèse de droit, 2010, Université Nancy 2, p. 366 : «
L'utilisation de l'hypnose et de la narco-analyse, s'attachent à
supprimer toute volonté de masquer la vérité dans le
discours en provoquant un état d'altération de la conscience
».
934 V. sur ce point : M. D.-Castelli, «
La présentation de la preuve et la sauvegarde des libertés
individuelles », 3e colloque du Département des droits de l'homme -
Université Catholique de Louvain - Centre d'Études
européennes, Bruxelles, Établissements Émile Bruylant,
1977, in Les Cahiers de droit, Vol. 21, n° 2, 1980, p.
d'obtenir l'aveu ou des éléments de preuves
935
. Pour certains, l'influence matérielle ayant pour
but d'obliger ou de faire passer l'accusé aux aveux,
peut se manifester par plusieurs cas ou moyens, dont les plus importants sont :
la violence (contrainte physique), fatiguer l'accusé par
un long interrogatoire, l'hypnose et l'utilisation de
narcotiques
|
936
|
. Il est interdit au juge et aux
|
226
officiers de police judiciaire qui ont la charge d'interroger
le suspect ou l'accusé, de recourir aux méthodes illégales
pendant l'interrogatoire, comme l'utilisation de la violence, de la coercition
physique, des moyens de tromperie et de duperie ou des moyens techniques (comme
l'usage du polygraphe, de l'hypnose ou d'autres moyens), dans le but de lui
extraire
937
des aveux et affaiblir sa volonté et sa conscience.
Donc il y a une nécessité d'encadrer l'administration de la
preuve pénale qui exige un profond respect pour la protection de la
dignité humaine. Nous allons aborder la question de la preuve qui est
entachée d'une illégalité portant atteinte à la
dignité humaine et à la liberté individuelle dans la
première section, et plus particulièrement la question de la
légalité des aveux en matière pénale. Une
première section porte sur les procédés de preuves qui
sont attentatoires à la dignité humaine et à la
liberté individuelle. La deuxième section va aborder la question
de la légalité des procédés scientifiques qui
visent à la recherche des preuves. La deuxième section porte sur
la question de la légalité des procédés
scientifiques.
487-493, V. spec. p, 489 : « Le respect de la
dignité humaine et de l'intégrité de la personne conduit
à interdire la violence physique (avec la prohibition de la torture) et
les moyens utilisant la violence, l'astuce ou la ruse pour obtenir des preuves
».
935 V. sur le recours à la violence
physique dans le procès pénal : G. Guidicelli-Delage (dir.) et H.
Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations
de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées.
Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal,
Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 /
décembre 2003, p. 5 : « le recours fréquent à la
violence physique des organisations criminelles oblige à assurer une
protection particulière des témoins, ainsi que des personnes
impliquées dans la commission d'une infraction, qui souhaitent
collaborer avec la justice, et plus généralement des personnes
participant à la conduite du procès ».
936 V. en langue arabe : J. Mohammed
Mostapha, « Les aveux de l'accusé, aveux résultant de
l'utilisation des moyens de tromperie et de duperie », in La revue
arabe de jurisprudence et de magistrature, numéro 25, pp. 360380,
V. spec. p. 368.
937 V. en langue arabe : D. Becheraoui,
Procédure pénale, op. cit., n° 268, pp. 263-364.
Section I
Les procédés de preuves attentatoires
à la dignité humaine et à la liberté
individuelle
938
161. L'importance de l'aveu. L'aveu a eu et pendant
longtemps une haute importance
939
dans la législation pénale. Selon Mme
Philomène Nasr, l'aveu occupe toujours un rang
940
prestigieux. Au contraire, selon MM. Georges Levasseur et
Albert Chavanne « l'aveu n'est qu'un élément de
conviction parmi tant d'autres et il est laissé à la libre
appréciation des
941
juges. Ceux-ci ne sont donc jamais liés par lui
». L'aveu a longtemps été considéré
comme
942
la preuve par excellence. M. Jean Pradel considère que
l'aveu est loin d'être la reine des preuves comme il a longtemps
été considéré dans l'ancien droit parce que l'aveu
n'est pas toujours sincère ; il peut être un acte de défi,
ou un aveu dans le but de protéger le vrai
943
coupable ou émaner d'une personne intimidable. Nous
aurions tendance à penser que
944
l'importance de l'aveutrouve sa source dans le fait que l'aveu
est considéré comme le plus
court chemin pour déchiffrer le doute qui n'est pas
étranger de la preuve pénale
|
945
|
. MM.
|
227
938 V. en ce sens : H. Leclerc, « Les
limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in
Revue de science criminelle, 1992, p. 15 : « On ne peut donc
pas parler de preuve sans parler de l'aveu».
939 V. J. Magnol, « L'aveu dans la
procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C.,
Vol. 3, n°3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. 516:
« Depuis les temps les plus anciens, l'aveu de l'inculpé a
toujours été admis en preuve, il ne peut d'ailleurs en être
autrement ; mais il a été admis différemment selon les
moeurs, les coutumes et les systèmes généraux de
procédure pénale ».
940 V. en langue arabe : Ph. Nasr,
Les principes des procès pénaux. Étude
comparative et d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 390.
941 G. Levasseur et A. Chavanne, Droit
Pénal et Procédure Pénale, Sirey, Paris, 1963, p.
96.
942 C. Ambroise-Castérot, « Aveu
», in Rép. pén. Dalloz., octobre 2006, n° 2,
p. 3 : « S'il n'est plus regardé comme la preuve parfaite, en
revanche, il est toujours recherché en raison de sa faculté
certaine à rassurer l'enquêteur et le juge ».
943 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 852, p.
781.
944 V. Rapport de M. François Gorphe,
« L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C.,
Vol. 4, n° 4, Octobre-décembre 1952, pp. 776-780, V. spec. p.
777 : « L'aveu se présente, en effet, comme la preuve la plus
simple, et c'est surtout ce qui lui a donné une place
privilégiée, tant en pratique qu'en théorie. La raison
pratique est sérieuse : on comprend la première
préoccupation de tout enquêteur ou instructeur d'obtenir un aveu,
qui va immédiatement éclairer toute l'affaire et abréger
les recherches ; il ne restera plus qu'à vérifier les faits
reconnus. Voilà précisément le rôle propre de l'aveu
: c'est beaucoup moins de faire preuve que de faire avancer l'instruction
».
945 V. sur ce point : H. Leclerc, « Les
limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in
Revue de science criminelle, 1992, p. 15 : « ... il suffit de
fréquenter les audiences pour constater l'importance que revêt
l'aveu comme moyen de preuve, soit qu'il soit réitéré et
dispense le plus souvent les acteurs du procès d'une
228
Georges Levasseur, Albert Chavanne et Jean Montreuil
considèrent qu' « On a souvent reproché aux services
répressifs d'avoir pour objectif essentiel d'obtenir l'aveu du suspect,
et il est exact que ces services ont eu parfois tendance à
considérer l'enquête comme pratiquement terminée lorsque la
personne soupçonnée a avoué. Pourtant, il n'est pas
certain
946
que l'aveu corresponde à la vérité.
». Mme Haritini Matsopoulou souligne que « dans le
système français, postérieur à la période
révolutionnaire, l'aveu n'occupe plus la place de reine des preuves. Du
fait de la libre appréciation de ces dernières par le juge, par
suite du procédé de la preuve morale ou par intime conviction,
les magistrats peuvent accorder un crédit à l'aveu, comme ils
peuvent ne lui en donner aucun. C'est un élément de preuve
comme
. De surcroît, l'aveu est une preuve qui vient pour
dissiper l'obscurité qui entoure
947
un autre »
la vérité, ce qui oriente la recherche de la
preuve même d'une manière involontaire vers cette
948
preuve idéale.
§ 1. La légalité de la preuve par aveu
en matière pénale.
162. L'aveu est dominé par un double
déséquilibre. C'est ce que pense M. Jacques-Bernard
949
Herzog: « je crois que le problème de l'aveu
est dominé par un double déséquilibre ». L'aveu
comme preuve en matière pénale souffre de deux sortes ou types de
déséquilibres. Le premier déséquilibre est
fonctionnel. Il réside nettement dans le déséquilibre
entre le cadre juridique de l'aveu dans la législation qui affirme
l'absence de hiérarchie des preuves, ce qui implique que l'aveu n'est
pas la meilleure des preuves. Tandis que la fonction réelle de l'aveu
compte tenu de son application pratique affirme qu'il existe une
véritable hiérarchie des preuves, l'aveu étant
traditionnellement et jusqu'à aujourd'hui, considéré comme
la « reine
partie importante des débats, soit qu'il soit
rétracté et il devient alors le centre du débat
contradictoire, l'accusé étant sommé de s'expliquer sur
les raisons apparemment incompréhensibles qui l'ont amené
à un moment de la procédure - et le plus souvent au cours d'un
interrogatoire policier - à avouer des actes qu'il prétend ne pas
avoir commis ».
946 G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil,
B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et
procédure pénale, 14e éd., Dalloz, 2002,
n° 459, p. 184.
947 H. Matsopoulou, Les enquêtes de
police, Thèse de droit, L.G.D.J., Paris, 1996, n° 881, p.
712.
948 V. Rapport de M. François Gorphe,
« L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C.,
Vol. 4, n° 4, Octobre-décembre 1952, pp. 776-780, V. spec. p.
776-777 : « De tout temps l'on a eu tendance à s'en tenir
à l'aveu comme preuve supérieure, non seulement en vertu d'une
présomption de véridicité correspondant au cours normal
des choses, mais aussi en raison d'une position juridique : on estime que
chacun doit prendre la responsabilité de ses déclarations, et
qu'on doit répondre des actes qu'on reconnaît avoir commis
».
949 Intervention de M. Jacques-Bernard
Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in
R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, juillet-septembre 1951. pp. 516-541, V.
spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog p. 533.
des preuves »
950
. Le second déséquilibre concerne le
déséquilibre des garanties de défense
229
entre les deux phases de l'enquête préliminaire
et de l'information judiciaire (l'instruction qui est menée par un juge
d'instruction). Ce déséquilibre rend illusoires les droits de la
défense pendant la phase policière et pousse la police judiciaire
à se concentrer sur la recherche de l'aveu comme preuve au lieu de
procéder aux constatations matérielles, ce qui est
951
normalement le but de la phase policière ou
d'enquête préliminaire.
A. Notion d'aveu en procédure pénale.
163. Définition et signification de l'aveu. En
1873, M. Edouard Bonnier a parfaitement
952
défini sur quoi doit porter l'aveuen écrivant :
« L'aveu est la déclaration par laquelle une personne
reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des
conséquences
. Néanmoins, nous considérons
953
juridiques. Il doit porter sur le fait, et non sur le
droit... »
que cette définition est incomplète, car elle ne
comporte pas les conditions de validité de l'aveu pour qu'il soit
compatible avec le principe de la légalité de la preuve
pénale. Il est à noter qu'en général, la
jurisprudence ne s'est pas limitée à un seul avis concernant
la
950 V. Intervention de M. Jacques-Bernard
Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in
R.I.D.C., Vol. 3, n°3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V.
spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog p. 533 : « Le
premier de ces déséquilibres est un déséquilibre
fonctionnel : toute la législation pénale est fondée sur
l'idée que l'aveu est une preuve comme les autres, alors qu'en fait, il
faut bien le reconnaître -- j'apporte peut-être ici plus qu'un
point de vue doctrinal, une confession de praticien --, la pratique judiciaire
est orientée vers la recherche de l'aveu. Il faut reconnaître que
lorsque, moi-même, je vais au Parquet de la Seine chercher les dossiers
qu'on me donne à régler, je commence par regarder ceux dans
lesquels l'inculpé a avoué, parce que la chose est plus facile
à régler. La pratique judiciaire est fondée sur cette
recherche de l'aveu. Il y a un déséquilibre entre le cadre
juridique et la fonction réelle de l'aveu dans notre système
».
951 V. Intervention de M. Jacques-Bernard
Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in
R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, juillet-septembre 1951. pp. 516-541, V.
spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog pp. 533-534 : « le
déséquilibre entre les deux phases de l'information ; puisque les
garanties de la défense sont telles que souvent la
spontanéité de l'aveu est empêchée au cours de
l'information et puisque cet aveu est le but principal de celle-ci, on fait une
sorte de transfert et, puisqu'on ne peut pas avoir l'aveu à la fin de
l'information, on cherche à l'avoir à la première phase ;
dès lors, la phase policière, qui devrait être une phase de
pure constatation matérielle, devient une phase d'information proprement
dite. Il y a hypertrophie de la phase policière, une sorte de
délégation de la justice qui est sa négation, que ce soit
la délégation aux médecins, à laquelle nous convie,
peut-être un peu rapidement, malgré son intérêt, le
mouvement criminologique moderne ou que ce soit la délégation aux
policiers. Très souvent, on est obligé de constater, quand on
voit des dossiers, que la phase de l'information devant le juge d'instruction
confirme purement et simplement les aveux faits à la police
».
952 V. E. R. De Fresquet, De la preuve en
droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve
littérale, notes du cours de doctorat fait à la
faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p.
6 : En 1862, M. Raymond de Fresquet a défini l'aveu comme suit :
« L'aveu est la reconnaissance faite par une personne, de la
vérité d'une allégation qui lui est opposée
».
953 E. Bonnier, Traité
théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit
criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc
Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 547, p. 440.
détermination de la signification ou de la
définition de l'aveu. Dans les procès pénaux, l'aveu est
la reconnaissance du suspect, ou du prévenu lui-même de tout ou
partie d'un fait ou d'une situation constituant la preuve du bien-fondé
des accusations criminelles portées contre lui954 .
955
M. Jean Pradel définit l'aveucomme « une
déclaration par laquelle une personne reconnaît
956
en totalité ou en partie avoir commis un fait
répréhensible ». Selon Mme Coralie
Ambroise-Castérot, « l'aveu est la reconnaissance, par la
personne soupçonnée, de sa culpabilité quant
aux faits qui lui sont reprochés »
|
957
|
. D'après M. Elyas Abou-Eid, l'aveu est un acte
volontaire,
|
en vertu duquel le défendeur avoue lui-même avoir
commis les éléments constitutifs du crime
958
dont on l'accuse, ou la réalité de tout ou
partie des faits qu'on lui reproche. L'aveu a été défini
par M. Sami Al-Mulla comme une reconnaissance de l'accusé d'avoir commis
tout ou
959
partie des faits constituant l'infraction. M. Adly Khalil l'a
défini comme une déclaration faite par l'accusé dans
laquelle il reconnaît la réalité de tout ou partie des
faits constitutifs de
l'infraction commise, ce qui fait de lui la meilleure et la
plus forte des preuves
|
960
|
. Quant à M.
|
230
Farouk Al-Kilani, il le définit comme la reconnaissance
partielle ou totale de l'accusé d'avoir commis l'infraction dont il est
accusé, en avouant expressément l'accomplissement de l'acte
criminel961. Aussi, et dans le même contexte,
M. Mahmoud Najib Hossni l'a défini comme la
révélation de l'accusé, contre son propre
intérêt, d'avoir commis l'acte criminel962. Dans les
procès pénaux, l'aveu est le témoignage du
défendeur, reconnaissant, contre son propre
intérêt, une partie ou la totalité de la
vérité des faits allégués par l'adversaire 963 .
Une définition complète et satisfaisante est
présentée par M. Hosni Al-Jondi qui indique que l'aveu est le
témoignage émanant de l'accusé lui-même devant la
juridiction, reconnaissant avoir bien
954 V. en langue arabe : D. Becheraoui,
Procédure pénale, op. cit., n° 262, p. 260.
955 V. sur l'aveu : M.-J. Arcaute-Descazeaux,
L'aveu. Essai d'une contribution à la justice
négociée, Thèse de droit, Université Toulouse
I, 1998.
956 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p.
413.
957 C. Ambroise-Castérot, « Aveu
», in Rép. pén. Dalloz., octobre 2006, n° 2,
p. 3.
958 V. en langue arabe : E. Abou-Eid,
Théorie de la preuve, op .cit., n° 166, pp. 276-277.
959 V. en langue arabe : S. Sadek Al-Mulla,
L'aveu de l'accusé, 3e éd., 1968, p. 1.
960 V. en langue arabe : A. Khalil, L'aveu
de l'accusé dans la juridiction et la jurisprudence, 1987, p.17.
961 V. en langue arabe : F. Al-Kilani,
Conférences sur le Code de procédure pénale Jordanien
et en droit comparé, 3e éd., 1985, p. 253.
962 V. en langue arabe : M. Najib Hosni,
L'explication du Code de Procédure pénale, 2e
éd., p. 472.
963 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les
principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar
Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 331.
231
commis une partie ou la totalité de l'infraction
reprochée, en tant qu'auteur principal ou bien
964
en tant que complice dans l'infraction, avec une volonté
libre et consciente.
164. Proposition d'une définition plus
complète de l'aveu. Dans l'intention de compléter les
différentes définitions de l'aveu, nous proposons une nouvelle
définition de l'aveu qui prend en compte les situations et les
conditions qui accompagnent la production de l'aveu comme preuve en
matière pénale et qui doit nécessairement sans exception,
être compatible avec le principe de la légalité des preuves
pénales. Parallèlement, l'aveu doit être défini
d'une manière qui laisse apparaître et manifester que c'est une
preuve pénale qui est soumise au principe de légalité et
au respect des droits fondamentaux dans la recherche et l'administration de la
preuve pénale. Par conséquent, nous avons tendance à
définir l'aveu comme une
965 966
reconnaissance claire, explicite et précise, sans
équivoque ni ambiguïté, faite par le suspect, le
prévenu ou l'accusé, contre son propre intérêt,
affirmant avoir commis l'infraction
967
conformément à la vérité et
à la réalité, et ce, dans l'une des étapes de la
procédure pénale devant le tribunal ou devant la police
judiciaire, avec un choix personnel volontaire, sans pression, ni menace, ni
peur et ce, à condition qu'il jouisse de toutes ses capacités
mentales et
968
de discernement au moment de son aveu. Il est clairement
identifié que l'aveu qu'on peut prendre en compte comme preuve
pénale est celui qui prend appui sur la libre volonté, où
l'accusé peut faire son aveu sans lui avoir fait subir toute forme
d'influence physique ou
969
morale.
964 V. en langue arabe : H. Al-Jondi, Les
dispositions de l'action en nullité de l'aveu à la lumière
de la jurisprudence de la Cour de cassation d'Égypte, Dar Al-Nahda
Al-Arabia (maison de la renaissance arabe), Le Caire (Egypte), 1990, p. 5.
965 M. Edouard Bonnier affirme sur la
qualité que doit remplir l'aveu, que l'aveu doit être clair, pour
entraîner condamnation, il doit être précis et complet : V.
E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit
civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur
et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 553, p. 444.
966 V. en ce sens : R. De Fresquet, De la
preuve en droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve
littérale, notes du cours de doctorat fait à la
faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p.
10 : « Il faut que l'aveu soit précis ».
967 V. sur ce point : Rapport de M.
François Gorphe, « L'aveu dans la procédure pénale
» in R.I.D.C., Vol. 4, n°4, Octobre-décembre 1952,
pp. 776-780, V. spec. p. 776 : « La critique de l'aveu doit renverser
la tendance naturelle que l'on a à croire en la sincérité
de l'aveu, ou à se dispenser d'autre preuve en présence d'un
aveu. L'aveu ne doit pas y faire exception ».
968 V. en ce sens : R. De Fresquet, De la
preuve en droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve
littérale, notes du cours de doctorat fait à la
faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p.
9 : « Quant à la personne qui avoue, il faut qu'elle soit
capable de comprendre la portée de son aveu ».
969 V. Sur les ces conditions de l'aveu :
Rapport de M. Christo P. Yotis, « L'aveu dans la procédure
pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n°4,
Octobre-décembre 1952, pp. 788-789, V. spec. p. 788 : « Mais il
faut qu'il soit dépourvu,
970
165. Les différents types d'aveux. Il faut
faire la distinction entre les différents types d'aveux. Certains fixent
un cadre spécifique à la définition de l'aveu. En effet,
d'après leur point de vue, l'aveu doit être nécessairement
fait devant une instance judiciaire habilitée à recevoir des
dépositions, faute de quoi, il est considéré comme de
simples déclarations de l'accusé pendant le déroulement de
l'enquête. Certains auteurs font la distinction entre deux
, émis au cours du procès et devant le juge et
l'aveu
971
types d'aveux : l'aveu judiciaire
972
extrajudiciaire, qui est fait en dehors du procès en
question, par écrit, par un officier public
ou sous seing privé
|
973
|
. Selon M. Edouard Bonnier, l'aveu extrajudiciaire est celui
qui n'a pas
|
lieu en face de la justice dans le cours d'un procès
|
974
|
. Quant à la loi libanaise, et en ce qui
|
232
concerne l'aveu fait devant la police judiciaire, l'article 47
du Code de procédure pénale libanais indique que hors les cas
d'infraction flagrante, l'agent de police judiciaire ne peut
975 976
procéder qu'à des auditions des prévenussous
peine de nullité. D'autre part, l'article 76
977
du même Codea signalé au juge d'instruction
plusieurs devoirs envers le défendeur lors de
en pratique, de tout soupçon de contrainte physique
ou morale de l'inculpé de la part des autorités chargées
de dépister la vérité dans les affaires pénales
».
970 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les
principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar
Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 336.
971 V. Aveu judiciaire ou extrajudiciaire :
C. Ambroise-Castérot, « Aveu », in Rép. pén.
Dalloz., octobre 2006, n° 3, p. 3 : « L'aveu peut être
judiciaire, lorsqu'il est fait directement devant une autorité
chargée de l'enquête ou du jugement (officier de police judiciaire
lors d'une enquête de flagrance ou lors d'une enquête
préliminaire, juge d'instruction, procureur, magistrats du
siège...). Il peut aussi être extrajudiciaire. Cet aveu est alors
indirect. Ce sera le cas, par exemple, s'il est rapporté par un
témoignage, s'il figure dans un document écrit, etc.
».
972 V. E. Bonnier, Traité
théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit
criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc
Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 559, pp. 456-457 : «
L'aveu extrajudiciaire, en le supposant légalement prouvé, n'est
pas au fond d'une autre nature que l'aveu judiciaire. S'il est positif et
précis, en quelque lieu qu'il ait été fait, il doit
être décisif contre la partie qui s'est condamnée par sa
propre bouche ».
973 V. en langue arabe : Ph. Nasr,
Les principes des procès pénaux.
Étude comparative et d'analyse, Sader Éditeurs,
Beyrouth, p. 390.
974 E. Bonnier, Traité
théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit
criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc
Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 557, p. 455
975 En droit libanais, hors le cas
d'infraction flagrante, l'officier de police judiciaire n'a pas le droit de
procéder à l'interrogatoire du prévenu.
976 L'article du 47 CPP libanais dispose:
« En leur qualité d'auxiliaires de justice, les officiers de
police judiciaire exécutent les missions que celui-ci leur confie. Ils
enquêtent sur les infractions non flagrantes, ... ainsi que du recueil
des dépositions des témoins sans les soumettre au serment et des
déclarations de suspects et de personnes visées par des plaintes.
Lorsque ces personnes refusent de faire des déclarations ou choisissent
de garder le silence, mention en est portée sur le procès-verbal.
Les officiers de police judiciaire ne peuvent dans ce cas les contraindre
à parler ou les interroger, sous peine de nullité des
déclarations recueillies».
977 L'article du 76 CPP libanais dispose:
« Lors de la première comparution du défendeur devant
lui, le juge d'instruction l'informe de l'infraction qui lui est imputée
en lui en résumant les faits et en lui présentant les
sa première comparution devant le juge d'instruction
à peine de nullité de l'interrogatoire
978
comme moyen de preuve. Mme Philomène Nassr
considère qu'on peut conclure des deux textes précités que
l'aveu ne peut pas être invoqué comme un élément de
preuve en dehors des
exigences légales
|
979
|
. Cependant Mme Philomène Nassr reconnaît que cet
aveu pourrait garder
|
un impact indirect sur la conviction du juge, sur la conduite de
l'enquête et sur le déroulement
du procès
|
980
|
. Le fait est que, dans les affaires pénales, il n'est
pas important de distinguer
|
entre les types d'aveux, tant que ces aveux ont
été obtenus pendant les étapes de la procédure
pénale, en l'occurrence l'enquête préliminaire menée
par la police judiciaire, l'interrogatoire devant le juge d'instruction, et
l'enquête finale (phase de jugement). Dans de tels cas, on peut utiliser
le terme « aveu judiciaire » si l'aveu est
délivré par le suspect ou le prévenu devant le juge
pénal, ou devant l'officier de police judiciaire compétent dans
le cadre d'une enquête
judiciaire prévue par la loi981 . Toutefois,
on ne peut prendre cet aveu en considération qu'en
vertu des conditions de validité
|
982
|
imposées par la jurisprudence, de telle sorte que la
valeur
|
233
probatoire de l'aveu soit de la seule compétence de
l'appréciation de l'intime conviction du juge du fond983. En
droit français, selon M. Jean Pradel, l'aveu
extrajudiciaire984 est fait en
charges et suspicions qui pèsent contre lui afin
qu'il puisse les réfuter et se défendre. Le juge d'instruction
n'est pas tenu de lui fournir la qualification juridique des faits. Le juge
d'instruction informe le défendeur de ses droits, notamment celui de se
faire assister par un avocat unique pendant l'interrogatoire. L'omission par le
juge d'instruction d'informer le défendeur de l'infraction qui lui est
imputée conformément aux dispositions ci-dessus ou de l'informer
de son droit de se faire assister par un avocat emporte nullité de
l'interrogatoire en tant que preuve à charge ».
978 Ph. Nasr, Les principes des
procès pénaux. Étude comparative et d'analyse,
p. 394.
979 Ph. Nasr, Les principes des
procès pénaux. Étude comparative et d'analyse,
p. 394.
980 Ph. Nasr, Les principes des
procès pénaux. Étude comparative et d'analyse,
p. 394.
981 V. voire en opposition : Rapport de M.
Alfredo Molinario, « L'aveu dans la procédure pénale »
in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, octobre-décembre 1952, pp.
769-776, V. spec. p. 771 : « Etant admis que l'aveu, pour avoir la
valeur de preuve, doit avoir été fait devant le juge
d'instruction, au cours d'un acte de procédure réalisé
selon les règles légales qui le régissent, tout le
problème réside à établir à quelles
règles l'interrogatoire devra être assujetti, pour que soient
sauve gardés, à la fois, les droits de la défense sociale
et ceux de la liberté de défense de l'inculpé »
;V. en même sens : J. Pradel, Procédure pénale,
17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p. 413 : «
Quant à l'aveu judiciaire, il est passé devant un magistrat
(notamment un juge d'instruction) ou devant un officier de police judiciaire
».
982 V. E. Bonnier, Traité
théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit
criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc
Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 559, p. 457 : « L'aveu
extrajudiciaire, en effet, est rarement bien complet et bien net. Les paroles
qui échappent dans une conversation ne sont pas pesées par celui
qui les prononce, comme celles qui sont proférées en justice dans
un interrogatoire solennel. Il faudra donc examiner avec soin dans quelles
circonstances une partie aura fait cette reconnaissance, dont on cherche
à se prévaloir contre elle ».
983 V. en langue arabe : D. Becheraoui,
Procédure pénale, op. cit., n° 273, p. 266.
984 V. M. Franchimont, A. Jacobs et A.
Masset, Manuel de procédure pénale, 3e
éd., Larcier, Bruxelles, 2009, p. 1059 : « L'aveu peut
être judiciaire ou extrajudiciaire. Dans le premier cas, il est fait
devant le juge, dans le second, il n'est connu qu'indirectement par le juge
(procès-verbal, témoignages, confessions écrites, etc...)
».
234
dehors de la présence d'un juge ou d'un officier de police
judiciaire et l'on peut citer les
985
lettres par lesquelles une personne suspecte a reconnu sa
culpabilité. De tels aveux selon M.
986
Jean Pradel, ont la nature d'indices.
166. Les formes de l'aveu. D'après le classement
de la doctrine pénale, il existe plusieurs formes d'aveux : l'aveu
tacite, qui découle de la prise de l'accusé en flagrant
délit, c'est en général la constatation d'un délit
commis sous les yeux des officiers de police. C'est l'aveu
direct, qui résulte de l'admission du délit
commis. On peut distinguer aussi987
|
988
l'aveu simple
|
,
|
|
dans le cas où l'accusé avoue sans
détour uniquement l'incident criminel qui est la matière du
procès. L'aveu est dit qualifié lorsqu'à la reconnaissance
des faits s'ajoutent des actes ou des circonstances invoqués en faveur
de celui qui avoue afin d'avoir des circonstances atténuantes ou pour
ôter à l'acte son caractère criminel, comme celui qui admet
avoir tué une personne,
989
mais qui invoque la légitime défense.
167. La règle de la divisibilité de
l'aveu. En matière pénale, l'aveu est par essence
990
divisible, ce qui implique que l'aveu peut n'être que
partiellement efficace. En ce qui touche
985 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p.
413.
986 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p.
413.
987 Certains auteurs font une distinction
entre aveu spontané et aveu provoqué : V. C. Robinson et A. Eser,
« Le droit du prévenu au silence et son droit à être
assisté par un défenseur au cours de la phase
préjudiciaire en Allemagne et aux États-Unis d'Amérique
», in R.S.C., n° 3, juillet-septembre 1967, pp. 567-618, V.
spec. p. 589 :« Dans la plupart des affaires qui nous
intéressent, le prévenu a avoué au cours de
l'interrogatoire fait par la police. Objection est faite au procès sur
l'argument que les aveux n'étaient pas « spontanés»,
c'est-à-dire que le prévenu ne les avait pas faits de son plein
gré » ; V. Rapport de M. Alfredo Molinario, « L'aveu dans
la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n°
4, octobre-décembre 1952, pp. 769-776, V. spec. p. 770 : «
Même dans les cas où l'aveu se produit au cours d'un
interrogatoire d'office et par prescription de la loi par le magistrat
instructeur, celui-ci, à aucun moment, ne peut employer des menaces ou
des promesses tendant à obtenir l'aveu de la part de celui qui est
interrogé sur son intervention dans le fait qui donne matière au
procès. Il ne peut pas davantage lui poser des questions insidieuses
ayant le même but, ni utiliser des ruses, tromperies ou machinations
d'aucune sorte. Il est donc évident que, ces dispositions légales
s'accomplissant, l'expression aveu provoqué devient impropre
».
988 V. Rapport de M. Alfredo Molinario,
« L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C.,
Vol. 4, n° 4, octobre-décembre 1952, pp. 769-776, V. spec. p.
769 : « Il est aussi parlé dans notre droit argentin d'aveu
simple et d'aveu qualifié. Pour le premier, le suspect reconnaît
sans ambages son intervention dans le fait délictueux sur lequel on
enquête et, pour le second, cette reconnaissance est accompagnée
de manifestations qu'il est important d'invoquer en faveur de celui qui avoue,
causes de justification, excuses absolutoires ou circonstances
atténuantes ».
989 V. en langue arabe : Ph. Nasr,
Les principes des procès pénaux. Étude
comparative et d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 391.
990 V. J. Magnol, « L'aveu dans la
procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C.,
Vol. 3, n° 3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. p. 518 :
« L'aveu n'est pas davantage indivisible, à la
différence encore des matières civiles ».
235
l'indivisibilité de l'aveu, le motif principal sur lequel
elle est fondée en matière civile n'existe
991
plus ici en matière criminelle. MM Pierre Bouzat et Jean
Pinatel expliquent que la règle de la divisibilité de l'aveu en
matière pénale, qui n'est pas admise traditionnellement en
matière civile, est la conséquence directe du principe de la
liberté dans l'appréciation des preuves
selon l'intime conviction du juge pénal
992
. Ainsi peut-on dire que tous les types d'aveux en
993
matière pénale sont divisibles, à la
différence de la matière civile , et ce, en se basant sur le
994
principe de la conviction personnelle du juge. Dans le cas
où le défendeur a avoué son crime, mais en même
temps a ajouté des conditions qui pourraient limiter sa
responsabilité ou l'exclure, le juge doit examiner toutes les parties de
l'aveu et se baser uniquement sur ce qui
l'a convaincu 995 . Il peut ainsi prendre en
considération la première partie et négliger la
deuxième, s'il a estimé que l'enquête qu'il avait
menée a révélé la non-exactitude des faits
996
négligés . M. Joseph Magnol résume
l'application pratique de la notion de la divisibilité de l'aveu dans le
domaine de la preuve pénale en soulignant que le juge pénal a le
droit de ne retenir qu'une seule partie spécifique des
déclarations de l'inculpé, celle par laquelle il reconnaît
tel ou tel fait, d'où découlera sa culpabilité, et rejeter
les autres qui tendaient à
997
démontrer son irresponsabilité.
991 E. Bonnier, Traité
théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit
criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc
Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 568, p. 469.
992 P. Bouzat et J. Pinatel, Traité
de droit pénal et de criminologie, Dalloz, 1963, Vol. 2, p. 945.
993 V. sur la divisibilité de l'aveu
en matière pénale : R. Merle et A. Vitu, Traité de
droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris,
2001, tome 2 Procédure pénale, n° 189, p. 238 :
« A la différence de l'aveu civil, l'aveu fait en
matière pénale est divisible: il est en effet du pouvoir du juge
criminel, en vertu de son intime conviction, d'apprécier l'aveu dans
chacune de ses parties et de ne retenir que ce qui lui paraît
probant.».
994 V. en langue arabe : Ph. Nasr, Les
principes des procès pénaux, étude comparative et
d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 391.
995 V. en même sens : H. de Page,
Traité élémentaire de droit civil belge: principes,
doctrine, jurisprudence, E. Bruylant, Bruxelles, 1967, Vol. 3, p. 1101 :
« La divisibilité de l'aveu au pénal a tout simplement
cette portée pratique que le juge peut se fonder sur un des
éléments de l'aveu, joint aux autres circonstances de la cause,
pour asseoir sa conviction ».
996 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les
principes des procès pénaux. Etude comparative, Dar Al
Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 336.
997 V. J. Magnol, « L'aveu dans la
procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C.,
Vol. 3, n° 3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. p. 518 :
M. Joseph Magnol cite l'exemple classique concernant la divisibilité de
l'aveu : « l'accusé reconnaît, avoir donné la mort
à la victime, mais il déclare en même temps qu'il avait
été attaqué et qu'il se trouvait en état de
légitime défense. Le juge pourra retenir la partie de la
déclaration où l'accusé reconnaît avoir porté
les coups à la victime qui ont provoqué sa mort et rejeter
l'allégation de la légitime défense ».
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