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La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanais


par Ali Ataya
Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013
  

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Chapitre II

Preuve entachée d'une illégalité matérielle

159. Mode de preuve illicite. Le principe de la légalité dans l'administration des preuves en matière pénale implique l'obligation et le devoir de respecter les principes généraux du droit et les principes fondamentaux des droits de l'homme. Les principes de base des droits de l'homme, et particulièrement le respect de la dignité de la personne humaine fait partie

intégrante du principe de la légalité de la preuve pénale

930

. Il n'est pas permis d'adopter des

modes de preuve qui ne respectent pas l'individu, ses droits et sa dignité 931 . Il est donc inadmissible et formellement interdit d'arracher des aveux sous la violence, la torture ou la contrainte morale, ou de soumettre l'accusé à l'hypnose, ou encore lui administrer des produits dans le but d'affaiblir sa volonté et réveiller son subconscient, afin qu'il apporte son

témoignage sans conscience ni réflexion 932 . Il est interdit d'user de procédés de violence physique à l'encontre des suspects, inculpés ou témoins. Sont également prohibées les méthodes qui impliquent une diminution ou une suppression du contrôle de soi-même comme

933

la narco-analyse.

160. Respect de la dignité humaine et violence physique. Le respect de la dignité humaine

934

exige l'interdiction absolue du recours à la violence physique sous toutes ses formesafin

930 V. sur l'effet de la Convention européenne des droits de l'homme sur le respect de la dignité humaine : B. Maurer, Le principe de respect de la dignité humaine et la Convention européenne des droits de l'homme, Editeur : La documentation française, 1999.

931 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, 1993, p. 326 ; V. en même sens : C. Ambroise-Casterot, La procédure pénale, 2e éd., Gualino éditeur, Paris, 2009, n° 246-1, p. 173.

932 V. en ce sens : J.-Y. Chevallier, « La preuve en procédure pénale comparée (Rapport de synthèse pour les pays d'Europe continentale) », in Revue internationale de droit pénal, 1er-2e trimestre1992, vol. 63, Actes du Séminaire International organisé par l'Institut Supérieur International de Sciences Criminelles à Syracuse (Italie) du 20 au 25 janvier 1992, pp.43-55, V. spec. p. 53 : « Quand il s'agit d'apprécier la preuve, tout le monde sait qu'il y a deux systèmes applicables : ou bien le juge devant qui une preuve prévue par la loi est régulièrement apportée est lié par cette preuve et doit automatiquement considérer que le suspect est coupable et entrer en condamnation : système de la légalité des preuves ; ou bien ce même juge apprécie librement les preuves qui sont apportées devant lui : système de l'intime conviction ».

933 V. sur ce point : P. Bolze, Le droit à la preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit, 2010, Université Nancy 2, p. 366 : « L'utilisation de l'hypnose et de la narco-analyse, s'attachent à supprimer toute volonté de masquer la vérité dans le discours en provoquant un état d'altération de la conscience ».

934 V. sur ce point : M. D.-Castelli, « La présentation de la preuve et la sauvegarde des libertés individuelles », 3e colloque du Département des droits de l'homme - Université Catholique de Louvain - Centre d'Études européennes, Bruxelles, Établissements Émile Bruylant, 1977, in Les Cahiers de droit, Vol. 21, n° 2, 1980, p.

d'obtenir l'aveu ou des éléments de preuves

935

. Pour certains, l'influence matérielle ayant pour

but d'obliger ou de faire passer l'accusé aux aveux, peut se manifester par plusieurs cas ou moyens, dont les plus importants sont : la violence (contrainte physique), fatiguer l'accusé par

un long interrogatoire, l'hypnose et l'utilisation de narcotiques

936

. Il est interdit au juge et aux

226

officiers de police judiciaire qui ont la charge d'interroger le suspect ou l'accusé, de recourir aux méthodes illégales pendant l'interrogatoire, comme l'utilisation de la violence, de la coercition physique, des moyens de tromperie et de duperie ou des moyens techniques (comme l'usage du polygraphe, de l'hypnose ou d'autres moyens), dans le but de lui extraire

937

des aveux et affaiblir sa volonté et sa conscience. Donc il y a une nécessité d'encadrer l'administration de la preuve pénale qui exige un profond respect pour la protection de la dignité humaine. Nous allons aborder la question de la preuve qui est entachée d'une illégalité portant atteinte à la dignité humaine et à la liberté individuelle dans la première section, et plus particulièrement la question de la légalité des aveux en matière pénale. Une première section porte sur les procédés de preuves qui sont attentatoires à la dignité humaine et à la liberté individuelle. La deuxième section va aborder la question de la légalité des procédés scientifiques qui visent à la recherche des preuves. La deuxième section porte sur la question de la légalité des procédés scientifiques.

487-493, V. spec. p, 489 : « Le respect de la dignité humaine et de l'intégrité de la personne conduit à interdire la violence physique (avec la prohibition de la torture) et les moyens utilisant la violence, l'astuce ou la ruse pour obtenir des preuves ».

935 V. sur le recours à la violence physique dans le procès pénal : G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Synthèse », in Les transformations de l'administration de la preuve pénale : perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni, Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 / décembre 2003, p. 5 : « le recours fréquent à la violence physique des organisations criminelles oblige à assurer une protection particulière des témoins, ainsi que des personnes impliquées dans la commission d'une infraction, qui souhaitent collaborer avec la justice, et plus généralement des personnes participant à la conduite du procès ».

936 V. en langue arabe : J. Mohammed Mostapha, « Les aveux de l'accusé, aveux résultant de l'utilisation des moyens de tromperie et de duperie », in La revue arabe de jurisprudence et de magistrature, numéro 25, pp. 360380, V. spec. p. 368.

937 V. en langue arabe : D. Becheraoui, Procédure pénale, op. cit., n° 268, pp. 263-364.

Section I

Les procédés de preuves attentatoires à la dignité humaine et à la liberté individuelle

938

161. L'importance de l'aveu. L'aveu a eu et pendant longtemps une haute importance

939

dans la législation pénale. Selon Mme Philomène Nasr, l'aveu occupe toujours un rang

940

prestigieux. Au contraire, selon MM. Georges Levasseur et Albert Chavanne « l'aveu n'est qu'un élément de conviction parmi tant d'autres et il est laissé à la libre appréciation des

941

juges. Ceux-ci ne sont donc jamais liés par lui ». L'aveu a longtemps été considéré comme

942

la preuve par excellence. M. Jean Pradel considère que l'aveu est loin d'être la reine des preuves comme il a longtemps été considéré dans l'ancien droit parce que l'aveu n'est pas toujours sincère ; il peut être un acte de défi, ou un aveu dans le but de protéger le vrai

943

coupable ou émaner d'une personne intimidable. Nous aurions tendance à penser que

944

l'importance de l'aveutrouve sa source dans le fait que l'aveu est considéré comme le plus

court chemin pour déchiffrer le doute qui n'est pas étranger de la preuve pénale

945

. MM.

227

938 V. en ce sens : H. Leclerc, « Les limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in Revue de science criminelle, 1992, p. 15 : « On ne peut donc pas parler de preuve sans parler de l'aveu».

939 V. J. Magnol, « L'aveu dans la procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C., Vol. 3, n°3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. 516: « Depuis les temps les plus anciens, l'aveu de l'inculpé a toujours été admis en preuve, il ne peut d'ailleurs en être autrement ; mais il a été admis différemment selon les moeurs, les coutumes et les systèmes généraux de procédure pénale ».

940 V. en langue arabe : Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 390.

941 G. Levasseur et A. Chavanne, Droit Pénal et Procédure Pénale, Sirey, Paris, 1963, p. 96.

942 C. Ambroise-Castérot, « Aveu », in Rép. pén. Dalloz., octobre 2006, n° 2, p. 3 : « S'il n'est plus regardé comme la preuve parfaite, en revanche, il est toujours recherché en raison de sa faculté certaine à rassurer l'enquêteur et le juge ».

943 J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 852, p. 781.

944 V. Rapport de M. François Gorphe, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, Octobre-décembre 1952, pp. 776-780, V. spec. p. 777 : « L'aveu se présente, en effet, comme la preuve la plus simple, et c'est surtout ce qui lui a donné une place privilégiée, tant en pratique qu'en théorie. La raison pratique est sérieuse : on comprend la première préoccupation de tout enquêteur ou instructeur d'obtenir un aveu, qui va immédiatement éclairer toute l'affaire et abréger les recherches ; il ne restera plus qu'à vérifier les faits reconnus. Voilà précisément le rôle propre de l'aveu : c'est beaucoup moins de faire preuve que de faire avancer l'instruction ».

945 V. sur ce point : H. Leclerc, « Les limites de la liberté de la preuve. Aspects actuels en France », in Revue de science criminelle, 1992, p. 15 : « ... il suffit de fréquenter les audiences pour constater l'importance que revêt l'aveu comme moyen de preuve, soit qu'il soit réitéré et dispense le plus souvent les acteurs du procès d'une

228

Georges Levasseur, Albert Chavanne et Jean Montreuil considèrent qu' « On a souvent reproché aux services répressifs d'avoir pour objectif essentiel d'obtenir l'aveu du suspect, et il est exact que ces services ont eu parfois tendance à considérer l'enquête comme pratiquement terminée lorsque la personne soupçonnée a avoué. Pourtant, il n'est pas certain

946

que l'aveu corresponde à la vérité. ». Mme Haritini Matsopoulou souligne que « dans le système français, postérieur à la période révolutionnaire, l'aveu n'occupe plus la place de reine des preuves. Du fait de la libre appréciation de ces dernières par le juge, par suite du procédé de la preuve morale ou par intime conviction, les magistrats peuvent accorder un crédit à l'aveu, comme ils peuvent ne lui en donner aucun. C'est un élément de preuve comme

. De surcroît, l'aveu est une preuve qui vient pour dissiper l'obscurité qui entoure

947

un autre »

la vérité, ce qui oriente la recherche de la preuve même d'une manière involontaire vers cette

948

preuve idéale.

§ 1. La légalité de la preuve par aveu en matière pénale.

162. L'aveu est dominé par un double déséquilibre. C'est ce que pense M. Jacques-Bernard

949

Herzog: « je crois que le problème de l'aveu est dominé par un double déséquilibre ». L'aveu comme preuve en matière pénale souffre de deux sortes ou types de déséquilibres. Le premier déséquilibre est fonctionnel. Il réside nettement dans le déséquilibre entre le cadre juridique de l'aveu dans la législation qui affirme l'absence de hiérarchie des preuves, ce qui implique que l'aveu n'est pas la meilleure des preuves. Tandis que la fonction réelle de l'aveu compte tenu de son application pratique affirme qu'il existe une véritable hiérarchie des preuves, l'aveu étant traditionnellement et jusqu'à aujourd'hui, considéré comme la « reine

partie importante des débats, soit qu'il soit rétracté et il devient alors le centre du débat contradictoire, l'accusé étant sommé de s'expliquer sur les raisons apparemment incompréhensibles qui l'ont amené à un moment de la procédure - et le plus souvent au cours d'un interrogatoire policier - à avouer des actes qu'il prétend ne pas avoir commis ».

946 G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil, B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et procédure pénale, 14e éd., Dalloz, 2002, n° 459, p. 184.

947 H. Matsopoulou, Les enquêtes de police, Thèse de droit, L.G.D.J., Paris, 1996, n° 881, p. 712.

948 V. Rapport de M. François Gorphe, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, Octobre-décembre 1952, pp. 776-780, V. spec. p. 776-777 : « De tout temps l'on a eu tendance à s'en tenir à l'aveu comme preuve supérieure, non seulement en vertu d'une présomption de véridicité correspondant au cours normal des choses, mais aussi en raison d'une position juridique : on estime que chacun doit prendre la responsabilité de ses déclarations, et qu'on doit répondre des actes qu'on reconnaît avoir commis ».

949 Intervention de M. Jacques-Bernard Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, juillet-septembre 1951. pp. 516-541, V. spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog p. 533.

des preuves »

950

. Le second déséquilibre concerne le déséquilibre des garanties de défense

229

entre les deux phases de l'enquête préliminaire et de l'information judiciaire (l'instruction qui est menée par un juge d'instruction). Ce déséquilibre rend illusoires les droits de la défense pendant la phase policière et pousse la police judiciaire à se concentrer sur la recherche de l'aveu comme preuve au lieu de procéder aux constatations matérielles, ce qui est

951

normalement le but de la phase policière ou d'enquête préliminaire.

A. Notion d'aveu en procédure pénale.

163. Définition et signification de l'aveu. En 1873, M. Edouard Bonnier a parfaitement

952

défini sur quoi doit porter l'aveuen écrivant : « L'aveu est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences

. Néanmoins, nous considérons

953

juridiques. Il doit porter sur le fait, et non sur le droit... »

que cette définition est incomplète, car elle ne comporte pas les conditions de validité de l'aveu pour qu'il soit compatible avec le principe de la légalité de la preuve pénale. Il est à noter qu'en général, la jurisprudence ne s'est pas limitée à un seul avis concernant la

950 V. Intervention de M. Jacques-Bernard Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in R.I.D.C., Vol. 3, n°3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog p. 533 : « Le premier de ces déséquilibres est un déséquilibre fonctionnel : toute la législation pénale est fondée sur l'idée que l'aveu est une preuve comme les autres, alors qu'en fait, il faut bien le reconnaître -- j'apporte peut-être ici plus qu'un point de vue doctrinal, une confession de praticien --, la pratique judiciaire est orientée vers la recherche de l'aveu. Il faut reconnaître que lorsque, moi-même, je vais au Parquet de la Seine chercher les dossiers qu'on me donne à régler, je commence par regarder ceux dans lesquels l'inculpé a avoué, parce que la chose est plus facile à régler. La pratique judiciaire est fondée sur cette recherche de l'aveu. Il y a un déséquilibre entre le cadre juridique et la fonction réelle de l'aveu dans notre système ».

951 V. Intervention de M. Jacques-Bernard Herzog, « L'aveu dans la procédure pénale », in R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, juillet-septembre 1951. pp. 516-541, V. spec. l'intervention de M. Jacques-Bernard Herzog pp. 533-534 : « le déséquilibre entre les deux phases de l'information ; puisque les garanties de la défense sont telles que souvent la spontanéité de l'aveu est empêchée au cours de l'information et puisque cet aveu est le but principal de celle-ci, on fait une sorte de transfert et, puisqu'on ne peut pas avoir l'aveu à la fin de l'information, on cherche à l'avoir à la première phase ; dès lors, la phase policière, qui devrait être une phase de pure constatation matérielle, devient une phase d'information proprement dite. Il y a hypertrophie de la phase policière, une sorte de délégation de la justice qui est sa négation, que ce soit la délégation aux médecins, à laquelle nous convie, peut-être un peu rapidement, malgré son intérêt, le mouvement criminologique moderne ou que ce soit la délégation aux policiers. Très souvent, on est obligé de constater, quand on voit des dossiers, que la phase de l'information devant le juge d'instruction confirme purement et simplement les aveux faits à la police ».

952 V. E. R. De Fresquet, De la preuve en droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve littérale, notes du cours de doctorat fait à la faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p. 6 : En 1862, M. Raymond de Fresquet a défini l'aveu comme suit : « L'aveu est la reconnaissance faite par une personne, de la vérité d'une allégation qui lui est opposée ».

953 E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 547, p. 440.

détermination de la signification ou de la définition de l'aveu. Dans les procès pénaux, l'aveu est la reconnaissance du suspect, ou du prévenu lui-même de tout ou partie d'un fait ou d'une situation constituant la preuve du bien-fondé des accusations criminelles portées contre lui954 .

955

M. Jean Pradel définit l'aveucomme « une déclaration par laquelle une personne reconnaît

956

en totalité ou en partie avoir commis un fait répréhensible ». Selon Mme Coralie Ambroise-Castérot, « l'aveu est la reconnaissance, par la personne soupçonnée, de sa culpabilité quant

aux faits qui lui sont reprochés »

957

. D'après M. Elyas Abou-Eid, l'aveu est un acte volontaire,

en vertu duquel le défendeur avoue lui-même avoir commis les éléments constitutifs du crime

958

dont on l'accuse, ou la réalité de tout ou partie des faits qu'on lui reproche. L'aveu a été défini par M. Sami Al-Mulla comme une reconnaissance de l'accusé d'avoir commis tout ou

959

partie des faits constituant l'infraction. M. Adly Khalil l'a défini comme une déclaration faite par l'accusé dans laquelle il reconnaît la réalité de tout ou partie des faits constitutifs de

l'infraction commise, ce qui fait de lui la meilleure et la plus forte des preuves

960

. Quant à M.

230

Farouk Al-Kilani, il le définit comme la reconnaissance partielle ou totale de l'accusé d'avoir commis l'infraction dont il est accusé, en avouant expressément l'accomplissement de l'acte

criminel961. Aussi, et dans le même contexte, M. Mahmoud Najib Hossni l'a défini comme la

révélation de l'accusé, contre son propre intérêt, d'avoir commis l'acte criminel962. Dans les procès pénaux, l'aveu est le témoignage du défendeur, reconnaissant, contre son propre

intérêt, une partie ou la totalité de la vérité des faits allégués par l'adversaire 963 . Une définition complète et satisfaisante est présentée par M. Hosni Al-Jondi qui indique que l'aveu est le témoignage émanant de l'accusé lui-même devant la juridiction, reconnaissant avoir bien

954 V. en langue arabe : D. Becheraoui, Procédure pénale, op. cit., n° 262, p. 260.

955 V. sur l'aveu : M.-J. Arcaute-Descazeaux, L'aveu. Essai d'une contribution à la justice négociée, Thèse de droit, Université Toulouse I, 1998.

956 J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p. 413.

957 C. Ambroise-Castérot, « Aveu », in Rép. pén. Dalloz., octobre 2006, n° 2, p. 3.

958 V. en langue arabe : E. Abou-Eid, Théorie de la preuve, op .cit., n° 166, pp. 276-277.

959 V. en langue arabe : S. Sadek Al-Mulla, L'aveu de l'accusé, 3e éd., 1968, p. 1.

960 V. en langue arabe : A. Khalil, L'aveu de l'accusé dans la juridiction et la jurisprudence, 1987, p.17.

961 V. en langue arabe : F. Al-Kilani, Conférences sur le Code de procédure pénale Jordanien et en droit comparé, 3e éd., 1985, p. 253.

962 V. en langue arabe : M. Najib Hosni, L'explication du Code de Procédure pénale, 2e éd., p. 472.

963 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 331.

231

commis une partie ou la totalité de l'infraction reprochée, en tant qu'auteur principal ou bien

964

en tant que complice dans l'infraction, avec une volonté libre et consciente.

164. Proposition d'une définition plus complète de l'aveu. Dans l'intention de compléter les différentes définitions de l'aveu, nous proposons une nouvelle définition de l'aveu qui prend en compte les situations et les conditions qui accompagnent la production de l'aveu comme preuve en matière pénale et qui doit nécessairement sans exception, être compatible avec le principe de la légalité des preuves pénales. Parallèlement, l'aveu doit être défini d'une manière qui laisse apparaître et manifester que c'est une preuve pénale qui est soumise au principe de légalité et au respect des droits fondamentaux dans la recherche et l'administration de la preuve pénale. Par conséquent, nous avons tendance à définir l'aveu comme une

965 966

reconnaissance claire, explicite et précise, sans équivoque ni ambiguïté, faite par le suspect, le prévenu ou l'accusé, contre son propre intérêt, affirmant avoir commis l'infraction

967

conformément à la vérité et à la réalité, et ce, dans l'une des étapes de la procédure pénale devant le tribunal ou devant la police judiciaire, avec un choix personnel volontaire, sans pression, ni menace, ni peur et ce, à condition qu'il jouisse de toutes ses capacités mentales et

968

de discernement au moment de son aveu. Il est clairement identifié que l'aveu qu'on peut prendre en compte comme preuve pénale est celui qui prend appui sur la libre volonté, où l'accusé peut faire son aveu sans lui avoir fait subir toute forme d'influence physique ou

969

morale.

964 V. en langue arabe : H. Al-Jondi, Les dispositions de l'action en nullité de l'aveu à la lumière de la jurisprudence de la Cour de cassation d'Égypte, Dar Al-Nahda Al-Arabia (maison de la renaissance arabe), Le Caire (Egypte), 1990, p. 5.

965 M. Edouard Bonnier affirme sur la qualité que doit remplir l'aveu, que l'aveu doit être clair, pour entraîner condamnation, il doit être précis et complet : V. E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 553, p. 444.

966 V. en ce sens : R. De Fresquet, De la preuve en droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve littérale, notes du cours de doctorat fait à la faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p. 10 : « Il faut que l'aveu soit précis ».

967 V. sur ce point : Rapport de M. François Gorphe, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n°4, Octobre-décembre 1952, pp. 776-780, V. spec. p. 776 : « La critique de l'aveu doit renverser la tendance naturelle que l'on a à croire en la sincérité de l'aveu, ou à se dispenser d'autre preuve en présence d'un aveu. L'aveu ne doit pas y faire exception ».

968 V. en ce sens : R. De Fresquet, De la preuve en droit Romain. De l'aveu. De la preuve testimoniale. De la preuve littérale, notes du cours de doctorat fait à la faculté d'Aix en 1862, Achille Makaire Imprimeur-Libraire, Aix, 1862, p. 9 : « Quant à la personne qui avoue, il faut qu'elle soit capable de comprendre la portée de son aveu ».

969 V. Sur les ces conditions de l'aveu : Rapport de M. Christo P. Yotis, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n°4, Octobre-décembre 1952, pp. 788-789, V. spec. p. 788 : « Mais il faut qu'il soit dépourvu,

970

165. Les différents types d'aveux. Il faut faire la distinction entre les différents types d'aveux. Certains fixent un cadre spécifique à la définition de l'aveu. En effet, d'après leur point de vue, l'aveu doit être nécessairement fait devant une instance judiciaire habilitée à recevoir des dépositions, faute de quoi, il est considéré comme de simples déclarations de l'accusé pendant le déroulement de l'enquête. Certains auteurs font la distinction entre deux

, émis au cours du procès et devant le juge et l'aveu

971

types d'aveux : l'aveu judiciaire

972

extrajudiciaire, qui est fait en dehors du procès en question, par écrit, par un officier public

ou sous seing privé

973

. Selon M. Edouard Bonnier, l'aveu extrajudiciaire est celui qui n'a pas

lieu en face de la justice dans le cours d'un procès

974

. Quant à la loi libanaise, et en ce qui

232

concerne l'aveu fait devant la police judiciaire, l'article 47 du Code de procédure pénale libanais indique que hors les cas d'infraction flagrante, l'agent de police judiciaire ne peut

975 976

procéder qu'à des auditions des prévenussous peine de nullité. D'autre part, l'article 76

977

du même Codea signalé au juge d'instruction plusieurs devoirs envers le défendeur lors de

en pratique, de tout soupçon de contrainte physique ou morale de l'inculpé de la part des autorités chargées de dépister la vérité dans les affaires pénales ».

970 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les principes des procès pénaux. Étude comparative, Dar Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 336.

971 V. Aveu judiciaire ou extrajudiciaire : C. Ambroise-Castérot, « Aveu », in Rép. pén. Dalloz., octobre 2006, n° 3, p. 3 : « L'aveu peut être judiciaire, lorsqu'il est fait directement devant une autorité chargée de l'enquête ou du jugement (officier de police judiciaire lors d'une enquête de flagrance ou lors d'une enquête préliminaire, juge d'instruction, procureur, magistrats du siège...). Il peut aussi être extrajudiciaire. Cet aveu est alors indirect. Ce sera le cas, par exemple, s'il est rapporté par un témoignage, s'il figure dans un document écrit, etc. ».

972 V. E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 559, pp. 456-457 : « L'aveu extrajudiciaire, en le supposant légalement prouvé, n'est pas au fond d'une autre nature que l'aveu judiciaire. S'il est positif et précis, en quelque lieu qu'il ait été fait, il doit être décisif contre la partie qui s'est condamnée par sa propre bouche ».

973 V. en langue arabe : Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, Sader Éditeurs, Beyrouth, p. 390.

974 E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 557, p. 455

975 En droit libanais, hors le cas d'infraction flagrante, l'officier de police judiciaire n'a pas le droit de procéder à l'interrogatoire du prévenu.

976 L'article du 47 CPP libanais dispose: « En leur qualité d'auxiliaires de justice, les officiers de police judiciaire exécutent les missions que celui-ci leur confie. Ils enquêtent sur les infractions non flagrantes, ... ainsi que du recueil des dépositions des témoins sans les soumettre au serment et des déclarations de suspects et de personnes visées par des plaintes. Lorsque ces personnes refusent de faire des déclarations ou choisissent de garder le silence, mention en est portée sur le procès-verbal. Les officiers de police judiciaire ne peuvent dans ce cas les contraindre à parler ou les interroger, sous peine de nullité des déclarations recueillies».

977 L'article du 76 CPP libanais dispose: « Lors de la première comparution du défendeur devant lui, le juge d'instruction l'informe de l'infraction qui lui est imputée en lui en résumant les faits et en lui présentant les

sa première comparution devant le juge d'instruction à peine de nullité de l'interrogatoire

978

comme moyen de preuve. Mme Philomène Nassr considère qu'on peut conclure des deux textes précités que l'aveu ne peut pas être invoqué comme un élément de preuve en dehors des

exigences légales

979

. Cependant Mme Philomène Nassr reconnaît que cet aveu pourrait garder

un impact indirect sur la conviction du juge, sur la conduite de l'enquête et sur le déroulement

du procès

980

. Le fait est que, dans les affaires pénales, il n'est pas important de distinguer

entre les types d'aveux, tant que ces aveux ont été obtenus pendant les étapes de la procédure pénale, en l'occurrence l'enquête préliminaire menée par la police judiciaire, l'interrogatoire devant le juge d'instruction, et l'enquête finale (phase de jugement). Dans de tels cas, on peut utiliser le terme « aveu judiciaire » si l'aveu est délivré par le suspect ou le prévenu devant le juge pénal, ou devant l'officier de police judiciaire compétent dans le cadre d'une enquête

judiciaire prévue par la loi981 . Toutefois, on ne peut prendre cet aveu en considération qu'en

vertu des conditions de validité

982

imposées par la jurisprudence, de telle sorte que la valeur

233

probatoire de l'aveu soit de la seule compétence de l'appréciation de l'intime conviction du juge du fond983. En droit français, selon M. Jean Pradel, l'aveu extrajudiciaire984 est fait en

charges et suspicions qui pèsent contre lui afin qu'il puisse les réfuter et se défendre. Le juge d'instruction n'est pas tenu de lui fournir la qualification juridique des faits. Le juge d'instruction informe le défendeur de ses droits, notamment celui de se faire assister par un avocat unique pendant l'interrogatoire. L'omission par le juge d'instruction d'informer le défendeur de l'infraction qui lui est imputée conformément aux dispositions ci-dessus ou de l'informer de son droit de se faire assister par un avocat emporte nullité de l'interrogatoire en tant que preuve à charge ».

978 Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, p. 394.

979 Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, p. 394.

980 Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, p. 394.

981 V. voire en opposition : Rapport de M. Alfredo Molinario, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, octobre-décembre 1952, pp. 769-776, V. spec. p. 771 : « Etant admis que l'aveu, pour avoir la valeur de preuve, doit avoir été fait devant le juge d'instruction, au cours d'un acte de procédure réalisé selon les règles légales qui le régissent, tout le problème réside à établir à quelles règles l'interrogatoire devra être assujetti, pour que soient sauve gardés, à la fois, les droits de la défense sociale et ceux de la liberté de défense de l'inculpé » ;V. en même sens : J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p. 413 : « Quant à l'aveu judiciaire, il est passé devant un magistrat (notamment un juge d'instruction) ou devant un officier de police judiciaire ».

982 V. E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 559, p. 457 : « L'aveu extrajudiciaire, en effet, est rarement bien complet et bien net. Les paroles qui échappent dans une conversation ne sont pas pesées par celui qui les prononce, comme celles qui sont proférées en justice dans un interrogatoire solennel. Il faudra donc examiner avec soin dans quelles circonstances une partie aura fait cette reconnaissance, dont on cherche à se prévaloir contre elle ».

983 V. en langue arabe : D. Becheraoui, Procédure pénale, op. cit., n° 273, p. 266.

984 V. M. Franchimont, A. Jacobs et A. Masset, Manuel de procédure pénale, 3e éd., Larcier, Bruxelles, 2009, p. 1059 : « L'aveu peut être judiciaire ou extrajudiciaire. Dans le premier cas, il est fait devant le juge, dans le second, il n'est connu qu'indirectement par le juge (procès-verbal, témoignages, confessions écrites, etc...) ».

234

dehors de la présence d'un juge ou d'un officier de police judiciaire et l'on peut citer les

985

lettres par lesquelles une personne suspecte a reconnu sa culpabilité. De tels aveux selon M.

986

Jean Pradel, ont la nature d'indices.

166. Les formes de l'aveu. D'après le classement de la doctrine pénale, il existe plusieurs formes d'aveux : l'aveu tacite, qui découle de la prise de l'accusé en flagrant délit, c'est en général la constatation d'un délit commis sous les yeux des officiers de police. C'est l'aveu

direct, qui résulte de l'admission du délit commis. On peut distinguer aussi987

988

l'aveu simple

,

 

dans le cas où l'accusé avoue sans détour uniquement l'incident criminel qui est la matière du procès. L'aveu est dit qualifié lorsqu'à la reconnaissance des faits s'ajoutent des actes ou des circonstances invoqués en faveur de celui qui avoue afin d'avoir des circonstances atténuantes ou pour ôter à l'acte son caractère criminel, comme celui qui admet avoir tué une personne,

989

mais qui invoque la légitime défense.

167. La règle de la divisibilité de l'aveu. En matière pénale, l'aveu est par essence

990

divisible, ce qui implique que l'aveu peut n'être que partiellement efficace. En ce qui touche

985 J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p. 413.

986 J. Pradel, Procédure pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 464, p. 413.

987 Certains auteurs font une distinction entre aveu spontané et aveu provoqué : V. C. Robinson et A. Eser, « Le droit du prévenu au silence et son droit à être assisté par un défenseur au cours de la phase préjudiciaire en Allemagne et aux États-Unis d'Amérique », in R.S.C., n° 3, juillet-septembre 1967, pp. 567-618, V. spec. p. 589 :« Dans la plupart des affaires qui nous intéressent, le prévenu a avoué au cours de l'interrogatoire fait par la police. Objection est faite au procès sur l'argument que les aveux n'étaient pas « spontanés», c'est-à-dire que le prévenu ne les avait pas faits de son plein gré » ; V. Rapport de M. Alfredo Molinario, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, octobre-décembre 1952, pp. 769-776, V. spec. p. 770 : « Même dans les cas où l'aveu se produit au cours d'un interrogatoire d'office et par prescription de la loi par le magistrat instructeur, celui-ci, à aucun moment, ne peut employer des menaces ou des promesses tendant à obtenir l'aveu de la part de celui qui est interrogé sur son intervention dans le fait qui donne matière au procès. Il ne peut pas davantage lui poser des questions insidieuses ayant le même but, ni utiliser des ruses, tromperies ou machinations d'aucune sorte. Il est donc évident que, ces dispositions légales s'accomplissant, l'expression aveu provoqué devient impropre ».

988 V. Rapport de M. Alfredo Molinario, « L'aveu dans la procédure pénale » in R.I.D.C., Vol. 4, n° 4, octobre-décembre 1952, pp. 769-776, V. spec. p. 769 : « Il est aussi parlé dans notre droit argentin d'aveu simple et d'aveu qualifié. Pour le premier, le suspect reconnaît sans ambages son intervention dans le fait délictueux sur lequel on enquête et, pour le second, cette reconnaissance est accompagnée de manifestations qu'il est important d'invoquer en faveur de celui qui avoue, causes de justification, excuses absolutoires ou circonstances atténuantes ».

989 V. en langue arabe : Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux. Étude comparative et d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 391.

990 V. J. Magnol, « L'aveu dans la procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. p. 518 : « L'aveu n'est pas davantage indivisible, à la différence encore des matières civiles ».

235

l'indivisibilité de l'aveu, le motif principal sur lequel elle est fondée en matière civile n'existe

991

plus ici en matière criminelle. MM Pierre Bouzat et Jean Pinatel expliquent que la règle de la divisibilité de l'aveu en matière pénale, qui n'est pas admise traditionnellement en matière civile, est la conséquence directe du principe de la liberté dans l'appréciation des preuves

selon l'intime conviction du juge pénal

992

. Ainsi peut-on dire que tous les types d'aveux en

993

matière pénale sont divisibles, à la différence de la matière civile , et ce, en se basant sur le

994

principe de la conviction personnelle du juge. Dans le cas où le défendeur a avoué son crime, mais en même temps a ajouté des conditions qui pourraient limiter sa responsabilité ou l'exclure, le juge doit examiner toutes les parties de l'aveu et se baser uniquement sur ce qui

l'a convaincu 995 . Il peut ainsi prendre en considération la première partie et négliger la deuxième, s'il a estimé que l'enquête qu'il avait menée a révélé la non-exactitude des faits

996

négligés . M. Joseph Magnol résume l'application pratique de la notion de la divisibilité de l'aveu dans le domaine de la preuve pénale en soulignant que le juge pénal a le droit de ne retenir qu'une seule partie spécifique des déclarations de l'inculpé, celle par laquelle il reconnaît tel ou tel fait, d'où découlera sa culpabilité, et rejeter les autres qui tendaient à

997

démontrer son irresponsabilité.

991 E. Bonnier, Traité théorique et pratique des preuves en droit civil et en droit criminel, 4e éd., Henri Plon Editeur et Maresc Ainé Editeur, Paris, 1873, t.1, n° 568, p. 469.

992 P. Bouzat et J. Pinatel, Traité de droit pénal et de criminologie, Dalloz, 1963, Vol. 2, p. 945.

993 V. sur la divisibilité de l'aveu en matière pénale : R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris, 2001, tome 2 Procédure pénale, n° 189, p. 238 : « A la différence de l'aveu civil, l'aveu fait en matière pénale est divisible: il est en effet du pouvoir du juge criminel, en vertu de son intime conviction, d'apprécier l'aveu dans chacune de ses parties et de ne retenir que ce qui lui paraît probant.».

994 V. en langue arabe : Ph. Nasr, Les principes des procès pénaux, étude comparative et d'analyse, Sader Editeurs, Beyrouth, p. 391.

995 V. en même sens : H. de Page, Traité élémentaire de droit civil belge: principes, doctrine, jurisprudence, E. Bruylant, Bruxelles, 1967, Vol. 3, p. 1101 : « La divisibilité de l'aveu au pénal a tout simplement cette portée pratique que le juge peut se fonder sur un des éléments de l'aveu, joint aux autres circonstances de la cause, pour asseoir sa conviction ».

996 V. en langue arabe : A. Nakkib, Les principes des procès pénaux. Etude comparative, Dar Al Manchourat Al Houkoukia, Beyrouth, p. 336.

997 V. J. Magnol, « L'aveu dans la procédure pénale », (Rapport oral) in R.I.D.C., Vol. 3, n° 3, Juillet-septembre 1951, pp. 516-541, V. spec. p. 518 : M. Joseph Magnol cite l'exemple classique concernant la divisibilité de l'aveu : « l'accusé reconnaît, avoir donné la mort à la victime, mais il déclare en même temps qu'il avait été attaqué et qu'il se trouvait en état de légitime défense. Le juge pourra retenir la partie de la déclaration où l'accusé reconnaît avoir porté les coups à la victime qui ont provoqué sa mort et rejeter l'allégation de la légitime défense ».

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