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La légalite des moyens de preuve dans le procès pénal en droit français et libanais


par Ali Ataya
Ecole doctorale 88 Pierre Couvrat (Poitiers) - Droit et Sciences Politique, Université du Maine - Thèse de doctorat en Droit privé 2013
  

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Chapitre I

Preuve entachée d'une illégalité formelle

110. La question de l'illégalité. Comment déterminer de manière précise et de façon judicieuse le concept ou la notion de la preuve illégale dans le procès pénal ? Une question qui demeure ouverte : comment peut-on définir la notion de l'illégalité d'une procédure qui vise à la recherche des éléments de preuve dans le cadre d'une procédure pénale ? Plus précisément, comment définir la notion d'une preuve illégale ou la notion de preuve illicite ou irrégulière ? Plusieurs termes sont utilisés pour signifier qu'une procédure est incorrecte ou qu'un acte s'est déroulé d'une façon non conforme à la loi. C'est ce qu'on appelle exactement une procédure illégale ou irrégulière. On dit aussi qu'un acte de procédure est entaché d'une illégalité formelle ou matérielle. Au sens large, durant la recherche de preuve, les actes de procédure pénale peuvent être entachés d'irrégularités, lorsqu'un certain nombre d'éléments de preuve

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ont été recueillis à la suite d'une action illégale ou irrégulière. Le thème présente un intérêt certain en ce sens que la sanction des irrégularités dans la conduite du procès pénal est apparue comme étant un gage essentiel de garantie du procès équitable qui est une exigence fondatrice inévitable et fondamentale participant largement à la consécration de l'État de droit. Mais il est nécessaire de trouver un critère qui permet de limiter la notion de preuve illégale parce qu'on ne peut pas considérer que n'importe quelle preuve entachée d'un vice sera considérée comme une preuve illégale même si le vice ne porte pas atteinte aux droits et aux principes généraux en matière pénale. Quels sont les sources, les origines et les causes d'une illégalité ? L'illégalité de la preuve trouve sa source dans la méconnaissance de la légalité procédurale, c'est-à-dire la méconnaissance des règles de procédure pénale et des principes généraux de la procédure pénale. On parle ici des grands principes gouvernant la preuve pénale qui sont intimement liés à la recherche et à l'administration de la preuve pénale. La première section de ce chapitre porte sur les procédés de preuve portant atteinte à la légalité procédurale (section 1). La seconde section de ce chapitre porte sur les procédés de preuves portant atteinte à l'intimité de la vie privée (section 2).

677V. sur ce point : Jean Du Jardin, Il s'agit des conclusions que M. J. Du Jardin, avocat général Belge, avait prononcées dans une affaire fiscale en cause Vande Vyvere et consorts, soumis à la Cour de cassation Belge (Cass. 13 mai 1986, Pas., 1987, p. 1107). : « Sous le régime de l'administration libre de la preuve en matière pénale, les éléments probants ne peuvent pas être recueillis d'une manière illégale. ... Il est à l'évidence, interdit aux organes du pouvoir d'agir, non seulement en violation d'un texte formel de la loi mais aussi d'une manière irrégulière, c'est-à-dire en violant les principes généraux du droit, ... ».

161

Section I.

Les Procédés de preuve portant atteinte à la légalité procédurale.

111. Les sources de l'illégalité procédurale. Les différentes sources de l'illégalité de la preuve qui affectent un moyen de preuve pénale peut avoir deux origines : la première résulte soit de la violation d'une règle juridique dont l'objectif est d'interdire ou de soumettre à des conditions précises la recherche de telle preuve, soit du manquement à une règle de procédure

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relative à son administration. L'illégalité de la preuve peut puiser son origine dans la violation des principes liés la notion de procès équitable. Le droit à un procès équitable est une notion multiple, composée de plusieurs principes. En ce sens, la légalité de la preuve est étroitement liée au principe de l'oralité des débats avec le respect du principe du débat

679

contradictoire et la publicité des débats à l'audience. L'accusé doit pouvoir débattre et contredire les arguments et preuves avancés par l'autre. Ce qui impose aujourd'hui que les

680

.

éléments de preuve soient produits en audience publique, en vue d'un débat contradictoire

681

.

La preuve ne doit pas être obtenue en atteinte aux droits de la défense. L'utilisation des preuves ainsi obtenues en violation des principes précédents rend la preuve illégale

§ 1. Preuve illégale résultant de l'inobservation de la loi.

112. Preuve recevable en justice. Dans un État de droit, la manifestation de la vérité d'après la recherche de preuve, se déroule conformément à la procédure prescrite par la loi surtout selon le Code de procédure pénale qui organise la procédure de la découverte de la

678 J. Benedict, Le sort des preuves illégales dans le procès pénal, op. cit., p. 19.

679 V. en ce sens : G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Les transformations de l'administration de la preuve pénale. Perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni », in Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 /, décembre 2003, p. 2: « Procéduralement, la montée des standards communs du procès équitable est indéniable. Elle se marque par une constitutionnalisation et/ou conventionnalisation de plus en plus forte du droit de la preuve, par un développement des droits de la défense, du principe du contradictoire et de l'oralité, ... ».

680 G. Guidicelli-Delage (dir.) et H. Matsopoulou (coord.), « Les transformations de l'administration de la preuve pénale. Perspectives comparées. Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, France, Italie, Portugal, Royaume-Uni », in Mission de recherche Droit et Justice / Synthèse 107 /, décembre 2003, p. 7.

681 V. sur ce point : F. El Hajj Chehade, Les actes d'investigation, Thèse de droit, Université du Maine, 2010, p. 200: « Si la recherche des preuves n'est pas toujours marquée par une obligation de loyauté, le respect des droits de la défense et le principe du contradictoire imposent la loyauté lors de la discussion des preuves ».

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vérité et le rassemblement des preuves d'une infraction contre un criminel. Donc, l'acte de procédure non conforme à la loi qui vise à amasser des preuves est contraire au principe de la légalité de preuve pénale. Pendant la recherche de la preuve, il existe un formalisme à respecter qui est prévu par le Code de procédure pénale pour que la preuve soit légalement admise. L'obtention de preuves peut prendre plusieurs formes, le problème réside essentiellement dans la légalité de l'obtention de la preuve et non dans la crédibilité de la preuve. Il s'agit d'une formalité qui vise notamment à garantir la légalité et la régularité de la preuve pour assurer le droit à un procès équitable et les droits de la défense à toutes les personnes soupçonnées ou poursuivies dans une affaire pénale. Une question se pose : le non-respect d'une formalité substantielle entache-t-il la preuve d'une illégalité ou irrégularité? Quelles sont les conséquences du non-respect de cette formalité procédurale sur l'admissibilité de la preuve?

682

113. L'importance du respect des règles de forme. Les formalités de la procédure pénale assurent une application exacte de la loi sans risque d'arbitraire ou excès de pouvoir qui menace les droits de la défense, et les libertés individuelles pendant l'accomplissent des actes

683

de procédure qui visent la recherche de la preuve de l'infraction et son auteur. La recherche et l'administration de la preuve pénale doivent respecter les règles de forme de procédure car le respect de ces règles garantit au prévenu et accusé le droit à un procès juste et équitable et en même temps lui permet d'exercer efficacement et effectivement ses droits de la défense. C'est-à-dire qu'il offre au prévenu ou accusé pleinement la possibilité d'exercer les droits attachés à sa défense. Le non-respect d'une règle de forme peut entraîner la nullité de l'acte de

684

procédure qui vise au rassemblement des preuves. La procédure pénale vise à organiser

682 V. E. Vergès, « Rigueur du formalisme procédural et respect du droit au procès équitable », observations sous CEDH 26 juillet 2007 Walchi c/ France, in R.P.D.P., 2007-4, p. 893 : « le formalisme procédural est traditionnellement conçu comme un facteur de protection des droits fondamentaux dans le procès pénal ».

683 V. R. Garraud et P. Garraud, Précis de droit criminel, contenant l'explication élémentaire de la partie générale du Code pénal, du Code d'instruction criminelle et des lois qui ont modifié ces deux codes, Société anonyme du Recueil Sirey, 1926, p. 111 : MM. René Garraud et Pierre Garraud expliquent le rôle des formalités dans la procédure pénale en écrivant : « Le but de la procédure pénale est d'assurer la complète manifestation de la vérité judiciaire en protégeant, par les formalités dont elle entoure la poursuite, l'instruction et le jugement, l'intérêt de l'accusation et l'intérêt de la défense ».

684 V. R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, Cujas, Paris, 1967, n° 125 et s., pp. 138-139 : « La règle de droit pénal de forme a pour objet d'assurer la mise en oeuvre concrète de la justice criminelle, c'est à dire l'application, aux personnes poursuivies des règles de droit pénal de fond. Elles atteignent leur but d'une double façon. En premier lieu, elles établissent un certain ordonnancement judiciaire, en instituant des juridictions répressives dont elles déterminent les rouages et l'agencement interne. D'autre part, elles organisent le déroulement des procès. Elle apparaît sous forme de normes d'organisation, de normes de compétence et de normes processuelles ou d'activité ».

163

685686

légalement la recherche de la preuve, d'où la nécessité de respecter les formalités prescrites par loi sans que le législateur ajoute chaque fois à la fin de chaque article le terme « sous peine de nullité », parce que la recherche de preuve doit être effectuée conformément aux règles de procédure matérielle et formelle qui organisent les différentes formes d'actes de procédure. « Il ne saurait être question d'évoquer tous les textes de fond ou de forme dont la

687

violation peut aboutir à déclarer illégale la preuve produite ». La formalité dans la procédure pénale, notamment dans la recherche de preuve, revêt une importance essentielle lorsque la forme de la procédure a pour objectif d'assurer le caractère équitable du procès, les droits de la défense et pour limiter les abus de pouvoir et l'arbitraire. En droit libanais et français, le régime de nullité en matière pénale est mixte, la loi qui prévoit une formalité indique parfois qu'elle est requise à peine de nullité et parfois ne l'indique pas expressément. La violation des règles de procédure non prescrites expressément à peine de nullité pose la question de la légalité de la preuve obtenue en violation à ces règles. L'absence des termes « à peine de nullité » conduit plusieurs auteurs à constater que la formalité procédurale ne doit pas être respectée sauf si elle est prévue «à peine de nullité ». Mais cela, à notre avis, est inacceptable parce que la formalité doit être respectée conformément au principe de la légalité formelle. Mais il faut distinguer la formalité substantielle dont la violation ou l'omission peut entraîner l'illégalité de la preuve.

A. L'absence de base légale.

114. L'absence de règle de preuve. L'illégalité de la preuve pénale trouve sa source dans l'absence ou le défaut de base légale parce que l'acte de procédure qui vise la recherche de preuve doit trouver un fondement légal qui est un texte de loi. Chaque procédure qui vise à rechercher la preuve doit être mentionnée dans le Code de procédure pénale ou doit être indiquée comme base légale qui prescrit la forme juridique déterminée. Au contraire, les

685 V. L.-A. Macarel, Eléments de droit politique, Librairie de jurisprudence de H. Tarlier, Bruxelles, 1834, p. 100 : Selon M. Louis-Antoine Macarel « Les règles et les formalités de la procédure doivent, en général, avoir pour effet d'écarter de l'administration de la justice le désordre, l'arbitraire et la confusion... ».

686 V. F. Hélie, Traité de l'instruction criminelle ou théorie du code d'instruction criminelle, Charles Hingray libraire-éditeur, Paris, 1845, 1er partie, p. 6 : « Les formes de la procédure sont destinées, comme des phares, à éclairer la marche de l'action judiciaire; leur but est d'arrêter les entraînements de la justice, d'attacher une sorte de solennité à chacun de ses pas, de préparer ses actes ».

687 J. Buisson, « La légalité dans l'administration de la preuve pénale », in Procédures, Décembre 1998, Chr. n° 14, pp. 3-6, V. spec. p. 4.

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autorités étatiques ou judiciaires et les parties dans le procès pénal ne peuvent pas inventer un nouvel acte de procédure ou mode de preuve en justice sans aucune disposition ou base légale qui règle, organise et légalise ce moyen de preuve et qui a pour objet de fixer les conditions et les formes dans lesquelles elle peut être effectuée. Donc un vice existe dans la preuve s'il n'existe aucune disposition légale spécifique qui légalise le moyen de recherche de preuve. Ce défaut ou manque de base légale permet de dire que cette preuve est entachée d'illégalité au

688

motif du manque ou défaut et même pour absence de base légale.

B. La violation d'une formalité substantielle.

115. But du formalisme. La forme de l'acte de procédure qui vise la recherche et la constatation d'infractions est d'une application obligatoire. Tout simplement, l'application de l'article du Code de procédure pénale doit être strictement conforme à la forme prescrite par loi, soit prévue textuellement sous peine de nullité ou non, soit qu'il s'agisse d'une règle de forme substantielle ou règle de forme non substantielle. L'application stricte du modèle de l'acte de procédure pénale prévue dans le texte appliqué revêt une importance toute particulière dans le domaine de la preuve pénale parce que le législateur impose certaines formes juridiques pour garantir l'efficacité d'un des principes fondamentaux qui gouvernent la preuve pénale. Pour assurer une conciliation entre les valeurs de qualité et d'efficacité et, de façon plus générale, un équilibre entre les intérêts des parties au procès pénal, la procédure va fixer des règles gouvernant les actes utiles à la manifestation de la vérité. Ces formes procédurales ne sont pas établies par pur hasard ou de manière arbitraire. Au contraire elles ont pour objectif essentiel de garantir le respect d'un certain équilibre dans le cadre d'un procès pénal surtout durant la recherche de preuve où le prévenu ou l'accusé jouit d'une présomption d'innocence. Il en résulte que parfois le formalisme doit être allégé en vue de garantir la réalisation effective des droits. Les règles de procédure doivent donc veiller à

688 V. en droit français : P. Hennion-Jacquet, « L'encadrement relatif de la liberté de la preuve par la Convention européenne des droits de l'homme », in D., 2005, p. 2575 et s., V. spec n° 2 : « Deux situations peuvent en effet se produire. D'une part, la preuve peut être administrée en violation d'une règle de fond ou de forme. D'autre part, elle peut être rapportée sans fondement légal relatif à ses conditions d'obtention. Aucune de ces deux hypothèses ne devrait conduire à l'admission des éléments probatoires : en vertu des dispositions supra-législatives, la culpabilité doit être établie légalement, ce qui s'oppose à toute violation de la loi avant son prononcé et, aux termes de la Constitution, nul ne peut être accusé, arrêté, ni détenu que dans le respect des formes que la loi a prescrites, ce qui prohibe tout recours à un moyen probatoire non réglementé » ; V. encore : P. Hennion-Jacquet, « L'encadrement relatif de la liberté de la preuve par la Convention européenne des droits de l'homme », in D., 2005, p. 2575 et s., V. spec n° 3 : « Or, en l'absence de dispositions spéciales, l'article 81 du Code de procédure pénale est invoqué pour justifier le recours à des procédés non réglementés, visant à l'obtention de déclarations auto-incriminantes à l'insu de l'accusé ».

maintenir le formalisme dans des limites bien précises afin que celui-ci ne soit pas appliqué de manière aveugle, ce qui peut lui faire perdre tout ou partie de son efficacité.

116. Le respect de certaines dispositions et conditions de forme est prescrit à peine de nullité. Certains actes de procédure pénale qui visent la recherche de la preuve sont prescrits à peine de nullité. Le législateur rédige l'article de procédure en mentionnant expressément que le respect de ces formes ou dispositions est sanctionné sous peine de nullité de la procédure. Donc, la méconnaissance de cette disposition est sanctionnée par la nullité sans hésitation et sans l'appréciation par la jurisprudence. Ici, le législateur a clairement manifesté son intention de sanctionner l'illégalité, ce qui implique que la méconnaissance de tous les actes de procédure qui sont rédigés « sous peine de nullité » est considérée par le législateur comme des éléments de preuve illégaux en cas de méconnaissance de la procédure.

117. L'incidence directe du respect des règles de forme sur la légalité des éléments de preuve. Sans doute, s'agissant de la procédure pénale libanaise et française, il y a certaines règles de forme qui n'ont aucun effet ni aucune incidence sur la légalité de la preuve et qui ne s'attachent pas aux garanties et formalités substantielles. Mais cela ne justifie pas de négliger l'importance et les garanties qui se trouvent dans nombre de règles de forme qui sont liées à l'efficacité et au bon déroulement de l'exercice du droit à un procès pénal équitable et les droits de la défense. Il faut noter qu'en général, le problème de la légalité de forme dans la procédure pénale est souvent négligé par la doctrine libanaise. La doctrine libanaise ne consacre pas l'importance du principe de la légalité formelle de la preuve, mais analyse ce problème d'une manière trop timide et implicite dans la théorie des nullités. Contrairement à la doctrine libanaise timide, la doctrine française pose explicitement la nécessité de respecter les règles formelles de procédure pénale dans la recherche des preuves comme l'affirme M.

689

Jacques Buissonqui rappelle également que ces règles de forme de procédure pénale doivent être respectées en toutes circonstances durant l'intervention des autorités étatiques et

même par les particuliers dans la recherche des preuves

690

. La chambre criminelle de la Cour

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de cassation française, à son tour, confirme la force du principe de légalité formelle de

689 V. J. Buisson, « Preuve », in Rép. pén. Dalloz, février 2003, n° 94, p. 20 : « Il ne saurait être question d'évoquer tous les textes de fond ou de forme dont la violation peut aboutir à déclarer illégale la preuve produite ».

690 V. J. Buisson, « Preuve », in Rép. pén. Dalloz, février 2003, n° 94, p. 20 : « Ces normes doivent être respectées par tous, par les agents de l'autorité chargés du recueil de la preuve comme par les particuliers qui souhaitent apporter des preuves aux juges répressifs ».

l'administration de la preuve

691

. Nous pouvons dire que l'absence de la forme nécessaire pour

166

la validité de la procédure signifie le non-établissement de la procédure selon la forme prévue dans la loi, ce que l'on peut traduire par l'expression la « preuve illégale ». Cependant, les formes selon lesquelles la procédure doit être exécutée n'ont pas toutes la même importance. En effet, certaines de ces formes sont fondamentales. Leur négligence a pour conséquence de vicier la procédure. Par contre, d'autres formes ne sont pas indispensables (formes d'organisation) et donc ne touchent pas la validité de la procédure prise en

692

l'absence de conformité.

118. La violation de la forme rend la preuve illégale. Généralement, le rôle des règles formelles dans le domaine de la preuve est tout aussi important et vital que celui des règles de fond. En effet, ces règles jouent un rôle important dans l'aspect organisationnel du processus de la preuve devant les tribunaux, en sachant que cet aspect organisationnel est le pilier de la réalisation de la justice dans ses différents domaines. Les règles formelles dans le Code de procédure pénale imposent une forme, un modèle et des conditions spécifiques aux actions à exercer lors de l'exécution d'une procédure pénale.

119. Les formes déterminées par le législateur en vue de l'organisation et de l'orientation. Il convient de dire que les formes requises par le législateur ne sont pas toutes essentielles. La violation de certaines (formes) ne risque pas de détruire le but de l'acte de procédure, car elles certaines sont mentionnées par le législateur pour un rôle d'organisation et d'orientation. Le principe général est que le législateur veille toujours à la conformité de toutes les parties aux règles établies de procédure qu'elles soient objectives ou formelles. Si l'absence de ces formalités n'est pas une violation de la loi ou des garanties fondamentales, la procédure ne perd pas son efficacité, et donc n'a pas d'impact sur le but auquel aspire le législateur. En effet, ces règles ne sont pas considérées comme indispensables de sorte que si elles ont été touchées par un vice à cause d'une violation, cela n'entraîne pas la nullité. En effet, la violation de ces règles ne fait pas obstacle à la découverte de la vérité dans le crime reproché à l'accusé, et

691 V. Cass. crim., 19 juin 1989, B.C., n° 261, p. 648 : « selon les dispositions combinées des articles 342 et 451 du Code des douanes, tous délits en matière douanière ou cambiaire peuvent être prouvés par toutes les voies de droit, c'est à la condition que les moyens de preuve produits devant le juge pénal ne procèdent pas d'une méconnaissance des règles de procédure et n'aient pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense, ni au principe énoncé à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales».

692 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim, Nullité de la procédure pénale : tentative de réadaptation des causes de nullité à la lumière la justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 157, p. 255.

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donc n'a pas d'impact négatif sur la bonne conduite des procédures et ne contrarie pas la justice.

120. L'importance pour les procédures de recherche de la preuve d'inclure les formes fondamentales prévues par la loi. Les procédures de l'enquête préliminaire sont nombreuses et diverses : se déplacer au lieu du crime, l'étudier, écouter les témoins, rechercher et saisir les choses, les correspondances, la perquisition, la confrontation et l'interrogatoire. Elles peuvent également prendre la forme de procédures provisoires afin de sécuriser les preuves et d'éviter leur perte, comme l'arrestation du suspect et la mise en détention provisoire. Généralement, le législateur a entouré les différents actes pendant l'étape d'enquête de formes procédurales précises à respecter. Etant donné que certaines formes sont organisationnelles et qu'elles ont pour objectif unique l'orientation, la plupart des autres formes sont fondamentales, c'est-à-dire que le législateur vise en vertu de l'application de son rapport à garantir un droit

693

spécifique du suspect ou bien à assurer une nécessité publique. Dans ce dernier cas réside l'importance de la forme procédurale qui protège les droits fondamentaux dans le procès pénal. Dans ce sens, on distingue du champ des formes prévues par la loi toutes formes dites purement organisationnelles ou d'orientation ou en d'autres termes non fondamentales pour les distinguer des autres formes fondamentales. Parmi les principales formes d'orientation, il convient de citer l'ordre des procédures en audience en vue de succession et d'alternance.

C. L'illégalité résultant de la violation des conditions fixant les actes de recherche des preuves strictement réglementée.

121. Restreindre la mise en oeuvre de l'enquête d'une manière particulière. Bien que l'objectif de toute procédure de l'enquête soit la découverte de la vérité dans l'infraction produite, les législateurs libanais et français ont entouré les moyens d'atteinte de cet objectif de contrôles et de garanties assurant le respect des droits et libertés individuelles. En effet, le législateur tente de trouver un équilibre entre l'efficacité des enquêtes d'une part et le non respect des droits et libertés individuelles, d'autre part, y compris la reconnaissance de la dignité humaine de l'accusé. À la lumière de cet équilibre, il existe des procédures dont le

693 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim, Nullité de la procédure pénale : tentative de réadaptation des causes de nullité à la lumière la justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 158, p. 256.

168

législateur limite l'application d'une façon particulière. Par conséquent l'arrestation et la perquisition menées par l'officier de police judiciaire pourraient être valides indépendamment de la méthode de sa procédure tant qu'elle est légale. Cependant, le législateur et la justice veillent à affirmer certaines conditions et formes associées aux procédures d'enquête, par exemple, en matière de perquisition694. Quelles sont donc les formes fondamentales de la procédure qui rendent la preuve illégale en cas de violation? Les formes fondamentales de la procédure pénale relatives ou associées à la preuve pénale dont la violation affecte la légalité, et qui doivent être respectées et appliquées de la façon prescrite par la loi sont variables. Cependant, elles sont toutes liées à des formes fixées par les législateurs libanais et français, en matière de perquisition, et s'agissant des formes relatives à l'interrogatoire et de l'audition des témoins. L'illégalité de la preuve pénale résulte de l'application d'une procédure pénale spécifique contraire à certaines conditions requises par la loi. A ce propos, il convient de citer la perquisition. En effet, il est possible de dire que la forme et les conditions prévues par les législateurs libanais et français relatives à la perquisition sont considérées parmi les formes fondamentales, étant donné que cette forme est nécessaire dans la procédure pénale afin de protéger les droits et les libertés individuelles et de fournir également la confiance dans la preuve résultant de cette procédure pénale. En résumé, il est constaté que l'application de ces procédures, contrairement à ce qui est exigé par la loi rend illégale la preuve issue de cette procédure.

§ 2. Preuve portant atteinte au droit à un procès équitable.

122. Les formes nécessaires pour la légalité des procédures de la phase du jugement. Les

procédures de la phase du jugement sont nombreuses et variées 695 . Après l'instruction préparatoire de l'affaire vient le temps du jugement. Devant la juridiction de jugement, la procédure est publique, orale et contradictoire, ce qui diminue la probabilité d'abus contre

l'accusé 696 . La phase décisoire, qui intéresse les juridictions de jugement, est le point

694 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim, Nullité de la procédure pénale : tentative de réadaptation des causes de nullité à la lumière de la jurisprudence de la cour de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 160, pp. 259-260.

695 V. Ph. Conte et P. Maistre Du Chambon, Procédure pénale, 4e éd., Armand Colin, Paris, 2002, n° 66, p. 40 : « Notre système procédural prohibe l'administration de preuves incompatibles avec le respect des droits de la défense. ».

696 V. en ce sens : B. Bouloc, « Les abus en matière de procédure pénale », in R.S.C., 1991, p. 221 : « Quant à la phase de jugement, à première vue, elle semble moins donner prise à des abus, en raison des caractères qui

d'aboutissement du processus pénal. Le législateur se soucie du déroulement des procédures de la phase du jugement à travers un ensemble de principes, de contrôles et de garanties qui assurent l'efficacité de la divulgation de la vérité, d'une part, et le respect des droits et des libertés de l'accusé, d'autre part, en particulier son droit inhérent d'être présumé innocent jusqu'à l'émission du verdict. Il existe des formes organisationnelles, et d'autres fondamentales. Le but des formes organisationnelles est uniquement indicatif. Toutefois, ces procédures sont valides dans le respect ou non de ces formes. En dehors de ces formes organisationnelles dont l'omission ne conduit pas à qualifier de vicieuses les procédures de la phase du jugement, il existe d'autres formes qui sont fondamentales, qui représentent d'une manière donnée une condition formelle pour la validité de cette phase du jugement. Par conséquent, en comptant le fondamentalisme de ces formes ou de ces conditions, leur négligence marque les procédures de la phase du jugement de la nullité, y compris le verdict dont l'émission est prévue à la base de ces procédures ou à leur suite697. En conclusion, il est possible de constater que les principes procéduraux qui dominent la phase de jugement sont en relation directe avec la légalité de la preuve pénale. Le non-respect de ces principes fondamentaux peut valablement rendre la preuve illégale. Généralement, les formes

698

dominantes des procédures de la phase du jugementse représentent dans la trilogie de la publicité, de l'oralité et du débat contradictoire, grands principes généraux dont la violation entraîne l'illégalité de preuve.

123. Les formes dominant l'ensemble du système des procédures de la phase du jugement. Ce sont sans doute les caractères fondamentaux de la procédure de jugement. Pendant la phase de jugement, on peut constater clairement que la procédure suit un modèle dit accusatoire qui a pour conséquence des audiences publiques, des débats oraux, contradictoires comme le souligne M. Édouard Verny : « l'audience de jugement s'inspire du modèle accusatoire qui

suppose, outre l'oralité et le contradictoire, la publicité des débats »

699

. La procédure

169

accusatoire présente les caractères suivants : c'est une procédure orale, publique et

sont les siens : oralité, contradiction et publicité».

697 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim, Nullité de la procédure pénale : tentative de réadaptation des causes de nullité à la lumière la justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 163, p. 265.

698 V. D. Coujard, « instruction à l'audience », in Rép. pén. Dalloz, avril 1997, n° 5, p .4 : « La juridiction de jugement, saisie d'une prévention, l'examine publiquement, contradictoirement, au cours d'un débat oral et public : cette instruction à l'audience, en une forme de procédure à dominante accusatoire, donne des garanties à la société et aux parties privées ; elle ne présente pas les inconvénients de la procédure inquisitoire, qui domine l'information préparatoire, laquelle ne donne pas la même place au principe du contradictoire »

699 É. Verny, Procédure pénale, 3e éd., Dalloz, 2012, n° 16, p. 14.

contradictoire. La phase de jugement en droit libanais et français apparaît plutôt accusatoire, la procédure de la phase de jugement prendra un caractère oral, public et respectant le contradictoire. Il est impératif que le juge pénal tire sa conviction des preuves présentées à l'audience lorsqu'elle a été soumise à la libre discussion des parties. Cette condition se base sur le principe de l'oralité et la confrontation dans la phase du jugement pénal. En effet, il s'agit d'un principe fondamental dans les procédures pénales, selon lequel le juge devrait étaler chaque preuve présentée au jugement pour la discussion devant les adversaires de façon à ce qu'ils soient au courant de ce qui est fourni contre eux comme preuves afin de pouvoir faire face à ces preuves et y répondre. Par conséquent, il en résulte qu'il est interdit au juge pénal de baser sa conviction sur une preuve présentée par l'une des parties du jugement sans présenter cette preuve lors de l'audience du jugement et la débattre pour mettre au courant les autres parties. Sans doute l'exigence d'une procédure orale, publique et contradictoire qui imposée lors de la discussion des preuves est un aspect de la loyauté de preuve comme le souligne M. Édouard Verny « si la recherche de la preuve n'est donc pas toujours marquée par une obligation complète de loyauté, le respect des droits de la défense et le principe du contradictoire imposent la loyauté lors de la discussion des

700

preuves ».

124. L'étendue de la notion de la phase de jugement. La phase jugement, a pour objet de clôturer définitivement le procès en statuant sur l'existence de l'infraction et la culpabilité du

prévenu ou accusé

701

. La procédure de jugement, encore appelée procédure d'audience ou

procédure d'instruction définitive, a pour but la production des preuves devant les juridictions de jugement et leur discussion publique et contradictoire ; elle permet aux juges de délibérer sur la culpabilité du délinquant et la mesure à prendre à son égard. La décision à laquelle tend

702

cette procédure porte le nom général de jugement. L'audience de jugement constitue l'étape décisive vers laquelle tend toute procédure pénale : il s'agit en cette occasion de permettre à un juge impartial de porter une appréciation objective et respectueuse des droits de la défense

sur l'exactitude des accusations formées à l'encontre du mis en cause

703

. Au Liban et en

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France, lors de la phase de jugement, l'inculpé peut exercer pleinement ses droits de la

700 É. Verny, Procédure pénale, 3e éd., Dalloz, 2012, n° 32, p. 23.

701 G. Vidal, Cours de droit criminel et de science pénitentiaire, 2e éd., Librairie nouvelle de droit et de jurisprudence Arthur Rousseau, Paris, 1901, n° 771, p. 789.

702 R. Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris, 2001, tome 2 Procédure pénale, n° 726, p. 839.

703 F. Debove et F. Falleti, Précis de droit pénal et de procédure pénale, 2e éd., P.U.F., Paris, 2006, p. 643.

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défense au cours de l'audience qui constitue le point central de la procédure pénale. Le juge doit former son opinion en appréciant librement la preuve. Le jugement doit se fonder sur les éléments de preuve recueillis pendant l'audience. C'est pourquoi la phase de jugement est en principe longue et complexe. L'accusé ou le défendeur doit pouvoir discuter les charges

découvertes contre lui704, c'est pourquoi la phase de jugement est de caractère oral, public et contradictoire.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand