A. La violation du principe de la publicité des
débats judiciaires.
125. La publicité des procédures de la phase
du jugement. L'adage anglais « Justice must
exprime bien le « refus de tout secret, ..., de
705
not only be done, but must be seen to be done »
706
toute clandestinité qui jetterait un doute sur
l'oeuvre de justice ». Le principe de la publicité signifie
notamment que les portes de la juridiction sont ouvertes au public pendant le
temps de
707708
l'audience sans que les magistrats puissent s'y opposer. La
publicité des débatsest
favorable au bon déroulement du procès
pénal709, surtout à la manifestation de la
vérité et au respect des droits de la défense pendant la
phase de jugement. Le principe de la publicité des
710
débats judiciaires est le garant de la
sérénité et de l'impartialité de la justice. Pour
MM. René Garraud et Pierre Garraud, la publicité des
débats est un principe général qui doit être
704 M. Delmas-Marty et S. Lasvignes, (et
al.), « La Mise en état des affaires pénales, Commission
justice pénale et droits de l'homme», in La Documentation
Française, Paris, 1991, v. spec. Rapport préliminaire
(novembre 1989) introduction : du fait au droit, p. 13.
705 Traduction en langue française :
« Il ne faut pas seulement que la justice soit rendue, il faut aussi
qu'elle donne l'apparence d'être rendue ».
706 R. Perrot, « Le principe de la
publicité dans la procédure civile » in Le principe de
la publicité de la justice, Travaux du VIe Colloque des Instituts
d'Etudes Judiciaires, Toulouse, Mai 1968, Librairies Techniques, 1969, p.
23.
707 E. Verges, Les principes directeurs
du procès judiciaire : étude d'une catégorie
juridique, Thèse de droit, Université de droit,
d'économie et des sciences d'Aix-Marseille, 2000, n° 37, p. 44
708 V. R. Merle et A. Vitu, Traité
de droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris,
2001, tome 2 Procédure pénale, n° 728, p. 841 :
« On voit d'ordinaire dans la publicité des débats
à l'audience une garantie pour le justiciable et pour son juge: le
premier est assuré que la vérité ne sera pas
étouffée par une juridiction aveugle ou partiale, le second voit
son oeuvre gagner en autorité morale. ».
709 F. Hélie, Traité de
l'instruction criminelle, Charles Hingray, Libraire-Editeur, Paris, 1858,
Vol. 8, p. 589 :« la publicité de l'audience est une forme
essentielle de la procédure, la plus essentielle peut-être, car
elle éclaire tous les actes du juge ; elle les défère,
à mesure qu'ils s'accomplissent, à l'examen et au contrôle
du public ».
710 M. Bousaber, « Les principes
généraux de droit et la procédure civile », in
Les dénominateurs communs entre les principes généraux
du droit musulman et des droits des pays arabes et les principes
généraux du droit français, Beyrouth, octobre
2001.
711
appliqué devant toutes les juridictions . En droit
libanais, la procédure de jugement et la
172
vérification de la preuve devant le juge unique selon
l'article 178 du CPP libanais sont publiques et orales. « Les
débats se déroulent, sous peine de nullité, en audience
publique et oralement ». Le procès devant la Cour criminelle
selon l'article 249 du CPP libanais est public. « Le procès
devant la Cour criminelle est public ». La Cour européenne de
Strasbourg condamne le manque de publicité des débats au sens de
l'article 6§1 qui constitue un principe
712 713
fondamental. Les audiences sont publiques en droit libanais et
français. Ce principe est
affirmé par la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l'homme et des libertés
714
fondamentales. Il s'agit de permettre au public et aux
médias sans discrimination d'assister à l'audience du jugement et
de suivre les procédures prises, ainsi que les décisions et les
arrêts rendus. Cette publicité est une forme fondamentale dont
dépend la validité des procédures de la phase du jugement.
En considérant l'importance du principe de la publicité des
débats, la base reste la publicité des audiences. Toutefois, la
publicité des audiences du jugement ne s'oppose pas à la
possibilité de procéder discrètement à titre
d'exception pour des raisons relatives à l'ordre public ou à la
moralité, ainsi que dans les affaires concernant des mineurs
délinquants. Dans ce cas, il faut souligner que la
confidentialité n'est destinée qu'au public. Les parties au
procès public et leurs mandataires ne peuvent point être
empêchés d'assister à l'audience sous le prétexte de
sa confidentialité. Le principe de publicité des audiences
représente l'une des garanties fondamentales de la
sécurité des procédures de la phase du jugement
étant donné qu'il influence, à travers le contrôle
direct de l'opinion publique, la conduite de la justice pénale,
l'assurance de son équité, la neutralité du juge et sa
711 R. Garraud et P. Garraud,
Précis de droit criminel, contenant l'explication
élémentaire de la partie générale du Code
pénal, du Code d'instruction criminelle et des lois qui ont
modifié ces deux codes, Société anonyme du Recueil
Sirey, 1926, p. 865.
712 L'alinéa 1 de l'article 14 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose «
Tous sont égaux devant les tribunaux et les cours de justice. Toute
personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et
publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial,
établi par la loi, qui décidera soit du bien-fondé de
toute accusation en matière pénale dirigée contre elle,
soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil.
Le huis clos peut être prononcé pendant la totalité ou une
partie du procès soit dans l'intérêt des bonnes moeurs, de
l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une
société démocratique, soit lorsque l'intérêt
de la vie privée des parties en cause l'exige, soit encore dans la
mesure où le tribunal l'estimera absolument nécessaire lorsqu'en
raison des circonstances particulières de l'affaire la publicité
nuirait aux intérêts de la justice; cependant, tout jugement rendu
en matière pénale ou civile sera public, sauf si
l'intérêt de mineurs exige qu'il en soit autrement ou si le
procès porte sur des différends matrimoniaux ou sur la tutelle
des enfants ».
713 L'article 400 du CPP français dispose
: «Les audiences sont publiques ».
714 L'article 6 de la Convention de
sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose :
« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, ... Le
jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle
d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la
totalité ou une partie du procès ... ».
173
diligence dans l'application correcte de la loi715.
La publicité des procédures de l'audience ne réside pas
uniquement dans une forme à travers laquelle la procédure
pénale est appliquée, mais plutôt cette publicité
est associée étroitement à l'idée des droits de la
défense716. La publicité des audiences
représente donc une garantie du contrôle de l'opinion publique, et
une assurance psychologique à l'accusé.
126. La publicité de l'audience en droit libanais.
Le droit à un procès public est consacré par les
articles 10 de la Déclaration universelle et 14 du Pacte de 1966. Il
s'applique, en droit
717
interne libanais, pour les audiences et pour le
prononcé du jugement; la procédure devant la Cour criminelle et
toutes les juridictions du jugement en droit libanais étant orale,
publique et contradictoire. Donc, les caractères principaux de la
procédure accusatoire sont strictement prévus par la loi
libanaise. L'audience devant la Cour criminelle est publique, sauf en cas de
huis clos (le huis clos étant
l'exception)718 sur décision du président de la Cour
criminelle s'il considère que cela est nécessaire pour des
raisons de maintien de l'ordre ou de protection des bonnes moeurs. La
publicité de la procédure devant la Cour criminelle est
assurée par l'admission du public à l'audience, à moins
que la publicité ne soit dangereuse pour l'ordre ou
719
les moeurs. Dans ce cas, le huis clos est ordonné.
127. La publicité de l'audience en droit
français. Selon l'article 306 du CPP français, la
procédure d'audience est en principe publique et tous les débats
sont donc ouverts à toute
715 V. en langue arabe : A. Abdelkader
Kahwaji, Interprétation du code des procédures
pénales. Etude comparative, 1er éd.,
Éditions Manchourat al. Halabi al Qanounya (Éditions Juridiques
Halabi), Beyrouth (Liban), 2002, pp. 446-447.
716 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim,
Nullité de la procédure pénale : tentative de
réadaptation des causes de nullité à la lumière la
justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la
nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 164, p. 267.
717 V. sur la publicité de l'audience
en matière de procédure civile libanais : N. Antoine-Diab, «
Inventaire des droits fondamentaux en matière de procédure civile
au Liban », in Les droits fondamentaux : inventaire et théorie
générale, Beyrouth, novembre 2003, pp. 23 et s.
718 V. sur la définition du huis clos:
Ph. Piot, Du caractère public du procès pénal,
Thèse de droit, 2012, Université de Lorraine, p. 275 : «
La procédure à huis clos est une exception qui s'applique aux
audiences dont le principe est la publicité. Elle consiste à
faire sortir le public de l'auditoire et à en fermer les portes afin
d'en interdire l'accès ».
719 V. en droit libanais : sur la
procédure du jugement devant la cour criminelle : L'article 249 du CPP
libanais dispose, « Le procès devant la Cour criminelle est
public, à moins que le président de celle-ci ne décide le
huis clos pour des raisons de maintien de l'ordre ou de protection des bonnes
moeurs » ; L'article 250 du CPP libanais dispose :
« ...Toutes les preuves qui permettent de statuer en
l'espèce doivent faire l'objet d'un débat public entre les
parties. Les pièces à conviction doivent être
présentées à l'audience et il doit être donné
lecture des procès-verbaux de saisie correspondants. Il appartient
à chacune des parties de formuler ses observations sur ces pièces
».
174
720
personne qui souhaite y assister. Cette règle vaut en
principe devant toutes les juridictions
721
du jugement en droit français,« sauf dans les
cas des exceptions prévues par la loi, la publicité des
débats et du prononcé est une des conditions de la
validité de toute décision que
722
rendra une juridiction pénale ». En
outre, l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme
consacre le principe de la publicité de procédure comme l'un des
éléments
723
fondamentaux du procès équitable. Ce principe
constitue l'une des plus importantes
724
garanties pour l'accusé. Cette publicité porte
surtout sur les débats que le public est admis à
725
suivre et dont un compte rendu peut être reproduit par
la presse. Selon la jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour
de cassation, la publicité des débats judiciaires est une
règle d'ordre public à laquelle il ne peut être
dérogé que dans les cas limitativement déterminés
par la loi. Ainsi, selon l'article 306, alinéa 1er, CPP, le huis clos ne
peut être ordonné que si la Cour constate, dans l'arrêt, que
la publicité est dangereuse pour l'ordre ou les
726
moeurs.
128. La sanction de la violation du principe de la
publicité des débats devant la Cour. La sanction
résultant de l'inobservation de la règle de la publicité
des audiences est la nullité qui correspond à l'ordre public, car
cette règle est liée aux fondements du jugement pénal
correct.
M. Solaiman Abdelmoniim assure que le manque de la forme de la
publicité ou en d'autres
720 L'article 306 du CPP français
dispose : «Les débats sont publics, à moins que la
publicité ne soit dangereuse pour l'ordre ou les moeurs. Dans ce cas, la
cour le déclare par un arrêt rendu en audience publique.
Toutefois, le président peut interdire l'accès de la salle
d'audience aux mineurs ou à certains d'entre eux. Lorsque les poursuites
sont exercées du chef de viol ou de tortures et actes de barbarie
accompagnés d'agressions sexuelles, le huis clos est de droit si la
victime partie civile ou l'une des victimes parties civiles le demande ; dans
les autres cas, le huis clos ne peut être ordonné que si la
victime partie civile ou l'une des victimes parties civiles ne s'y oppose pas.
Lorsque le huis clos a été ordonné, celui-ci s'applique au
prononcé des arrêts qui peuvent intervenir sur les incidents
contentieux visés à l'article 316. L'arrêt sur le fond doit
toujours être prononcé en audience publique ».
721 V. en droit français : D. Coujard,
« instruction à l'audience », in Rép. pén.
Dalloz, avril 1997, n°6, p .4 : « Les audiences sont
publiques (C. pr. pén., art. 400). Ce principe est affirmé par la
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des
libertés fondamentales (art. 6 ; V. Décr. de publication no
74-360 du 3 mai 1974, D. 1974.181) et par le pacte international relatif aux
droits civils et politiques publié par le décret no 81-76 du 29
janvier 1981 (D. 1981.79) ».
722 Ph. Piot, Du caractère public du
procès pénal, Thèse de droit, 2012, Université
de Lorraine, p. 296.
723 F. Debove et F. Falleti, Précis
de droit pénal et de procédure pénale, op. cit., p.
644.
724 V. en droit français : D. Coujard,
« instruction à l'audience », in Rép. pén.
Dalloz, avril 1997, n° 21, p .6 : « Le juge ne peut fonder
sa décision que sur des preuves qui lui sont apportées au cours
des débats et contradictoirement discutées devant lui (C. pr.
pén., art. 427, al. 2). Ce droit fondamental est encore consacré
par l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de
l'homme et des libertés fondamentales ».
725 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 848, p.
773.
726 Cass. crim., 27 septembre 2000, B. C.,
n° 283, p. 837.
175
termes la publicité des audiences du jugement ou son
omission risque de vicier ces
procédures, ou encore la production de l'audience et
l'arrêt émis suite à celle-ci727. Il est
possible de considérer la publicité comme une condition
fondamentale pour la validité de la procédure du jugement, et sa
négligence conduit à la nullité. Il est reconnu, comme
l'explique
M. Mahmoud Najib Hosni, que la publicité des audiences
est l'un des principes fondamentaux des phases des jugements, et par
conséquent, son omission devrait se traduire par la nullité, et
donc la nullité des arrêts. Cela se présente dans le cas
où la décision prise par le tribunal pour rendre le jugement
discret n'est pas nécessaire, et qu'il était possible de tenir
une audience
728
publique.
B. La violation du principe de l'oralité des
débats de la procédure de jugement.
729
129. Le principe de l'oralité des procédures
des débats. Le caractère d'oralité de la
procédure d'audience dérive du principe de l'intime conviction,
qui gouverne l'activité du jugement répressif moderne : celui-ci
ne doit former son opinion que d'après les preuves qui
730
ont été directement et immédiatement
soumises au débat. La finalité du principe de l'oralité
des débats est de rendre plus efficace la discussion des preuves
à partir desquelles la juridiction de jugement doit se
déterminer. Le principe signifie qu'au stade du jugement, les
731
preuves doivent être administrées oralement. Selon
M. Jean Pradel, le droit français
727 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim,
Nullité de la procédure pénale : tentative de
réadaptation des causes de nullité à la lumière la
justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la
nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 163, p. 265.
728 V. en langue arabe : M. Najib Housni,
Explication du code de procédure pénale, Dar Al-Nahda
Al-Arabia (maison de la renaissance arabe), Le Caire (Egypte), 1986, p. 809.
729 V sur l'oralité des débats
: F. Hélie, Traité de l'instruction criminelle ou
théorie du code d'instruction criminelle, Henri Plon
Imprimeur-Editeur, Paris, 1867, t. 7, p. 487. n°3407 : L'instruction
qui se fait à l'audience doit être exclusivement orale. C'est
là une règle fondamentale de notre procédure criminelle.
La discussion orale est la seule qui puisse faire jaillir la
vérité d'un débat : elle place les accusés et les
témoins en face les uns des autres ; elle provoque les explications et
les révélations, les dénégations ou les aveux ;
elle dépouille les faits de leur première apparence et les livre
aux yeux dans leur nudité. La discussion écrite, plus froide et
plus réservée, n'a ni ces épanchements, ni ces chocs qui
font briller l'éclair ; elle est parfaitement propre à recueillir
les éléments du débat ; mais le débat,
c'est-à-dire la discussion de toutes les preuves, l'examen de tous les
éléments du procès, ne peut se faire qu'oralement à
l'audience ».
730 V. R. Merle et A. Vitu, Traité
de droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris,
2001, tome 2 Procédure pénale, n° 727, p. 840.
731 V. Ph. Conte et P. Maistre Du Chambon,
Procédure pénale, 4e éd., Armand
Colin, Paris, 2002, n° 512, p. 360 : «Le principe signifie qu'au
stade du jugement les preuves doivent être administrées oralement.
À ce titre, il concerne tous ceux qui participent au débat sur
les preuves : le prévenu ou l'accusé doivent être
interrogés, les policiers qui ont constaté l'infraction peuvent
être entendus, les témoins déposent oralement, les experts
relatent
consacre le principe d'oralité en vertu duquel le
tribunal se fonde sur les déclarations faites devant lui par le
prévenu, les témoins et les experts. Mais ce principe
connaît des
exceptions
|
732
|
. L'oralité de l'instruction exprime cette idée
que toute preuve doit être soumise à
|
la connaissance du juge dans sa source originaire ; elle a pour
conséquence l'immédiateté de la preuve. Même dans le
cas où une information a eu lieu, la juridiction de jugement ne se
prononce donc pas sur la lecture des procès-verbaux de cette
information, elle doit entendre et
733
voir, à l'audience, l'accusé, ou le prévenu,
les experts et les témoins . Sans doute le principe
de l'oralité des débats est un principe
substantiel aux droits de la défense
|
734
|
. M. Joseph-Louis-
|
176
Elzéar Ortolan souligne l'importance de discuter
oralement de la preuve dans la phase de jugement qui est la phase d'instruction
finale déterminante dans le procès pénal. Pour arriver
à la connaissance, il est nécessaire de discuter les divers
éléments ou instruments de cette connaissance. Les
éléments ou instruments de cette connaissance sont les preuves
dans le procès pénal. En d'autres termes, pour discuter les
preuves, il est nécessaire de les recueillir. Pour les recueillir, il
est nécessaire de les chercher. D'où, dans l'ordre chronologique
: recherche, investigation, enquête ou inquisition des preuves ;
recueillement, saisie, constatation des divers éléments de preuve
; discussions, débats. L'ensemble de ces trois sortes
d'opérations est dirigé vers un même but, instruire le
juge, former la connaissance du juge, et pourrait porter par conséquent,
le nom d'instruction. Néanmoins, dans le langage pratique de la
procédure pénale, ce nom d'instruction est donné
particulièrement aux deux premières de ces opérations. La
troisième de ces opérations, la discussion ou le débat
des
verbalement le résultat de leurs opérations
et, bien évidement, le ministère public prend des
réquisitions orales et les avocats font valoir leurs plaidoiries
».
732 V. J. Pradel, « Notes en vue d'une
brève présentation sur certaines questions de procédure
pénale », In Conférence annuelle de l'Association
Franco-britannique des juristes, GLASCOW, Septembre 2003 : « Le
président de la cour peut autoriser un témoin ou un expert
à s'aider de documents écrits ; le tribunal peut se fonder sur
les procès-verbaux établis par les policiers ou gendarmes, voire
par le juge d'instruction, quand le déposant est absent le
président en en donnant lecture (ouï-dire ou hersay evidence) ; en
cas d'appel, un usage consacré par la jurisprudence fait que les juges
n'entendent presque jamais les témoins et se fondent donc sur les sur
procès-verbaux ».
733 R. Garraud, Précis de droit
criminelle, 12e éd., Sirey, 1912, p. 805.
734 V. sur ce principe : F. Kuty,
L'impartialité du juge en procédure pénale. De la
confiance décrétée à la confiance
justifiée, Coll. De thèses éd. Larcier, Bruxelles,
2005, Préface de Paul Martens et Marc Preumont, p. 155 : « le
principe de l'oralité des débats apparaît comme un
prolongement du principe du contradictoire. À l'origine, il s'agissait
du principe de la séparation des fonctions de justice répressive
entre l'instruction préparatoire et l'instruction d'audience en
matière criminelle. Le principe de l'oralité implique que les
juges ne peuvent alimenter leur intime conviction que dans les informations
recueillies lors des débats et non dans les pièces de
procédure préparatoire, de telle sorte que les
éléments de preuve qu'ils retiennent ne peuvent être que
les impressions que ces débats leur ont faites. Le juge impartial ne
doit se laisser influencer que par ce qui se passe à l'audience devant
lui ».
preuves constitue l'instruction finale ou l'instruction
déterminante
735
. L'oralité des débats
177
signifie que les preuves et les pièces du procès
sont présentées oralement d'une manière qui
736
permet aux justiciables de les vérifier et de les
réfuter. Cela signifie donc que toutes les procédures de la phase
du jugement se passent à la vue et à l'audition des parties du
: le témoin exprime son témoignage, l'expert
récite son rapport, le procureur
737
procès
public revendique leurs demandes, le tribunal lit les
pièces, et les justiciables se défendent et répondent aux
propos qui ont été émis par voie orale. L'oralité
des débats signifie également que le tribunal refait l'examen du
procès lui-même en écoutant donc les témoins, en
débattant avec les experts, en recevant les demandes et les
défenses oralement, en présence des justiciables. Il s'agit donc
de la façon d'appliquer le principe de la confrontation entre les
justiciables. En effet, afin de permettre à chaque partie du
procès de faire face à l'autre justiciable avec ses preuves, de
connaître celles de son justiciable, et d'en donner son opinion, il faut
que ces preuves soient présentées oralement durant l'audience et
prennent place dans le débat entre les parties au procès. Il est
donc possible de dire que le tribunal et les juges du fond constituent leurs
convictions d'après les preuves en général et pas
seulement à partir de la plaidoirie orale qui se passe devant eux durant
les audiences du jugement. Dans ce sens, nous concluons que le principe de
l'oralité est lié au principe de la conviction judiciaire. En
effet, le juge tire ses convictions de l'ensemble des débats qui se
passent devant lui. En outre, le principe de l'oralité permet
également le contrôle du tribunal sur les travaux de
l'enquête préliminaire, et ce qui en résulte comme preuves
est évalué et estimé par le tribunal durant leur
présentation et lors du débat oral. Il est clair que
l'oralité des procédures de la phase de jugement compte parmi les
droits de chaque justiciable. En effet, le tribunal ne peut pas se limiter
à l'examen des procès-verbaux, étant donné que le
juge ne peut pas constituer sa conviction qu'à partir des discussions
directes menées avec les parties du procès pénal,
présentant ainsi l'oralité des débats durant lesquels
toutes les preuves sont présentées et débattues. En outre,
il lui est interdit de constituer sa conviction et donc de procéder
à son
735 J.-L.-E. Ortolan, Eléments de
droit pénal; pénalité, juridictions, procédure,
suivant la science rationnelle, la législation positive et la
jurisprudence avec les données de nos statistiques criminelles,
Librairie de Plon Frères, Paris, 1855, t. 1, n° 1799, p. 849.
736 V. en droit français : D. Coujard,
« instruction à l'audience », in Rép. pén.
Dalloz, avril 1997, n° 20, p .6 : « Le principe de
l'oralité des débats, qu'aucun texte ne consacre, résulte
logiquement de leur publicité et de la procédure accusatoire qui
exige la discussion des éléments de preuve entre les parties,
devant le tribunal ».
737 V. en droit libanais : L'exposition des
preuves par voie orale. Au début de l'audience, le greffier lit
attentivement le réquisitoire du ministère public ou l'ordonnance
du juge d'instruction ou résume les faits existant dans la plainte
directe avec toutes les preuves contre le défendeur, le juge unique
pénal expose les preuves produites à l'encontre du
défendeur. « Au début du
procès, le greffier donne lecture du réquisitoire du
ministère public ou de l'ordonnance du juge d'instruction, ou
résume les faits mentionnés dans la plainte directe
».(art. 180 CPP libanais).
178
jugement à partir d'un document joint aux pièces
du procès n'ayant pas été présenté durant
l'audience. Dans ce cas, le jugement est nul738. En effet, la
règle générale prévoit que la pièce, qu'elle
soit formelle ou officielle, n'a pas d'authenticité dans l'affirmation,
et elle est donc soumise comme les autres preuves à l'estimation du juge
et à sa conviction739. Le système pénal
libanais repose sur une procédure essentiellement orale. La
procédure de jugement et de vérification de la preuve devant le
juge unique doit obligatoirement respecter le principe et les
740741
règles de l'oralité du débat,
conformément à l'article 178 du CPP libanais. La Cour criminelle
ne statue pas sur pièces pour forger son intime conviction, mais
d'après les preuves administrées directement devant elle durant
l'audience. Les débats vont se dérouler oralement
742
devant la Cour criminelle libanaiseconformément à
l'article 250 du CPP libanais qui
dispose que « les débats se déroulent
oralement »
743
. Le président de la Cour criminelle peut
744
ordonner ou décider d'enregistrer certains
procès sur cassette audio et vidéo . Les preuves sont
soumises au débat et à la libre discussion des parties devant la
Cour criminelle. Les parties du procès pénal, le président
de la Cour et ses conseillers pourront discuter les divers
745
.
éléments des preuves
130. L'oralité des débats en droit
français. Le caractère d'oralité de la
procédure d'audience dérive du principe de l'intime conviction,
qui gouverne l'activité du jugement
738 V. en langue arabe : A. Fathi Srour,
Le médiateur en procédure pénale, 7e
éd., Dar Al-Nahda Al-Arabia (maison de la renaissance arabe), Le Caire
(Egypte), 1996, p. 720.
739 V. en langue arabe : M. Mostafa,
L'évolution de la procédure pénale en Egypte et dans
d'autres pays arabes, 2e éd., L'imprimerie de
l'université du Caire (Egypte), Le Caire (Egypte), 1985, p. 449.
740 Les caractères principaux de la
procédure du jugement devant le juge unique qui sont l'oralité,
le contradictoire et la publicité sont applicables devant la cour
d'appel comme indique l'article 223 du CPP libanais dispose : « La
Cour d'appel fixe la date du procès en appel, dans le cadre duquel sont
reprises les règles de procédure ordinairement applicables devant
le juge unique ».
741 V. en droit libanais : L'article 178 du
CPP libanais dispose : « Les débats se déroulent, sous
peine de nullité, en audience publique et oralement, à moins que
le juge unique ne décide le huis clos pour des raisons de
préservation de l'ordre public ou de protection des bonnes moeurs. En
tout état de cause, il peut interdire l'accès à la salle
d'audience aux mineurs » ; V. sur l'oralité de la
procédure du jugement devant le juge pénal unique : l'article 186
du CPP libanais dispose : « Le témoin dépose oralement.
Il ne peut être interrompu ni par la partie civile, ni par le
défendeur, ni par leurs conseils respectifs ».
742 V. en droit libanais : sur
l'oralité la procédure du jugement devant la cour criminelle :
L'article 255 du CPP libanais dispose : « ... Le témoin
dépose alors oralement et sa déposition est consignée par
le greffier au procès-verbal de l'audience ».
743 L'article 250 du CPP libanais
744 L'article 250 du CPP libanais
745 L'article 250 du CPP libanais dispose :
« Toutes les preuves qui permettent de statuer en l'espèce
doivent faire l'objet d'un débat public entre les parties. Les
pièces à conviction doivent être présentées
à l'audience et il doit être donné lecture des
procès-verbaux de saisie correspondants. Il appartient à chacune
des parties de formuler ses observations sur ces pièces ».
répressif moderne : celui-ci ne doit former son opinion
que d'après les preuves qui ont été
746
directement et immédiatement soumises au débat. M.
Jean Pradel l'affirme : l'oralité découle de l'intime conviction
du juge parce que ce dernier ne doit pouvoir se décider que sur
des preuves qui ont été directement et
immédiatement soumises aux débats devant lui747
. Si la
179
mise en état des affaires au stade de l'enquête
et de l'instruction préparatoire réserve une place essentielle
à l'écrit, il n'en va plus de même s'agissant du
déroulement de l'audience devant les différentes juridictions de
jugement. Si l'oralité concerne plus particulièrement
l'administration des preuves, elle intéresse plus
généralement tous ceux qui, à un titre ou à un
autre, sont susceptibles d'éclairer les juges, prévenus ou
accusés, parties civiles, avocats,
748
témoins, experts, enquêteurs, ainsi le
ministère public
.
131. Le domaine et le champ du principe de
l'oralité des procédures. Le principe de l'oralité
est parmi les principes obligatoires dans toutes les procédures de la
phase du jugement depuis son début jusqu'à la prononciation du
verdict au cours d'une audience publique. En effet, le tribunal est
obligé d'écouter les témoins et les experts, de
débattre avec eux, et de présenter les preuves durant l'audience.
Par conséquent, l'oralité du débat représente une
forme indispensable. Ainsi, la sagesse est présentée d'une part
par la nécessité de cette forme pour le bon déroulement de
la justice. Le juge écoute de nouveau les témoins et les experts
et présente toutes les preuves et les pièces pour le
débat, ce qui influe positivement sur l'opération de la
découverte de la vérité qui est le but de l'action
publique. D'autre part, l'oralité des procédures de la phase du
jugement est une garantie des droits de la défense, voire des droits des
autres parties du procès. En effet, durant la phase du jugement,
l'accusé écoute les revendications du procureur, les paroles des
témoins et les rapports des experts, et peut donc y répondre, et
réfuter les preuves présentées contre lui. Il n'ignore
donc aucune preuve présentée, ni la parole d'un témoin.
Par conséquent, il est possible de déterminer le domaine de ce
principe en disant qu'il est strictement interdit au juge du fond de fonder son
jugement sur des procédures prises sans connaissance des justiciables,
ou sans leur permettre de débattre autour des preuves produites. Il
signifie que les preuves et les pièces du procès sont
présentées oralement d'une manière permettant aux
justiciables de les consulter et de les réfuter et par
conséquent, toutes les procédures de la phase du jugement se
passent sous la vue et l'audition des parties du procès, ou en d'autres
termes le témoin présente son témoignage,
746 R. Merle et A. Vitu, Traité de
droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris,
2001, tome 2 Procédure pénale, n° 727, p. 840.
747 J. Pradel, Procédure
pénale, 17e éd., Cujas, 2013, n° 847, p.
772.
748 F. Debove et F. Falleti, Précis
de droit pénal et de procédure pénale, op. cit., p.
647.
l'expert lit son rapport, le procureur présente ses
demandes, le tribunal lit les pièces dont il dispose et les justiciables
se défendent et répondent à ce qui leur est adressé
oralement749. L'opinion du juge ne résulte donc pas seulement
des procédures de l'enquête préliminaire mais le juge
refait l'enquête de nouveau durant l'audience ce qui a pour
conséquence de permettre le principe de la conviction personnelle
à partir des preuves présentées durant les plaidoiries.
C. La violation du principe du débat
contradictoire de la procédure du jugement.
132. Le principe du débat contradictoire. Le
procès pénal est essentiellement
750
contradictoire . Il suppose la présence des parties aux
débats et devant le juge, dans une
situation et avec des armes égales
|
751
|
. Le principe du contradictoire, n'est pas le propre de la
|
procédure de jugement. Il trouve à s'appliquer
en principe dès la phase d'instruction, mais est
752
particulièrement fort au cours de la phase du jugement.
Lors de cette phase, le contradictoire se traduit par la possibilité
pour les parties de défendre leurs intérêts, ce qui
753
implique leur présence, et la possibilité de
prendre la parole pour discuter des preuves. Le principe du contradictoire est
lié à celui d'égalité des armes entre les parties
au procès : « Les débats sont contradictoires,
c'est-à-dire que les parties discutent sur un pied
d'égalité, sous le contrôle du président de la
juridiction à qui sont confiées la direction des débats et
la police
de l'audience »
|
754
|
. Mais il le dépasse, dans la mesure où il
suppose l'existence d'un véritable
|
180
749 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim,
Nullité de la procédure pénale : tentative de
réadaptation des causes de nullité à la lumière la
justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la
nouvelle université, Egypte, 2002, p. 268.
750 V. P. Bolze, Le droit à la
preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit,
2010, Université Nancy 2, p. 84 : « Le principe du
contradictoire s'impose donc non seulement entre les parties, mais
également entre le juge et les parties ».
751 R. Garraud, Précis de droit
criminelle, 12e éd., Sirey, 1912, n° 426, p.
801.
752 V. sur l'absence de possibilité de
contradiction des parties : A. De Nauw, « Les règles d'exclusion
relatives à la preuve en procédure pénale belge »,
in Rev. dr. pén. crim. , 1990, pp. 705-723, V. spec. p. 714 :
« La cause d'exclusion des preuves réside dans la règle
que les parties doivent disposer de la possibilité de contredire
librement la valeur probante des éléments de la cause
».
753 V. P. Bolze, Le droit à la
preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit,
2010, Université Nancy 2, p. 97 : « La procédure
d'audience contradictoire implique la présence des différentes
parties au procès pénal et la liberté pour chacune d'elle
de participer au débat sur la preuve ».
754 G. Levasseur, A. Chavanne, J. Montreuil,
B. Bouloc et H. Matsopoulou, Droit pénal général et
procédure pénale, 14e éd., Dalloz, 2002,
n° 773, p. 305.
755
débat judiciaire. Selon MM. Roger Merle et André
Vitu, le trait le plus important est la contradiction dans la procédure
à l'audience ; les parties sont présentes aux débats, y
756
produisent leurs preuves et y combattent librement celles de
leurs adversaires. Ce principe signifie que les parties présentes
doivent pouvoir discuter contradictoirement les éléments de
757
preuves acquis aux débats dans la phase de jugement.
Chaque partie durant l'audience est libre de discuter les preuves
administrées par les autres parties du procès et en même
temps
d'invoquer ses propres preuves
|
758
|
. La vérité dans le procès pénal ne
peut être vue qu'à travers
|
181
la contradiction entre l'accusation et la défense sur
la base de l'égalité des armes. L'article préliminaire du
CPP français dispose « la procédure pénale doit
être équitable et contradictoire et préserver
l'équilibre des droits des parties ». Dans le procès
pénal, le principe du débat contradictoire recouvre le droit
d'être entendu par le juge du fond qui doit forger sa conviction et en
même temps permet de discuter de façon contradictoire tous les
éléments de preuves. Ce principe implique que le juge de fond
pour juger l'affaire pénale ne puisse puiser les éléments
de sa conviction que dans les preuves qui ont été soumises aux
759
débats contradictoires . M. Franklin Kuty
considère que le principe du contradictoire constitue sans doute une
garantie fondamentale de l'impartialité du juge. Le principe du
760
contradictoire est l'un des principes essentiels sur lesquelles
les preuves pénales se basent
761
parce qu'il permet aux parties de se défendre avant qu'une
décision soit rendue contre
755 V. P. Bolze, Le droit à la
preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit,
2010, Université Nancy 2, p. 84 : « Le juge est tenu en toutes
circonstances d'observer et de faire observer le principe le la contradiction
et ne peut retenir dans sa décision que les éléments et
les explications qu'il a recueillis contradictoirement ».
756 R. Merle et A. Vitu, Traité de
droit criminel, 5e éd., Éditions Cujas, Paris,
2001, tome 2 Procédure pénale, n° 731, p. 846.
757 V. Ph. Conte et P. Maistre Du Chambon,
Procédure pénale, 4e éd., Armand
Colin, Paris, 2002, n° 48, p. 32 : « Le principe du
contradictoire signifie, aussi, que les parties, présentes, doivent
pouvoir discuter contradictoirement les éléments de preuve acquis
aux débats ... Le principe du contradictoire engendre des droits pour
les parties et des devoirs pour les juges. ».
758 V. P. Bolze, Le droit à la
preuve contraire en procédure pénale, Thèse de droit,
2010, Université Nancy 2, p. 84 : « La discussion sur la preuve
envisagée sous couvert du contradictoire pourrait dès lors
s'entendre de la possibilité de contester les éléments de
preuve fournis par l'accusation et de pouvoir les combattre par tous moyens
».
759 V. sur le principe du contradictoire :
Ch. Gavalda-Moulenat, Le principe du contradictoire en procédure
pénale, Thèse de droit, 2005, Université Montpellier
I.
760 V. en même sens : F. Kuty,
L'impartialité du juge en procédure
pénale. De la confiance
décrétée à la confiance justifiée,
op. cit., p. 131.
761 V. sur le principe contradictoire : X.
Labbée, Introduction générale au droit: Pour une
approche éthique, Presse Universitaire du Septentrion, 2005, p. 247
: « C'est le juge qui est le gardien du principe du contradictoire :
ce qui veut dire qu'il ne peut statuer que dans les limites du procès,
qu'il peut écarter des débats des pièces ou des
conclusions non communiquées, ou encore donner aux parties le temps
nécessaire pour se défendre. On
182
762
elles. En effet, les parties se confrontent avec les preuves
et reçoivent leur défense ou leurs observations à ce
sujet. Le principe du contradictoire est l'un des plus importants principes du
contentieux et l'une des garanties de la réalisation de la justice. Le
principe du contradictoire est une application d'un droit plus large et plus
profond, celui de la défense. Par conséquent, le principe du
contradictoire occupe une place importante parmi les principes essentiels dans
l'organisation de la procédure pénale. Ce principe signifie
l'obligation de la présence des parties ou des adversaires devant le
juge au cours des discussions et des plaidoiries dans toutes les phases de
l'enquête finale, ainsi que leur réponse aux
éléments de preuve présentés par les autres parties
avec des arguments et des preuves échangés. En outre, il faut
être en mesure de les clarifier et de se défendre en personne ou
par des avocats désignés par les parties elles-mêmes ou par
le tribunal automatiquement en relation avec la Cour pénale, et le
service des mineurs au tribunal. Il est donc clair que la présentation
des preuves et leur discussion sont la base sur laquelle le tribunal forme sa
foi et son jugement. En outre, il n'est pas permis au tribunal d'adopter sa
décision sur la base d'une preuve qui n'a pas été
soulevée durant l'audience, ou qui a été soulevée
mais non consultée ou discutée par les justiciables. Dès
lors, il est interdit d'accepter de nouvelles preuves de la part de l'un des
justiciables après la clôture de l'audience, car cela ne
permettrait pas aux autres adversaires de les débattre. Dans le cas
où cette preuve est considérée comme importante, le juge
doit décider d'ouvrir à nouveau l'audience afin que les autres
opposants puissent consulter la nouvelle preuve et en débattre. Dans le
cas où la Cour a violé les règles
précédentes et a prononcé son jugement, ce dernier est
nul763.
133. Le principe du contradictoire est une forme
fondamentale de la procédure pénale libanaise. Le principe
du contradictoire exige que le défendeur à une procédure
pénale ait pris connaissance de toutes pièces et
éléments de preuve qui influencent et entrent dans la
construction de l'intime conviction du juge. L'article 179 du CPP libanais
énonce ce
comprendra que le respect du principe contradictoire rend
impossible la justice expéditive : il faut donner le temps aux parties
».
762 V. sur le principe du débat
contradictoire : L. Miniato, Le principe du contradictoire en droit
processuel, L.G.D.J., 2008.
763 V. en langue arabe : A. Abdelkader
Kahwaji, Interprétation du Code des procédures
pénales. Etude comparative, 1er éd.,
Éditions Manchourat al. Halabi al Qanounya (Éditions Juridiques
Halabi), Beyrouth (Liban), 2002, p. 452 ; V. R. Garraud et P. Garraud,
Précis de droit criminel, 15e éd.,
Sirey, Paris, 1934, n° 383, p. 805: « Il n'est pas permis au juge
de tenir compte d'une connaissance personnelle des faits acquise en dehors de
ses fonctions, car les faits qu'il a connus en dehors des débats
échappent à la discussion publique et contradictoire qui est le
seul moyen d'en vérifier l'exactitude et d'en apprécier la
portée. Par suite, il est de jurisprudence constante que tout jugement
qui admet ou repousse un moyen d'accusation ou de défense, en se basant
sur la connaissance personnelle acquise par les juges du fait en dehors des
débats, doit être annulé, parce qu'il est contraire au
principe de la contradiction ».
183
764
principe qui est applicable devant toutes les juridictions de
jugement en droit libanais. Le principe du contradictoire entre les
justiciables forme un élément fondamental de la
765
procédure, qui complète le principe de
l'oralité. L'implication de ce principe permet aux autres parties du
procès pénal de donner leurs témoignages ainsi que leurs
preuves ou éléments des preuves, et d'informer également
chacun des accusés des arguments et des preuves fournis par leur
adversaire, et en général sur toute procédure judiciaire
ouverte par le tribunal, notamment si cela influence le jugement adopté.
Le principe du contradictoire reste incomplet sans que le juge examine
lui-même les éléments de preuve conformément aux
exigences de l'enquête finale. La raison évidente est de renforcer
le principe du contradictoire en le considérant simultanément
comme une idée et une forme procédurale. D'une part, ce principe
est une idée qui réalise les droits de la défense. D'autre
part, ce principe est une forme procédurale étant donné
qu'il est un moyen de mener le procès dans la phase du jugement d'une
manière équilibrée préservant ainsi les droits de
toutes les parties dans le but de procéder au bon déroulement de
la justice. La chambre criminelle de la Cour de cassation du Liban a
considéré dans sa résolution n°138 en date du
28/06/2007 que faire sortir l'accusé de la salle de tribunal
pénale pour interroger l'autre accusé, de le ramener et de
l'interroger
sans l'informer des faits produits en son absence est
illégal766. Durant l'audience du 09/06/2005, le
président de la Cour criminelle a fait sortir l'accusé H.K de la
salle de la Cour pénale et a commencé à interroger
l'accusée A.CH, puis il a fait entrer le défendeur H.K dans la
salle et a commencé à l'interroger, sans l'informer du
témoignage qui a eu lieu en son absence, ce qui constitue une violation
du texte de l'article 264 du CPP libanais qui dispose que le tribunal ne peut
pas poursuivre le débat sans la présence de l'accusé dans
la salle de l'audience et son information du témoignage qui a eu lieu en
son absence. Par conséquent, le témoin doit faire un
témoignage public devant le tribunal en présence de
l'accusé, qui peut donc débattre avec le témoin
après avoir fait son témoignage.
134. Le caractère contradictoire des débats
en droit français. Selon une jurisprudence constante et
rigoureusement appliquée par la Cour de cassation française
« aux termes de l'article 427 du Code de procédure
pénale le juge ne peut fonder sa décision que sur les
764 L'article 179 du CPP libanais dispose :
« Le juge ne peut fonder sa décision que sur les preuves dont
il dispose et qui ont fait l'objet d'un débat contradictoire en audience
publique ».
765 V. en langue arabe : S. Abdelmoniim,
Nullité de la procédure pénale : tentative de
réadaptation des causes de nullité à la lumière la
justice de cassation en Egypte, au Liban et en France, maison de la
nouvelle université, Alexandrie (Egypte), 1999, n° 166, p. 270.
766 Composée du président M.
Abdullah Sami et des conseillers M. Ghassan Rabah et M. Elias Nayfeh,
Décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation libanaise
n° 138 rendu le 28/06/2007.
éléments de preuve, qui lui sont
apportés au cours des débats et contradictoirement
discutés
767
devant lui ». Deux principes régissent le
déroulement des débats et limitent les pouvoirs du
768
président de la Cour : celui de l'oralité des
débats et celui du contradictoire. En vertu du principe du
contradictoire, les pièces nouvelles doivent être
communiquées à toutes les parties qui en font la demande. Selon
l'article 327 du CPP français, les débats devant la Cour
d'assises débutent avec la lecture par le greffier de la décision
de renvoi ainsi que, lorsque la Cour d'assises statue en appel, des questions
posées à la Cour ayant statué en premier ressort, des
réponses faites aux questions, de la décision et de la
condamnation prononcée. L'article 327 du Code de procédure
pénale français dispose que « le président invite
l'accusé et les jurés à écouter avec attention la
lecture de la décision de renvoi, ainsi que, lorsque la Cour d'assises
statue en appel, des questions posées à la Cour d'assises ayant
statué en premier ressort, des réponses faites aux questions, de
la décision et de la condamnation prononcée. Il
invite le greffier à procéder à cette
lecture »
|
769
|
. La chambre criminelle de la Cour de cassation
|
française avait déjà jugé qu'il
suffit qu'il ne résulte d'aucune mention que le greffier d'une Cour
d'assises statuant en appel ait donné lecture de l'arrêt de
condamnation prononcé par la Cour d'assises de première instance,
pour que soit encourue la cassation de l'arrêt prononcé en
appel ainsi que de la déclaration de la Cour et du jury
et des débats qui l'ont précédée
|
770
|
. Selon
|
184
la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de
cassation française : « Le juge ne peut fonder sa
décision que sur des preuves qui lui sont apportées au cours des
débats et
contradictoirement discutées devant lui
»
|
771
|
. Dans le même arrêt précédent, la
Cour a
|
considéré que violent ce principe « les
juges d'appel qui se sont déterminés sur des indications fournies
par le service de la répression des fraudes, sans que ces
documents,
767 Cass. crim., 15 décembre 1970,
B.C., n° 338, p. 826.
768 Cass. crim., 30 octobre 2007, B.C.,
n° 260 : « Vu les articles préliminaire et 148-6 du
Code de procédure pénale ; Attendu qu'il résulte
du premier de ces textes que la procédure pénale doit être
équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des
droits des parties ».
769 V. F. Desportes et L. Lazerges-Cousquer,
Traité de procédure pénale, 3e
éd., Economica, 2013, n° 3280, p. 2091.
770 Cass. Crim., 11 septembre 2002, B.C.,
n° 161, p. 559, Y. Monnet, Note sous Cass. Crim., 23 octobre 2002, in
Gaz.Pal., 05 août 2003, n° 217, p. 12.
771 V. Cass. Crim., 2 juillet 1991, B.C.,
n° 290, p. 739 : « Tout prévenu a droit à
être informé d'une manière détaillée de la
nature et de la cause de la prévention dont il est l'objet et doit, par
suite, être mis en demeure de se défendre, tant sur les divers
chefs d'infraction qui lui sont reprochés, que sur chacune des
circonstances aggravantes susceptibles d'être retenues à sa
charge. Il en est ainsi de l'état de récidive, non visé
à la prévention, mais retenu par la cour d'appel pour aggraver la
peine ».
adressés au procureur général, aient
été soumis aux débats et contradictoirement
772
discutés ».
185
772 Cass. crim., 17 novembre 1965, B.C.,
n° 239.
|