Paragraphe 2 : les effets de la concurrence fiscale
Toutes les formes de concurrence sont nuisibles lorsqu'elles
ne sont pas encadrées par des règles. La concurrence entre Etat
en vue d'attirer les facteurs de productions peut avoir autant de
conséquences néfastes que les autres formes de concurrences.
Pour améliorer l'environnement des affaires et ainsi
attirer les investisseurs, beaucoup de pays ont recours à des politiques
d'incitation fiscale. Elles consistent à accorder des régimes
fiscaux plus favorables à certains secteurs ou acteurs de
l'économie plus qu'à d'autres et constituent malheureusement les
principales manifestations de la concurrences fiscale entre les Etats. Ainsi,
la concurrence fiscale remet en cause le principe de la souveraineté des
Etats qui, dans les faits, perdent la liberté de déterminer le
niveau et la structure de leurs impositions.
Pour mieux aborder les effets de la concurrence fiscale, nous
allons voir en premier lieu la baisse des recettes (A) et en second lieu
l'augmentation des emprunts (B).
A- La baisse des recettes
Un système d'imposition est équitable s'il
répartit la pression fiscale entre les agents économiques en
fonction de leur capacité contributive. Or, la concurrence fiscale tend
à entraîner une réduction de l'imposition des assiettes les
plus mobiles et un alourdissement de celle des assiettes les moins mobiles.
En effet, en l'absence de coordination, un Etat
confronté à la fuite des assiettes les plus mobiles vers les pays
où elles sont le moins taxées, est conduit, soit à
accepter un tarissement de ses recettes, soit à baisser le taux
d'imposition sur les bases mobiles.
La concurrence fiscale remet en cause le principe de la
souveraineté des Etats, qui, dans les faits, perdent la liberté
de déterminer le niveau et la structure de leur imposition.
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Ainsi, du fait de la concurrence, les impositions convergent
presque mécaniquement vers la baisse.98 Des lors, les Etats
engagés dans une concurrence fiscale courent le risque de voir leurs
ressources fiscales diminuer.
Les autres éléments de la fiscalité
pesant sur les entreprises telles que la charge patronale sur les salaires et
les impôts locaux ne sont harmonisés et demeurent très
hétérogènes.99 La pression concurrentielle
semble inciter les Etats de l'UEMOA à alléger les
prélèvements pour réduire leur incidence sur les couts de
productions ou sur le cout de la main d'oeuvre.
La théorie économique s'est ainsi
focalisée sur les effets comparés de la concurrence fiscale sur
le travail, supposé peu mobile, et le capital, supposé
très mobile. Elle indique que le taux de l'impôt sur le capital
tend vers zéro lorsque le nombre d'Etats en concurrence devient
très grand. A la limite, seul le travail supporte alors le fardeau
fiscal. Les modèles théoriques tendent à montrer que
l'impôt sur le capital est prélevé en l'absence de
coopération - à un taux nettement plus faible que celui sur le
travail.
La mise en oeuvre de ces incitations fiscales se fait pour
l'essentiel par un système dualiste, c'est-à-dire qu'on utilise,
mis à part les incitations de droit commun, des régimes fiscaux
dérogatoires. Les dépenses fiscales sont à l'origine d'un
manque à gagner énorme en matière de recettes pour les
économies de la région, car elles constituent des ressources
auxquelles l'Etat a renoncé. Pour y remédier, la directive
n°01/2009/CM/UEMOA du 27 mars 2009 portant Code de Transparence dans la
gestion des finances publiques au sein de l'UEMOA, transposée au
Sénégal par la loi 2012-22 du 27 décembre 2012,
préconise que les décisions ayant une incidence sur le budget de
l'Etat soient chiffrées et rendues publiques, et que l'évaluation
de l'impact financier de ces décisions fasse partie des documents
budgétaires à joindre au projet de loi de finances de
l'année.
Dans la même optique que cette directive, au
Sénégal, le Ministère en charge des Finances a entrepris,
avec la Direction Générale des Impôts et des Domaines
(DGID) une évaluation des dépenses fiscales pour les
périodes 2008 et 2009, puis 2010, 2011 et 2012. Avec ces études,
on a répertorié 327 dispositions fiscales dérogatoires
à la norme de référence dont 58% dans le droit commun et
42% résultant des régimes dérogatoires. Ces régimes
dérogatoires prennent la
98 Ibidem
99 Ibidem
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Financière et Fiscale Page 73
forme de codes, de conventions d'établissement, de lois
ou règlements comportant des mesures ayant une incidence fiscale.
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