Paragraphe 2 : les insuffisances liées aux mesures
fiscales incitatives
Les insuffisances liées aux mesures fiscales
incitatives se manifestent par les limites liées aux avantages consentis
(A), mais aussi des conditions d'accès parfois excessives (B).
A- Les limites liées aux avantages consentis
En dépit, de l'insertion des mesures fiscales
incitatives qui étaient dispersés dans le CGI qui comptait
déjà un nombre non négligeable,81 on remarque
qu'il y'a des insuffisances quant aux avantages consentis par le
législateur aux investisseurs par rapport à d'autres pays
Africains qui sont aller beaucoup plus loin que le Sénégal en
terme d'allègement et d'exonération, mais pour ne pas être
exhaustif nous citerons deux cas qui sont entre autre :
La réduction d'impôt pour exportation qui est le
résultat du transfert dans le droit commun des mesures relevant de la
fiscalité intérieure qui figuraient dans la loi n° 95-34 du
29 décembre 1995 instituant le statut de l'entreprise franche
d'exportation (EFE). Cette loi bien qu'elle contienne des conditions d'octroi
des avantages qui était plus lourdes que les nouvelles conditions
prévues dans le CGI qui sont désormais aux nombres de deux (02)
à savoir l'exportation directe d'au moins 80 % de la production et la
justification du rapatriements des devises.82 Mais, elle
prévoyait beaucoup d'avantages qui ont été retirés
par le législateur dans la réforme du CGI de 2012 tel que :
- L'exonération de l'impôt sur le revenu des
valeurs mobilières prélevé par l'entreprise sur les
dividendes distribués ;
- L'exonération de la contribution foncière sur
les propriétés bâtie, de la contribution foncière
sur les propriétés non bâties, de la contribution des
licences.83 tandis que la nouvelle réforme du droit commun
incitatif reprend simplement les avantages suivants qui étaient
déjà contenu dans le statut de l'EFE ;
- L'exonération à la CFCE, (contribution
forfaitaire a la charge de l'employeur) ;
- L'exonération des patentes ;
- L'exonération des droits d'enregistrement, notamment
pour les actes de constitution et de modification de statuts ;
- Modification des droits de timbre.
81 Mancabou , Op cit, p 73.
82 CGI édition 2016, Op, p,111 , article 253
83 Loi 65-35 du 21 décembre 1995 instituant le
statut de l'entreprise franche d'exportation, article 7
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Au regard de ce qui précède, on observe que le
législateur a préférer alléger les conditions
d'éligibilités à cette mesure d'incitation fiscale, mais
réduire les avantages au lieu de tout simplement prendre une disposition
équilibrée c'est-à-dire qui réunit à la fois
le souci de faciliter les conditions d'éligibilité et celui
d'avoir plusieurs avantages pour attirer les investisseurs.
Par contre au Togo, les entreprises franches d'exploitations
bénéficient d'un régime beaucoup plus avantageux qu'au
Sénégal. En effet, la Zone Franche Togolaise offre aux
entreprises exportatrices une des meilleurs environnements des affaires en
Afrique de l'Ouest. En effet, les entreprises agréées
bénéficient des avantages fiscaux suivants :
- Stabilisation de l'impôt sur les
sociétés au taux de 0% pendant les 5 premières
années ; - Paiement de l'impôt sur les sociétés au
taux de 8% sur le bénéfice imposable de la 6e
à
la 10e annéé ou paiement de
l'impôt minimum forfaitaire proportionnellement
correspondant ;
- Paiement de l'impôt sur les sociétés au
taux de 10% sur le bénéfice imposable de la 11e
à la 20e année ou paiement de l'impôt minimum
forfaitaire proportionnellement correspondant ;
- Paiement de l'impôt sur les sociétés au
taux de 20% sur le bénéfice imposable à partir de la
21e année ou paiement de l'IMF forfaitaire
proportionnellement correspondant ;
- Exonération de l'impôt sur les dividendes
pendant les 5 premières années, paiement de 50% du montant de cet
impôt calculé dans les conditions de droit commun de la
6e à la 10e année ;
- Application du droit commun à partir de la
11e année ;
- Stabilisation de la taxe sur les salaires au taux
réduit de 2% pendant la durée de vie de l'entreprise en zone
franche, sous réserve des dispositions de l'article 22 de la loi portant
statut de zone franche industrielle ;
- Exonération de la taxe foncière pendant les 5
premières années ;
- Paiement de cette taxe au taux de 15% du montant de la taxe
calculée au droit commun à partir de la 21e
année ;
- Exonération de la TVA sur les travaux et services
réalisés pour le compte de l'entreprise bénéficiant
du statut de la zone franche.84
84 Togo, Loi N° 2011-18 du 24 juin 2011 portant
statut de zone franche industrielle, article 21
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Nous remarquons que, le législateur fiscale Togolais a
fait preuve d'audace en instaurant ce régime d'incitations fiscale pour
favoriser l'implantation sur le territoire Togolais des entreprises franches
d'exportations.
En ce qui concerne le deuxième cas, on constate que le
législateur n'a pas prévu dans le CGI la possibilité pour
les pouvoirs publics d'étendre les avantages fiscaux accordées
aux cocontractants locaux des investisseurs au niveau du droit commun
incitatif. Or au Cameroun l'article 11 de la loi N° 2013/004 du 18 avril
2013 modifiée par la loi 201//015 du 10 juillet 2017, fixant les
incitations à l'investissement privé en République du
Cameroun prévoit que : « En raison de l'importance du projet
dument évaluée, l'Etat peut exceptionnellement étendre le
bénéfice de quelques exonérations fiscales et
douanières aux actionnaires, aux promoteurs et aux cocontractants locaux
de l'investisseur par voie contractuelle »85
En outre pour soutenir et encourager l'exportation des
produits vers l'étranger, à l'instar du Sénégal les
autorités Camerounaises ont prévues à travers,
l'arrêté N°0003366MINFI/SG/DGI/DGD du 18 novembre 2013
qu'outre les incitations communes et spécifiques, les entreprises
nouvelles agrées qui réalisent des opérations
d'exportation à hauteur de 50% du chiffre d'affaires annuel hors taxes
peuvent bénéficier des incitations fiscales ci-après pour
une durée n'excédant pas cinq (5) ans, c'est-à-dire une
exonération du droit de sortie sur les produits manufacturés
localement et bénéficié du régime du
perfectionnement actif prévu par le code des Douanes.86
Cet arrêté élargit le champ des secteurs
régis par les textes particuliers auxquels ne s'appliquent pas les
dispositions de la loi N°2013/004 du 18 avril 2013 modifié par la
loi 2017/015 du 12 juillet 2017, fixant les incitations à
l'investissement privé en République du Cameroun. Il s'y ajoute,
les régimes conventionnels, le régime de réinvestissement
du CGI, les régimes économiques du code des Douanes et tout autre
régime particulier accordant des avantages de nature fiscale et/ou
douanière. Nous constatons également que cette loi offre des
conditions plus souples en termes de taux de marchandises à exporter qui
est de 50%, tandis que le taux fixé par le législateur fiscal
sénégalais est de 80% soi une différence de 30%. De plus,
les avantages octroyés par le législateur Camerounais sont
nombreux87 par rapport aux avantages que l'on retrouve au
Sénégal. Par conséquent, d'un point de vue fiscal, les
investisseurs qui sont
85 Ndzana Biloa la fiscalité levier pour
l'émergence des pays de la zone franc le cas du Cameroun, l'harmattan,
Paris, 2016, 356 p
86 Ibidem
87 Voir les articles 5,6, 7, 14, 15 et 16 de la loi
n°2013/004 du 18 avril 2013 modifié par la loi 201//015 du 12
juillet 2017, fixant les incitations fiscales à l'investissement
privé en République du Cameroun.
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en quête perpétuelle d'avantages, choisiront
d'implanter leurs capitaux au Cameroun plutôt qu'au
Sénégal.
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