2- La jouissance
Les sociétés anonymes haïtiennes ont un
droit de jouissance absolu sur leurs biens immobiliers. Elles jouissent de
l'intégralité des prérogatives liées au droit de la
propriété. La législation consacre cette capacité
de jouissance sans réserve en stipulant qu' « elles jouiront sans
restrictions de tous les droits reconnus à l'haïtien quant à
la propriété immobilière. »
a)Quantité disponible et utilisation
Les S.A. haïtiennes ont la capacité
d'acquérir tous les terrains, maisons, et tout autre immeuble par nature
ou par destination qu'elles désirent. Et sans qu'elles aient à
justifier leur utilisation par devant les autorités. Autrement dit,
elles peuvent avoir tous les biens immeubles, sans restrictions de superficie,
mais aussi et surtout, elles peuvent les utiliser à leur gré et
pour leur besoins spécifiques. L'utilisation peut n'avoir aucun rapport
avec l'exploitation de l'objet commercial. Cette capacité juridique des
sociétés anonymes haïtiennes s'accompagne d'une aptitude
légale de recueillir tous les fruits des biens immeubles acquis. C'est
une jouissance pleine et entière qui suppose :
i) L'acquisition de la quantité voulue de biens
immobiliers, sans limites de superficie.
ii) L'acquisition effective sans notification et justification
par devant les autorités compétentes.
iii) La liberté de les occuper, de les donner en
usufruit, les louer pour réaliser des revenus, les hypothéquer
afin d'en percevoir des intérêts, les exploiter dans le but d'en
recueillir les fruits naturels et industriels ou les laisser
inexploités.
iv) L'exercice des actions en justice pour faire entrer dans
leur patrimoine tous les biens immobiliers acquis mais qui sont passés
en situation de litige.
72
v) L'exercice des actions en justice pour
récupérer leurs créances sur toutes sortes de prêts
consentis.
vi) L'exercice des actions paulienne et oblique pour
protéger leur patrimoine. b) Suspension ou transmission de
droit
Généralement, un droit se perd suite à
une déchéance, provoquée par des peines correctionnelles
ou criminelles. Ou, à la mort du de cujus, le droit se transmet. C'est
presque la même chose pour une société commerciale,
particulièrement pour la société anonyme. Une
société anonyme à qui les autorités
compétentes ont révoqué l'autorisation de fonctionnement
(art. 15 du décret du 23 Août 1960), est considérée
comme déchue. De plus, une société en faillite est
réputée civilement morte. Elle ne conserve son existence que pour
les besoins de sa liquidation qui intervient dans la dissolution. Tous les
biens meubles et immeubles doivent être vendus pour les besoins de la
liquidation et le partage entre les associés de l'éventuel boni
de liquidation. Et à partir de ce moment, la société
anonyme défunte perd tous ses droits extrapatrimoniaux et patrimoniaux,
avec tous les privilèges y relatifs. Il faut dire que des actionnaires
peuvent acheter des biens immobiliers que la société met en
liquidation. Mais en aucun cas, on ne pourrait parler de transmission.
Le droit de propriété souffre de quelques
restrictions, toutes, venant de l'Administration publique1. Devant
l'entité administrative, le droit de propriété perd ses
droits. L'une des caractéristiques essentielles de cette structure est
qu'elle jouit des privilèges exorbitants de droit commun. Parmi ces
privilèges se place celui de suspendre ou de mettre fin au droit de
propriété que détient une personne physique ou une
personne morale. Elle peut le suspendre pour servitude d'utilité
publique. Par exemple, pour les besoins de l'administration, elle peut
prendre la propriété, car c'est pour une cause
d'intérêt général. Pour des questions
d'urbanisme, d'environnement ou de zonage, l'Administration Publique
peut suspendre le droit de propriété de tout propriétaire.
Ce n'est pas tout, elle peut même faire la réquisition de
toute propriété pour servir la population civile ou pour toute
autre cause d'utilité publique. Enfin l'administration peut
réaliser l'expropriation de tout propriétaire pour se
servir ou pour servir l'intérêt général.
1 - JEAN-CHARLES, Enex : Manuel de droit
administratif, Imprimeur II, Port-au-Prince, 2002, page 189.
Article 10 : (3e alinéa)
«Toutefois, en raison de nécessité de
récupération de leurs capitaux et seulement en qualité de
créanciers gagistes, les sociétés étrangères
d'investissement, de
73
Cependant, toutes ces mesures s'accompagnent de
rémunération pour le propriétaire ciblé par
l'Administration. Ce sont les seuls obstacles au droit de
propriété immobilière (et mobilière dans une
moindre mesure).
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