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Les océans face au réchauffement climatique.


par Pierrick ROGE
Université de Nantes - M2 Droit et Sécurité des Activités Maritimes et Océaniques 2019
  

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B - La préférence politique pour un droit de l'environnement répondant aux enjeux économiques

Rien n'est nouveau lorsqu'il s'agit de dire que le droit représente et sert les intérêts d'une population à un moment donné. Ainsi il n'est pas étonnant que dans une période de mondialisation qui ne cesse de croître le droit soit adapté aux développements des économies de chaque État même si les enjeux sont d'autant plus grands pour les États en développement. Néanmoins la vision actuelle de la volonté de la société civile pourrait paraître biaisée. Le droit de l'environnement est-il subsidiaire ou complémentaire au droit économique ? Le droit de l'environnement n'est-il pas devenu une branche du droit économique ? Comment de droit économique pourrait-il être un outil pour combattre le réchauffement climatique ? Le droit économique peut-il créer un pont entre le droit du climat et la protection des océans ? Au final il existe une multitude de questions qui mériteraient des développements conséquents.

Afin d'effectuer un survol du sujet, il est important de préciser que la vision économique du droit de l'environnement s'est effectuée à compter des années 1990. Dès lors le principe et l'objectif portant le même nom de « développement durable », offrent une terminologie alliant aisément environnement et économie. En conséquence, le développement

60 http://www.ocean-climate.org/wp-content/uploads/2017/02/oc%C3%A9an-biodiversit%C3%A9-climat_FichesScientifiques_04-10.pdf.

61yAN LANG Agathe, « Protection du climat et de la biodiversité au prisme du droit économique », dans Energie - Environnement - Infrastructure, n°5, p. 21.

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ne saurait être distingué des aspects environnementaux offrant une vision durable de cette économie. Qu'en est-il ?

Certains auteurs62 ont pu s'interroger sur les relations qui existent entre biodiversité et « problématique climatique » mais également sur la présence « d'instruments économiques ». Ces interrogations permettent d'amener d'autres questions juridiques comme celle de savoir si un instrument économique serait justement le plus efficace dans la lutte contre les problématiques climatiques. Les océans seront-ils présents dans cette lutte ? Au sein de l'article précité, l'auteur évoque notamment la loi du 8 août 201663 dite « pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages », qui en plus d'opérer des liens entre la biodiversité et le climat se penche principalement sur les milieux forestiers et en ce qui intéresse ces développements, les milieux marins. Existe-t-il au sein de cette législation française des outils économiques ? Avant de répondre il est nécessaire d'évoquer la notion de « droit économique de l'environnement » définie par Gilles Martin comme suit : « droit de l'organisation de l'économie lorsqu'il a pour finalité directe ou indirecte la protection de l'environnement ou la gestion des questions environnementales64. ». Ainsi la loi sur la biodiversité adopte deux types de nouveaux outils : ceux qui sont innovants et ceux somme toute plus classiques. Une question émerge de ces développements et relève d'un ordre moins juridique que moral. Les changements climatiques sont une conséquence directe de l'économie de marché. À partir de là comment est-il possible d'accorder une certaine confiance aux instruments de marché pour remédier aux menaces qu'ils ont contribué à créer ?

Dans ses motifs la loi présente une terminologie assurément d'origine économique avec des termes comme « valeur potentielle importante », « capital économique extrêmement important » et l'orientation des mesures qui suivent l'est tout autant à l'instar d'outils classiques comme l'éco-fiscalité (par voie d'exonération par exemple) et il faut malheureusement regretter l'absence de mécanisme osés comme la présence d'une écotaxe sur l'huile de palme65. Il existe par ailleurs des mécanismes contractuels qui naissent, non seulement par l'existence de cette loi mais également au niveau international.

62Ibid.

63Loi n°2016-1087, 8 août 2016 : JO 9 août 2016, texte n°2

64MARTIN Gilles, « Le droit économique de l'environnement, une nouvelle frontière pour la doctrine et l'enseignement du droit de l'environnement ? », RJE, numéro spécial, p. 72-81.

65Taxe appliquée à tout système ou entreprise qui cause des dégâts sur l'environnement, destinée à réduire l'émission de pollution : https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/ecotaxe/.

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En effet l'origine des menaces actuelles fut l'industrialisation et avec elle l'augmentation croissante d'une mondialisation galopante qui participe aujourd'hui massivement aux émissions de CO2. En partant de ce constat il est impossible de se cantonner à la législation française uniquement. Quid alors des instruments économiques internationaux ?

La protection de l'environnement a pu directement passer par le prisme de l'économie. À l'origine ce n'est donc pas l'économie qui s'initia dans le droit de l'environnement mais bien l'environnement qui se rendit présent au sein des règles concernant l'économie. Il s'agit malgré tout d'observer cette évolution et de savoir si aujourd'hui une telle imbrication serait davantage effective que des mesures environnementales aux influences économiques. D'une part, le General Agreement on Tariffs and Trade66 avait pour objectif principal la libéralisation du commerce dans le monde. Néanmoins il existait et il existe toujours67 des exceptions dans la mise en oeuvre des conventions conclues au sein de l'article XX de l'Accord. Cet article énonce successivement dans ses paragraphes b) et g) les faits suivants : « b) nécessaires à la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou à la préservation des végétaux; », ainsi que « g) se rapportant à la conservation des ressources naturelles épuisables, si de telles mesures sont appliquées conjointement avec des restrictions à la production ou à la consommation nationales; ».

L'article XX du GATT relatif aux exceptions générales comprend deux prescriptions cumulatives pour permettre la justification de telles mesures. Pour qu'une mesure environnementale incompatible avec le GATT soit justifiée au regard de l'article XX, un Membre doit procéder à une double analyse prouvant que sa mesure relève au moins de l'une des exceptions précédemment citées en ce qui concerne l'environnement et qu'elle ne constitue pas une « restriction déguisée au commerce international ». Cet article a fait l'objet de plusieurs affaires68 concernant l'environnement telle que l'affaire États-Unis - Crevettes, dans laquelle l'Organe d'appel a admis qu'une politique s'appliquant aux tortues qui vivent dans les eaux des États-Unis, ainsi qu'au-delà de leurs frontières, relevait de l'article XX g). Il a estimé qu'il existait un lien suffisant entre les populations marines migratrices et menacées d'extinction considérées et les États-Unis aux fins de l'article XX g).

66GATT, en français : accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, signé le 30 octobre 1947 par 23 pays, pour harmoniser les politiques douanières des parties signataires

67Règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) 68 https://www.wto.org/french/tratop_f/envir_f/envt_rules_exceptions_f.htm.

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Une autre affaire peut mettre en relief le commerce et l'utilisation des règles de l'OMC dans un but de protection de l'environnement et plus précisément contre les émissions ici responsables des changements climatiques. Il s'agit de l'affaire États-Unis -- Essence, les États-Unis avaient adopté une mesure réglementant la composition de l'essence et ses effets en matière d'émissions afin de réduire la pollution de l'air dans ce pays. L'Organe d'appel a constaté que la mesure choisie « visait principalement » l'objectif général de conservation de l'air pur aux États-Unis et relevait par conséquent de l'article XX g). Il est donc possible pour un État de protéger ses intérêts environnementaux au-delà de ses engagements économiques et commerciaux. Néanmoins, l'OMC ne devrait-il pas pouvoir intégrer plus profondément des règles en faveur d'une réduction conséquente des émissions de dioxyde de carbone ? Les États étant parties à la fois à l'OMC et à l'Accord de Paris ne devraient-ils pas acter à davantage de conventions économiques permettant une évolution vers le développement durable ?

D'autre part, l'économie s'est invitée dans le droit de l'environnement dans les années 90 notamment dans la CCNUCC déjà évoquée et au sein de la Déclaration de Rio de 1992. C'est ici que la terminologie de développement durable est née et n'a cessé de se structurer et de s'adapter. En effet le protocole de Kyoto permettait l'utilisation d'instruments économiques en ouvrant notamment un marché du CO2 avec le mécanisme de flexibilité. Aujourd'hui l'Accord de Paris établit des mécanismes d'incitation économique pour le carbone forestier mais qui restent carbo-centrés. Malgré cette vision qui semble aujourd'hui critiquée69 il se pourrait que cette méthode appliquée aux océans soit davantage favorable car ces derniers ne risquent pas une exploitation libérant de nouveau les GES. Mais cette question relève moins des questions climatiques que de la protection du milieu marin70.

Pour conclure, le problème qu'il est bon de relever est que les aspects économiques ont une tendance à empiéter sur le véritable objectif, concernant le sujet, de combattre les changements climatiques pour garantir la viabilité des océans. Néanmoins l'apport de ces instruments économiques apparaît comme un liant. Les liens nouvellement apportés pourraient-ils apporter une effectivité renforcée de la protection des océans des conséquences

69MOLINER-DUBOST Marianne, « Quel rôle pour les mécanismes d'incitation économique pour le carbone forestier dans la mise en oeuvre de l'Accord de Paris », dans Energie - Environnement - Infrastructures, n°5, 2018, p. 37.

70Infra Partie 2, chapitre 2.

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climatiques ? À moins que la volonté politique ne soit préalablement accordée qu'à une croissance économique éternelle et destructrice.

De plus la confiance accordée aux instruments économiques pour réparer ou arrêter les menaces visées n'est plus aussi importante qu'elle a pu l'être. En revanche, les années 1990 ont permis l'affirmation ou la naissance de principes qui peuvent avoir un impact sur la protection des océans des changements climatiques. Mais cette possibilité est-elle palpable dans les textes ?

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon