La violence en milieu scolaire: cas du lycée de tigazapar Estelle FOUDA MENYENG Institut Universitaire Catholique de Bertoua - Master 2 2016 |
4.2- MANIFESTATIONS DE LA VIOLENCE EN MILIEU SCOLAIREIl est question ici, dans un premier temps, de présenter toutes les formes de violence évoquées par les élèves et les enseignants et ensuite de développer celles qui nous semblent les plus visibles. 4.2.1- Manifestations de la violence chez les élèvesTableau N°7 : Présentation de la violence entre élèves selon les élèves eux-mêmes
Tableau N°8: Présentation de la violence entre élèves selon les Enseignants
4.2.1.1- Violence entre élèvesLes formes de violence entre élèves évoquées tant par les élèves que par les enseignants sont des violences aussi bien physiques que psychologiques. Ces formes de violence sont parfois liées et s'accumulent au sein de l'institution scolaire créant ainsi un climat de chaos. 4.2.1.1.1- Les violences physiquesLes violences physiques traduisent ici la brutalité dont peut user un élève envers un autre en laissant des marques visibles comme les bleus, des traces de coups ou de blessures. Ces marques peuvent aussi être internes. La violence physique peut aussi impliquer tout choc, bousculade ou agression qui fait entrer de façon non volontaire le contact d'un corps avec un autre. Parmi les violences physiques évoquées on note : · Les bagarres, · Les coups, · Les brimades exprimées par « la dominance des grands sur les petits » · La bastonnade Beaucoup plus évoquée par les élèves et les enseignants, la bagarre, selon le Larousse, signifie un « échange de coups » ou une « rixe provoquant une mêlée et un tumulte ». En langage familier l'on parlera de « dispute » ou de « querelle » qui elle exprime un désaccord ou conflit entraînant des échanges vifs, voire agressifs et sentencieux, entre les parties concernées. Quoi qu'il en soit, la joute entre élève est toujours provoquée par un conflit qui n'a pas pu se limiter à des paroles et qui a dégénéré en affrontement physique. Rares au sein de l'établissement parce que sanctionnées dans le Règlement intérieur par une exclusion temporaire de 06 à 10 jours, les bagarres sont toutefois visibles entre les élèves. Séquence 1 : Un Mardi à 07 heures 40 minutes, deux élèves de Première A4 bagarrent en plein cours d'Histoire-Géographie. Le Proviseur qui passe par là trouve le Surveillant de Secteur entrain de les séparer. Il les ramène au bloc administratif. Le premier, pieds nus et saignant du nez est surnommé « la menace » et le deuxième a la tenue complètement déchirée. La dispute a éclaté à cause du cahier de leur camarade dans lequel tous les deux voulaient recopier l'exercice de mathématiques. Les deux élèves seront immédiatement exclus du lycée et le deuxième ira passer la matinée à attendre son camarade avec une machette aux abords du lycée. Seule l'arrivée de l'ESIR, appelée par le Proviseur pour chasser une bande de jeunes qui rôdaient, le fera fuir. Son arme, jetée dans la précipitation à la vue de la police, sera retrouvée dans la broussaille par un Surveillant Général. (NOE, 25/10/2016) Ainsi, les bagarres peuvent être accompagnées de l'usage d'armes blanches (Cf. NEP2) telles que les lames de rasoir, les couteaux et très rarement des coupe-coupe. Une bagarre peut aussi se transformer en ce que l'on nomme familièrement « bastonnade ». Au cours d'un entretien, M. Baba nous relate un incident survenu dans une classe de 3ème où un élève a été battu par trois de ses camarades (NEP, 17/10/2016). Un autre élève raconte l'expérience de son camarade qui a été frappé en pleine cour de l'école par un élève non identifié. Certains élèves font appel à leurs amis du quartier pour battre un camarade. C'est le cas d'une élève fille de 2nde qui, parce que son camarade lui a « manqué de respect », selon ses propres termes, appelle son petit-ami, un repris de justice, pour venir la défendre. La séquence qui suit illustre bien la situation : Séquence 2 : Elève E : J'ai eu à piétiner ma camarade, elle s'est fâchée, nous nous sommes échangés des injures. Vendredi, elle a appelé les gars du quartier pour me taper. Comme je suis vite rentré, ils ont menacé l'élève Y (son ami). Ils lui ont demandé d'aller montrer ma maison. Un d'entre eux l'a giflé. Il a dit qu'il ne connaissait pas. Samedi 05 Octobre, ils sont venus me chercher et ils ont tapé sur moi. Je suis allé au GMI voir mon oncle pour rédiger une plainte, il m'a conseillé d'aller voir ma mère pour qu'on se plaigne à l'établissement. Arrivé à l'établissement, ma mère a demandé pourquoi elle est allée prendre les gars hors du lycée. En voulant rencontrer l'encadreur, X (l'élève fille) est venue vers moi, me tapant à la poitrine. Je l'ai frappé et ça a entraîné une bagarre généralisée. Les gars étaient trois et ont mis main sur ma mère et ma tante. Quand mes camarades ont vu, ils sont montés puis les gars sont sortis de l'enceinte. (NOE, 17/10/2016) Cet extrait montre plusieurs types de violence exercée au sein de l'école non seulement par des élèves, mais aussi par des personnes étrangères à l'institution scolaire à savoir : · Le fait de piétiner son (sa) camarade, · Les injures, · La menace, · La gifle, · Le fait de taper ou de frapper (porter la main sur l'autre) L'accumulation de ces violences conduit inévitablement à la « bagarre généralisée ». Dans la situation présente, elle implique les parents du garçon et les amis de la fille. Il est à noter que le Règlement de comptes avec renfort de personnes extérieures est classé comme faute de la 5ème catégorie et sanctionné par une exclusion définitive du lycée. Lors d'un Rassemblement, le Proviseur annonce l'exclusion définitive de deux élèves de Terminale pour avoir organisé la bastonnade de leur camarade par des inconnus (NOE, 14/11/2016). Les violences physiques entre élèves sont plus visibles chez les plus jeunes à travers les jeux brutaux dans la cours, le lancer des projectiles de façon consciente ou non sur les camarades, le fait de frapper son camarade pour le plaisir ou juste pour se défouler. D'autres prennent du plaisir à brimer les autres, surtout les plus petits. Le plus souvent, se sont les élèves filles qui se plaignent de leurs camarades garçons : Séquence 3 : Une élève de 3ème E1 se plaint de son camarade qui lui a tapé les fesses. Il la traite ensuite de lâche parce qu'elle n'est pas allée se plaindre. Elle est donc venue accuser celui-ci chez le Surveillant Général. Son camarade, originaire du Nord-Cameroun, dit qu'il a juste frôlé ses fesses. On le met en corvée, il demande pardon et promet de ne plus recommencer. Le Surveillant Général lui demande de travailler pour s'amender et il s'exécute. (NOE, vendredi 21/10/2016 à 11h15minutes) Cette violence pourrait avoir une connotation sexuelle et qu'elle soit perpétrée par un Nordiste, qui plus est, un musulman, peut soulever des interrogations lorsqu'on sait quel respect est vouée à la femme dans cette culture. Parfois aussi, se sont les garçons qui se plaignent des filles, généralement plus âgées qu'eux : Séquence 4 : Un garçon de 5ème vient en pleurant au bureau du Censeur : Monsieur, on me tape en classe. Le Censeur : Qui ? L'élève : Deux filles. Celles que vous avez punies hier. Elles me lancent les papiers, quand je vais me plaindre chez le Chef de classe, elles me tapent. (NOE, 18/11/2016, 8h55 minutes) Il est à noter ici que la même fille était présentée la veille par ses camarades comme « la grande dame », certainement à cause de sa taille et peut-être son âge qui fait d'elle l'une des plus grandes élèves par rapport aux autres de sa classe. |
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