WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La violence en milieu scolaire: cas du lycée de tigaza


par Estelle FOUDA MENYENG
Institut Universitaire Catholique de Bertoua - Master 2 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.1.4- Les justifications de la violence en milieu scolaire

François Dubet (op. cit.) fait appel à trois théories sociologiques de la violence :

La première présente la violence comme naturelle chez l'homme. Il prend appui sur Emile Durkheim qui affirme le rôle de l'éducation, de la morale et de la religion pour la culture de l'amour et du bien. Ainsi les psychiatres considèrent que les causes de violence sont liées à des une socialisation ratée : « images paternelles déficientes, rapport à la loi défaillant... ». Le manque de socialisation et d'éducation morale conduit à la barbarie, à l'expression « naturelle » des actes de violence.

La deuxième théorie est développée par Hobbes, puis par Weber qui pensent qu' « à l'état de nature l'homme est un loup pour l'homme ». La seule instance qui a droit d'autorité, de répression, de torture est l'Etat. En ce sens, la discipline et les sanctions telles que l'exclusion des élèves difficiles ainsi que la collaboration avec l'appareil répressif de l'Etat est recommandé.

Le troisième paradigme ou modèle prône la bonne nature de l'homme. C'est cette thèse est sans aucun doute en accord avec la théorie de la bonté humaine de Rousseau qui soutient que l'homme est naturellement bon, mais l'environnement le corrompt. La violence vis-à-vis des autres serait une répercussion de la violence expérimentée ou une révolte contre l'ordre oppressant établi par l'environnement social. En effet, l'individu violent serait une victime des injustices du système. La solution de l'avis de Dubet est de reconnaître la violence de l'école et de permettre que s'expriment les sentiments d'injustice. C'est que l'on appellerait la démocratie. L'auteur conclut au miroir de ces trois paradigmes que : « La violence juvénile et scolaire résulte à la fois de la faiblesse de l'autorité, des lacunes de l'éducation et de l'injustice sociale »p.43

Dubet pense que l'amalgame fait dans la perception de la violence n'apporte aucune issue quant à son éradication car les établissements jugés à problèmes ne sont pas toujours les plus violents et ceux qui semblent y résister « sont ceux qui prennent acte de la pluralité des significations de la violence, et qui combinent des systèmes de réponses en surmontant leurs caractères à priori contradictoires. » p. 43

Il propose ainsi trois réponses dont la première est l'ouverture de l'école à l'environnement immédiat en renforçant la dimension éducative de l'enseignement. La deuxième est que l'école réaffirme «  une loi, une légitimité et une discipline » que tous, enseignants comme élèves doivent respecter. La troisième réponse implique la reconnaissance d'une violence propre à l'école afin de laisser s'exprimer les élèves et les parents tout en construisant une civilité démocratique et en ne confondant pas les leçons morales avec "l'éducation à la citoyenneté".

Dans les travaux de Carra et Faggianelli (op. cit.), les trois tendances explicatives de la violence généralement utilisées sont :

· Les facteurs susceptibles de favoriser le passage à l'acte violent,

· Les éléments de transformation de la réaction sociale et de la perception de la violence,

· La violence comme réaction à celle de l'institution.

Les travaux de Funk (2001), Lösel, Bliesener (1995) et Döpfner et al (1996) démontrent que l'accroissement des processus de socialisation défaillants, partant des dysfonctionnements au niveau de la famille, peut être une cause de la violence des jeunes adolescents. En effet, facteurs qui peuvent contribuer à l'escalade de la violence juvénile sont : la séparation des parents, le manque de relations chaleureuses, l'absence de frères et soeur ou leur nombre trop élevé, l'éducation trop stricte ou trop laxiste, le manque de surveillance, le parent absent. D'autres part, le développement d'une culture de la violence divulguée à travers les médias, les films violents conduit au mensonge, à l'injure, à la bagarre, au vandalisme, à la menace et au harcèlement sexuel (Fuchs et al., 1996 cité par Carra et Faggianelli). L'appartenance aux gangs ou bandes est généralement l'une des conséquences immédiates. La massification de l'école ainsi que la paupérisation des quartiers qui l'environnent sont aussi des facteurs favorables à l'entrée et à l'installation de la violence en milieu scolaire.

Carra et Faggianelli démontrent également que les définitions dominantes de la violence se sont transformées rendant intolérables des comportements qui étaient jadis acceptés (cf. Dubet, 1998). En effet, les nouveaux élèves, d'origine étrangère ou venant des quartiers populaires, n'ont aucune idée des normes scolaires et ont de la peine à se socialiser, le chahut traditionnel cède la place au chahut anomique, perturbant l'ordre scolaire.

Carra et Faggianelli évoquent aussi la violence symbolique de l'école qui amplifie les inégalités sociales de réussite ainsi que l'arbitraire dans la notation, l'orientation et les sanctions. La désertion des cours, le chahut, l'insolence, le refus de travailler, les agressions à l'encontre des élèves, des enseignants et des établissements scolaires sont autant de violences réactionnelles (Bourdieu, Passeron, 1970) ou anti scolaires marquant une résistance à la massification, à la prolongation des études pour tous et à l'ethnicisation des rapports, à l'injustice. Ils refusent ainsi la position marginale qu'ils occupent dans la société et dont se servent les enseignants pour expliquer l'échec scolaire et la violence.

Pour étudier la violence scolaire, Carra et Faggianelli identifient trois grandes orientations ayant une démarche pragmatique et opérationnelle :

· La recherche des facteurs de risques individuels et situationnels

Farrington (2003 : 33 cité par Carra et Faggianelli) idendifie ces facteurs comme résultante de la violence juvénile. Ils sont au plan psychologique : la grande impulsivité, la faible intelligence ; au plan familial : une discipline très rude, le mauvais traitement des jeunes enfants, la violence des parents, les familles nombreuses ou dispersées. La délinquance des pairs, le statut socio-économique médiocre, la résidence urbaine et le voisinage fortement criminalisé peuvent aussi être des facteurs de risque. Il propose de suivre les individus de l'enfance à l'âge adulte afin de déceler les signes de violence juvénile.

· Identification des variables relatives au contexte d'établissement et qui contribuent à la baisse ou la montée de la violence scolaire

La théorie de l'effet établissement et l'approche organisationnelle montrent que l'établissement scolaire en tant qu'organisation ne se définit pas uniquement par son environnement socio-économique, mais est un acteur social indépendant qui peut développer ses propres stratégies et obtenir son efficacité quelles que soient les caractéristiques de ses élèves (Cousin, 2000) et l'environnement. Pour y parvenir, il faut :

· Une discipline et des règles connues et applicables par tous.

· La cohésion, la concertation et la mobilisation des personnels sous la houlette du Chef d'établissement.

· Des attentes et exigences de réussite scolaire fortes envers tous les élèves.

· Un sentiment d'appartenance de tous les acteurs de la communauté éducative.

Janosz et al. (2002) affirment que les facteurs structurels, les variantes du climat scolaire et les pratiques éducatives ont un impact sur la qualité des écoles. Cette approche a plusieurs avantages :

· Permet d'appréhender les variations des taux de violence entre les établissements, principalement ceux avec un public aux caractéristiques similaires.

· Permet aux décideurs de prendre des initiatives en vue de lutter contre la violence.

· Compréhension des violences interpersonnelles et des interactions

Le courant de la sociologie traditionnelle, comme l'approche interactionniste, considère la violence comme résultant de l'interaction et explique pourquoi un individu peut être à la fois auteur et victime. La violence est appréhendée comme un processus faisant intervenir la confrontation de logiques d'actions différentes, ce qui conduit à développer des stratégies de résolution de conflits telle que la médiation.

En ce qui concerne les conséquences sociales et institutionnelles de la violence scolaire, Carra et Carra et Faggianelli démontrent avec Bouveau, Rochex (1997) que la violence dans la classe freine le processus de transmission des savoirs au profit du travail de socialisation des élèves qui, dans certains établissements, prend plus de temps. Les exemples des Beacon Schools de New York, les écoles ouvertes en France, et autres visent à remplacer l'influence du milieu parental qui désormais s'écroule (Funk, 2001 :37 cité par Carra et Faggianelli) et obligent les enseignants à construire de nouvelles compétences.

En outre certaines écoles jugées difficiles sont évitées tant par les enseignants que par les parents ce qui renforce les inégalités de performance scolaire et la ghettoïsation des écoles des quartiers populaires. Pour palier cet écart les classes à niveau, les projets d'établissements, les écoles à thème sont autant de solutions pour maintenir ou attirer la clientèle. En plus de cela, les mesures disciplinaires et sécuritaires sont mises sur pied en collaboration avec la police et la justice avec une tolérance zéro, notamment dans les safe school program aux USA et au Canada, ce qui suscite encore l'engouement des chercheurs qui interrogent ces pratiques. Carra et Faggianelli orientent alors les recherches futures vers les effets sociaux de la violence à l'école sur les pratiques des acteurs du système éducatif et les dispositifs de lutte.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand