Evaluation du processus de management des risques de la direction générale des impôts au Burkina Fasopar Hassane KOUSSOUBE Université Senghor d'Alexandrie - Master en Audit et contrôle de gestion basé sur les risques 2021 |
V.3.2. Spécificités du management des risques dans l'administration fiscaleLe sujet du risque est particulièrement important dans l'administration fiscale. C'est à juste titre que le cadre TADAT d'évaluation des administrations fiscales intègre la qualité du dispositif de gestion des risques dans ses critères d'évaluation (TADAT, 2015).La publication de manuels de gestion des risques fiscaux par de grandes organisations telles que l'Union Européenne ou l'OCDE attestent égalementde l'importancedu sujet dans l'administration fiscale[ (Union Européenne, 2010), (OCDE, 2017)]. Le management des risques dans l'administration fiscale présente des spécificitésparmi lesquellesl'on peut citer : - le niveau d'exposition aux risques; - les objectifs de la gestion des risques ; - les outils d'évaluation des risques fiscaux ; - et les conditions d'efficacitédela gestion des risques. v L' administration fiscale : une entité très exposée aux risques L'administration fiscale fait partie des administrations les plus exposées aux risques qui peuvent nuire aux recettes (Union Européenne, 2010).C'est pourquoi, l'évaluation des risques fiscaux est un élément clé de l'administration moderne de l'impôt (OCDE, 2017). Le cadre TADAT d'évaluation de l'administration fiscale,classeles risques de l'administration fiscaleen deux grandes catégories(TADAT, 2015): - les risques d'incivisme fiscal qui peuvent se traduire par un manque à gagner si les contribuables enfreignentà leursobligations (immatriculation au registre des impôts, dépôt des déclarations fiscales, paiement des impôts dans les délais, et communication d'informations exactes et exhaustives dans les déclarations) ; - les risques institutionnels qui peuvent se traduire par une interruption des fonctions de l'administration fiscale lorsque surviennent certains évènementsinternes et/ou externes, tels que les catastrophes naturelles, les actes de sabotage, la perte ou la destruction d'actifs physiques, les pannesinformatiques, les grèvesdes salariés et les infractions administratives pouvant nuire à la confiance de la collectivité en l'administration fiscale (défaut de confidentialité, réclamations indues d'impôts, etc.) v Objectifs de la gestion des risques dans l'administration fiscale Le but de la gestion des risques dans l'administration fiscale est de permettre à cette dernière de remplir samission en aidant le personnel d'encadrement à prendre de meilleures décisions(Union Européenne, 2010). De façon détaillée, la gestion des risques contribue : - à garantir l'équité dans le traitementdes contribuables; - àaccentuer les travaux de contrôle sur les contribuables contrevenants; - à tirer le meilleur parti des ressources humaines, financières et techniquesdisponibles; - à accroître le niveau de respect volontaire de la législation par lescontribuables; - et à adapter les ressources disponibles aux niveaux de risques età estimer laprobabilité qu'un contribuable en règle contrevienne à la législation en vigueur. v Outils d'évaluation des risques fiscaux dans l'administration fiscale Les outils d'évaluation des risques fiscaux permettent aux administrations fiscales d'élaborer des indicateurs qui laissent présager que des contribuables ou des dispositifs spécifiques peuvent présenter un risque important, susceptible d'entraîner des mesures de discipline fiscale complémentaires, ou bien un risque réduit, qui peut impliquer des mesures moins importantes et plus ciblées(OCDE, 2017)19(*). Cela devrait permettre une meilleure allocationdes ressources limitées aux secteurs les plus risqués, tout en orientant l'administration fiscale sur l'endroit où l'activité économique a été imposée correctement, ce qui réduira la charge pesant sur les contribuables à faible risque. Les administrations fiscales modernes ont tendance à recourir de plus en plus à des méthodes automatisées pour évaluer les risques fiscaux. Selon l'administrationfiscale,l'organisation de l'évaluation des risques fiscaux peut être centralisée par une équipe spécialisée, avec la contribution de la fonction chargée de la discipline fiscale, ou bien assurée localement par l'équipe affectée au respect des obligations fiscales (ou l'inspecteur des impôts). Des outils d'évaluation des risques peuvent être utilisés pour déterminer les contribuables présentant des risques accrus, qui font ensuite l'objet d'un examen plus approfondi de l'ensemble de leurs activités ou d'un secteur précis (les opérations internationales, par exemple) ou bien pour repérer les dispositifs présentant un risque accru, qui sont ensuite soumis à un examen complémentaire, peu importe que le contribuable concerné soit considéré ou non comme à haut risque. Pour déterminer les contribuables présentant un risque élevé, certaines administrations fiscales utilisent un système fondé à base de points, qui classe les groupes en fonction du nombre d'indicateurs de risques présents (certains indicateurs ou combinaisons d'indicateurs valant plus de points). D'autres administrations fiscales utilisent également la dimension ou la complexité comme indicateur clé d'un risque potentiel, puis ont recours à des outils d'évaluation des risques pour cerner les points sur lesquels se concentrer au sein de ces groupes. Pour que les contribuables bénéficient d'une certitude accrue, certaines administrations fiscales effectuent davantage d'évaluations des risques en temps réel (avant le dépôt de la déclaration de revenus) tandis que d'autres continuent à évaluer les risques des contribuables et dispositifs principalement ou uniquement après le dépôt de la déclaration. Dans tous les cas, l'évaluation des risques fiscaux doit être un processus dynamique, qui s'adapte au niveau du risque fiscal défini. Lorsqu'il s'avère, à un stade précoce, qu'un contribuable présente un faible risque fiscal potentiel, il peut être alors décidé qu'aucune évaluation supplémentaire ni mesure de renforcement de la discipline fiscale n'est requise. Lorsqu'une telle décision ne peut pas être prise, une analyse et des investigations complémentaires peuvent être menées afin de sélectionner les étapes suivantes les plus appropriées. v Conditions pour une gestion efficace des risques fiscaux L'OCDE dans son manuel d'évaluation des risques fiscaux (OCDE, 2017) reconnaît que même si les cadres de gestion des risques utilisés par les administrations fiscales diffèrent, certaines caractéristiques essentielles doivent être présentes pour que l'évaluation des risques soit efficace : - les outils d'évaluation des risques fiscaux doivent être utilisés de manière objective : les outils doivent déterminer les risques fiscaux potentiels à partir d'une évaluation objective des informations disponibles ; - les agents en charge de l'évaluation des risques doivent avoir reçu une formation adéquate et disposer d'une expérience dans les secteurs clés ; - les outils d'évaluation des risques doivent servir à sélectionner et à exclure les contribuables devant faire l'objet d'investigations complémentaires, y compris une vérification fiscale ou d'autres mesures de discipline fiscale,maisne doivent pas remplacer cette activité ; - les processus d'évaluation des risques doivent être dynamiques et réactifs aux informations communiquées par l'administration fiscale afin de garantir une amélioration continue. Les méthodes utilisées doivent être révisées et mises à jour afin d'identifier et de traiter de nouveaux risques ou de réduire le risque que des contribuables ou des dispositifs à faible risque soient signalés ou que d'autres à risques élevés ne le soient pas ; - une stratégie d'évaluation des risques doit associer plusieurs outils et tenir compte des différents éléments du profil de risque d'un groupe afin de limiter les possibilités qu'un contribuable au risque accru puisse échapper au contrôle par la mise en place d'éléments visant à masquer un indicateur de risque donné. Les outils d'évaluation des risques doivent également évoluer dans le temps pour empêcher que des contribuables à haut risque mettent au point des stratégies pour échapper au contrôle ; - des processus de gouvernance devraient être en place pour assurer le suivi adéquat de la fonction d'évaluation des risques. Ils permettraient de garantir que les évaluations du risque sont soumises à des niveaux d'examen et d'autorisation appropriés et sont entièrement documentées afin de disposer d'une piste de vérification complète en cas d'investigations ultérieures ; - les processus d'évaluation des risques fiscaux devraient faire partie du cadre global de gestion des risquesd'une administration fiscale. Le management des risques a pour but de gérer les risques d'une organisation afin de créer et de préserver de la valeur. Il joue un rôle clé dans l'administration publique et encore plus dans l'administration fiscale qui est l'une des administrations les plus exposées aux risques.ToutPMR doit être amélioréde façon continue par la réalisation d'évaluationspériodiqueset la prise de mesures correctives.C'est le but de ce mémoire qui traite de l'évaluation du PMR de la DGI. ToutPMR efficace comporte trois composantes fondamentalesque sont la culture du risque, la gouvernance des risques et le processus de gestion des risques. C'est en nous appuyant sur ces composantes que nousconstruironsle modèle d'analyse(chapitre suivant) sur lequel nous nous appuierons pour évaluer le processus de management des risques de la DGI (chapitre 4). * 19L'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) est une organisation internationale qui oeuvre pour la mise en place de politiques meilleures pour une vie meilleure. Notre objectif est de promouvoir des politiques publiques qui favorisent la prospérité, l'égalité des chances et le bien-être pour tous. |
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