CONCLUSION CHAPITRE
Malgré les critiques, l'idée
d'alternatives aux poursuites a fait son chemin. De l'interdiction de transiger
en passant par les « substituts » à l'emprisonnement, on est
inexorablement en train de tendre à une admission plus large de la
transaction par son extension progressive à la matière
pénale. Jadis limitée à certaines matières
spécifiques, elle s'étend aujourd'hui à de nouvelles
matières. Ceci n'est que normal au regard de l'évolution sociale
puisque « la fidélité au passé ne peut constituer
un titre au maintien des règles transmises que sous
bénéfice d'un inventaire exercé par la
société de contemporains à qui ces règles sont
destinées ». 51 Mais une telle évolution ne
peut bien suivre son cours que si aucun doute n'entoure les modes et la nature
des mesures envisagées.
25
51 Léaute
(J.) op. cit. p. 152.
26
CHAPITRE II. MECANISME ET NATURE DES MESURES
TRANSACTIONNELLES
Traditionnellement, une infraction était
poursuivie par le parquet (sous réserve du classement sans suite dans
les systèmes opportunistes) et se trouvait sanctionné d'une
peine. Ce schéma classique est aujourd'hui contesté par les
adeptes du recul du système pénal qui suggèrent de faire
appel à la «dépénalisation» ou à la
«diversion». La dépénalisation recouvre les formes
comme le passage d'une infraction du statut de crime à celui de
délit ou le remplacement d'une peine privative de liberté par une
alternative à celle-ci. La diversion quant à elle consiste
à l'abstention de poursuivre ou l'arrêt des poursuites
pénales lorsque le système de justice pénale est
régulièrement compétent avec appel à des techniques
extrapénales.52 Le souhait de raréfier l'application
de la privation de liberté devait conduire les auteurs à
suggérer des alternatives à celle-ci. FERRI en son temps avait
déjà imaginé plusieurs, même s'il ne croyait pas
à leur efficacité. MICHAUD recommandait quant à lui le
travail d'intérêt général. L'épanouissement
de la vie économique, l'automation industrielle et
l'accélération des déplacements sont l'une des causes de
ce mouvement de recul du système pénal. Ce mouvement traduit au
fond le souci de simplifier la procédure. Il fallait donc, comme le dit
le Pr. FETTWEIS, « dégager les rôles des juridictions et
assurer la répression simple et rapide des infractions « les moins
graves » par un allègement de ce que François Clercq appelle
le « rite judiciaire » 53. Pour répondre
à cette préoccupation, le législateur camerounais avait
déjà mis sur place des mesures allant dans ce sens. En fait
« le législateur a toujours voulu simplifier la
procédure pour la rendre d'un maniement plus aisé
»54. Mais on
52 Pradel, op.
cit.
53 Bekaert (H.),
La manifestation de la vérité dans le procès pénal,
Bruxelles, Bruylant, 1972
54 Anoukaha
(F.) Le magistrat instructeur en procédure pénale
Camerounaise, thèse doctorat 3e Cycle, Yaoundé
1981. p. 117.
27
peut envisager divers moyens qui permettent d'y
parvenir et il n'est pas douteux que les alternatives aux poursuites auraient
méritées de retenir l'attention du
législateur.
Ainsi les législations étrangères
ont prévu des mesures autres que la flagrance ou les alternatives
à l'emprisonnement. Ces mesures sont très en vue dans la
procédure contemporaine. Si les auteurs tendent à s'accorder sur
leurs vertus (S2), les opinions divergent cependant sur leur nature. Toujours
est-il que pour procéder à une qualification, il est important de
connaître ces mesures à travers leur description (S1).
Section 1- LES FORMES DE TRANSACTION
En droit positif actuel, la panoplie des alternatives
s'est diversifiée à un point extrême si bien que l'on peut
aujourd'hui parler de la « théorie des alternatives55.
En témoignent les enquêtes qui sont innombrables ainsi que les
comptes rendus des discussions menées devant la Société
Générale des prisons. Si ces affirmations font beaucoup plus
allusion aux alternatives à l'emprisonnement, il n'en demeure pas moins
vrai que dans le domaine des alternatives aux poursuites, le foisonnement est
aussi présent. Plusieurs variétés d'alternatives aux
poursuites ont été instituées. Toutes n'ont pas
reçu le même écho. C'est le cas de l'injonction
pénale en France qui a été déclarée
inconstitutionnelle par une décision du Conseil
Constitutionnel55.
Malgré cette tentative avortée, le
législateur n'a pas baissé les bras et une loi de 1999 va
instituer la composition pénale. Un peu plus tard, en 2004, la loi
Perben II va consacrer La comparution sur reconnaissance préalable de
culpabilité, une sorte de « plaider coupable » « à
la française ». 56 Un peu plus tôt au début
des années 1990, la loi no 93-2 du 4 janvier 1993 avait
entériné la médiation pénale.
55 Pradel (J.),
Op. cit.
55
Décision no95-360 DC du 2 février
1995.
56
Céré (J-P.), De la composition pénale à la
Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité : le
«plaider coupable» à la française in « Le
nouveau procès pénal après la Loi Perben II ».
Dossiers de la journée d'études Dalloz 2004. Paris Dalloz 2004.
p. 388 et s.
28
Para. 1- La composition pénale
C'est une des procédures alternatives aux
poursuites par excellence permettant au Procureur de la République de
proposer au mis en cause des mesures dont l'acceptation et l'exécution
arrêteront les (éventuelles) poursuites puisqu'elle éteint
l'action publique. Elle ne constitue pas un jugement et, encore moins une peine
car elle est essentiellement écrite. Instituer par la loi n° 99-515
du 23 juin 1999 en France, la composition pénale est née des
cendres de la défunte injonction pénale dont elle corrige les
insuffisances.
Les conditions d'exécution ou de mise en oeuvre
de la composition pénale tiennent pour l'essentiel à la nature de
l'infraction commise et à la personne du délinquant. Pour ce qui
est des infractions, il s'agit de celles n'affectant pas gravement l'ordre
public et dont la liste est limitativement énumérée par
l'article 41-2 du code de procédure pénale français et qui
sont passibles d'une peine de trois ans d'emprisonnement au maximum. Dès
que l'infraction concernée figure dans cette liste57, le
procureur peut déjà envisager la composition pénale sous
réserve du respect des autres conditions.
Quant à l'autre condition liée à
la personne du délinquant ce dernier doit être majeur et admettre
sa participation aux faits reprochés sous peine de nullité de la
procédure. Il ne doit pas avoir fait l'objet ou
bénéficié de mesure du même genre par le
passé. Il doit être un délinquant primaire.
A côté de ces deux conditions, il existe
celle de la réparation du dommage causé à la victime
lorsque celle-ci est identifiée. Mais elle n'est pas préalable ou
obligatoire pour la mise en oeuvre de la procédure et doit avoir lieu
dans les six mois de la conclusion de l'accord de composition pénale.
Les acteurs de cette procédure sont le Procureur de la
République, auteur de la proposition, le mis en cause et le juge du
siège. Elle se déroule en deux phases :
57 Cére,
ibid.
29
La première est celle de la proposition de la
mesure au mis en cause qui dispose d'un délai d'environ 10 jours pour se
décider sous peine de caducité de la proposition. La proposition
est faite par le procureur soit directement au mis en cause, soit par
l'entremise d'un officier de police judiciaire.
La deuxième étape se déroule
devant un magistrat du siège. Le Procureur informe le Président
du tribunal de la proposition de composition pénale. Ce dernier
procède à la validation ou au rejet de la mesure proposée.
La validation met en exécution la composition pénale tandis que
rejet la rend caduque et le Procureur a le choix soit de recourir à une
autre mesure alternative, soit d'opter pour le déclenchement des
poursuites.
En cas de validation, diverses mesures seront
prononcées,58 et on doit sanctionner l'infraction qui a
été commise. Toutefois, la procédure ne peut arriver
à cette étape que si elle a été acceptée par
le mis en cause à travers un consentement libre et
éclairé. Dans tous les cas, le mis en cause
bénéficie d'un certain nombre de droit59.
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