L'égalité entre catégories d'associés en droit OHADApar Adrienne Yangue Belibi Université Yaoundé 2 Soa - Master 2 2019 |
SECTION 2 : La protection de l'égalité politique entre associésCe qui rend le contrat de société particulier c'est l'absence de subordination entre associés résultant de l'affectio societatis122(*). L'affectio societatis est la volonté de former une société et de coopérer dans l'intérêt commun des associés .Chaque décision doit donc être adoptée pour satisfaire l'intérêt de tous et non pour assouvir des intérêts égoïstes. Mais l'exercice du droit de vote peut parfois être l'opportunité pour certains d'imposer leurs choix aux autres associés se plaçant ainsi en position de force ou encore d'empêcher la prise de décisions. Face à ça, le législateur OHADA interdit les abus (Paragraphe 1) tout en prévoyant des sanctions en cas d'abus(paragraphe 2). Paragraphe1 : L'interdiction des abusLa prise de décisions peut se faire à l'unanimité dans certains cas123(*)mais la règle générale est celle de la majorité. La majorité est le total des voix qui l'emporte par son nombre lors d'une élection ou du vote d'une décision124(*). Le fait pour cette majorité d'abuser de sa position dominante peut constituer un abus. Pour mieux cerner cette interdiction d'abus du droit de vote entre associés il est important de préciser la notion d'abus de majorité(A) avant celle d'abus de minorité (B). A-L'abus de majoritéL'abus de majorité est la transposition en droit des sociétés de la théorie civiliste de l'abus de droit125(*). D'après l'Art 130 al 2 « Il y a abus de majorité lorsque les associés majoritaires ont voté une décision dans leur seul intérêt, contrairement aux intérêts des associés minoritaires, sans que cette décision ne puisse être justifiée par l'intérêt de la société ». En effet, si la loi du plus grand nombre habilite une partie de la collectivité à prendre une décision qui engage l'autre partie ,tout abus par la majorité est interdit car entrainant une rupture d'égalité entre les parties .Ainsi , pour qu'on parle d'abus de majorité il faut la réunion de deux éléments notamment la violation de l'intérêt social et la rupture d'égalité entre associés. La violation de l'intérêt social correspond à la violation de l'intérêt général. L'intérêt social n'étant pas défini par le législateur, c'est vers la doctrine qu'on trouvera sa définition. Ainsi pour Philippe BISSARA, l'intérêt social est un « 126(*)intérêt supérieur de la personne morale elle-même c'est-à-dire de l'entreprise considérée comme un agent économique autonome, poursuivant ses fins propres ,distinctes notamment de celles de ses actionnaires ,de ses salariés, de ses créanciers, de ses fournisseurs et de ses clients ,mais qui est d'assurer la prospérité et la continuité de l'entreprise » .On peut dire de cette définition que l'intérêt social est comme le centre de tous les intérêts. Il s'agira donc d'un abus de majorité lorsque la décision prise par la majorité au détriment de la bonne, saine gestion et la prospérité de l'entreprise. Pour qu'on parle d'abus de majorité il faut aussi que la décision prise occasionne une rupture d'égalité entre associés. Il s'agit ici pour les majoritaires de prendre des décisions dans la seule finalité de nuire aux minoritaires .On peut prendre à titre d'exemple la décision des majoritaires de mettre en réserve de façon systématique les bénéfices alors qu'ils sont distribuables et leur partage ne causerait aucun tort à la société. Le législateur fait aussi interdiction des abus de minorité. * 122 Traité et actes uniformes commentés et annotés p.383 * 123 Art 359 AUSCGIE « l'unanimité est requise dans les cas suivants : 1°) augmentation des engagements des associés ; 2°) transformation de la société en société en nom collectif ou en société par actions simplifié ; 3°) transfert du siège social dans un Etat autre qu'un Etat partie. » * 124 G.CORNU, Vocabulaire juridique 12e édition op.cit. * 125 Traité et actes uniformes commentés et annotés p.425 * 126PH . BASSARA, l'intérêt social ,2001 p.40 |
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